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moiselle noble dont le père avait été l'un des navigateurs au service de l'infant Don Henri de Portugal. Sa belle-mère, devenue veuve peu de temps après cette union, pria Colomb et sa femme de venir habiter avec elle et les entretint souvent des voyages et des découvertes de leur père; enfin, elle remit à son gendre les cartes, les mémoires et les instruments nautiques dont s'était servi son mari.

L'imagination de Colomb fut tellement enflammée par ces entretiens qu'il conçut des idées de découvertes et commença à nourrir le projet qui, par la suite, ne fit que grandir, de rechercher de nouvelles terres. D'après les écrits laissés par de précédents navigateurs et les récits de quelques marins entraînés par des tempêtes, il supposait qu'il en existait sur la route entre l'Europe et les Indes occidentales et il croyait devoir forcément y arriver en se dirigeant de l'est à l'ouest. De plus, la passion des voyages et des découvertes qui régnait alors sur l'Europe ne pouvait qu'exciter Colomb et entretenir son enthousiasme.

Il faut remarquer ici que Colomb mêla toujours à ses méditations un sentiment éminemment religieux; il se croyait même, dit-il, dans une de ses lettres, comme choisi par le ciel pour l'accomplissement de grands desseins.

Colomb fit part de son projet à la ville de Gênes, son pays natal, et demanda qu'on lui fournît les moyens de l'exécuter, mais sa proposition, traitée de chimérique, fut rejetée.

C'est sous l'impression de ce refus qu'il fut appelé à la cour du roi de Portugal, Jean II, auquel il exposa ses vues. Le roi, peu convaincu d'abord, consentit ensuite; pourtant on ne put s'entendre sur la récompense à accorder à Colomb en cas de réussite. Pendant le temps de cette négociation, le roi, sur le conseil que lui en donnèrent quelques courtisans peu scrupuleux, organisa secrètement une expédition et une caravelle fut envoyée sur la route qu'avait indiquée Colomb. Après une navigation assez longue, le pilote, ne voyant devant lui que l'immensité de la mer et n'ayant aperçu aucune terre, revint à Lisbonne ; puis, afin de détourner de lui tout blâme pour n'avoir pas persévéré et poussé plus loin ses recherches, il s'efforça de tourner en ridicule l'entreprise de Christophe Colomb.

Sur ces entrefaites, la femme de Colomb étant morte, celui-ci quitta le Portugal avec son fils Diego, vers l'année 1484. Enfin, désireux de faire rejaillir sur la ville où il était né la gloire qu'il devait retirer de sa découverte, il retourna à Gênes, renouvela ses offres aux magistrats, mais n'essuya que de nouveaux dédains.

De là, Colomb alla en Espagne et dépêcha son frère au roi d'Angleterre, Henri VII, qui refusa de l'écouter et même de le recevoir.

Il communiqua aussi son projet aux Vénitiens; là encore il échoua.

Malgré tous ces insuccès, il ne se laissait pas

abattre et, loin d'abandonner ses idées, il puisait, pour ainsi dire, une nouvelle force dans sa mauvaise fortune. Non fregit eum, sed erexit, D comme dit Népos, de Thémistocle.

Enfin, un jour, en se rendant à Huelva, Colomb, dénué de tout, frappa à la porte d'un couvent de franciscains dédié à Santa Maria de la Rabida, et pria le portier de lui donner un peu de pain et de l'eau pour son fils Diego qui l'accompagnait. Le prieur du couvent, Juan Perez de Marchena, homme fort instruit surtout en géographie et en science nautique, survint à ce moment et fut frappé de la noble fierté et de l'intelligence qu'exprimaient les traits de Colomb. Il lui fit raconter sa vie et ses projets, et s'intéressa tant à lui qu'il le persuada de rester quelques jours au cou

vent.

Au printemps de l'année 1486, Colomb se rendait à la cour d'Espagne, muni d'une lettre de recommandation que lui avait donnée son bon ami le prieur du couvent de la Rabida pour Fernando de Talavera; ce personnage, prieur du Prado et confesseur de la reine Isabelle, jouissait d'une grande autorité auprès de cette princesse.

Néanmoins, comme la politique et les guerres contre les Maures absorbaient l'attention des deux souverains des royaumes de Castille et de Léon, Colomb ne put se faire entendre d'eux, et, se trouvant sans ressources, il dut gagner son pain en copiant des cartes de géographie.

Après beaucoup de démarches et de peines, il réussit à se créer quelques appuis à la cour, et fut reçu par le roi Ferdinand et la reine Isabelle, qui nommèrent une commission de savants à l'effet de contrôler les chances de succès du projet qui leur était soumis. Cette commission se réunit à Salamanque, et ce fut en cette circonstance qu'on renouvela à Christophe Colomb, à propos de la sphéricité de la terre dont il se montrait un chaud partisan, cette grande objection des antipodes tirée de Lactance et qu'on lui dit avec cet auteur: « Est-il rien de plus absurde que de croire qu'il y a des antipodes ayant leurs pieds opposés aux nôtres, des gens qui marchent les talons en l'air et la tête en bas? Qu'il y a une partie du monde où tout est à l'envers, où les arbres poussent avec leurs branches de haut en bas, tandis qu'il pleut, qu'il grêle et qu'il neige de bas en haut '?» Malgré toutes les explications que fournit Colomb à cette assemblée, son projet fut rejeté comme vain et irréalisable. En 1491, communication lui fut donnée de la décision de la commission et il retourna à Séville, le désespoir dans l'âme.

Ses instances à la cour d'Espagne avaient duré six ans qu'il avait employés à augmenter encore ses connaissances nautiques et géographiques par la fréquentation des bibliothèques. Il retira un grand profit de la lecture de l'« Imago Mundi » du cardinal Pierre

1 Biographie générale, t. XI.

d'Ailly, qui lui mit sous les yeux la narration complète des voyages tentés par de précédents navigateurs.

Sur le point de quitter l'Espagne pour se rendre en France où l'appelait le roi Charles VIII, il retourna au couvent de la Rabida pour y reprendre son fils Diego qui y était resté, mais le prieur, aussitôt qu'il eut connaissance du dessein de son protégé, fit tant et si bien par lui et par ses amis, qu'Isabelle, reine de Castille, et son époux Ferdinand consentirent aux demandes que faisait Colomb et aux conditions qu'il stipulait en cas de réussite, il devait être investi de la charge et des priviléges d'amiral et de vice-roi des pays qu'il découvrirait, avoir le dixième de l'or, des pierreries et des bénéfices qui reviendraient au royaume de Castille soit par la conquête, soit par le commerce. Enfin, il reçut les autorisations nécessaires pour procéder à l'armement de trois vais

seaux.

Deux navires lui furent fournis, après de nombreux délais et de grandes difficultés, par les habitants de Palos; Colomb supporta lui-même les frais de l'armement du troisième, aidé en cela par les deux frères Martin Alonzo et Vincent-Yanez Pinzon. L'aîné de ces deux hommes, Vincent-Yanez, était depuis peu de temps de retour d'un voyage à Rome, lorsqu'il fit connaissance avec Colomb. Mais déjà il avait entendu parler des projets du Génois et avait résolu de s'y associer. Il gagna son frère à cette résolution, et tous

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