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qu'elles ont toutes quelque usage pour la religion, comme on le verra dans la suite.

Pour ce qui regarde les sciences dont l'usage se rapporte précisément à la religion, comme elles consistent à porter les hommes au culte de Dieu, et à l'observation de la loi qu'il leur a donnée, la première science que demande la religion, est celle qui doit enseigner ce culte; et la seconde est celle qui nous enseigne les préceptes de cette loi.

La science du culte de Dieu renferme la connaissance qu'on doit avoir du Dieu à qui on doit ce culte; et elle renferme aussi la manière dont il veut que ce cultè lui soit rendu, et la science des principes de sa loi comprend la connaissance de la lettre de ces préceptes, et celle de l'esprit qui en doit animer les œuvres.

d'un

La connaissance de Dieu ne peut s'acquérir par aucun des sens de la manière dont on connaît les objets sensibles, car sa nature est d'un ordre qui est infiniment au-dessus de leur portée, et audelà de leur étendue. Il est vrai que la connaissance des objets sensibles peut élever l'homme à y reconnaître l'ouvrage d'un auteur de tant de merveilles, et il ne paraît pas même possible d'ouvrir les yeux, et de voir et considérer l'univers, éclairé de la lumière du soleil, les cieux, les astres, l'ordre réglé des jours, des nuits, des mois, des années, la vaste étendue de la terre et des mers qui l'environnent, la multitude et la diversité infinie de plantes, d'arbres, de minéraux, et enfin l'homme composé corps d'une structure divine, animé d'une intelligence, sans être en même temps jeté dans un abîme d'admiration de ces grands ouvrages, dont le moindre par son seul être, prouve une cause qui l'a produit, et dont chacun par sa structure, prouve seul la puissance et la sagesse infinie d'une telle cause, qui devrait être encore plus évidemment prouvée par l'assemblage de cette multitude innombrable d'êtres de toutes natures dans un si grand ordre. Mais cette preuve, si naturelle et si sûre qu'elle paraît, n'a jamais conduit personne à la véritable connaissance que l'homme doit avoir de Dieu, et au vrai culte qu'il doit lui rendre, et elle n'a même aucun accès en plusieurs esprits, puisqu'on en a vu qui n'ont point cru de Divinité, de sorte que cette ignorance naturelle où naissent les hommes du culte et de la religion qu'ils doivent à leur créateur, et la pente contraire qui les porte à ce qu'il leur défend par sa loi, fait une preuve invincible, que l'homme est tombé dans un état, qui ne pouvait être naturel à une créature capable de connaître et aimer son Dieu, s'il fût demeuré tel qu'il était parti de la main de ce créateur. Cette vérité assez prouvée par cette ignorance et cette pente au mal, l'est encore plus par cette multitude infinie de misères qui en sont les suites.

Puisqu'il est donc vrai que la connaissance de Dieu et du culte que

nous lui devons, ne peut s'acquérir ni par les sens, ni par la raison, sans autres secours; c'est par quelque autre voie qu'on doit y être élevé, et la seule est celle que Dieu y a lui-même employée, ayant bien voulu nous enseigner par lui-même, ce qu'il veut que nous connaissions de sa nature, et la manière dont il veut que nous le servions, et cette voie est si éloignée de la manière de connaître Dieu dans ses créatures par l'usage des sens et de la raison, qu'il a compté celle-ci pour rien. Car, outre qu'elle ne donnerait aux plus clairs-voyans que des preuves qui les persuaderaient qu'il y a un Dieu, mais sans les conduire à la connaissance de sa nature, ni des devoirs qu'il exige de la créature raisonnable; ce n'est pas seulement aux plus habiles que Dieu veut se manifester, il se communique à toute sorte de personnes indépendamment de leur capacité ou incapacité, et de toutes les autres qualités naturelles. Et c'est ce qu'il a fait par ce grand appareil de miracles et de prodiges dont il a accompagné les connaissances qu'il a voulu donner aux hommes des mystères et des vérités de la religion où il veut être servi, et où il enseigne aux hommes la science sublime qui nous découvre et la cause de notre chute, de notre ignorance, de notre pente au mal, et de toutes les misères qui en sont les suites, et les remèdes dont il s'est servi pour nous en tirer et nous ramener à le connaître et à le servir. Mais pour cette manière de le connaître naturellement dans ces créatures, il nous a appris par les ministres dispensateurs de la science des vérités et des mystères de la religion, qu'elle n'a servi à ceux qui ont eu quelque connaissance de la divinité par les créatures qu'à les rendre coupables du mauvais usage qu'ils ont fait de cette connaissance, et de l'ingratitude envers celui qu'ils ont reconnu pour le créateur et auteur de tout, ne lui ayant pas rendu l'honneur et le culte qu'ils lui doivent, et ayant au contraire mis en sa place des créatures qu'ils ont adorées (1).

