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gouvernent, et c'est Dieu même qu'ils représentent dans leurs fonctions (1).

On peut remarquer sur ce qui est dit dans cet article, que c'est de Dieu que les souverains tiennent leur puissance, que c'est une des cérémonies du sacre des Rois de France, qu'ils prennent l'épée sur l'autel, pour marquer que c'est immédiatement de la main de Dieu que leur est donnée la puissance souveraine dont l'épée est la principale marque. [Le Roi et ses successeurs jureront, dans la solennité de leur sacre d'observer fidèlement la présente Charte constitutionnelle, art. 74. Le Roi Louis XVIII a prêté serment à la Charte dans la séance du 15 mars 1815.

S. M. Charles X, lors de son sacre, le 29 avril 1825, a prêté les trois sermens suivans:

1o « En présence de Dieu, je promets à mon peuple de maintenir et d'honorer notre sainte religion, comme il appartient au Roi très-chrétien et au fils aîné de l'Église; de reudre bonne justice à tous mes sujets; enfin de gouverner conformément aux lois du royaume et à la Charte constitutionnelle, que je jure d'observer fidèlement; qu'ainsi Dieu me soit en aide et ses saints évangiles.

2° « Nous jurons à Dieu le créateur, de vivre et de mourir en sa sainte foi et religion catholique, apostolique et romaine; de maintenir l'ordre du Saint-Esprit, sans le laisser déchoir de ses glorieuses prérogatives; d'observer les statuts du dit ordre, et de les faire observer par tous ceux qui sout ou seront; nous réservant néanmoins de régler les conditions d'admission, selon le bien de notre service.

3o. Nous jurons solennellement à Dieu de maintenir à jamais, sans laisser déchoir de leurs glorieuses prérogatives, l'ordre royal et militaire de Saint-Louis et l'ordre royal de la Légion d'honneur; de porter la croix desdits ordres, et d'en faire observer les statuts. Ainsi le jurons et le promettons sur la sainte croix et les saints évangiles.

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Le dépôt de la Charte constitutionnelle et de la liberté publique, est confié à la fidélité et au courage de l'armée, des gardes nationales et de tous les citoyens. (Loi du 15 mars 1815, art. 4.)

Le Roi, à son avènement au trône, ou dès qu'il aura atteint sa majorité, prêtera à la nation, en présence du Corps législatif, le serment d'être fidèle à la nation et à la loi, d'employer tout le pouvoir qui lui est délégué à maintenir la constitution décrétée par l'Assemblée nationale constituante, aux années 1789, 1790 et 1791, et à faire exécuter les lois. Art. 4 de la Constitution du 3-14 sept. 1791. V. le serment de Louis XVI, t. 1, p. 113.]

7. On voit assez par ces causes de la nécessité du gouvernement quel en est l'usage, et qu'en général c'est de maintenir l'ordre public dans toute l'étendue des diverses parties qui forment cet ordre, de contenir les particuliers dans la paix, et de réprimer les entreprises de ceux qui la troublent (P. 127.), de faire rendre la justice à tous ceux qui se trouvent obligés de la demander, et de pourvoir à tout ce qui peut être nécessaire pour le bien commun d'un état (2). (P. 109, 114, 123.)

(1) Eccli. 17. 14. Sap. 6. 4. Prov. 8. 16. Judic. 8. 23. 1. Par. 29. 11. Ibid. 12. (2) 1. Tim. 2. 2.

SECTION II.

De l'obéissance due à ceux qui gouvernent.

1. Puisque le gouvernement est nécessaire pour le bien commun, et que c'est Dieu même qui l'a établi, il est par conséquent nécessaire aussi que ceux qui se trouvent y être sujets, y soient soumis et y obéissent. Car autrement ce serait à Dieu qu'ils ré-` sisteraient; et le gouvernement qui doit être le lien de la paix et de l'union d'où doit naître le bien public d'un état, serait une occasion de divisions et de troubles, qui en causeraient le renversement (1). (P. 1, s. 59, 60, s. 222, 234, s. )

2. Le premier devoir de l'obéissance au gouvernement est celui d'obéir à ceux qui en occupent la première place, monarques, ou autres qui sont les chefs du corps que compose la société, et d'y obéir comme les membres du corps obéissent au chef à qui ils sont unis (2). (Charte, 57; p. 86, s. 109, S, 127, S. 123, s. 209, s.)

3. Cette obéissance doit être considérée en celui qui a le gouvernement, comme la puissance de Dieu même qui l'a établi pour tenir sa place. Ainsi, ce n'est ni par la crainte du poids de l'autorité et des peines dues à la désobéissance, ni par l'avantage qu'on pourrait trouver dans l'obéissance qu'il faut obéir, mais par une volonté sincère d'accomplir un devoir essentiel. Car encore que la bassesse des motifs de crainte des peines, et d'intérêt propre ne blesse pas l'ordre public, si l'obéissance est d'ailleurs entière; elle est néanmoins imparfaite pour accomplir le devoir de celui qui doit obéir, parce que ce devoir est en lui un engagement de sa conscience indépendante de son intérêt (3) particulier que l'amour-propre peut inspirer. (P. 234, s.)

