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II. ANALYSES D'OUVRAGES.

SCIENCES PHYSIQUES.

APPLICATIONS de géométrie ET DE MÉCANIQUE à la marine, aux ponts et-chaussées, etc., pour faire suite aux DÉVELOPPEMENS DE GÉOMÉTRIE; par CH. DUPIN, membre de l'Institut, Académie des Sciences, etc. (1). TRAITÉ DES PROPRIÉTÉS PROJECTIVES DES FIGURES, ouvrage utile à ceux qui s'occupent des applications de la géométrie descriptive, et d'opérations géométriques sur le terrain ; par J. V. PONCELET, ancien élève de l'école Polytechnique, capitaine au corps du génie (2). Mémoires sur la MÉCANIQUE; par M. DUBUAT, capitaine au corps du génie. Tome 1 (3).

Réunir ces trois ouvrages dans un seul article, c'est annoncer qu'ils seront considérés sous un point de vue trèsgénéral. On s'attachera principalement à ce qui peut faire connaître l'influence des méthodes sur les sciences, et celle des théories mathématiques sur plusieurs arts dont notre état social ne peut se passer: on ne pourra se dispenser de jeter un coup d'œil sur les transformations que l'école Polytechnique a subies depuis sa fondation; de rappeler ce qu'elle dut à l'homme illustre qui en conçut le projet, qui l'anima de

(1) Paris, 1822. Un vol. in-4o avec 17 planches. Bachelier, quai des Augustins. Prix, 15 fr.

(2) Paris, 1822. Un vol. in-4o, 12 planches. Bachelier. Prix, 16 fr. (3) Paris, 1821. Un vol. in-4°, une planche. Firmin Didot, rue Jacob, no 24. Prix, 10 fr.

T. XVIII.—Mai 1823.

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son propre génie, et lui donna cette vigueur de talens, cette grandeur de pensées qui fut long-tems l'orgueil de la France et un sujet d'admiration pour l'Europe.

MM. Dupin et Poncelet sont élèves de l'école Polytechnique. L'un et l'autre, ils ont cultivé les sciences au milieu du tumulte des armes, dans les circonstances les plus difficiles. Tandis que le premier faisait imprimer à Paris ses Développemens de géométrie, et marchant ainsi sur les traces de Monge, entrait dans la carrière qu'il a parcourue avec tant d'éclat, le second, prisonnier en Russie, dénué de tous secours, et souffrant encore plus des maux de sa patrie que des siens propres, rassemblait les premiers matériaux de l'ouvrage qu'il vient de publier. La conduite de nos savans, quel que soit leur âge, ne peut qu'honorer les sciences, et prouverait, s'il le fallait, que la plus haute instruction s'allie très-bien avec toutes les sortes de courage.

Le talent de M. Dubuat est un héritage paternel. Le père, excellent officier du génie et géomètre distingué, avait consacré ses recherches aux progrès de la mécanique; c'est de la même science que le fils s'est occupé. Mais, comme son instruction mathématique a été plus dirigée vers l'analyse que vers la géométrie, la forme de ses raisonnemens porte J'empreinte de ses premières études, et le choix des sujets qu'il traite est analogue à ses méthodes de raisonnement. A quelque page que l'on ouvre les trois ouvrages dont nous parlons, on reconnaîtra, dans les deux premiers, les disciples de Monge le troisième n'appartient à aucune école.

Le Traité des propriétés projectives des figures devait être méthodique, et présenter, dans un ordre facile à saisir, un grand nombre d'idées, de vues et de vérités nouvelles : les deux autres livres sont des recueils de mémoires sur des sujets différens, en sorte que, pour ceux-ci, les difficultés de rédaction se réduisaient à celles d'un mémoire de quelque éten