Ce n'est donc que par les vérités que Dieu a voulu apprendre lui-même aux hommes, qu'ils peuvent le connaître et le servir dans la religion qu'il a établie, et c'est par conséquent la science de cette religion, qui est la première de toutes, et qui est infiniment au-dessus de toutes les autres. Et c'est aussi pour cette première science, qu'on a principalement établi les universités, afin de la conserver et de l'enseigner dans sa pureté.

Cette science de la religion comprend trois parties: la première, des mystères et des vérités de la foi que Dieu a révélées à son église, comme ce qui regarde sa nature divine, la distinction des trois personnes en un seul Dieu, leurs attributs, la création des anges, la chute d'une partie d'entre eux, la création de

(1) Rom. 1. 21. v. 2. Sap. 13.

l'homme, sa chute dans l'esclavage du démon et du péché, sa rédemption par le mystère de l'incarnation, les sacremens, l'unité de l'église, son étendue dans toutes les nations, sa perpétuité, la mission des apôtres et de leurs successeurs, pasteurs et ministres de cette église, leurs fonctions pour ce ministère, et les autres vérités semblables.

La seconde partie de cette science est la doctrine des mœurs, composées des préceptes de la loi divine enseignés aux hommes, dans la première alliance, par le ministère de Moïse, et dans la seconde par Jésus-Christ qui, au lieu de la lettre de cette lọi, que cette première alliance avait seulement donné, en a enseigné l'esprit et donné l'accomplissement par son évangile.

La troisième est la discipline ecclésiastique qui est comme la police de l'église pour toutes les choses qui ne sont essentielles, ni à la foi, ni aux mœurs, telles que sont les cérémonies du culte divin, celle de l'administration des sacremens, les manières de convoquer les conciles et de les tenir, celles de pourvoir aux évèchés, aux cures et autres bénéfices, les établissemens de chapitres, les institutions d'ordres religieux, et les autres matières semblables, dont quelques règles peuvent être différentes en divers lieux et sujettes à des changemens.

C'est pour conserver ce qu'il y a dans l'église de règles de cette science de la religion dans ces trois parties, de la foi, des mœurs et de la discipline, qu'après la première mission des apôtres, eux et leurs successeurs ont tenu des conciles selon le besoin de purger l'église des abus, des erreurs, des hérésies (1), et que les papes ont fait aussi plusieurs décrets et constitutions. Ainsi, la multitude infinie d'hérésies, d'erreurs et d'abus qu'on a vus naître dans tous les siècles en divers lieux, ayant obligé à un grand nombre de décisions et de règles pour conserver la pureté de la foi et des mœurs, et pour maintenir le bon ordre de la discipline, il s'en est composé la matière d'une science. dont l'importance et l'étendue a demandé l'usage de personnes habiles, instruites de toutes ces règles dans leur pureté, et qui en fussent des docteurs fidèles.

C'était pour cet usage, qu'outre les anciens conciles, dans les premiers siècles, Dieu avait donné à son église des saints docteurs qui ont mérité le nom de ses pères par leur doctrine et leur sainteté, et c'est dans toute la suite des siècles, pour ce usage, que Dieu a présidé aux divers conciles que les nouvelles hérésies, les nouvelles erreurs et les nouveaux abus ont rendus nécessaires. De sorte qu'il s'est composé dans l'église la matière d'une science qui renferme les dogmes de la foi et des mœurs, et les règles de la discipline, dont l'église a le dépôt

même

(1) Act. 15.

III.

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dans l'écriture, dans les conciles, dans les livres des saints pères et dans les saints canons, composés de ces mêmes dogmes tirés de l'écriture, des conciles, des livres des pères, et des constitutions des papes, et c'est pour l'étude de cette science qu'on a établi les universités, et qu'on enseigne en plusieurs colléges et académies quelques parties de cette science, quoique ce ne soit pas avec les mèmes précautions que dans les universités, dont les professeurs doivent avoir le caractère d'un témoignage public de leur capacité, et un titre qui leur donne le droit de professer et enseigner les parties de cette science qui leur sont commises, comme sont les matières de cette partie qu'on appelle la théologie, l'interprétation des livres saints, et les autres qu'on distingue différemment selon les usages.