4. Comme le gouvernement renferme un détail de plusieurs fonctions que le souverain seul ne peut exercer, et qu'outre celles qui lui sont propres et qu'il ne confie pas à d'autres personnes, il y en a plusieurs qu'il commet à diverses sortes d'officiers, ministres ou autres qui ont part au gouvernement; le même devoir de l'obéissance au souverain oblige aussi à obéir à ceux qu'il commet à ces fonctions (4). (Charte, 13, 14, 57, s.)

[La nature de la monarchie exige donc, dit Filangieri, qu'il y ait entre le prince et le peuple une classe intermédiaire, destinée, non point à exercer quelques portions de l'autorité publique, mais à maintenir entre elles un équilibre constant, et qu'il existe dans l'état un corps dépositaire des lois, médiateur entre le monarque et les sujets.

Les lois doivent donc fixer les priviléges des uns et les fonctions des autres; énoncer avec exactitude quels sont les véritables droits de la couronne, et quel est le ministère du prince qui la porte, objets importans, dont les principes sont malheureusement encore ignorés dans

(1) Rom. 13. 1. (2) 1. Petr. 2. 13. (3) Rom. 13. 3. (4) Petr. 2. 13.

presque toutes les monarchies de l'Europe; déterminer l'étendue du pouvoir législatif; indiquer le point où commence et le point où finit le pouvoir exécutif; montrer les subdivisions de ce pouvoir; distinguer les ordres de la magistrature, établir et constater d'une manière immuable leur dépendance respective, la nature de leurs occupations, et l'ordre des appels. Si la sûreté des citoyens dans les monarchies dépend de cette exacte distribution; si c'est une atteinte mortelle à la puissance de l'état, que l'usurpation d'une seule classe de citoyens sur les droits de l'autre; si, du moment que le monarque veut être juge, et que le juge veut devenir législateur, il n'y a plus dans la nation ni liberté ni sûreté; si, enfin, le despotisme, exercé, soit par les magistrats, soit par les nobles, soit par le prince, n'en est pas moins l'anéantissement de tous les droits de la nature; il est aisé de sentir avec quelle précision rigoureuse les lois doivent déterminer tant d'objets (1).Ĵ

5. L'obéissance au gouvernement comprend les devoirs d'observer les lois, de ne rien entreprendre qui y soit contraire, d'exécuter ce qui est ordonné, de s'abstenir de ce qui est défendu, de porter les charges publiques, soit qu'elles les obligent à quelques fonctions ou à quelques contributions; et en général chacun est obligé non-seulement de ne blesser en rien l'ordre public, mais d'y contribuer en ce qui peut le regarder en particulier (2).

6. Comme cette obéissance est nécessaire pour maintenir l'ordre et la paix que doit former l'union du chef et des membres qui composent le corps de l'état, elle fait un devoir universel à tous les sujets et dans tous les cas, d'obéir aux ordres du prince, sans qu'aucun ait la liberté de se rendre juge de l'ordre auquel il doit obéir. Car autrement chacun serait maître par le droit d'examiner ce qui serait juste ou ne le serait point; et cette liberté favoriserait les séditions. Ainsi, chaque particulier doit l'obéissance aux lois même, et aux ordres qui seraient injustes, pourvu que de sa part il puisse sans injustice les exécuter et y obéir (3). Et la seule exception qui peut dispenser de l'exactitude de cette obéissance, est bornée aux cas où l'on ne pourrait obéir sans désobéir à la loi divine (4). (P. 127, 209, s.)

TITRE II.

De la puissance, des droits et des devoirs de ceux qui ont le gou

vernement souverain.

La puissance du gouvernement souverain doit être proportionnée à ce ministère, et au rang que tient dans le corps de la société des hommes qui composent un état, celui qui en étant le chef doit y remplir la place de Dieu. Car comme c'est Dieu qui est le seul dominateur naturel des hommes, leur juge, leur législateur, leur roi (5); il ne peut y avoir d'autorité légitime d'un homme sur d'autres, qu'il ne la tienne de la main de Dieu.

(1) Science de la législation, liv. 1, ch. 1o. (2) Rom. 13. 1. Rom. 13. 7. (3) Tit. 3. 1. Petr. 2. 17. (4) Act. 5. 29. (5) Is. 33. 22.

Ainsi, la puissance des souverains étant une participation de celle de Dieu, elle est comme le bras et la force de la justice qui doit être l'ame du gouvernement, et qui seule a l'usage naturel de toute autorité sur les esprits et les cœurs des hommes; car c'est sur ces deux puissances de l'homme que la justice doit avoir son règne..

