chaient un emplacement pour la fondation de leur colonie, ils avaient un jour ramassé une assez grande quantité de maïs trouvé dans la hutte abandonnée d'un Indien. Au printemps, ils se servirent de ces graines pour ensemencer les champs qu'ils avaient défrichés, et à la fin de l'été ils récoltèrent une ample provision de maïs. Il avait été d'abord convenu que tous travailleraient dans l'intérêt commun, mais on ne tarda pas à voir les inconvénients de ce système. L'ardeur au travail diminua quand disparut l'appât d'un gain personnel. De quelques-uns même on ne pouvait obtenir de travail qu'en les menaçant de leur refuser le pain qu'ils n'avaient point gagné : on allait tomber dans une anarchie absolue. Heureusement, en 1623.1624, c'est-à-dire après trois ans d'un essai infructueux de communisme, on attribua à chacun un arpent de terre. C'était peu! mais il était nécessaire que tous les membres de la colonie formassent un petit noyau et pussent se serrer les uns contre les autres, si une attaque des Indiens survenait. Plus tard, quand la colonie eut pris des forces, chaque colon reçut vingt arpents de terre hors de la ville. Les liens de la commandite de Londres, car il avait fallu aux nouveaux colons des bailleurs de fonds, ces liens, disons-nous, qui enchaînaient tout le monde et dont aucun ne pouvait s'affranchir, attachaient la colonie au système de communisme, et faillirent empêcher la réforme accomplie d'être définitive. La difficulté ne fut résolue qu'en 1627. Huit des principaux colons se chargèrent de payer un intérêt fixe à ceux envers lesquels tous avaient contracté une dette. Pour compenser cette charge, on leur accorda le monopole du commerce. Dès ce moment, la prospérité fut assurée à la colonie, et ses habitants expédièrent des produits de leur chasse et de leur culture jusqu'en Angleterre. COLONIE DE MASSACHUSETTS. Le succès qui avait enfin couronné les courageux efforts des pèlerins fut bientôt connu en Angleterre, et l'idée vint de les imiter. Les persécutions religieuses n'ayant pas cessé, un grand nombre de familles de puritains voulurent émigrer. Le 29 juin 1628, cinq vaisseaux arrivèrent en Amérique, et s'arrêtèrent à un endroit que les nouveaux venus nommèrent « Salem, nom tiré d'un mot hébreu qui veut dire « Paix. » Ils étaient restés six semaines et trois jours en route, mais cette durée de leur voyage leur sembla néanmoins très-courte. Les conditions dans lesquelles ils se présentaient étaient bien différentes de celles où s'étaient trouvés, dès le début, les pèlerins ; une charte régulière du roi d'Angleterre leur concédait le droit de s'établir dans le pays et de se gouverner eux-mêmes. Ils n'avaient obtenu cette charte qu'à force d'intrigues et d'argent. Elle fut signée le 4 mars 1629; d'après ses prescriptions, un gouverneur, aidé d'un lieutenant gouverneur et de dix-huit assesseurs, devait administrer les affaires de l'association. Ces fonctionnaires étaient nommés pour un an par les actionnaires ou freemen', Ils ne décidaient en dernier ressort que des affaires courantes. Les lois civiles, les lois criminelles, les emprunts exigeaient un vote des a cours générales,» sessions semestrielles de l'assemblée des actionnaires, Ces votes étaient sans appel : la sanction royale ne leur était pas nécessaire. La Compagnie pouvait même faire la guerre sans consulter le roi; enfin, elle était autorisée à transporter dans la circonscription de sa concession des émigrants anglais ou étrangers, à cette seule condition qu'ils consentissent à se reconnaître, dès lors, sujets du roi d'Angleterre. Ainsi organisés à l'avance au point de vue politique, nos colons avaient également pris toutes les précautions matérielles : ils avaient avec eux des chevaux, du bétail et tous les instruments aratoires nécessaires. L'année auparavant, John Endicott, suivi de quelques hommes, les avait précédés pour choisir le lieu de leur établissement; malgré cette précaution, ils ne furent pas exempts des premières peines endurées par les pèlerins, et l'hiver qui vint ensuite les fit cruellement souffrir. Un an après, le gouverneur John Winthrop arriva d'Angleterre avec huit cents émigrants et d'autres colonies furent rapidement formées : Charlestown, Dorchester, Watertown, Lynn, Cambridge, puis enfin, en 1630, Boston, qu'on appela d'abord « Trois-Montagnes » à cause de ses trois collines. Toutes ces colonies se réunirent sous la même administration, et prirent le nom de « Colonies-Unies de la baie de Massachusetts. » 1 Nous n'analyserons pas ainsi les chartes de chaque colonie, mais il est important d'insister une fois au moins sur cette sorte de documents, puisque telle fut la base de toute constitution américaine. La population de la baie de Massachusetts était puritaine, mais non pas séparatiste. S'étant exilée d'Angleterre pour établir en Amérique une Église conforme à ses croyances religieuses, elle ne voulait pas recevoir dans son sein des émigrants dont les opinions différaient des siennes. En conséquence, on renvoya ceux qui persistaient à employer, dans le service religieux, les formes observées en Angleterre. Un des ministres des habitants de la baie de Massachusetts, Roger William, jeune homme éloquent et pieux, enseigna que chacun devait penser pour lui-même et n'être responsable que devant sa propre conscience. Il déclara en outre que les magistrats n'avaient pas le droit de punir les blasphémateurs, les parjures ni ceux qui n'observaient pas le repos du dimanche. Le gouverneur de la colonie fut effrayé par ces nouvelles doctrines, et il ordonna l'expulsion du ministre. Roger William s'enfuit et erra seul en plein hiver, pendant plus de trois mois, dans les forêts et les plaines désertes. Il voulut d'abord se fixer à Seekonk, petite dépendance de la colonie de Plymouth ; mais le gouverneur Winthrop lui fit signifier d'avoir à déguerpir. Il traversa alors avec cinq compagnons, dans un canot indien, la baie de Narragansett, et se mit en rapport avec le grand chef des Narragansetts, Canonicus, qui lui donna une assez grande étendue de terre sur son territoire. L'endroit n'avait jamais été habité par les blancs; William résolut de s'y établir, et il lui donna, dans sa reconnaissance pour la protection divine qui ne l'avait pas abandonné, le nom de Providence (1636). Les quakers créèrent aussi des embarras à la colonie des puritains de la baie de Massachusetts, en essayant de propager parmi ses membres leurs singulières doctrines. La religion des quakers a eu, comme tant d'autres, une origine vulgaire, et ce ne fut que lorsqu'elle commença réellement à progresser qu'elle recueillit des adhérents dans les classes élevées. Un Anglais, George Fox, né à Drayton dans le comté de Lancashire, en 1624, fut le fondateur de cette secte. Fils d'un tisserand, il était lui-même apprenti chez un cordonnier; se sentant attiré par des contemplations spirituelles, il quitta son maître, abandonna sa profession et se fit voir dans son pays, habillé d'un pourpoint de cuir qu'il préférait à tout autre, par originalité et économie. Puis il cessa toutes relations avec ses amis pour pouvoir, dişait-il, se consacrer plus entièrement à sa vocation; il erra dans les bois, se logeant dans les cavités des rochers et des arbres; sa Bible était sa seule compagnie. Lorsqu'il se crut suffisamment inspiré, il reparut parmi les siens et chercha à |