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« a parfaitement justifié ce dicton des Romains: quod non « fecêre barbari, fecêre Barberini. Au reste, les barbares «ont fait peu de mal aux monuments de Rome : l'anarchie <«< du Moyen Age, le mépris des souvenirs antiques et les « idées de la Renaissance, qui ont eu certains rapports << avec les tendances contemporaines, ont été les vérita«<bles barbares. >>

Deux Nouvelles sont venues faire une diversion agréable aux sérieuses méditations, et fournir à notre attention l'aliment plus facile de la littérature légère. M. de Lubac, dans une étude morale intitulée Marcel, nous a représenté un jeune artiste, épris d'un type de suprême beauté, sous les traits de sainte Madeleine, dans un tableau du Louvre, perdant la raison dans un transport d'extase, et allant chercher dans l'autre vie la réalisation de son rêve.

L'autre nouvelle, moins sévère quant à sa donnée, est due à M. Vingtrinier. De Varambon à Paris, ou de la puissance d'une virgule, est un récit très-piquant, où les observations de mœurs et la marche de l'action ne font pas perdre de vue le culte des souvenirs. Ce culte, M. Vingtrinier le professe avec amour et ne manque pas d'y consacrer quelques pages, toutes les fois que les exigences de la narration n'y forment par un obstacle invincible. C'est ce qu'il a fait dans la Nouvelle dont nous avons entendu un chapitre, et qui commence par une description historique du pays bressan, d'où part le héros dont il doit nous retracer les faits et gestes.

« A la sortie des dernières gorges du Jura, dit-il, la rivière « d'Ain reflète, jusqu'à sa chute dans le Rhône, une troupe « de petites villes pittoresques et de vieux châteaux tout << pleins de souvenirs. Le peintre et le romancier font, pen«dant cette dernière course de notre jolie rivière, ample « moisson de notes et de croquis. Devant eux passent suc

«< cessivement, comme dans un panorama magique, Pon«cin, le berceau du chancelier Bolomier, du chimiste

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Serrulaz, de Bichat, non pas le lieu où Bichat vit le jour, <«< car il naquit un peu plus haut, dans la montagne, à Thoi<< rette, pendant un voyage de sa mère, mais l'endroit qu'ha<< bitaient ses parents, où il fut élevé et où se dresse encore <«<le toit paisible qui l'abrita; Poncin, dont la légende de « Saint-Amont, écrite au viie siècle, parle comme d'une << ville déjà antique et connue, Poncin, le plus beau châ<< teau des sires de Thoire et Villars, et où ils faisaient fiè<<rement battre monnaie, comme des souverains indépen«<dants qu'ils étaient; puis Neuville, charmant village, d'où «< la vue s'échappe sur le Bas-Bugey, et dont les jolies mai<< sons se cachent sous l'épais feuillage des grands châtai

gniers et des chênes; Pont-d'Ain, où les princesses de « la maison de Savoie venaient accoucher, tant l'air était «pur et le paysage enchanteur; Richemont, dont les hau«<les tours dominent la contrée; Châtillon-la-Palud, dont « le nom rappelle une des plus nobles et des plus puissan«tes familles de la Bresse; Crans, qui cache dans l'épais<< seur de ses forêts les ruines de l'abbaye de la Chassagne; «St-Maurice-de-Rémens, dont on ne peut fouiller la plaine << sans soulever les ossements des guerriers romains, gau«<lois et sarrazins; Loyes et son château princier; Mexi« mieux, dans le lointain, avec ses maisons artistement « groupées, son château moderne, son petit séminaire, sa « jolie église, ses débris romains et les beaux arbres qui «<le dominent; Chazey, dont la haute tour se dresse sur «<les bords de la rivière d'Ain, comme une sentinelle; <«< Blye et les ruines de son couvent; St-Vulbas, où mouarut Philibert-le-Beau, enterré à Brou; Anthon, enfin, qui <«<< n'est plus de la Bresse ni du Bugey, mais qui se dresse << en plein Dauphiné, au confluent de la rivière d'Ain et du

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Rhône, Anthon qui vit, au xve siècle, les Lyonnais battre << le duc d'Orange, et qui livre encore des antiquités pré« cieuses au zélé et patient explorateur.

Après la littérature, la bibliographie doit trouver ici sa place, comme l'archéologie après l'histoire. En suivant le même ordre, nous commencerons par la philosophie. Cette série de comptes rendus s'ouvre par le Livre de l'Amour, œuvre de J. Michelet, sur lequel M. Saint-Olive vous a présenté un jugement en quelques pages, d'où la pensée dominante du critique se détache avec clarté.

Après avoir relevé un bon nombre de propositions étranges renfermées dans cet ouvrage, il a spécialement insisté sur le danger de mettre ce volume entre les mains des jeunes femmes sans expérience de la vie et dépourvues des conseils d'un mari intelligent, qui pourrait administrer le contre-poison.

