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blissement et, après la mort de Henri IV, remonta jusqu'aux lacs du cours supérieur du Saint-Laurent.

Quels furent, au point de vue commercial, les résultats des découvertes de Champlain et de ses prédécesseurs? Les ressources naturelles du Canada et de l'Acadie sont attestées par toutes les descriptions (Lescarbot, Champlain, Denys) et mieux encore par leur prospérité actuelle. Les cuirs, les fourrures, les mines, les bois de construction, le chanvre, les grains, la pêche, etc., étaient des richesses naturelles qui devaient attirer des colons et alimenter un commerce actif avec la France et l'Europe. Mais les colons, les marchands qui se lancèrent sur les traces des explorateurs n'exploitèrent pas ces richesses si variées. De même que les Espagnols ne s'attachaient dans l'Amérique du Sud qu'à l'exploitation des mines, de même que les Hollandais n'allaient guère chercher aux Indes orientales que les épiceries, ce fut le commerce des fourrures et des cuirs qui occupa presque exclusivement les Français. Le P. Charlevoix écrit qu'en 1608 l'attrait du commerce des pelleteries avait fait presque abandonner en Acadie la culture de la terre, au point que les colons étaient menacés de disette1. Ce fut à ce commerce que les découvertes et les établissements des de Monts et des Champlain donnèrent le plus d'impulsion. En 1608 il attirait plus de quatre-vingts vaisseaux sur les côtes d'Acadie et au Canada. Il y eut aussi un autre genre de commerce qui se ressentit de ces essais de colonisation ce fut la pêche. Elle devint plus active, elle exploita de nouveaux parages jusque-là inexplorés. Nous parlons de la pêche que venaient faire pendant trois mois de l'année nos pêcheurs des côtes de l'Océan. Quant à la pêche sur place, qui aurait évité à nos terre-neuviers un aussi long séjour dans des mers glaciales, qui leur aurait permis de faire trois voyages par an au lieu d'un, puisqu'ils n'auraient eu qu'à venir charger le produit de la pêche des colons, elle ne s'organisa pas d'une façon sérieuse 3.

Le commerce des pelleteries devint moins lucratif lorsque, la prorogation du privilège de la compagnie de de Monts ayant expiré le 7 janvier 1609, il devint libre pour tout le monde. Les sauvages firent alors payer les peaux de castors beaucoup plus

1. Histoire de la Nouvelle-France, 1744. 9 vol. in-12. I, 190. 2. Voyages de Champlain, cités par Poirson, III, 586, n. 2.

3. Lescarbot, 848. Denys, Description géographique et historique des côtes de l'Amérique septentrionale, I, 94. II, 249.

cher. « Aujourd'hui, écrit Marc Lescarbot1, depuis la liberté remise, les castors se vendent au double de ce que le s' de Monts en retiroit. Car l'avidité a été si grande, qu'à l'envi l'un de l'autre, les marchands ont gâté le commerce..... » Les inconvẻnients de la libre concurrence ramenèrent Henri IV au monopole, qui semble en effet le ressort indispensable d'entreprises aussi hasardeuses la compagnie privilégiée créée en 1613 par Champlain et qui fut ouverte à tous les commerçants, moyennant le versement d'un capital, ne fut que la réalisation d'une idée à laquelle l'expérience avait fait revenir Henri IV.

COMMERCE DE COMMISSION ET DE TRANSPORT.

:

A côté du vendeur et de l'acheteur, les opérations commerciales mettent en jeu des personnes dont le rôle doit maintenant nous occuper nous voulons parler surtout des commissionnaires et des entrepreneurs de transports. Pour achever de parcourir le cadre que nous nous sommes tracé, il resterait à déterminer la part que la France prenait au commerce de commission et de transit.

