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Le traité des lois, les lois civiles et le droit public suffiraient pour assurer à J. Domat la première place parmi nos législateurs et nos jurisconsultes; et pourtant ces immenses travaux ne forment qu'une partie de sa gloire. Ce génie, dont il donna tant de preuves dans les vastes compositions qui renferment toutes les matières du droit public et privé, on le retrouve dans des travaux plus modestes, dans les harangues qu'il prononça aux assises, pendant qu'il exerçait la charge d'avocat du Roi au présidial de Clermont. Alliant à la science de l'orateur toute la sévérité d'un magistrat philosophe, Domat est encore le meilleur modèle pour ces discours d'apparat dont la coutume est parvenue jusqu'à nous. Dédaignant toutes ces formes adulatrices, tous ces éloges qu'un jour voit naître et mourir, ses paroles énergiques ne donnaient jamais lieu à une double interprétation; elles étaient pures comme la vérité qui les avait dictées. Fidèle à ses premières doctrines, Domat n'eut jamais la crainte de déplaire au pouvoir; il ne sollicita jamais ses faveurs justice et indépendance, telle était sa devise, comme celle des anciens parlemens qui ne fréquentaient point les maisons des princes ni des seigneurs, et n'allaient point au Louvre s'ils n'étaient mandés par le roi.

C'est à ce mépris des honneurs, à cet amour pour l'étude et la retraite, que nous devons encore à Domat le legum delectus. En publiant un choix des lois romaines, il ne s'est pas proposé seulement de prendre, parmi les lois, celles qui lui ont paru d'une utilité plus générale, mais il a voulu, en retranchant des explications superflues ou de fastidieuses répétitions, réunir d'un coup-d'oeil, par un extrait du digeste et du code, toute la raison du droit civil, adaptée aux lois et aux usages du temps où il

vivait.

Le droit romain, toujours en vigueur dans toutes les dispositions qui n'ont pas été abrogées par les codes qui nous régissent, fait encore aujourd'hui l'objet d'une étude spéciale. Le legum delectus, tel que l'a conçu l'illustre ami de d'Aguesseau, a donc conservé une partie des avantages qu'il offrait jadis. C'est toujours le meilleur tableau synoptique de toute la législation romaine. Son importance relative a seulement perdu quelques charmes par la révolution opérée dans nos lois. Pour lui rendre son utilité première, j'ai dû approprier ce recueil aux besoins de notre époque, et je me suis permis d'appliquer à l'ancien travail d'un grand maître les articles des nouveaux codes. Les nombreuses citations

que j'ai faites serviront de notes explicatives du texte, et indiqueront en même temps les rapports ou les différences du droit romain avec les dispositions du droit français.

Placées ainsi sur la même ligne, pour éclairer la marche du jurisconsulte et de l'étudiant, les deux législations se fortifient l'une par l'autre. Elles guident le magistrat dans la recherche de la vérité, fournissent à l'avocat ses armes les plus sûres, et permettent à l'étudiant de suivre à la lettre les réglemens établis pour les écoles de droit, par l'article 2, § 1o, de la loi du 22 ventose an XII, qui veut que le droit romain soit enseigné dans ses rapports avec le droit français.

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En empruntant aux lois romaines la plus grande partie de leurs dispositions, nos législateurs modernes ont négligé les définitions; nous les retrouvons dans le legum delectus, appuyées par de nombreux exemples. Souvent, pour interpréter nos lois, nous recourons aux motifs développés par les orateurs du conseil d'état; mais ces orateurs ont puisé dans les différens traités de Domat tous les principes et souvent même le texte des lois nouvelles. N'est-il pas juste de revendiquer ici, pour l'illustre auteur des lois civiles, la gloire qui lui appartient? C'est donc pour nous un devoir de combiner la pensée de Domat avec celle des législateurs de notre époque, lorsque nous voulons connaître le véritable esprit de la loi.

A cet égard, les indications que j'ai faites des articles de nos codes à la suite des principes admis par Domat abrégeront de beaucoup les recherches auxquelles on voudra se livrer pour la saine interprétation des questions controversées; en un mot, je n'ai épargné ni veilles ni soins pour que cette édition, en ramenant à nos jours les œuvres complètes de J. Domat, présentât l'historique des variations que, depuis la mort de l'auteur, ont subies nos lois civiles et politiques, et fût digne d'être offerte aux législateurs, aux magistrats, aux membres du barreau et aux écoles de droit.

