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CHAPITRE XIV

Les deux Carolines. Premier essai de colonisation par les Français. Les Anglais reprennent ce projet. Fondation des colonies d'Albemarle et de Carteret. L'esclavage y est introduit. Manière de vivre et habitudes des habitants. Administration des colonies, révolte des colons. Le roi d'Angleterre les prend sous sa protection. Il déclare les deux colonies provinces royales, Attaques des Indiens.

Fondation de la Géorgie. Jacques et Edouard Oglethorpe. But dans lequel ils veulent fonder une colonie en Amérique. Premiers départs d'émigrants. Ils achètent le territoire aux Indiens. Oglethorpe protége les Indiens et défend l'introduction de l'esclavage dans la colonie. Composition de la population. Jean et Charles Wesley, fondateurs du méthodisme. George Whitefield, le prédicateur. Guerre entre la Géorgie et la Floride. Impopularité des commissaires du gouvernement. Le roi d'Angleterre déclare la colonie province royale.

LES DEUX CAROLINES.

La contrée qui porte encore aujourd'hui le nom de Caroline fut ainsi nommée par une petite troupe de protestants qui, sous la conduite de Jean de Ribaut, était partie de France le 18 février 1562, fuyant les persécutions dont les huguenots étaient alors l'objet. Nous avons vu, dans un chapitre précédent, quelles furent les aventures de la colonie qu'ils fondèrent dans ce pays et le peu de succès qu'ils obtinrent dans leur entreprise.

Un siècle environ après ces événements, quelques

courageux colons de la Virginie et des colonies de la Nouvelle-Angleterre traversèrent les forêts et les vastes plaines désertes qui les séparaient de la Caroline et s'y établirent.

L'Angleterre se préoccupait aussi de la colonisation de ce magnifique territoire, car en 1663 le roi Charles II en divisa la propriété entre lord Clarendon et sept autres seigneurs de son entourage. Il avait d'abord été convenu de donner à la forme du gouvernement de la colonie une tournure beaucoup plus aristocratique que dans les autres colonies. Un ordre de noblesse devait être institué, et toutes les terres divisées en comtés et en baronnies. En somme, le gouvernement devait être mis entre les mains de quelques-uns seulement, et la condition du peuple insensiblement différente de ce qu'elle était en Angleterre. Par bonheur, ces beaux projets n'eurent pas de suite; ils soulevèrent une violente opposition qui contraignit le roi et les propriétaires de la nouvelle colonie à les abandonner avant de les avoir mis à exécution.

Pendant le temps que prirent ces arrangements préliminaires, des émigrants arrivèrent dans la Caroline venant de toutes les directions. Deux colonies permanentes furent bientôt fondées; elles devaient plus tard constituer les deux États connus sous les noms de Caroline du Nord et de Caroline du Sud, mais elles prirent d'abord les noms de leurs proprié taires respectifs, lord Albemarle et sir George Carteret.

1o La colonie d'Albemarle était composée des établissements fondés par quelques anciens membres de la colonie de Virginie qui s'y étaient définitivement installés. Ils s'étaient choisi un gouverneur, cultivaient en paix leurs plantations et ne payaient annuellement aux propriétaires anglais de la contrée qu'un demi-penny (cinq centimes) par arpent de terre.

2o La colonie de Carteret fut fondée en 1670 par une troupe nombreuse d'émigrants venus d'Angleterre. Ils cherchèrent d'abord à s'établir sur les rives de l'Ashley, à peu de distance de l'endroit où Jean de Ribaut avait bâti un fort, mais ils abandonnèrent bientôt ce site et construisirent leurs habitations sur l'emplacement actuellement occupé par la ville de Charlestown. La colonie grandit très-rapidement, augmentée par les arrivées fréquentes de Hollandais quittant la colonie de New-York, à cause de l'oppression exercée sur eux par le gouvernement anglais et attirés dans la Caroline par son climat extrêmement doux. Les protestants français, fuyant les persécutions, vinrent aussi accroître la population de la colonie en se réfugiant sous la protection du drapeau anglais. A un moment, il se trouva, rien que dans Charlestown, 16,000 huguenots au moins. La sévérité de leurs principes, leur charité, leurs manières élégantes, les firent considérer comme une bonne acquisition pour la colonie. Ils implantèrent des mûriers, des oliviers et diverses autres espèces d'arbres fruitiers qui portent encore aujourd'hui les noms des plus célèbres protestants de cette époque.

L'esclavage des nègres fut introduit dans la Caroline en 1665. Le riz, dont la culture employa bientôt tous les planteurs, n'y a été importé, dit-on, qu'accidentellement par un navire venant de Madagascar et qui relâcha dans le port de Charlestown. Quant au coton, qui est maintenant le principal produit de cette partie de l'Amérique, ce n'est que beaucoup plus tard qu'on songea à le cultiver.

· Les deux colonies d'Albemarle et de Carteret étant très-éloignées l'une de l'autre, il en résulta qu'elles contractèrent des habitudes et une manière de vivre totalement différentes dans la colonie de Carteret, qui occupait la partie méridionale de la Caroline, les colons avaient suivi la coutume des Virginiens, en établissant leurs plantations à des distances très-grandes les unes des autres; la colonie d'Albemarle, située dans la partie nord de la Caroline, avait encore exagéré cette habitude, en choisissant pour ses plantations des terrains situés au milieu de forêts et auxquels on ne pouvait parvenir qu'en suivant d'étroits sentiers frayés par le feu. Les habitants de cette dernière colonie ne s'étaient point autant adonnés à la culture que ceux de la Caroline du Nord. Ils s'employaient plus à l'abatage d'arbres d'espèces particulières qu'ils vendaient pour l'exportation en Angleterre, fabriquaient du goudron et récoltaient la térébenthine, aidés dans ces travaux par les esclaves qui leur avaient été envoyés de la Virginie.

L'éloignement des deux colonies avait nécessité que

chacune eût son gouverneur, et cela dura ainsi, quoiqu'en réalité elles ne formassent qu'une seule colonie, jusqu'en 1729.

Les habitants étaient très-mécontents de la manière dont les propriétaires de la contrée les administraient; à tout instant surgissait quelque cause de querelle entre les colons qui demandaient de plus grands priviléges, et les propriétaires qui, au lieu de chercher à les satisfaire, auraient plutôt désiré leur retirer le peu de droits dont ils jouissaient. Ils trouvaient que les taxes, les loyers et toutes autres sources de revenu pour les propriétaires étaient exorbitants, en sorte qu'à la fin, las du joug qui leur était imposé, ils se révoltèrent, emprisonnèrent le secrétaire de la province et chassèrent le gouverneur. Puis ils s'adressèrent au roi, lui exposant leur situation et le priant de racheter des propriétaires les droits qu'il leur avait donnés. Celui-ci y consentit et, en 1729, un arrangement fut conclu, par lequel les propriétaires cédaient au roi leurs pouvoirs dans le gouvernement, ainsi que les sept huitièmes du sol. Les deux colonies furent alors définitivement séparées, chacune fut déclarée province royale, et son gouverneur nommé par le roi; mais les habitants avaient obtenu le droit d'élire une assemblée de représentants.

Les deux colonies eurent aussi à souffrir des invasions et des hostilités des Indiens. Pendant la guerre entre l'Espagne et l'Angleterre, les colons de la Caroline attaquèrent les établissements des Espagnols

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