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cour elle-même de ses plaintes, et la reine-mère écrivait à l'évêque, le 14 septembre 1612, cette lettre pres

sante :

« Monsieur l'évêque du Mans,

« Franchaie, ingénieur du roi Monsieur mon fils, et intendant de ses fontaines, s'est plaint par plusieurs fois à moi de ce qu'au préjudice de la pension de six mille livres, dont le feu roi Monseigneur l'a voulu gratifier, à prendre sur le revenu temporel de votre évêché, vous n'avez jusques ici tenu compte de l'en faire sortir, quelques instances que l'on ait pu faire. Vous faisant celle-ci en sa faveur, pour vous prier de le faire payer de ce qui lui est dû de son entretenement et lui en donner le contentement, qu'il n'ait plus d'occasion de recourir à moi, l'affectionnant pour les services qu'il a rendus et rend journellement en sa charge. Tenez y donc la main et vous ferez en cela chose qui me sera bien agréable. Priant sur ce Dieu, etc., etc. (1).

>>

Nous ignorons les suites de cette affaire. Une pension de six mille livres était une bien grosse pension. Il est néanmoins probable que l'évêque la paya: quand la cour donnait des ordres aussi formels, personne ne pouvait se dispenser d'obéir.

L'historien des évêques du Mans, Le Corvaisier de Courteilles, a prolixement raconté la plupart des faits qui concernent l'épiscopat de Charles de Beaumanoir.

(1) Biblioth. impériale; Cinq-cents de Colbert, t. LXXXIX, fol. 83.

Nous ne reproduirons pas tous les détails de son récit ; cependant nous n'omettrons aucun de ceux qui semblent avoir quelque intérêt. Nous aurons d'ailleurs occasion de suppléer à son silence sur divers points. Voici le portrait qu'il fait de ce prélat : « Il gouverna << son évêché avec une grande modération, maniant <«<les esprits par la douceur et l'accortise de son << humeur; se rendant sociable à tout le monde, il << n'eut jamais de querelle ou de procès avec son peu«ple ou son clergé, mais au contraire assoupit tous «< ceux qui étaient intentés, et demeura, pendant qu'il «< vécut, en bonne intelligence avec son chapitre, qui <«<lui porta toujours beaucoup d'honneur et d'affection, << relâchant quelquefois les uns et les autres de leurs <<< droits et des intérêts qu'ils avaient à démêler, pour <«<< entretenir la paix et vivre en amitié. Notre Charles «< était un prélat doué de grandes perfections et qui << avait reçu de grands avantages de la nature, car il << était homme de bonne mine, agréable à tous ceux « qui le voyaient, bien disant, affable, courtois, qui << avait un entendement vif et pénétrant, et capable << de grandes affaires, s'il n'eût point préféré le séjour << de sa province au tracas et au tumulte de la cour. << Quoique dans ses actions il fût accompagné d'une << grâce naturelle et qu'il eût dans son port et dans << son maintien un certain air qui ressentait la géné«<rosité de sa maison, toutefois cet avantage que sa <«< naissance lui avait donné paraissait principalement

<«< lorsqu'il vacquait à quelque cérémonie : l'on n'a « guères vu de prélats officier avec une façon si << majestueuse et une contenance si grave et si « auguste que cet évêque, qui semblait accroître la << pompe et la solennité d'une fête lorsqu'il y assistait «< paré de ses habits pontificaux. » Si flatteur que soit ce portrait, nous croyons qu'il est assez fidèle: tous les actes administratifs de Charles de Beaumanoir ne furent pas sans doute approuvés par le clergé de son diocèse, mais dans les libelles les plus véhéments qui ont été publiés contre sa gestion épiscopale nous trouvons l'éloge de sa modestie, de sa continence, de son humeur affable et de son savoir (1). Si Tallemant des Réaux a mal parlé de ses mœurs (2), il ne cite aucun fait qui justifie ce langage, et il y a lieu de supposer qu'il a traité Charles de Beaumanoir avec peu d'égards à cause du fâcheux renom qu'eut son neveu, Philbert-Emmanuel.

Lorsqu'en l'année 1614 Louis XIII et Marie de Médicis passèrent par la ville du Mans, Charles de Beaumanoir vint recevoir le jeune roi au seuil de l'église cathédrale, et lui présenta, comme au premier chanoine de l'église, le surplis et l'aumusse. Après cette cérémonie, il harangua le prince et sa mère, au nom du clergé de la province. Hardouin Lebourdays

(1) Jesuitica prima, auctore incerto, in-8°, page 16.

(2) Historiettes de Tallemant des Réaux, édit. de 1834, t. IV,

nous a conservé ces deux discours (1). Ils sont plutôt d'un rhétoricien que d'un prélat. Celui qui est à l'adresse du roi n'a que trois phrases, mais on ne saurait imaginer combien il s'y trouve d'épithètes vides de sens, d'incises précieuses et de métaphores énigmatiques. On nous apprend, toutefois, qu'il se fit applaudir comme orateur en deux circonstances solennelles au collège de La Flèche, dans la cérémonie qui eut lieu pour la canonisation des saints Ignace et François Xavier (2); en l'église des Capucins du Mans, à l'occasion de la béatification de frère Félix (3).

Si dans la chaire on admirait son éloquence, on faisait d'ailleurs grand état de sa sagesse, de son expérience dans les conseils : « Aussi, comme nous l'ap<< prenons de Le Corvaisier, lorsqu'il s'est fait quelque << assemblée dans le royaume, il a souvent été choisi << du clergé de la province, comme un des plus habiles

(1) Discours et Ordre tenus à l'entrée de leurs MM. Louis XIII et Marie de Médicis.

(2) Le triomphe des saints Ignace et Fr. Xavier au collège de La Flèche; La Flèche, Hébert, 1622, in-16.

(3) C'est à l'occasion de son sermon sur saint Félix qu'ont été composés ces méchants vers:

« Bienheureux Félix, favorise
Charles, qui, dévot, autorise
L'honneur que ça bas tu reçois.
En revanche obtiens lui la grâce
Qu'après cette vie on lui fasse

Ce qu'on fait aujourd'hui pour toi. »

Nous empruntons ces vers au num. 4255 du Suppl. franç., à la Bibliothèque impériale.

«et plus intelligents à conduire et à manier des affai«res de cette importance. » Après avoir représenté le clergé de son diocèse aux États-Généraux de 1614, à l'issue desquels il fit une harangue qui ne nous a pas été conservée, Charles de Baumanoir parut comme député de sa province à l'assemblée générale du clergé qui se tint à Paris en l'année 1626. Il y fut trèsoccupé, ayant été particulièrement chargé du laborieux examen des comptes. Ses collègues le désignérent, en outre, comme devant prononcer devant le roi le discours de clôture et d'adieu; mais un motif qu'on ne nous fait pas connaître l'empêcha de remplir cette commission et il fut suppléé par l'évêque de Chartres (1).

Charles de Beaumanoir témoigna beaucoup de zèle pour les ordres religieux, les congrégations, les confréries. Le Corvaisier compte vingt-trois maisons conventuelles ou autres, fondées avec son concours dans le diocèse du Mans. Dans les premières années de son épiscopat, les frères Capucins vinrent s'établir au Mans, à Mayenne et à Laval; les Récollets à La FertéBernard et à Château-du-Loir; les Minimes au Mans et à Sillé; les religieux de la Charité à Domfront en Passais c'est à sa prière que les Pères de l'Oratoire prirent possession du collége du Mans, en l'année 1624. Plus grand fut encore le nombre des maisons

:

(1) Collection des procès-verbaux du clergé, t. II, p. 579.

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