S'il ne s'agissait que d'annoncer la réimpression des œuvres de Domat, a dit le rédacteur du Moniteur, nous nous serions dispensés d'en rendre compte. La clarté de son style, l'exactitude de sa logique, la pureté de sa doctrine, sa méthode parfaite, ont toujours excité l'admiration des hommes livrés à l'étude des lois, et rendu sa réputation en quelque sorte populaire.

L'illustre chancelier d'Aguesseau, juste appréciateur du mérite, honora les ouvrages de Domat de son suffrage; il fit plus, il en recommanda l'étude à son fils..... On trouve en effet dans ses immortels ouvrages la source et l'origine des textes les plus précis de notre droit public, privé et administratif. Sous ce rapport, ses œuvres offrent un cours complet de législation, où le magistrat, l'avocat et l'administrateur peuvent puiser le véritable sens de la loi, qui n'en est que la substance. Mais Domat ne pouvait pas prévoir les changemens que le temps opérerait dans nos institutions. La régé

neration politique et civile qu'elles ont subie, le nombre infini de lois que la révolution a produites, et à travers lesquelles la sagesse des lois romaines ne jetait plus qu'une clarté douteuse, sans porter atteinte au mérite de Domat, en avaient alors affaibli l'utilité.

Aujourd'hui, un savant et laborieux jurisconsulte, M. J. Remy, a osé entreprendre de rendre à Domat toute la vigueur de la jeunesse, de lier la legislation moderne à l'ancienne, d'expliquer l'une par l'autre, et de faire enfin des traités du jurisconsulte da 16° siècle un ouvrage classique pour le nôtre. Grace à ses soins et à ses recherches immenses, Domat reparaît sur la scène du monde judiciaire, enrichi des lumières de l'expérience de deux siècles....

Le besoin du travail auquel s'est livré M. Remy se faisait partout sentir: c'était un véritable service à rendre à la France; jusqu'ici personne n'avait osé s'en charger. Ce jurisconsulte n'a pas reculé devant cette tâche difficile et honorable; il prend le nom modeste d'éditeur, mais nous ne craignons pas de lui donner le titre de continuateur de Domat.

M. J. Remy, profondément versé dans la science des lois civiles et politiques, a employé ses nombreux matériaux avec un ordre digne de Domat lui-même. Son ouvrage offre le répertoire le plus complet et le plus commode de la législation. Convaincu de son utilité, nous ne doutons pas qu'il ne devienne le manuel, non-seulement des jurisconsultes, des avocats et de tous les gens vonés, par état, à l'étude des lois, mais de tous les hommes jaloux de connaître et d'accomplir leurs devoirs sociaux, j'ai presque dit de tous les Français.....

On voit que l'ouvrage de M. Remy présente, dans un cadre étroit, la série de toutes les dispositions législatives sur un même sujet. En suivant la concordance qu'il a judicieusement établie entre les anciennes et les nouvelles lois, on peut observer sans effort d'esprit les diverses phases de la législation, et en connaître l'historique depuis son origine jusqu'à nos jours (1).

Domat avait compris sous quatre grandes divisions toutes les matières du droit public, a dit le célèbre M. Devaux, député du Cher: les gouvernemens, les fonctions publiques, les crimes et délits, et l'ordre judiciaire. On y trouve tous les grands principes que les gouvernemens libres ont érigés en maximes constitutionnelles, et que nos assemblées nationales ont proclamés. A cet égard, le rapprochement que fait le savant éditeur, M. J. Remy, entre la doctrine de Domat et les divers monumens de notre nouveau droit public est des plus instructifs. Quand Domat caractérise les institutions diverses de la monarchie ou de la république, le jurisconsulte éditeur cite immédiatement la loi nouvelle qui les supprime ou les remplace par d'autres institutions analogues. Le laconique commentateur a donné une immense extension à ses recherches, en indiquant les textes correspondans de tous les publicistes les plus accrédités dans l'Europe civilisée, des lois romaines et des innombrables ordonnances et édits de l'ancienne monarchie.....

