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hirent l'Inde, il y trouvèrent les Rajpouts établis dans toutes les villes du nord

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L'EMPEREUR MOGOL ABKAR.

D'après un manuscrit hindou (Bibliothèque A. Firmin-Didot).

et dans la plaine du Gange jusqu'au Bengale actuel. Ils régnaient à Lahore, Delhi, Kanoudje. Adjodhya, etc. La région qu'ils occupaient s'étendait au nord

de l'Inde et du Satledj jusqu'à la Jumna, près d'Agra et au sud jusqu'aux monts Vindhya, en un mot sur tout le nord-ouest de l'Inde. Refoulés de ces régions fertiles, ils se réfugièrent dans la contrée moins accessible et plus facile à défendre du Rajpoutana actuel. Leur territoire se divise aujourd'hui en dix-neuf États, dont seize sont la possession de clans rajpouts et gouvernés par les chefs de ces clans. Celui qui occupe le rang le plus élevé est l'État d'Odeypour. Jusqu'au quatorzième siècle, les Rajpouts luttèrent avec succès contre les musulmans; ils ne furent sérieusement menacés qu'après la perte de leur capitale, Chittor. Ce ne fut cependant qu'au temps d'Akbar qu'ils furent incorporés à l'empire mogol, et encore cette incorporation fut-elle beaucoup plus nominale que réelle; leur situation reste celle des grands vassaux, demi-indépendants. Akbar leur laissa leur organisation, donna à leurs chefs de grandes dignités dans les armées, épousa des filles rajpoutes et ses successeurs l'imitèrent. L'antique constitution des États rajpouts est la seule ayant survécu dans l'Inde aux vicissitudes politiques qui se sont succédé à travers les siècles. Leurs coutumes sont les scules qui n'aient pas été plus ou moins altérées par des influences étrangères. >

Le plan que nous nous sommes tracé pour ce compte rendu, où nous laissons volontiers la parole à l'auteur, nous conduit à ce qu'il appelle la période musulmane. Les Musulmans ont exercé dans l'Inde la même influence profonde qu'ils exercèrent dans toutes les régions du monde conquises par eux. Pendant les sept siècles que dura leur domination dans l'Inde, une grande partie du peuple hindou modifia profondément sa religion, sa langue et ses arts; et cette transformation survécut à la disparition des vainqueurs. Alors que l'influence de l'invasion grecque fut presque nulle, que celle des Anglais n'est pas appréciable encore, 50 millions d'Hindous pratiquent la religion de Mahomet. > Bien que l'Islamisme ait pénétré dans l'Inde dès le septième siècle, ce n'est qu'au commencement du onzième que sa grande poussée vers l'Orient s'effectua sous la conduite de Mahmoud « aventurier turc qui s'était créé une principauté indépendante dans le district montagneux de Ghazni, ville située dans l'Afghanistan, au sud de Kaboul ». Sa maison régna à Ghazni et à Lahore de 986 à 1186, année où elle fut renversée par Mahmoud de Ghor, autre conquérant afghan; un des lieutenants de celui-ci devint, à son tour, le chef d'une dynastie dite de rois esclaves, qui s'éteignit en 1290. C'est à ce prince qu'est due la fameuse tour de Koutab, à Delhi. Le plus célèbre de ses descendants fut Altamsh dont on admire, à Delhi même, le magnifique mausolée. Aux Gourides succédèrent plusieurs autres maisons royales. Parmi les souverains du quatorzième siècle, nous ne nommerons que Ala-ud-din, auquel est due la fameuse porte sculptée qui garde son nom à Delhi.

En 1398, le grand mogol Timour ou Tamerlan envahit l'Inde. « Il pilla Delhi, mais ne fit que traverser la péninsule comme un ouragan et regagna bientôt son pays. L'anarchie qu'il avait provoquée ne cessa qu'à l'avènement de son arrière-petit-fils Baber, mort à Agra, en 1530. « Mais, dit le docteur Le Bon, ce ne fut qu'à la fin de l'empire mogol et seulement pendant une très courte période, que l'Inde entière fut placée sous un seul sceptre. C'est donc uniquement en réalité sur le nord et le centre de l'Inde que s'exerça la puissance mogole fondée par Baber et ses successeurs. >

Humayun (1530-1556), fils de Baber, fut lui-même père de l'empereur Akbar (1556-1605), qui entreprit la fusion du peuple hindou avec les Musulmans, épousa des princesses hindoues, employa indifféremment comme ministres des musulmans et des hindous et tenta de combiner l'architecture des deux peuples. Plusieurs des institutions qu'il adopta lui survécurent et les Anglais les ont souvent imitées. Son exemple fut suivi par Jahanguir (1605-1628), son fils, mais non par Shah Jehan, son petit-fils (1628-1658). Intolérant, celui-ci < élimina autant que possible, dans l'architecture, toutes les influences hin

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DELHI (PÉRIODE MOGOLE).

