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ait beaucoup d'érudition & quelques anecdotes curieuses, en petit nombre à la vérité, dans la Bibliothèque hiftorique & critique du Poitou, contenant les vies des Sçavans de cette Province, depuis le troisième fiècle jufqu'à préfent ; une notice de leurs ouvrages, avec des obfervations pour en juger; la fuite hiftorique & chronologique des Comtes héréditaires, & celles des Evêques de Poitiers depuis Saint Nectaire par M. Dreux du Radier, Avocat au Parlement.

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Ce Livre, en cinq Volumes in-12, imprimé chez Ganeau, Libraire, Rue Saint-Séverin, n'eft guères fufceptible d'une analyse. Vous n'y verriez en général que les noms d'une foule d'Auteurs inconnus, avec le catalogue de leurs ou vrages. Ce détail ne peut intéreffer que des lecteurs Poitevins; mais vous, Monfieur, vous ne demandez que les traits les plus remarquables.

Richard, Roi d'Angleterre, furnommé Cœur de Lion, eft placé parmi les écrivains du Poitou, parce qu'il a vêcu dans cette Province, & qu'il y a fon tombeau. Pendant trois ans qu'il fut prifonnier en Allemagne, il adoucit par l'étude les ennuis de fa détention, & l'on pré

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tend que ce fut à la poëfie qu'il dut fa liberté. Un Muficien nommé Blondel, élevé à la Cour de ce Prince, n'ayant aucunes nouvelles de fon Maître, alla partout où il crut pouvoir en apprendre. Après une longue courfe, il fe trouva au pied d'un Château, où il s'imagina que Richard étoit renfermé. Il fit connoiffance avec les Gardes; mais voyant qu'il ne pouvoit tirer d'eux aucun éclairciffement, il chanta le commencement d'une Chanfon qu'il avoit compofée autrefois avec Richard. Ce Prince l'entendit, & acheva le refte de la Chanfon. Il n'en

fallut pas davantage à Blondel pour reconnoître le Roi. Il retourna en Angle terre, où l'on prit des mefures efficaces pour procurer au Prince une prompte liberté.

Au commencement du dix-feptième fiècle naquit à Poitiers François Umeau, Médecin célèbre, de qui nous avons d'excellens écrits fur la Médecine. Quoique ce Docteur eût une femme fort aimable, il n'en étoit pas plus fcrupuleux fur la fidélité conjugale. Il fe donnoit là-deffus des libertés qui animèrent plufieurs fois le zéle des Prédicateurs. On alloit jufqu'à le défigner en chaire d'une manière

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à ne pas s'y méprendre. Un Cordelier entre autres le reprit ainfi publiquement dans un Sermon fur l'adultère : Nous apprenons qu'il y a des gens affez perdus pour s'abandonner à ce péché, bien qu'ils ayent dans leurs maisons des femmes qui font telles, que, quant à nous > nous nous

en contenterions bien.

François le Poulchre, Poëte Gafcon, mais originaire de Loudun, occupe auffi une place dans cette Bibliothèque. Il avoit pris le parti des armes, & la plûpart de fes poëfies traitent de l'amour & de la guerre. Ce qu'il dit des Courtifannes qui fuivoient en Flandres l'armée du Duc d'Albe, me paroît affez curieux. On y voyoit, dit-il,

Deux gaillardes Cornettes,

Sous lesquelles marchoient des femmes de plaifir,
Pour fervir le premier qui en avoit defir;
Pourvû, cela s'entend, qu'il leur fût agréable.

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Il les entretenoit qui vouloit tout le jour,
Mais avec un refpect plein de cérémonie.

Or ces Dames avoient tous les foirs leur quartier,

Du Maréchal de Camp,par les mains du Fourrier, Et n'eût-on pas ofé leur faire une infolence.

Mais le Duc d'Albe s'ennuya de tant de cérémonie ; &, pour fe défaire de cet Efcadron, il les obligea à recevoir tous les Soldats indifféremment à cinq fols par nuit. Cet ordre leur déplut; elles quittèrent le Camp.

Un autre Poëte qui tient un rang dif tingué dans cette Bibliothèque, eft Nicolas Rapin, natif de Fontenai-leComte. Il fe diftingua également dans la poëfie Latine & Françoife. Il prétendit affranchir nos vers de la rime, en y fubftituant la profodie. Ce projet n'étoit pas neuf Baïf avoit eu le même deffein; mais il n'avoit pas eu le courage de rien publier en ce genre. Rapin, plus hardi, donna au Public un grand nombre de ces fortes de vers, tantôt rimés, & tantôt fans rimes. Voici une petite pièce de vers élégiaques rimés.

Henriette eft mon mal; je la prens bien, mais je la tiens mal:

Elle m'échappe & me fuit fous la faveur de la nuit.

Henriette eft mon bien, de sa bonté l'ombre je

fens bien;

Mais elle y joint la rigueur, dont elle abat ma

vigueur.

O forcière d'amour, fi à part je te puis tenir un jour,

Nous verrons à l'effort lors qui fera le plus fort.

Parmi les grands hommes qu'a pro'duit le Poitou, Jean de la Quintinie tiendra toujours un des premiers rangs. Il naquit à quelques lieues de Poitiers, fit fes études dans cette Ville, y prit quelques leçons de Droit, & vint à Paris fe faire recevoir Avocat. En fuivant le Barreau, la Quintinie n'auroit peut-être été qu'un Avocat médiocre ; il fe livra à fon goût, & devint le plus grand Jardinier de l'Europe.

Un des illuftres du Poitou eft encore le Chevalier de Meré, dont vous connoiffez les Lettres & d'autres ouvrages eftimables. Il fe nommoit George Broffin, connu d'abord fous le nom de Plaffac. Il étoit d'une famille diftinguée par fa nobleffe, & fon éducation fut conforme à fa naiffance. Mais il ne fe contenta pas de ce vernis de fçavoir, qui fait ordinairement toute la science des gens de qualité. Il s'appliqua aux Mathémati

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