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gouverneur et de dix-huit assesseurs, devait administrer les affaires de l'association. Ces fonctionnaires étaient nommés pour un an par les actionnaires ou freemen1, Ils ne décidaient en dernier ressort que des affaires courantes. Les lois civiles, les lois criminelles, les emprunts exigeaient un vote des « cours générales, » sessions semestrielles de l'assemblée des actionnaires. Ces votes étaient sans appel : la sanction royale ne leur était pas nécessaire. La Compagnie pouvait même faire la guerre sans consulter le roi; enfin, elle était autorisée à transporter dans la circonscription de sa concession des émigrants anglais ou étrangers, à cette seule condition qu'ils consentissent à se reconnaître, dès lors, sujets du roi d'Angleterre.

Ainsi organisés à l'avance au point de vue politique, nos colons avaient également pris toutes les précautions matérielles ils avaient avec eux des chevaux, du bétail et tous les instruments aratoires nécessaires.

L'année auparavant, John Endicott, suivi de quelques hommes, les avait précédés pour choisir le lieu. de leur établissement; malgré cette précaution, ils ne furent pas exempts des premières peines endurées par les pèlerins, et l'hiver qui vint ensuite les fit cruellement souffrir.

Un an après, le gouverneur John Winthrop arriva

1 Nous n'analyserons pas ainsi les chartes de chaque colonie, mais il est important d'insister une fois au moins sur cette sorte de documents, puisque telle fut la base de toute constitution américaine.

d'Angleterre avec huit cents émigrants et d'autres colonies furent rapidement formées : Charlestown, Dorchester, Watertown, Lynn, Cambridge, puis enfin, en 1630, Boston, qu'on appela d'abord « Trois-Montagnes à cause de ses trois collines. Toutes ces colonies se réunirent sous la même administration, et prirent le nom de « Colonies-Unies de la baie de Massachusetts. »

La population de la baie de Massachusetts était puritaine, mais non pas séparatiste. S'étant exilée d'Angleterre pour établir en Amérique une Église conforme à ses croyances religieuses, elle ne voulait pas recevoir dans son sein des émigrants dont les opinions différaient des siennes. En conséquence, on renvoya ceux qui persistaient à employer, dans le service religieux, les formes observées en Angleterre. Un des ministres des habitants de la baie de Massachusetts, Roger William, jeune homme éloquent et pieux, enseigna que chacun devait penser pour lui-même et n'être responsable que devant sa propre conscience. Il déclara en outre que les magistrats n'avaient pas le droit de punir les blasphémateurs, les parjures ni ceux qui n'observaient pas le repos du dimanche. Le gouverneur de la colonie fut effrayé par ces nouvelles doctrines, et il ordonna l'expulsion du ministre. Roger William s'enfuit et erra seul en plein hiver, pendant plus de trois mois, dans les forêts et les plaines désertes. Il voulut d'abord se fixer à Seekonk, petite dépendance de la colonie de Plymouth; mais le gou

verneur Winthrop lui fit signifier d'avoir à déguerpir. Il traversa alors avec cinq compagnons, dans un canot indien, la baie de Narragansett, et se mit en rapport avec le grand chef des Narragansetts, Canonicus, qui lui donna une assez grande étendue de terre sur son territoire. L'endroit n'avait jamais été habité par les blancs; William résolut de s'y établir, et il lui donna, dans sa reconnaissance pour la protection divine qui ne l'avait pas abandonné, le nom de Providence (1636).

Les quakers créèrent aussi des embarras à la colonie des puritains de la baie de Massachusetts, en essayant de propager parmi ses membres leurs singulières doctrines. La religion des quakers a eu, comme tant d'autres, une origine vulgaire, et ce ne fut que lorsqu'elle commença réellement à progresser qu'elle recueillit des adhérents dans les classes élevées. Un Anglais, George Fox, né à Drayton dans le comté de Lancashire, en 1624, fut le fondateur de cette secte. Fils d'un tisserand, il était lui-même apprenti chez un cordonnier; se sentant attiré par des contemplations spirituelles, il quitta son maître, abandonna sa profession et se fit voir dans son pays, habillé d'un pourpoint de cuir qu'il préférait à tout autre, par originalité et économie. Puis il cessa toutes relations avec ses amis pour pouvoir, disait-il, se consacrer plus entièrement à sa vocation; il erra dans les bois, se logeant dans les cavités des rochers et des arbres; sa Bible était sa seule compagnie. Lorsqu'il se crut suffisamment inspiré, il reparut parmi les siens et chercha à

gagner leur admiration et à se faire des disciples. En ces temps de persécutions religieuses, alors que l'attention de chacun était tournée vers la religion, il ne lui fut pas difficile de trouver des adhérents à ses extravagances. Fox et ses compagnons rejetèrent toutes les cérémonies usitées par l'Église, comme pleines d'orgueil et d'ostentation; ils affectèrent au contraire, dans l'accomplissement de leurs devoirs religieux, une simplicité extrême, et bannirent loin d'eux jusqu'aux règles de la politesse ordinaire. En se parlant, ils n'employaient jamais que le terme d'« Ami. » Ils renoncèrent aux usages établis qui veulent que l'on parle à une seule personne comme si on s'adressait à plusieurs, et ils revinrent à l'usage des langues anciennes, en se tutoyant les uns les autres. Ils cherchèrent aussi, par leur costume, à se distinguer du reste du peuple, en excluant sévèrement tout ornement. Leurs vêtements ne devaient pas être plissés comme c'était alors la mode, et ils ne souffraient ni bouton inutile, ni dentelle, ni broderie.

L'enthousiasme effréné de cette secte, étant trop violent pour le tempérament de quelques-uns de ses prédicateurs, les jeta dans des convulsions qui leur firent donner le nom de « quakers (trembleurs).

Ils étaient tout aussi extravagants dans leurs mœurs que dans leur religion. Lorsqu'un quaker recevait un soufflet sur une joue, il tendait l'autre; lui demandiez-vous son manteau, il vous donnait aussitôt son habit. Il ne réclamait jamais, quand il deman

dait son salaire, que la somme exacte qu'il avait résolu de recevoir. Cette dernière coutume est louable, et elle continue d'ailleurs à être observée rigoureusement par les membres de cette secte.

Quelques quakers essayèrent de jeûner pendant quarante jours, à l'imitation de Jésus-Christ, et l'un d'eux y succomba.

Il ne s'est jamais rencontré de fanatiques qui aient ainsi eu en horreur toutes les cérémonies, formes, coutumes et institutions religieuses. Ils ne tenaient aucun compte du sabbat, et ils niaient jusqu'au caractère sacré des églises. Une femme quakeresse entra un jour toute nue dans une église où se trouvait le protecteur Cromwell, se disant inspirée par le SaintEsprit pour apparaître au peuple comme un avertissement; un grand nombre de ses coreligionnaires crurent que le renouvellement de toutes choses allait commencer, et, l'imitant, ils se dépouillèrent de leurs vêtements.

De telles pratiques, contraires aux mœurs du temps, firent très-mal accueillir les quakers dans la colonie des puritains de Massachusetts. Quelques-uns des plus ardents furent fouettés par ordre du gouverneur, emprisonnés et expulsés de la colonie.

Cependant, ces châtiments ne les décourageaient pas; ils revenaient à la charge, se glorifiant de leurs souffrances, et il fallut, pour refroidir leur enthousiasme, que quatre d'entre eux fussent exécutés.

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