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zélés du despotisme, Le clergé a lutté jadis contre les rois de France, pour soutenir l'autorité de Rome; mais maintenant tous les privilégiés font ligue entre eux. Il n'y a que la nation qui n'ait d'autre appui qu'elle-même. Ils veulent un tiers état qui ne puisse occuper aucun emploi élevé, pour que ces emplois soient tous réservés aux nobles. Ils veulent que le peuple ne reçoive point d'instruction, pour en faire un troupeau d'autant plus facile à conduire. Ils veulent une armée dont les officiers fusillent, arrêtent et dénoncent, et soient plus ennemis de leurs concitoyens que des étrangers. Car pour refaire l'ancien régime en France, moins la gloire d'une part, et ce qu'il y avoit de liberté de l'autre, moins l'habitude du passé qui est rompue, et en opposition avec l'attachement invincible au nouvel ordre de choses, il faut une force étrangère à la nation pour la comprimer sans cesse. Ils ne veulent point de jurés, parce qu'ils souhaitent le rétablissement des anciens. parlemens du royaume. Mais outre que ces parlemens n'ont pu prévenir jadis, malgré leurs honorables efforts, ni les jugemens arbitraires, ni les lettres de cachet, ni les impôts établis en dépit de leurs remontrances, ils seroient dans le cas des autres privilégiés; ils n'auroient plus leur

ancien esprit de résistance aux empiétemens de ministres. Étant rétablis contre le vœu de la nation, et seulement par la volonté du trône, com. ment s'opposeroient-ils aux rois qui pourroient leur dire : Si nous cessons de vous soutenir, la nation, qui ne veut plus de vous, vous renversera? Enfin, pour maintenir le système qui a le vœu public contre lui, il faut pouvoir arrêter qui l'on veut, et accorder aux ministres la faculté d'emprisonner sans jugement, et d'empêcher qu'on n'imprime une ligne pour se plaindre. L'ordre social ainsi conçu seroit le fléau du grand nombre, et la proie de quelques-uns. Henri IV en seroit aussi révolté que Franklin; et il n'est aucun temps de l'histoire de France assez reculé pour y trouver rien de' semblable à cette barbarie. Faut-il qu'à une époque où toute l'Europe semble marcher vers une amélioration graduelle, on prétende se servir de la juste horreur qu'inspirent quelques années de la révolution, pour constituer l'oppression et l'avilissement chez une nation naguère invincible?

Tels sont les principes de gouvernement développés dans une foule d'écrits des émigrés et de leurs adhérens ou plutôt telles sont les conséquences de cet égoïsme de corps; car on

ne peut pas donner le nom de principes à cette théorie qui interdit la réfutation, et ne soutient pas la lumière. La situation des émigrés leur dicte les opinions qu'ils proclament, et voilà pourquoi la France a toujours redouté que le pouvoir fût entre leurs mains. Ce n'est point l'ancienne dynastie qui lui inspire aucun éloignement, c'est le parti qui veut régner sous son nom. Quand les émigrés ont été rappelés par Bonaparte, il pouvoit les contenir, et l'on ne s'est point aperçu de leur influence. Mais comme ils se disent exclusivement les défenseurs des Bourbons, on a craint que la reconnoissance de cette famille envers eux ne pût l'entraîner à remettre l'autorité militaire et civile à ceux contre lesquels la nation avoit combattu pendant vingt-cinq ans, et qu'elle avoit toujours vus dans les rangs des armées ennemies. Ce ne sont point non plus les individus composant le parti des émigrés qui déplaisent aux François restés en France; ils se sont mêlés avec eux dans les camps et même dans la cour de Bonaparte. Mais comme la doctrine politique des émigrés est contraire au bien de la nation, aux droits pour lesquels deux millions d'hommes ont péri sur le champ de bataille, aux droits pour quels, ce qui est plus douloureux encore

les

des

forfaits commis au nom de la liberté sont retombés sur la France, la nation ne pliera jamais volontairement sous le joug des opinions émigrées; et c'est la crainte de s'y voir contrainte qui l'a empêchée de prendre part au rappel des anciens princes. La charte constitutionnelle, en garantissant les bons principes de la révolution, est le palladium du trône et de la patrie.

CHAPITRE III.

Des circonstances qui rendent le gouvernement représentatif plus nécessaire maintenant en France que partout ailleurs.

LE ressentiment de ceux qui ont beaucoup souffert par la révolution, et qui ne peuvent se flatter de recouvrer leurs priviléges que par l'intolérance de la religion et le despotisme de la couronne, est, comme nous venons de le dire, le plus grand danger que la France puisse courir. Son bonheur et sa gloire consistent dans un traité entre les deux partis, dont la charte constitutionnelle soit la base. Car, outre que la prospérité de la France repose sur les avantages que la masse de la nation a acquis en 1789, je ne sais pas ce qui seroit plus humiliant les François, que d'être renvoyés dans la servitude, comme des enfans qu'il faut châtier.

pour

Deux grands faits historiques peuvent se comparer, à quelques égards, à la restauration en France : le retour des Stuarts en Angleterre, et l'avénement de Henri IV. Examinons d'abord le plus moderne de ces événemens;

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