pourrait être fondée sur une raison plus probante que celle qu'il allègue; car son principal argument est la ressemblance de quelquesuns des signes gravés sur les pierres de certains dolmens avec les symboles de monnaies gauloises. Il y a plus de précision et plus d'habitude des procédés scientifiques dans une monographie des haches de pierres composée par M. de Closmadeuc. Ce travail ne concerne que les pièces du musée de Vannes, celles qu'il a été possible et loisible à l'auteur d'examiner à tous les points de vue. Une collection comme celle-là offrait en outre cet autre avantage bien précieux pour l'étude, qu'on sait la provenance des objets. M. de Closmadeuc était certain de n'avoir devant lui que des pièces recueillies dans le département du Morbihan, et, pour plus de sûreté encore, il a éliminé toutes celles à l'égard desquelles il n'avait pas la preuve qu'elles eussent été fournies par les dolmens: Les remarques les plus intéressantes de M. de Closmadeuc sont les suivantes : Sur 186 pièces, 171 sont en pierres étrangères à la Bretagne. Il y en a 133 en fibrolite de l'Auvergne ou du Forez, et 36 en jadéite ou chloromélanite, supposées de provenance asiatique. Le travail de ces dernières est incomparablement plus parfait que celui des autres. Au dire des experts en minéralogie, elles n'ont pu être exécutées qu'à l'aide d'instruments en métal. De ce témoignage M. de Closmadeuc infère très légitimement que le même peuple qui fournissait ces haches aux habitants de nos contrées a dû leur fournir aussi des instruments de métal, et que par conséquent il serait téméraire d'affirmer que le bronze ou même le fer furent inconnus aux hommes dans la sépulture desquels on ne trouve que de la pierre sans métal. Les haches qui proviennent des tombeaux sont toutes neuves. Quand elles y furent déposées, elles n'avaient servi à aucun usage. Quelques-unes, qui se présentent avec des cassures, ont été visiblement abîmées à dessein. Il n'y a pas d'apparence qu'elles aient été jamais emmanchées. Un trou dont un petit nombre sont percées au talon (le musée de Vannes n'en possède que huit qui soient dans ce cas) n'a pu servir qu'à passer une cordelette pour suspendre l'objet. L'hypothèse qu'elles auraient pu être employées comme instruments de sacrifice ne se justifie pas par l'expérience. M. de Closmadeuc a essayé en vain de faire une section anatomique avec la mieux affilée de celles qu'il avait à sa disposition. On lit dans plusieurs ouvrages d'archéologie qu'aujourd'hui encore les Bretons tirent parti des haches de pierre en les entant sur un arbre, dans une branche vive qu'ils coupent après une année révolue. Ce fait, dont la Géographie de Malte-Brun parait être la source, se trouve, après enquête, n'être qu'une assertion erronée. Si quelques campagnards bretons ramassent, pour les conserver, les instruments de ce genre, c'est comme amulettes, comme préservatifs des maléfices et de la foudre; et en cela l'opinion des Bretons ne diffère pas de celle des paysans de tant d'autres contrées de l'Europe et de l'Asie. Le nom même qu'ils donnent à ces objets est le même qu'on retrouve dans toutes les langues : ils les appellent mengurun, qui veut dire « pierres de foudre. » Voilà des propositions d'une grande netteté, et dont la science ne peut que faire son profit. Il est à regretter que le savant qui a traité la question avec cette rigueur de méthode ait cru devoir, par respect pour un usage tout local, conserver à la hache de pierre le nom de celta. A la vérité, il confesse que c'est une mauvaise expression, mais il lui trouve l'avantage d'ètre brève et de n'avoir pas de sens déterminé. Pour brève, elle l'est sans doute, mais elle a un sens très précis, puisqu'elle est le nom d'un peuple et que Cambry, qui l'a le premier introduit dans l'archéologie, ne l'avait adoptée qu'à cause de l'opinion où il était que les Celtes, seuls de tous les anciens peuples, avaient fabriqué des haches de pierre. D'ailleurs la raison ne réprouve-elle pas qu'un mot latin à terminaison plurielle serve à désigner en français un objet que l'on mentionne aussi souvent au