L'autorité de la justice sur l'esprit de l'homme n'est autre chose que la force de la vérité sur la raison et sur le bon sens ; et l'autorité de la justice sur le cœur de l'homme, n'est autre chose que la force de son attrait qui en fait naître l'amour dans le cœur. Mais parce que tous les esprits et tous les coeurs ne se laissent pas conduire par la lumière et les attraits de la vérité et de la justice, et que plusieurs les rejettent et se portent à des injustices; il est de l'ordre divin que la justice ait d'autres armes que la lumière pour éclairer l'esprit, et les attraits pour toucher le cœur, et qu'elle règne d'une autre manière sur ceux qui résistent à son empire naturel, qui devrait régler la conduite de chaque

personne.

C'est ainsi que Dieu, qui est lui-même la justice et la vérité, règne sur les hommes, et c'est ainsi qu'il veut qu'usent de sa puissance pour le gouvernement ceux à qui il la confie, qu'ils rendent leur domination aimable à ceux qui aiment la justice, et terrible à ceux qui, ne l'aimant point, entreprennent de lui résister. (P. 209, s.)

Suivant ces principes, qui sont les fondemens naturels de l'autorité de ceux qui gouvernent, leur puissance doit avoir deux caractères essentiels : l'un de faire régner la justice à qui cette puissance se doit tout entière, et l'autre d'être aussi absolue que doit l'être l'empire de la justice, c'est-à-dire le règne de Dieu même qui est la justice, et qui veut régner par eux, comme il veut qu'ils règnent par lui (1), ce qui fait que l'Écriture donne le nom de Dieux à ceux à qui Dieu confie le droit de juger, qui fait la première et la plus essentielle de toutes les fonctions du gouvernement (2). Car, comme ce droit n'est naturel qu'à Dieu, c'est lui qu'on doit regarder en la personne de ceux à qui il commet la fonction divine de gouverner et juger les hommes; et c'est le jugement même de Dieu qu'ils doivent rendre (3), comme c'est sa place qu'ils tiennent, et sa puissance qu'il leur a donnée en les élevant au gouvernement qu'ils ne peuvent tenir que de lui. C'est ce qu'il a marqué singulièrement dans sa conduite sur le peuple juif sous Moïse, sous les juges, sous les rois, ayant luimême choisi Moïse et les juges et les premiers rois. Et quoique le choix que Dieu fait toujours de ceux qu'il veut mettre dans la première place du gouvernement, ne soit pas manifesté par un

(1) Proverb. 8. 15. (2) Ps. 81. 1. 6. Joan. 10. 34. 35. Exod. 22. 8. (3) Deut. 1. 16. 2. Paralip. 19. 5.

ordre exprès, comme il l'était dans ce gouvernement du peuple juif pendant ces premiers temps; il paraît, par ces exemples, que c'est Dieu qui, dans toute sorte d'états, dispose du gouvernement. Et on ne peut ignorer que, comme c'est lui qui est le maître de tous les événemens, il tient en ses mains ceux qui font passer la. puissance souveraine d'une main à une autre, soit par succession, par élection, ou par d'autres voies. De sorte que c'est de lui que les princes même infidèles tiennent leur puissance (1).

Comme la puissance des princes leur vient donc de Dieu, et qu'il ne la met en leurs mains que comme un instrument de sa providence et de sa conduite sur les états, dont il leur ce met le gouvernement; il est évident qu'ils doivent faire de cette puissance un usage proportionné aux fins que cette providence et cette conduite divine veut qu'ils se proposent; et que la manière sensible et visible dont leur autorité doit être exercée, ne devant ètre que l'ouvrage de la volonté de Dieu qui, cachant elle-même son gouvernement universel, veut en faire éclater par le ministère des princes cette partie qu'elle leur commet sur les peuples qui leur sont soumis. C'est cette volonté dont ils doivent rendre le gouvernement visible par cette puissance, qui doit être le principe et la règle de l'usage qu'ils doivent en faire, puisqu'elle en est l'instrument, et qu'elle ne leur est confiée que pour cette fin.

C'est là, sans doute, le fondement et le premier principe de tous les devoirs des souverains, qui consiste à faire régner Dieu mème, c'est-à-dire à régir toutes choses selon sa volonté, qui n'est autre que la justice. Ainsi, c'est ce règne de la justice qui doit faire la gloire de celui des princes.

Il s'ensuit de ce premier principe que tout le détail du gouvernement des princes doit avoir le caractère essentiel de la justice qu'ils sont obligés de faire régner; et qu'ayant pour cet usage la force en leurs mains dans toute l'étendue de leur domination, le corps de l'état doit sentir que son chef est animé de l'amour de la justice, dont il doit établir l'empire; et le chef luimême qui doit animer et régir ce corps ne doit se proposer aucune autre vue dans ce ministère divin, que ce qui peut mettre en usage son autorité pour imposer le joug de cet empire à ceux de ses sujets qui ne s'y soumettraient pas volontairement, et à le rendre absolu autant qu'il lui est possible pour faire jouir son peuple de la paix et de la tranquillité qui en sont les fruits.

C'est par cet amour de la justice que les princes se rendent eux-mêmes aimables aux peuples, et qu'ils dominent avec une autorité d'autant plus absolue qu'elle est plus naturelle, et que c'est l'ordre divin qui en est le principe et en règle l'usage. C'est

(1) Joau. 19. 11.

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