I. COMMERCE DE COMMISSION.

Les documents que nous avons recueillis ne nous présentent jamais des commerçants français faisant la commission à l'étranger pour leurs compatriotes. Ce silence ne suffirait peut-être pas pour affirmer qu'il n'en existait pas, si l'on ne se rappelait les obstacles mis par les législations étrangères au commerce français et qui rendaient inutile le ministère d'intermédiaires dont l'existence suppose toujours un grand nombre d'affaires 2. Quant aux commissionnaires agissant en France pour le compte de commerçants étrangers, il faut distinguer les commissionnaires d'achat et les commissionnaires de vente. Les commissions d'achat reçues de l'étranger pouvaient s'exécuter librement; elles favori

1. P. 611-612.

2. Cette raison n'a pas moins de valeur que le témoignage formel de Montchrestien «Que Vos Majestés prennent la peine de s'enquerir si nos marchands ont quelques commissionnaires, j'enten pour manier leur argent et leur amasser les marchandises du pays au prejudice des citoyens, Espagnols en Espagne, Anglois en Angleterre, Flamans en Flandres. Si l'on vous en nomme un, ce sera un corbeau blanc. » P. 84.

saient le commerce français et ne faisaient tort à personne. Il en était autrement des commissions de vente; elles amenaient sur le marché français les marchandises étrangères, créaient une concurrence à notre commerce et rendaient illusoires les restrictions apportées à cette concurrence ainsi que le monopole des corporations. Aussi les commissions de vente venant de l'étranger ne pouvaient légalement être exécutées que par des commissionnaires ayant un caractère officiel, limités en nombre, et dans les conditions où les marchands étrangers auraient pu vendre euxmêmes, c'est-à-dire en gros, dans les marchés et après examen des gardes jurés 1. Ce fut Henri III qui créa ces commissionnaires en titre d'office par un édit du mois de mars 1586, qui, rappelant les anciennes ordonnances mises en oubli, n'autorisait les étrangers à vendre que dans les foires et, en dehors des foires, dans les conditions que nous venons d'indiquer. Les commissionnaires institués par Henri III étaient tenus, lorsqu'ils faisaient une vente au comptant, de payer leur commettant dans les vingtquatre heures; dans les ventes à terme, ils garantissaient la solvabilité de l'acheteur (faire les debtes bonnes), faisaient connaître son nom et le prix de vente à leur commettant, auquel ils remettaient l'argent quinze jours après l'échéance. Ils lui avançaient, sur sa demande, les frais de transport et le montant des impôts, dont ils se remboursaient sur le prix, capital et intérêt à raison de 10 pour 100. Ils donnaient caution et étaient solidairement responsables envers leurs commettants, qui pouvaient avoir recours sur leur bourse commune. Leur commission était de 6 den. pour livre. Ils ne pouvaient être commerçants ni s'associer avec des commerçants. Enfin ils étaient exempts des charges publiques. Un arrêt du conseil du 15 avril 1595 créa dans les villes les plus commerçantes, à côté de ces commissionnaires, des courtiers privilégiés chargés de les mettre en rapport avec le public. Leur ministère n'était pas obligatoire. Ils faisaient également le courtage pour les agents de change et de banque. Paris eut huit courtiers, Lyon en eut douze, Rouen et Marseille quatre, Amiens, Dieppe et Calais un, Tours, la Rochelle et Bordeaux deux, Toulouse trois. Leur concours devait être assez recherché,

1. Il en était de même pour les marchandises des forains, mais nous n'avons à nous occuper ici que des marchandises étrangères.

2. Fontanon, I, 1025.

car lorsqu'ils contre-signaient un acte de vente, leur signature emportait hypothèque sur les biens de l'acheteur à partir de l'échéance du terme stipulé et après les sommations légales. L'arrêt du 15 avril 1595 ne se bornait pas à instituer des courtiers; il autorisait les commissionnaires à recevoir et à faire des dépôts d'argent moyennant un intérêt qui ne devait pas être supérieur à l'intérêt légal. En recevant des dépôts, les commissionnaires devenaient jusqu'à un certain point des banquiers; en en faisant, ils tiraient parti du prix des marchandises qu'ils avaient vendues pendant le court délai entre le moment où ils le touchaient et celui où ils le transmettaient à leur commettant1.