singulier qu'au pluriel? En rendant les armes à la routine sur ce point, M. de Closmadeuc me semble avoir usé de trop d'indulgence. RAPPORT AU COMITÉ DES TRAVAUX HISTORIQUES SUR LE BULLETIN DE L'ACADÉMIE DELPHINALE (T. XIV DE LA 30 SÉRIE, ANNÉE 1878, GRENOBLE 1879.) ANTIQUITÉS PREHISTORIQUES (Revue des Sociétés savantes, 1881. Bibliogr., no 180.) L'arrondissement de Montélimar avant l'histoire, tel est le titre un peu ambitieux d'un morceau en forme de discours, composé par M. Florian Vallentin pour sa réception à l'Académie delphinale. Ce travail n'est, à proprement parler, qu'un exposé de la doctrine professée aujourd'hui en matière d'antiquités préhistoriques. La plus grande partie des faits allégués sont ceux que l'on trouve dans les écrits de MM. Chantre et Cartailhac. L'appropriation du sujet à l'arrondissement de Montélimar ne consiste que dans l'énumération d'instruments de pierre qui appartiennent à des curieux du pays, et dans l'indication du lieu de Clansayes comme gisement principal de cette sorte d'objets. Évidemment l'exploration de la contrée au point de vue où s'est placé M. Vallentin n'a pas encore été faite. Il le reconnait luimême, et le but de son discours paraît être d'exciter ses nouveaux confrères à ce genre de recherches. Il voudrait être en mesure de leur présenter bientôt l'inventaire de tout ce que le Dauphiné a conservé de vestiges des anciens âges. Ce dessein n'a rien que de louable, à condition toutefois qu'il ne détournera pas M. Vallentin de l'antiquité romaine, dont l'étude est plus féconde, et qui lui a fourni déjà l'occasion de se distinguer. Nous lui recommanderons aussi, lorsqu'il voudra invoquer la tradition, de faire appel à toute sa critique afin d'éviter le danger que l'on court presque toujours en pareil cas, qui est de prendre pour un écho de l'antiquité un propos qui aura été mis en circulation depuis très peu d'années. Ainsi, par exemple, lorsque les habitants de Clansayes ont raconté à M. Vallentin qu'autour de la Pierre Pertus qu'on voit sur leur territoire, les peuplades du voisinage fai saient anciennement leurs assemblées et que les druides y officiaient, ils n'ont fait que répéter une chose sortie, il y a un demi-siècle tout au plus, de l'imagination d'un membre ou d'un adepte de l'Académie celtique. De semblables explications ne sont pas choses à recueillir pour le profit de la science. RAPPORT AU COMITÉ DES TRAVAUX HISTORIQUES SUR LES MEMOIRES DE LA SOCIÉTÉ D'ÉMULATION DE MONTBÉLIARD (3o SÉRIE, T. II (ire PARTIE), MONTBÉLIARD, 1878.) ANTIQUITÉS PREHISTORIQUES (Revue des Sociétés savantes, 1881. Bibliogr., no 181.) Une notice sur les antiquités préhistoriques des pays de Montbéliard et de Belfort, par M. Tuefferd, occupe la moitié du fascicule. Les résultats apportés par l'auteur ne répondent pas à la peine que ses recherches lui ont coûtée. Il a gravi des hauteurs d'un accès difficile pour en prendre les mesures et en dresser le plan; il a parcouru les villages pour en tirer de la bouche des habitants des informations sans précision ni portée; il a fait des fouilles et trouvé des instruments de pierre, des os humains, des débris d'animaux. Cela prouve que dans ce pays, comme dans toutes les autres parties de la France, et l'on peut dire de l'Europe, les hommes primitifs se postèrent sur les lieux hauts, qu'ils eurent partout le même outillage, et qu'il n'est resté d'eux aucun souvenir dans la mémoire des générations actuelles. Là où il existe des retranchements annonçant le travail de l'homme, les fouilles de M. Tuefferd ne lui ont rien procuré d'où il pût inférer la date de ces ouvrages. La rencontre de débris appartenant à des époques différentes lui a seulement permis de conclure que le même lieu avait servi de refuge à plusieurs reprises. Il en est partout ainsi, et il commence à y avoir bien de l'apparence que l'étude du préhistorique n'en apprendra jamais davantage. C'est un motif pour que le Comité engage les sociétés qui correspondent avec lui à raison des travaux historiques à porter leurs recherches sur des sujets d'où l'histoire puisse espérer de tirer plus de profit. |