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dit de Nantes dans une ordonnance de 1606, on voit Henri IV attribuer encore les causes concernant les mariages à la connaissance et à la jurisdiction du juge d'église.

Les testamens comme les mariages étaient anciennement de la compétence exclusive des ecclésiastiques. Les curés et les moines étaient chargés de recueillir avec les dernières confidences des mourans leurs dernières volontés. Quelques ecclésiastiques ayant abusé de ce privilége sacré pour arracher des pensions en faveur de leur église ou de leur couvent, et annuller les testamens de ceux qui mouraient sans sacrement, saint Louis fut obligé, dans ses établissemens, d'ordonner l'exécution de tous les testamens même de ceux des déconfès, parce que, ditil, nulle chose n'est si grande comme d'accomplir la volonté au mort. Ce qui n'empêcha pas Henri III, dans son ordonnance de Blois de 1579, de confier aux curés et aux vicaires le droit de recevoir les testamens, même ceux contenant des donations à l'église, et de confirmer les ecclésiastiques dans leurs anciens priviléges.

Je ne m'étendrai pas sur d'autres dispositions remarquables introduites par nos canonistes dans nos ordonnances, telles que la répression sévère de l'usure, l'abolition ou l'adoucissement de la contrainte par corps, la cession de biens accordée au débiteur insolvable. On est sûr que là où la vie, l'honneur, la liberté, le salut et la moralité de l'homme seront engagés on trouvera une disposition de l'Église; elle veillait en mère attentive sur le berceau, sur la couche nuptiale et sur la tombe : elle enchaînait dans les liens de sa discipline toutes les destinées du chrétien, et au moyen âge l'autel de la religion était aussi l'autel de la justice.

Si les règles les plus pures du droit civil nous viennent de F'Église, c'est aussi dans son sein que la procédure a pris naissance. Le droit romain en cette partie n'offrait guères que des arguties inintelligibles tout-à-fait étrangères à nos idées et à nos mœurs. Les décrétales ont adopté un système tout différent. Elles ont commencé par saper les bases de la procédure romaine en décidant que, pour intenter une action, il ne serait pas nécessaire d'en indiquer le nom, mais qu'il suffirait de prendre des conclusions et d'expliquer le motif de sa demande, de manière que le défendeur connût le sujet de l'action.

Le serment et le témoignage, substitués au duel et aux épreuves des Germains, une gradation pleine de logique et de clarté dans les épreuves judiciaires, le système des enquêtes, la requête civile, l'institution des divers degrés de jurisdiction et jusqu'aux formes mêmes des actes: voilà ce que nous devons aux canons et surtout aux décisions de Grégoire IX et de Boniface VIII.

«Les règles de la procédure civile et criminelle, dit Héricourt, » doivent leur origine au droit canonique. Ce que nos rois ont fait depuis par rapport à la procédure, n'a eu pour but que de » l'accommoder à nos mœurs et à nos usages.

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La jurisprudence criminelle, dégagée de tout ce que la superstition, l'ignorance ou les préjugés y avaient introduit de cruel ou d'absurde, est empreinte d'un caractère de modération et de douceur dont il faut faire hommage au christianisme et au clergé. Voici les principales maximes que nous avons recueillies du droit ecclésiastique:

1o On ne doit pas condamner un absent qui peut avoir des moyens légitimes de défense;

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2o L'accusé au criminel ne se défend pas par procureur.

3. On n'oblige pas l'accusé à prouver son innocence quand l'accusateur ne rapporte pas des preuves suffisantes pour établir les divers chefs d'accusation.

4° Les grands criminels ne peuvent être accusateurs.

5o La procédure doit être communiquée à l'accusé.

6° Lorsqu'il n'a pas de défenseur, le juge doit lui en nommer un d'office.

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7° Un accusé ne peut être condamné que lorsqu'il avoue ou qu'il est convainou par la déposition de deux ou trois témoins dignes de foi.

8° On doit avoir égard à la qualité plutôt qu'à la quantité des témoins.

9° En quelque dignité qu'une personne soit constituée, sa seule déposition ne peut suffire pour condamner un accusé.

10° Ne peuvent servir de témoins l'accusateur, les juges, les ennemis de l'accusé, ses parens, ses domestiques, les filles de

Lois ecclésiastiques, p. 151.

mauvaise vie, les individus repris de justice, les témoins qui ont reçu de l'argent, les faussaires, etc....

