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s'offre de le garder. La mère qui s'apperçoit de cette rufe, diffimule à fon tour. Elle répond en pleurant que fon fils a été écrasé fous les débris du tombeau de fon père. Ulyffe në la croit point:

La tendreffe de mère eût réglé votre fort;
Et, puifque vous vivez, votre fils n'est point

mort.

Il quitte le mafque, & demande où Theftor l'a caché; il dit qu'on le fçaura bientôt de Theftor lui-même ; qu'on l'a vû dans le bois voifin de l'Armée ; que des foldats entourent ce bois, & y ont mis le feu. Vous observerez, Monfieur que dans tout le troisième Acte & dans la moitié de celui-ci, on a perdu Hécube de vûe; ce qui rompt peut-être la feule unité qu'il pouvoit y avoir dans cette Piéce, qui étoit, comme on l'a dit, de frapper coup fur coup le cœur d'Hécube, & de lui faire fentir tous les malheurs qui arrivent à fa famille. Euripide a eu l'art de faire partir précipitamment Andromaque; en forte qu'elle pas témoin de la mort de fon fils, que c'eft encore Hécube à qui l'on offre

n'est

&

Notre Poëte s'eft bien apperçu qu'il he faifoit pas prendre à Hécube affez de part au fort d'Aftyanax ; il répare ce défaut, mais un peu tard. Elle vient annoncer toute en larmes qu'Aftyanax a été étouffé dans la flamme; qu'on l'a fçû de Theftor lui-même qui s'eft fauvé. Ulyffe attendri quitte la Scène. Andromaque défefpérée leve un poignard pour s'en frapper. Theftor furvient, & faifit le poignard. Il lui annonce qu'il a fauvé fon fils, & que le vaiffeau qui le porte à fait voile à fes yeux pour Samos, où il ira le joindre lui-même. Jugez, Monfieur, de la joie maternelle. Mais Idas vient lui fignifier qu'il faut qu'elle partes que Pyrrhus veut qu'elle fe rende à Scyros avant lui ; qu'il refte encore quelque temps fur les rives de Troie, pour ý célébrer une fête en l'honneur d'A chille. Idas n'a point d'ordre pour Hécube. Les adieux d'Andromaque à fa bellemère & à Theftor font très-touchans. Elle n'ofe parler à découvert devant Idas. Mais fon inquiétude pour fon fils éclate fur fon vifage; elle regarde tendrement Theftor; fes yeux lui expliquent fes allarmes, & lui font entendre ce qu'elle craint & ce qu'elle fouhaite. Hécube la

fuit; elles ne peuvent s'arracher des bras l'une de l'autre. Iphis, confident dè Theftor, apporte une autre nouvelle affreufe. Les Grecs mettent Achille au nombre de leurs Dieux, & vont égorger Polyxène fur fon tombeau. Theftor fe flatte de fléchir Calchas. Ulyffe pafoît, & le fait arrêter, en lui déclarant que les Grecs exigent qu'il s'en retourne Samos; que la Barque qui doit l'y conduire et toute prête. Theftor dit à Ulyffe ces vers fublimes, en parlant d'Achille :

En le plaçant parmi les Immortels,
Donnez-lui des vertus dignes de leurs Autels.
Ne le fuppofez plus violent, fanguinaire,
Avide de carnage, & bouillant de colère.
Les Dieux jouiroient-ils d'un fuprême bonheur,
Si la rage barbare empoifonnoit leur cœur ?
Tous les hommes n'ont plus qu'une même
Patrie,

Si-tôt qu'ils ont franchi les bornes de la vie.
La Mort également les marque de fon sceau.
La haine & l'intérêt meurent dans le tombeau
Les folles paffions n'en troublent point l'afyle."
Hector, fans être émû, voit les manes d'A-
chille.

Prenons les fentimens de ces illuftres Morts.
Achille ne veut point la mort de Polixène ;
Et, fi vous le croyez susceptible de haine,
C'eft à de vils mortels que vous le
comparez;
Et, pour en faire un Dieu, vous le deshonorez.

Ulyffe n'eft point touché de ces raifons. Il ordonne aux Gardes de conduire Theftor au vaiffeau qui l'attend. Resté feul, il ne peut cependant s'empêcher de rendre justice à l'attachement du Grand-Prêtre pour les Troyennes.

L'intérêt de l'Etat me force d'être injufte.
Je viole à regret son caractèrè auguste.
Quand de fon zèle ardent j'ai paru murmurer
Dans le fond de mon cœur j'aimois à l'admirer.
Quel Sujet ! Quel Ami ! Quel zèle pour fon
Maître !

Zèle pur,

que Priam ne peut plus reconnoître. Les Rois feroient des Dieux fur le Trône af

fermis,

Si leur cœur ne s'ouvroit qu'à de pareils amis.

Hécube fçait au commencement du cinquième Acte le fort qu'on réferve à Polixène. Elle appelle Theftor à fon fecours. Céphife lui apprend que les Grecs l'ont fait partir pour Samos, & qu'on ne le

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verra plus. Polixène vient par fa préfence augmenter le fupplice de fa mère. Elle demande des nouvelles de fes fœurs. Hécube lui dit tout ce qui eft arrivé. Polixène s'étonne de n'avoir pas la même destinée qu'Andromaque & Caffandre. Elle dit qu'après avoir été enlevée par les Grecs, ils l'avoient remise entre les mains de femmes confacrées au culte des Autels; que ces femmes lui parloient avec refpect; qu'elles l'avoient parée des plus beaux habits, ornée de guirlandes de fleurs, & qu'elles avoient ceint fa tête d'un fuperbe bandeau. Elle ne connoît point cet appareil de victime, dont l'afpect fait frémir fa mère.. Polixène lui demande la caufe de fes pleurs: Hécube la lui révèle. Cette Scène elt une des plus pathétiques que j'aie vûes au Théâtre elle a fait fondre en larmes. On vient arracher Polixène des bras de fa mère, qui fait de vains efforts pour la retenir & pour la fuivre. Des Gardes l'empêchent de fortir. Iphis fufpend un inftant fa douleur, en lui racontant que Calchas avoit représenté qu'il feroit plus hunain, plus grand, plus digne d'Achille de faire de Poli

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