Entrée des rois mogols (palais commencé en 1638).

doues; les monuments qu'il nous a laissés révèlent immédiatement cette constante préoccupation. En 1637, il se fixa à Delhi et y construisit un magnifique palais dont les Anglais n'ont laissé subsister qu'une partie, mais qui, tel qu'il est encore, constitue cependant un des plus beaux monuments que le monde possède. >

Son fils Aureng-Zeb (1658-1707) vécut tantôt à Agra, tantôt à Delhi. < Plus intolérant encore que son père pour les Hindous, il prépara par son fanatisme la chute de la puissance mogole. En détruisant dans le Dekkan les royaumes musulmans de Bijapour et de Golconde, il détruisit en même temps les dernières barrières qui s'élevaient contre ses ennemis, dont les principaux

étaient les Mahrattes, habitant dans le nord-ouest du Dekkan la région anciennement nommée Maharashra, correspondant à peu près au sud actuel de la province de Bombay. Il prépara ainsi lui-même la dissolution de son gigantesque empire. Si l'on ne jugeait de l'importance d'un empire que par son étendue, on pourrait dire que la puissance mogole (si fortement centralisée à Delhi), atteignit son apogée sous Aureng-Zeb; mais elle renfermait alors des germes de décadence qui devaient l'anéantir bientôt. Elle ne survécut pas, en effet, au souverain qui l'avait portée si haut. »

«La période musulmane, dont nous venons de résumer brièvement l'histoire, dura environ 700 ans. Pendant la plus grande partie de cette longue période, c'est-à-dire jusqu'à Aureng-Zeb, l'unité de l'Inde ne fut qu'apparente. Divers gouverneurs musulmans, devenus indépendants, avaient fondé des royaumes, tels que ceux de Gaur, Golconde, Bijapour, etc. En fait. ce ne fut que pendant un moment, sous Aureng-Zeb, que l'Inde entière fut réunie pour la première fois par un seul maître. Elle n'y resta pas longtemps: la mort d'Aureng-Zeb marque la fin de la puissance mogole dans l'Inde. Après lui la péninsule tomba dans l'anarchie la plus profonde; Mahrattes, Afghans, Siks, Jâts, Rajpouts, princes mahométans, se livrent au pillage et essayent de se tailler des royaumes indépendants dans le cadavre du colosse. Les faibles successeurs d'Aureng-Zeb ne gardent plus qu'un pouvoir nominal. Le Dekkan recouvre son indépendance, et, en 1723, un vizir du nom de Nizam se crée un État indépendant qui subsiste encore sous ce nom et dont la capitale est Hyderabad. En 1739, le shah de Perse Nadir vint piller Delhi, puis il enleva tous les trésors accumulés par les Mogols. Il emporta avec lui un butin estimé à plus d'un milliard. En 1747, les Afghans s'emparent de Lahore et du Pundjab. Profitant du désordre, les Mahrattes enlèvent à l'empire ses plus belles provinces. »

Comme le dit M. le docteur Le Bon, au moment où ceux-ci allaient achever la conquête de la péninsule, les Afghans brisèrent le faisceau de leurs forces à la célèbre bataille de Paniput en 1760, bataille qui coûta la vie, dit-on, à 200 000 hommes.

Survinrent les Anglais sous lord Clive (après les Français, si bien dirigés un instant par Dupleix).