Après cette science de la religion parmi toutes les autres qu'on appelle sciences humaines, pour les distinguer de cette première, celle qui est la plus nécessaire et la plus importante dans l'ordre de la société des hommes, et qui a aussi plus de dignité, est la science des lois, qui règlent la justice que les hommes se doivent les uns aux autres dans toutes les sortes d'affaires, que les liaisons, les engagemens et les autres suites de leur société peuvent faire naître, ce qui renferme les règles de l'administration de cette justice, et celles des fonctions et des devoirs de ceux qui participent à cette administration; ce sont ces lois qu'on appelle le droit civil, composé principalement de règles de l'équité naturelle dont les livres du droit romain comprennent un vaste détail, sur quoi le lecteur peut voir ce qui a été dit sur ce sujet dans la préface des lois civiles, et dans le traité des lois qui suit cette préface. C'est pour enseigner cette science que sont établis dans les universités les professeurs du droit civil, et comme il y a beaucoup de liaison entre le droit canonique et le droit civil, l'un et l'autre étant composé de lois, et de sorte que plusieurs de ces lois sont communes à l'un et et à l'autre, les mêmes professeurs enseignent les deux.

Quoique ces premières sciences dont on vient de parler, regardent en plusieurs manières l'utilité des particuliers qui composent la société, elles ont de plus un rapport à l'ordre général de cette société, les unes pour le spirituel, et les autres pour le temporel, et elles contiennent plusieurs règles qui se rapportent à cet ordre, et qui contribuent à le former et à le maintenir. On enseigne aussi dans les universités d'autres sciences qui n'ont pas le même rapport à cet ordre général, et qui ne' contiennent aucune règle dont l'usage regarde directement cet ordre. Mais comme ces sciences ont leur utilité pour les particuliers qui s'en instruisent, et que le bien commun des particuliers, qui sont les membres du corps de la société, doit être considéré comme un

bien public, il est de l'intérêt et de l'ordre général de la société que ces sciences y soient cultivées.

De toutes ces sciences, celle qui a l'objet le plus important, est la médecine, inventée pour le plus grand de tous les biens temporels qui est la santé, c'est par les principes de cette science qu'on tâche de découvrir la nature, les causes et les remèdes des différentes sortes de maux, ce qui renferme la nécessité de connaître la structure du corps humain, l'usage des diverses parties qui le composent, le sang et les autres humeurs, pour discerner les divers effets des maux sur les parties qu'ils affectent, et sur tout le corps. Cette science renferme la connaissance des remèdes que l'expérience a fait découvrir par l'usage des plantes, des minéraux, et des autres remèdes simples, et de ceux qui sont composés, y comprenant le discernement des alimens proportionnés aux différentes maladies, l'usage de la chirurgie pour une infinité de différentes opérations selon les diverses sortes de maux, et surtout pour les blessures, fractures, luxations ou dislocations et autres maux semblables. Ce sont ces deux parties de l'art de guérir les maux qu'on appelle pharmacie et chirurgie, qui comprennent toutes sortes de remèdes et de secours pour la conservation et le rétablissement de la santé, et dont la science de la médecine enseigne les principes, et règle l'usage; ainsi, il a été nécessaire d'établir dans les universités des professeurs de

cette science.

Toutes ces sciences dont on vient de donner ces idées générales ne peuvent s'acquérir, et on ne doit pas même en entreprendre l'étude qu'après avoir acquis d'autres connaissances nécessaires pour en donner l'entrée, et qui en sont comme les principes et les élémens ; et c'est par cette raison qu'on enseigne aussi dans les universités ces principes et ces élémens sous le nom d'arts, pour les distinguer de ces premières sciences à qui leur dignité fait donner ce rang, quoique de ces autres connaissances quelquesunes aient toujours eu et aient encore dans le monde le nom de sciences.

Ces sortes d'arts, qu'on appelle arts libéraux, la grammaire, les humanités, la rhétorique, la logique, la physique, la métaphysique, sont les parties de la phylosophie, qu'on met et qu'on peut justement mettre au nombre des sciences, puisqu'elles consistent en la théorie de plusieurs principes et de plusieurs vérités, qui ont leur certitude et les autres caractères des sciences, quoiqu'on y mêle surtout dans la physique plusieurs connaissances qui n'ont pas cette certitude.

Tous ces divers arts ont leur ordre entre eux, et ils ont tous ensemble leur rapport à ces premières sciences dont on a parlé; la grammaire a son usage pour apprendre les langues, surtout les anciennes, qui sont les langues des auteurs des livres où se

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