Nous avons dit qu'en droit les commerçants étrangers ne pouvaient s'adresser pour faire vendre leurs marchandises en France qu'aux commissionnaires officiels. Nous avons semblé indiquer par là qu'il en était autrement dans la pratique. Telle est en effet notre pensée. L'édit de 1586 défend formellement et sous des peines sévères à d'autres que les commissionnaires qu'il institue, notamment aux commerçants, de vendre pour le compte des commerçants étrangers. La pratique interdite par cet édit était bien tentante et en même temps bien facile à dissimuler pour nos commerçants; même en l'absence de textes formels, il serait permis de croire qu'ils ne se faisaient pas faute de vendre comme pour leur compte des marchandises appartenant à leurs commettants étrangers, d'autant plus que les règlements de leurs corporations ne le leur défendaient pas et qu'il y avait là pour elles une extension fort profitable de leurs affaires. Il n'y avait, à notre connaissance, que les statuts des merciers qui défendissent de faire la commission et le courtage pour les étrangers3. C'eût été là une exception considérable, vu le grand nombre d'articles qu'embrassait le commerce de la mercerie, si cette interdiction

1. Voy. cet arrêt Arch. nat., Rondonneau, série chronologique, à la date. 2. Aussi est défendu à tous marchans ou autres habitans desd. villes de prester leur nom ou marque ausd... forains ny vendre lesd. marchandises par commission sous leur nom ny autrement sur peine de confiscation de marchandises et de 500 escus d'amende à l'encontre de celuy qui l'aura... vendue... par commission. » Fontanon, loc. cit.

3. a... deffendons à tous marchands... estre courtier commissionnaire pour aucun étranger ou forain..... » Ord. de juillet 1601, art. 10, dans Recueil d'ordonn., statuts et règlements du corps de la mercerie, 1767.

4. La mercerie contient en soy six estats sçavoir est 1. Le marchand grossier qui debite en gros toutes sortes de marchandises. 2. Le marchand de

avait été observée, mais Savary nous apprend que de son temps elle ne l'était pas et que les merciers, comme les autres commerçants, acceptaient des commissions de l'étranger1. Ce qui se passait du temps de Savary avait lieu déjà sous Henri IV. Montchrestien, qui écrivait, on le sait, quelques années après la mort de ce prince, nous apprend que les étrangers faisaient faire leurs ventes comme leurs achats en France par des commissionnaires ou des facteurs et déplore l'extension que ce mode de procéder donnait à leur commerce, ainsi que le concours qu'ils trouvaient à cet égard chez nos compatriotes. On comprend en effet que nos commerçants, pour ne parler que d'eux, étaient bien aises de joindre les profits de la commission à ceux de leur commerce personnel..

II. COMMERCE DE TRANSPORT.

Sous ce titre, c'est principalement le commerce de transport maritime qui nous occupera. Nous n'oublions pas que les relations commerciales de la France avec l'étranger ont lieu en grande partie par terre, qu'elle tient au continent par sa frontière orientale et par une partie de sa frontière méridionale, et que sa situation géographique lui permettait de transporter des marchandises par ses cours d'eau et ses routes entre l'Allemagne, les Pays-Bas, la Flandre, l'Espagne, l'Italie. Nous avons vu que le commerce clandestin entre les Provinces-Unies et l'Espagne se faisait par le transit de la France qui faisait passer comme marchandises françaises les marchandises des deux États belligérants; une partie de ce transit s'opérait par terre. Mais en général le commerce étranger évitait de traverser notre territoire à cause de nos douanes intérieures et de l'état fort défectueux de nos voies de communication.

draps d'or, d'argent, de soye, demie ostade, sarges et toilles. 3. Marchands de toutes menues merceries. 4. Marchand jouaillier vendant orfevrerie, pierres précieuses, perles et tous autres joyaux. 5. Marchand quinquallier. 6. Marchand épicier droguier sous lesquels sont comprins ... tous les autres etats cy apres declarez..... » Extrait des ordonnances, articles et reglemens que le Roy veult ... estre... tenus ... par son maistre visiteur et general reformateur de marchandises de grosseries, merceries, jouailleries, etc. 27 août 1607. Collect. Rondonneau, série chronologique, à la date.

1. Le Parfait Négociant, éd. 1777, I, 572-573. Cf. Encyclopédie method. Commerce, v Commissionnaire.

2. P. 43, 48, 54, 74.

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