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malgré tous les obstacles. Sachez seulement qu'il était beau et que je l'aimais plus que la prunelle de mes yeux, où son image était perpétuellement empreinte.

» Je lui avais donné mon âme, je m'abandonnai à lui !.......

» Pendant quelque temps tout alla bien; mon mari était satisfait de me voir belle de jeunesse, de fraîcheur et de santé; mon amant m'aimait tous les jours davantage; j'étais heureuse!...

» Hélas! le bonheur n'est pas éternel dans ce monde périssable!

» Il était convenu entre mon amant et moi, que lorsque le rideau d'une certaine fenêtre, qui avait vue sur son jardin, était blanc il pouvait sans danger venir me tenir compagnie, mais que, si ce rideau était rouge, cela voulait dire que mon mari se trouvant à la maison, il s'abstînt de venir chez moi.

>> Un jour donc, après le départ de mon mari, je venais de déployer le rideau blanc, et j'attendais mon amant : j'entends tout à coup frapper à la porte et je vois mon mari entrer, pâle, défait, appuyé sur le bras de l'eunuque !

Pris d'un malaise subit, il avait quitté ses affaires et son magasin et était venu à la maison pour se reposer et se faire soigner. Il avait l'air si malheureux et si effrayé, que prise de pitié, malgré la contrariété qu'il me causait, je me mis à lui prodiguer mes soins.

» Le lit étant prêt, il s'y coucha et s'endormit, en me priant de le laisser seul. Je décidai alors d'aller au bain pour passer mon temps, mais la contrariété où j'étais me fit oublier de ployer le rideau blanc et de déployer le rouge.

» Pendant que j'étais absente, mon amant entra comme de coutume par la terrasse; voyant quelqu'un au lit, et croyant que c'était moi, il s'approcha et m'appelant par mon nom, il voulut me réveiller.

» Mon mari entendant la voix d'un homme dans le harem et reconnaissant son jeune ami, fut d'abord surpris, mais devinant tout son malheur, il sauta sur ses pieds et profitant du moment d'étonnement qui s'empara de mon amant qui, au lieu de me voir sortir de dessous les couvertures, voyait devant lui mon mari, il le saisit, le jeta dans une grande caisse qui se trouvait ouverte et vide à la

tête du lit ', abaissa le couvercle et ferma la caisse à clef.

» Il faut croire que cette excitation, en lui tournant le sang, produisit une réaction salutaire; car ayant appris du jardinier que j'étais allée au bain, il s'habilla à la hâte, sortit de la maison, en ferma la porte à clef et vint m'attendre devant l'entrée du bain.

» Là il arrêtait toutes les femmes qui y entraient et leur disait :

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Dites à ma femme, une telle, de sortir sur l'heure, j'ai besoin d'elle.

» Son air, sa voix et ses gestes étaient

1. Caisse dans laquelle on renferme les matelas, draps, traversins, couvertures, etc., pendant le jour. Dans beaucoup de maisons ce sont des armoires placards qui servent à cet usage.

Les lits en fer ou en bois n'existent pas ou plutôt n'existaient pas en Égypte. Le soir venu, on étend des matelas à terre, au milieu de la chambre, on les couvre des draps de lit, couvertures, etc., on s'y couche. Le jour, ces matelas et tous leurs accessoires sont roulés et enfermés dans des armoires, des caisses ou déposés ainsi roulés dans un coin de la chambre. C'est ainsi qu'il n'y a pas, à proprement parler. dans les maisons orientales, de chambre à coucher telle qu'on en voit en Europe.

empreints de tant de colère et de jalousie, qu'il se rendait ridicule: quelques-unes de ces femmes s'en effrayaient et se sauvaient le prenant pour un fou; d'autres l'excitaient à causer et toutes entraient au bain en riant et en se moquant de lui !

» La première qui prononça mon on nom et fit tout haut la commission de mon mari me fit souvenir du rideau blanc et de ma négligence.

» Les commissions se succédèrent rapidement; bientôt mon mari devint le seul sujet de conversation des femmes réunies dans le bain. Heureusement qu'aucune d'elles ne me connaissait. Je m'imaginais aisément ce qui mettait en fureur mon mari, mais ne sachant pas les détails de l'affaire, je résolus de les connaître tout d'abord.

>> Faisant donc semblant de ne point m'inté resser à ce qui se disait au bain, comme si cela ne me regardait pas, et cachant mon trouble, je sortis dans l'antichambre où je trouvai une pauvre marchande de poischiches.

» — Ma bonne mère, lui dis-je, prête-moi

tes habits et ton panier, pour une demiheure, au plus; garde mes effets ici jusqu'à ce que je te rapporte tes effets et ton panier, ainsi que le prix de son contenu au double !

>>> La vieille consentit sans vouloir en savoir plus long; elle se dépouilla de ses guenilles dont je me revêtis et, ainsi travestie, je sortis dans la rue.

» J'aperçus mon mari qui écumait de rage et maudissait les bains et toutes celles qui y allaient. Je courus à la maison.

>> Dans sa précipitation, mon mari avait oublié la clef de la porte d'entrée dans la

serrure.

» J'entre, je monte dans ma chambre, j'entends des gémissements ! Je savais qu'il n'y avait personne dans la maison; je pris peur et je me disposais à envoyer le jardinier chez mon amant pour me tranquilliser et apprendre de lui ce qui s'était passé !... Mais, surprise! j'entends distinctement ! Je ne me trompe pas !... c'est de dedans la grande caisse que sortent ces gémissements!...

>> Au nom de Dieu clément et miséricor

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