La plupart de ces principes ont été adoptés par nos tribunaux et sont devenus des vérités triviales, mais lorsqu'on songe combien il leur a fallu de tems pour se faire jour à travers les cruautés et les extravagances des anciennes lois, lorsqu'on songe que les plus sages législations de l'antiquité sont pleines de dispositions contraires à la raison et à l'humanité, et que les barbares qui ont succédé aux Romains ne connaissaient d'autre procédure que le combat, d'autre jugement que celui du fer, du feu ou de l'eau; lorsqu'on songe enfin qu'en France jusqu'à la fin du 18° siècle, la procédure criminelle était secrète, l'innocent soupçonné appliqué à la question, le condamné broyé sur une roue, on se prosterne devant une religion qui ne cesse de crier aux hommes: Soyez bons, soyez justes, soyez humains, et devant cette législation ecclésiastique qui a toujours devancé la législation civile dans la voie des améliorations et du perfectionnement social.

Je termine par une réflexion importante et qui m'a servi de guide dans mes recherches.

Pour apprécier le gouvernement de l'Église et le droit ecclésiastique, il ne faut pas se placer dans notre siècle, comparer des institutions créées dans des tems de désordre et d'anarchie, pour un état de société tout-à-fait différent du nôtre, aux institutions, fruits d'une civilisation plus développée, qui, ellemême, il ne faut jamais l'oublier, n'est que le développement du christianisme. Il ne faut pas juger avec des idées, prises dans nos codes modernes une législation qui, malgré sa supériorité, a dû nécessairement s'empreindre des couleurs de l'époque où elle a été composée. Car alors on ne la comprend plus. Elle paraît en arrière, tandis qu'elle a toujours été en avant dans le mouvement général de l'esprit humain. On s'étonne, on s'irrite même du pouvoir presque illimité de l'Église. Mais reculez de quelques siècles, alors le point de vue change. Placez-vous au moyen âge, au milieu de ses idées, de ses mœurs et de ses croyances, et les faits reparaissent dans toute leur vérité, l'Église dans toute sa grandeur. Ce n'est plus par usurpation, mais par nécessité et sur un consentement unanime qu'elle rè

gne en maîtresse absolue sur les esprits et sur les cœurs; les conciles sont des assemblées législatives où les rois et les peuples ont leurs représentans; les évêques sont de hauts et puissans seigneurs dont la houlette pastorale soutient les couronnes; la chaire pontificale est le premier trône et le premier tribunal de l'univers. Dès lors ce qu'on appelle envahissement n'est le plus souvent que l'exercice d'un droit acquis ou concédé; intolérance, fanatisme, qu'une sage fermeté; servitude, la soumission volontaire du faible et de l'ignorant à l'homme fort de ses talens et de ses lumières; enfin l'influence de l'Église sur l'état, du droit ecclésiastique sur le droit civil n'est plus qu'un des premiers et des plus purs élémens de la civilisation moderne.

X.

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TROUVÉS DANS L'ÉTAT DE L'OHIO ET AUTRES PARTIES DES ÉTATS-UNIS.

La découverte de ces monumens change toutes les idées que les philosophes du dix-huitième siècle nous avaient données sur l'état sauvage qu'ils prétendaient être l'état de nature, tandis que ces monumens prouvent qu'il n'est qu'un état de dégradation.

Deuxième Memoire '.

Le précédent mémoire, publié dans notre numéro de septembre, a eu principalement pour but de prouver la préoccupation avec laquelle on avait jugé de l'état passé de l'Amérique et surtout la facilité avec laquelle l'homme peut descendre de l'état de civilisation à l'état de barbarie sauvage. Dans celui-ci, beaucoup plus détaillé, l'on essaie, autant que cela est possible, de classer toutes ces antiquités, et de les assigner plus particulièrement aux Indiens indigènes, aux Européens, ou au peuple inconnu qui a passé par ces contrées. C'est ici que l'on va voir apparaître des camps, des forts, des villes dont on a mesuré l'enceinte, des remparts dont on a compté les portes; dans les mémoires suivans, nous passerons à la description plus curieuse des objets, figures, etc., trouvés dans ces monumens

1 Voir le n° 5 de septembre, page 153.

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