La disparition totale de l'empire mogol ne fut pas l'œuvre d'un jour. Pendant plus d'un siècle il y eut encore des grands Mogols sur le trône de Delhi, mais leur pouvoir devint de plus en plus nominal et ils finirent par devenir de simples pensionnaires des Anglais; lorsque le dernier d'entre eux fut fait prisonnier en 1857, il ne jouissait pas même d'une ombre d'autorité dans la ville où avaient régné ses pères. »

Géographie, ethnographie, histoire, évolution des civilisations de l'Inde. (périodes védique, brahmanique, bouddhique, musulmane, etc.), œuvres des civilisations de l'Inde, croyances, institutions, mœurs et coutumes actuelles, voilà ce que trouveront dans ce livre de 742 pages les lecteurs du docteur Le Bon. Qu'ils ne se dérobent pas à ce plaisir, que nous devons, pour une si notable part, à MM. Firmin-Didot, les intelligents et magnifiques éditeurs. LUDOVIC DRAPEYRON.

Miscellanea. Depuis que nous avons montré combien la géographie est compréhensive et combien elle aide à faire mieux comprendre, presque sans

effort, des sujets qui en apparence peuvent se passer de son concours, bien des auteurs qui, autrefois, nous auraient peut-être accusé d'excès de pouvoir, ne sont pas trop fàchés d'être mentionnés dans cette Revue.

M. Jules Tessier, professeur d'histoire à la Faculté des lettres de Caen, ne m'a rien demandé, mais n'a-t-il pas dédié son travail sur la Mort d'Étienne Marcel aux professeurs d'histoire, dont je suis? Ne nous a-t-il pas dit à nous tous, ses collègues : « C'est à vous spécialement que je dédie ces pages. Il y a là une vieille erreur que tous, pour une large part, nous avons contribué à répandre. C'est sur vous que je compte pour m'aider à rétablir la vérité ». Il était de l'intérêt du régent de France (plus tard Charles V), de faire passer Étienne Marcel, le grand prévôt des marchands, quelque temps si populaire, pour un traître patriotiquement mis à mort par Maillart et ses complices. Il allait, dit-on, au moment où il fut frappé, livrer Paris au roi de Navarre. Ce qui seul pouvait décider les professeurs d'histoire, bien étrangers à la raison d'État, à adopter obstinément cette version, c'est que, peu de temps auparavant, Marcel avait fait ou laissé déclarer (chose grave) Charles le Mauvais, capitaine général de Paris (15 juin 1358). Mais l'examen impartial de la situation, telle qu'elle se dessinait le 30 juillet au matin, et aussi des textes, les plus probants', ont conduit notre savant collègue à ruiner une légende que les Valois avaient sciemment et habilement accréditée. La vérité est que ce prétendu traître a été lui-même trahi.

Il nous est absolument interdit ici de faire preuve d'érudition historique. Pour nous en tenir à la géographie, nous rappellerons à nos lecteurs l'endroit précis où périt le maire » de Paris. « Un petit devant minuit, à la porte SaintAntoine, s'engageait le dialogue suivant, rapporté ou inventé par Froissard : Étienne, Étienne, que faites-vous ici à cette heure?

Je suis ici pour prendre garde de la ville.

- Par Dieu! vous mentez, traître, vous mentez ! »

Et tantôt férit à lui et dit à ses gens: « A la mort, à la mort, tout homme de son côté, car ils sont traîtres. >

La eut grand hutin et dur, et s'en fùt volontiers le prévôt des marchands fui s'il eût pu; mais il fut si hâté qu'il ne put, car Jean Maillart le férit d'une hache sur la tête et l'abattit à terre ».

Cette mise en scène semble être une pure invention de Froissart. C'est d'ailleurs en plein jour que Marcel fut tué:

La brochure érudite de M. Tessier m'est arrivée fort à propos, au moment même où je parlais de ce drame, non loin du lieu où il s'est accompli, de sorte que je n'aurai pas attendu 1887 pour rectifier l'erreur en question. Ajoutons que cette étude est extraite de l'excellente Revue de l'enseignement secondaire et de l'enseignement supérieur (Dupont et Cie).

A quel titre nommerons nous ici l'Histoire de quinze ans, récit des événements politiques contemporains depuis le 4 septembre 1870 jusqu'au 28 décembre 1885, date de la réélection de M. Grévy, - par M. Edmond Benoit-Lévy 2? Notre politique, depuis quelques années, est devenue essentiellement géographique, car elle se projette jusque sur l'Afrique et sur l'Asie. Nous avons con

1. Notamment une lettre de Charles V lui-même, de février 1368. 2. Derveaux fils, 1887.

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