de filles dont il encouragea l'établissement: les Ursulines instituèrent presque en même temps deux maisons dans le Maine (1); les Visitandines prirent d'abord résidence à La Ferté-Bernard, et bientôt elles furent appelées à Mamers et au Mans; les sœurs de Sainte-Elisabeth vinrent habiter Noyen; les Urbanistes, Beaumont-leVicomte; les sœurs du Calvaire, Mayenne; les Bénédictines, Laval, Domfront en Passais, Château-du-Loir, Ernée et Lassay (2). L'affection que l'évêque du Mans portait aux associations religieuses fut plus d'une fois contrariée par les remontrances du clergé diocésain; mais il ne paraît pas qu'il en ait tenu grand compte. L'Université de Paris se résigna moins facilement à le laisser faire, lorsqu'il entreprit de favoriser les Jésuites à cette occasion il eut avec elle un long procès. Nous exposerons avec quelques détails l'origine et les phases diverses de ce débat : il intéresse l'histoire littéraire, et ni Le Corvaisier, ni Bondonnet, n'ont mentionné les faits de la cause. : Le cardinal Philippe de Luxembourg, évêque du Mans, était mort en l'année 1519, laissant un testa (1) On peut consulter, sur l'établissement des religieuses Ursulines dans la ville du Mans, l'opuscule de Charles Aubert dont il a été parlé précédemment. (2) Dans un volume de Miscellanées de la Bibliothèque du Mans (no 8, 442, Grande-Salle), se trouve manuscrite l'ordonnance de Charles de Beaumanoir relative à la fondation du prieuré des Bénédictines de Lassay. Cette ordonnance porte la date du 23 juillet 1632. ment dans lequel il attribuait des fonds à la construction d'un collége en l'Université de Paris, pour les pauvres écoliers de sa province. Ses intentions charitables furent bien remplies par les chanoines auxquels il avait confié cette charge, et l'on vit bientôt s'élever le collége du Mans, rue de Reims, au sommet de la montagne Sainte-Geneviève, sur l'emplacement d'une vieille maison épiscopale, abandonnée en toute propriété aux exécuteurs testamentaires de Philippe de Luxembourg par son successeur sur le siége du Mans, le cardinal Louis de Bourbon (1). La construction du bâtiment avait coûté 12,000 livres : il contenait trentesix chambres, pour loger douze boursiers, les régents et les pensionnaires, sans compter les classes et les autres offices (2). L'administration temporelle et spirituelle du collége fut commise à un principal, à un procureur-chapelain et à divers régents, qui, d'après les statuts, firent des cours spéciaux sur tous les arfs et toutes les sciences. C'était donc un collége de plein exercice. Le premier état de cette maison paraît avoir été prospère; mais quand les Jésuites, recommandés par la cour de Rome, accueillis avec faveur par le pouvoir civil, eurent institué leurs maisons rivales au centre même de l'Université, les cours des professeurs du (1) Fundatio et statuta collegii et capellaniæ Cenomanensis. Parisiis, 1649, in-8°. (2) Félibien, Histoire de la ville de Paris, t. II, p. 915. collége du Mans furent suivis avec moins de zèle, et leur crédit fut ébranlé. Les Jésuites n'épargnaient rien pour servir la cause de leur congrégation et pour compromettre celle de l'Université. Ils pénétraient dans les familles, et par toutes sortes de brigues et de calomnies ils attiraient chez eux les fils des riches ainsi que les fils des pauvres, recrutant, dans toutes les conditions, de nombreux adhérents. Quand la déchéance du collége du Mans fut enfin considérée comme un fait accompli, l'évêque du Mans résolut de l'unir au collège de Reims, qui n'avait pas éprouvé de moindres disgrâces, et cette union dura quelque temps. Elle fut rompue par des contestations survenues entre les administrateurs des deux établissements. On voulut alors remettre en vigueur, dans la maison du Mans, les statuts primitifs et restaurer les études; mais on n'y réussit pas à peine trouva-t-on quelques bacheliers pour occuper la chaire de philosophie; les autres cours furent suspendus, non moins par défaut d'élèves que par défaut de professeurs, et, vingt-cinq années après cette tentative malheureuse, une portion des bâtiments du collége du Mans avait changé de destination les classes étaient devenues des magasins, les chambres des professeurs avaient été louées à des gens de métier; l'Université ne comptait plus en ce lieu d'autres suppôts que le principal, le procureur et quelques boursiers. C'est alors que Charles de Beaumanoir ayant eu quelques pourparlers avec les Jésuites établis au collége de Clermont, ceux-ci lui proposèrent 40,000 livres, destinées à l'acquisition d'un hôtel épiscopal à Paris (1), et lui demandèrent en retour de leur céder les bâtiments de son collége. Cette transaction avait été sans doute conseillée par le cardinal de Richelieu. Il avait, en effet, résolu de beaucoup réduire le nombre des colléges fondés à Paris, et, comme tendant à cette fin, l'union du collége de Clermont au collége du Mans lui paraissait désirable. Il la proposait lui-même au roi en cette année 1625 (2). Cependant, avant même que le marché fût conclu, le recteur de l'Université de Paris en connaissait les clauses. Il s'empresse donc de porter au greffe du parlement une opposition à tout contrat qui pourrait avoir pour objet de transférer aux Jésuites un établissement quelconque de son ressort et de sa dépendance. Charles de Beaumanoir ne s'arrête pas devant cet obstacle et termine l'affaire avec les Jésuites, le 11 octobre 1625. A cette nouvelle, le recteur de l'Université demande par voie de requête l'annulation du contrat, et la chambre des vacations du parlement, saisie de cette contestation, fait signifier aux parties contractantes qu'elles aient à rompre leurs engagements (1) Dans le contrat de 1631, dont nous parlerons plus loin, les Jésuites n'offraient plus que 33,000 livres. (2) Lettres, Instructions de Richelieu, publiées par M. Avenel, t. II, p. 181. réciproques. Ce désistement eut lieu le 22 novembre. C'était une victoire pour l'Université. Cependant les Jésuites convoitaient toujours le collége du Mans. Ils entament d'autres négociations, et, le 11 octobre 1631, ils proposent à l'évêque du Mans un nouveau contrat, qui est signé le 16, et confirmé par lettrespatentes du roi qui portent la date du 31 octobre. En vertu de ces lettres, les Jésuites se présentent le 9 novembre aux portes du collége, assistés de Me Anne Mangot, sieur de Villarceaux, maître des requêtes, de trois sergents et de quelques hommes d'armes; ils entrent, arrachent les clefs aux mains du portier, et ordonnent au principal, au procureur, aux régents et aux boursiers de se retirer à l'instant. L'Université se plaint avec plus de véhémence qu'elle ne l'avait fait encore; dans une nouvelle requête elle s'efforce d'établir que la conscience des conseillers d'État a été sur. prise, qu'il y a dol et fraude dans la conduite des Jésuites, simonie dans celle de l'évêque, et que le bon droit exige la révocation des lettres royales. Arrêt du conseil, sur cette requête, qui assigne à quinzaine le recteur du collége de Clermont: celui-ci ayant été entendu, trois jours sont accordés aux parties pour produire toutes les pièces sur lesquelles le conseil se réserve de statuer. Charles de Beaumanoir publie un factum intitulé: Raison pour lesquelles M. l'évêque du Mans a uni le collège du Mans au collège des PP. Jésuites de Paris: l'Université lui oppose deux |