« Un époux, quel qu'il soit, dit-il, ne peut que perdre << par ia comparaison faite entre lui et l'être de M. Miche«<let. En outre, l'excuse donnée aux caprices par l'empire <«< de la matière, constitue, suivant moi, une grave énor« mité. Je dirai plus: s'il en est ainsi, les hommes ne doi << vent pas l'avouer, car cet aveu ouvrirait la porte à un « débordement d'infortunes maritales.

« Ce livre me semblerait consacrer la déchéance de la << femme, et si elle y souscrivait, en donnant son adhésion « aux idées de M. Michelet, cette détermination serait « mille fois plus grave que la déchéance de la forme, ac<«< complie aujourd'hui par les modes contemporaines. Le « prôneur de tant d'erreurs décevantes a publié naguère <«< un livre sur l'oiseau, un autre sur l'insecte, et l'on dirait <«< vraiment que la femme vient compléter l'histoire natu«relle des gentilles petites bêtes. Mais j'espère que le sen«<timent de la dignité n'est pas éteint, et que bientôt nous

<< verrons s'organiser une intelligente agitation féminine, << pour protester en faveur de la liberté morale, et contre la << théorie qui prétend subordonner l'esprit à la matière. »

A l'occasion du livre de Jean Bonnet, M. Guillard vous a soumis ensuite une Etude sur la Poésie biblique, d'où il fait sortir des enseignements à l'appui de la vérité chrétienne, en montrant que la supériorité, sous ce point de vue encore, doit appartenir à l'inspiration divine.

Les ouvrages de littérature ont eu ensuite leur tour. M. Hignard, que vous entendez toujours avec empressement, vous a rendu compte de quelques publications nouvelles: Simple Bouquet, recueil de poésies légères, où le style et l'exécution typographique ont rivalisé de séduction pour attacher le lecteur, Une Ouvrière poëte, Essai poétique et Marie et Rose, par Reine Garde, œuvres où le cœur a tant de place, et dont la délicatesse résiste à l'analyse. Nul mieux que notre confrère ne pouvait apprécier et faire goûter ces livres écrits avec des larmes, et nous faire connaître ces femmes obscures chez qui le génie a germé dans les douleurs de la vie positive. Une étude de mœurs a succédé à ces fleurs de la souffrance, écloses dans la mansarde et dans l'atelier. M. Tuja d'Olivier vous a communiqué une lettre écrite sur la Société polie au XVIIe siècle, d'après le Grand Cyrus, de Mlle de Scudéry, remis en lumière par M. Victor Cousin, à qui l'analyse d'un roman frivole, pour appliquer ici l'expression de Boileau, a fourni tant d'intéressantes révélations sur une époque glorieuse et fructueuse de notre histoire. L'aristocratie, l'hôtel de Rambouillet, les batailles de Rocroy, de Lens, les fondateurs de l'Académie, les divertissements des grands seigneurs de ce temps-là, sont tour à tour frappés des rayons d'une clarté nouvelle, dans ce livre où l'un de nos plus grands philosophes s'est contenté d'être un de nos plus grands écrivains. M. Tuja

d'Olivier s'est seulement attaché à nous faire connaitre la société qui se réunissait à Chantilly, dans le salon bleu de la marquise de Rambouillet, chanté par le poëte Sarrazin, dans des vers adressés à la duchesse de Longueville, absente, et un peu empreints du style prétentieux du temps.

Quand l'Aurore, sortant des portes d'Orient,
Fait voir aux Indiens son visage riant,
Que des petits oiseaux les troupes éveillées
Renouvellent leurs chants sous les vertes feuillées,
Que partout le travail commence avec effort,
A Chantilly l'on dort.

Aussi lorsque la nuit étend ses sombres voiles,
Que la lune, brillant au milieu des étoiles,
D'une heure pour le moins a dépassé minuit,
Que le calme a chassé le bruit,

Que dans tout l'univers tout le monde sommeille,
A Chantilly l'on veille.

L'archéologie a encore trouvé une place distinguée dans le domaine des comptes rendus. M. Allmer vous a fait connaître les principales conclusions du Rapport fait à l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, au nom de la Commission des Antiquités de la France, par M. Paulin Paris. Cette communication, indépendamment de son importance pour les points d'histoire qu'elle touche, avait pour vous un intérêt pour ainsi dire personnel, parce qu'elle rappelait à votre réunion les succès de plusieurs membres de notre Société. Vous entendrez peut-être avec plaisir, une seconde fois, la nomenclature de ces lauréats dont les noms figurent sur notre liste. En tête, il faut placer M. Mahul, ancien préfet, proclamé pour un Cartulaire et pour des Archives de l'ancien diocèse de Carcassonne; puis M. Rossignol, conservateur des archives de la Côte-d'Or, pour deux monographies, le Bailliage de Dijon et de l'Oppidium chez les

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