Le but de Domat était d'infuser dans toutes les institutions la morale et l'équité; partout il en présente le flambeau au pouvoir pour le diriger dans les matières qui semblent, au premier aperçu, les plus étrangères à ses connaissances et à ses études. En finances, par exemple, nos lois, nos chartes n'ont rien professé de plus clair que sa doctrine sur la contribution proportionnelle et sur la destination de l'impôt pour le bien commun, destination qui seule rend juste l'impôt..... L'éditeur marque les progrès de la législation, et il nous semble qu'il y a une grande instruction à puiser dans cette confé(1) Extrait du Moniteur du 8 janvier 1830.

rence de l'ancien droit, exprimé par un organe aussi pur, et les lois nouvelles qui ont érigé en droit positif les règles de Domat.....

Nous avons entendu plusieurs membres de nos assemblées parlementaires se plaindre de ne pouvoir pénétrer dans les mystères de notre ancien et de notre nouveau droit, et exprimer le désir d'en avoir des idées élémentaires assez nettes pour bien comprendre toutes les difficultés législatives qui leur sont proposées, ou dont ils ont à chercher la solution pour s'éclairer eux-mêmes sur les matières législatives qui, si elles diffèrent dans leurs objets, ont une racine commune. Rien n'est plus propre à les satisfaire que les divers traités de Domat, accompagnés des citations nombreuses qui marquent leurs rapports semblables ou différentiels avec notre nouvelle législation. . ...(1).

Embarrassés dans le choix des divers traités particuliers, a dit le rédacteur de la Gazette de France, nous ne savons comment réunir la législation toute entière et mettre en rapport le droit nouveau avec le droit ancien. Cet enchaînement logique exige de longues et pénibles études; elles n'ont point rebuté l'habile jurisconsulte, éditeur des œuvres complètes de J. Domat. M. J. Remy a eu l'heureuse et persévérante idée de mettre toutes les questions traitées par le jurisconsulte législateur du 16° siècle, en corrélation avec nos lois actuelles. Il a fait marcher, il a ramené les divers ouvrages de Domat à notre siècle. Grace aux travaux de M. J. Remy, nos deux législations sont expliquées l'une par l'autre, et forment aujourd'hui le monument le plus précieux de nos droits et de nos devoirs.... (2).

Peu de livres sont en plus haute estime auprès des jurisconsultes que celui de Domat. Les plus grandes lumières du barreau français se sont plu à rendre une éclatante justice à ce célèbre auteur.....

Après avoir recueilli et coordonné les principes des lois civiles, Domat en fit autant pour ceux du droit public, science si importante, si négligée de nos jours..... Il fut le premier et le dernier qui les mit en ordre, et en fit connaître la nature et les bases. L'ouvrage de Domat est un véritable code national; c'est de son sein, comme d'une source abondante et fertilisante, que toute notre législation est sortie. Il a été le guide et le flambeau de nos législateurs modernes, et on dénombrerait difficilement ce qu'il a improvisé d'hommes d'état, de conseillers, à une époque où l'on voulut faire croire que nos codes étaient l'œuvre de la science improvisée.....

M. J. Remy s'est proposé, non-seulement de nous restituer Domat, dégagé de toute superfluité, mais encore d'établir, si je puis m'exprimer ainsi, la génealogie et la filiation de notre droit public, de nos codes, de nos lois et de nos réglemens d'administration, en plaçant à la suite de chaque question traitée par l'auteur l'indication des articles, des dispositions fondamentales, législatives ou réglementaires qui s'y rapportent, de manière à présenter la corrẻlation ou les différences existantes entre l'ancien droit et le nouveau. Cet immense travail, fruit des plus laborieuses recherches, est complété par la citation des lois, arrêtés, sénatus-consultes, décrets, ordonnances, arrêtés du conseil, décisions judiciaires ou administratives.

Ainsi se trouve établi l'enchaînement du droit romain et du droit actuel dont l'œuvre de Domat a été l'intermédiaire et le principe. Ainsi se trouvent applanis les obstacles qui séparaient les deux législations. M. Remy a réuni en un seul corps trois époques et trois systèmes d'institutions, qui, quoique dérivant l'un de l'autre et ayant toutes les analogies d'une même origine, présentent des différences qui appartiennent au génie des temps..... (3).

(1) Extrait du journal du Commerce du 22 février 1830. (2) Extrait de la Gazette de France du 8 février 1830. (3) Extrait de la Gazette de France du 10 avril 1830.

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