due. L'entreprise de M. Poncelet exigeait un travail plus long et plus pénible: celles de MM. Dupin et Dubuat laissaient plus de repos à l'esprit, outre que, par la variété des cbjets, elles offraient le délassement de la diversion. Mais les mémoires de M. Dupin sont des applications des plus belles théories mathématiques à des objets d'une utilité générale, ou à des recherches physiques aussi importantes que difficiles. Avant et depuis son entrée à l'Académie, le jeune géomètre s'est identifié avec les mathématiques appliquées, et les travaux dont cette branche de nos connaissances lui est redevable surpassent déjà ce que le plus laborieux de ses devanciers a pu faire dans le cours d'une longue vie. Les occupa tions auxquelles il s'est livré en sortant des écoles, ont dû fortifier de plus en plus son goût pour les connaissances applicables, au lieu que MM. Dubuat et Poncelet, suivant une autre carrière, l'un à l'époque des premiers orages de la révolution, et l'autre, au milieu des revers qui ont mis la France à la disposition de l'Europe, ont passé une grande partie de leur tems loin de tout sujet d'applications mathématiques. Cependant, on remarque entre ces deux officiers du génie, une différence qui tient à l'éducation polytechnique que l'un d'eux a reçue : celui-ci ne perd pas de vue les applications aux arts, puisque tous ses efforts ont pour but de leur procurer de nouvelles ressources : l'autre se livre davantage aux recherches de pure théorie. Ces observations, que l'on pourrait appuyer d'un grand nombre d'autres, parfaitement concordantes, font voir combien il eût été avantageux de laisser à l'école Polytechnique son ancienne organisation. Ces leçons de l'expérience ne seront peut-être pas perdues pour les nations qui ont établi des écoles sur le modèle de la nôtre : ici, les vues sont différentes, et l'ancien édifice démoli peu à peu est menacé de disparaître tôt au tard. M. Dupin, auquel ces remarques ne pouvaient échapper, s'exprime ainsi, dans

l'ouvrage que nous analysons: « Ce qui doit frapper les esprits observateurs, c'est que l'école Polytechnique a cessé de produire des géomètres, depuis qu'elle a quitté la méthode qu'on aurait pu ne croire propre qu'à former de grands ingénieurs. » Cependant, aussi long-tems que cette école subsistera, quelques géomètres en sortiront, parce qu'ils y seront entrés; mais ils ne lui devront rien, et ne seront point modifiés par elle, si la tendance actuelle ne change point.

Entrons dans quelques détails sur chacun des trois volumes que nous avons sous les yeux.

Les Développemens de géométrie de M. Dupin avaient. préparé les méthodes dont l'auteur fait maintenant l'application. Son premier mémoire est une théorie nouvelle de la stabilité des corps flottans, fondée sur les principes de la courbure des surfaces. Bouguer et Euler avaient déjà traité cette question, l'un par une méthode géométrique, et l'autre par l'analyse ; mais en suivant une autre marche que celle de M.Dupin. Entre les résultats remarquables auxquels notre géomètre est conduit, on peut citer ceux-ci : « Tout corps solide flottant sur un fluide, présente au moins deux positions d'équilibre; F'une dont la stabilité est absolue, et l'autre dont l'instabilité est également absolue. Le nombre des positions d'équilibre est toujours pair, et les positions de stabilité sont toujours en même nombre que celles d'instabilité.

L'objet du second mémoire est le tracé des routes isolées, c'est à dire, considérées comme indépendantes de toute relation avec d'autres routes déjà faites. Cette question est beaucoup plus complexe qu'on ne le croirait au premier coup d'œil. L'auteur commence par déterminer la limite des pentes, c'est-à-dire, l'inclinaison de la route par rapport à l'horizon il passe ensuite au tracé graphique d'une route entre deux points donnés, celui de départ, et celui d'arrivée. Il est évident que les considérations géométriques ne suffisent pas

pour conduire, dans tous les cas, à une bonne solution de ce problème : la nature du terrain, des obstacles à éviter, des vues administratives ou militaires, etc., peuvent modifier le projet, en sorte que les résultats déduits de la figure du terrain ne servent qu'à fixer des limites dont il faut se rapprocher autant qu'on le peut. L'auteur passe ensuite à l'examen de: systèmes de routes par lesquels il s'agit de transporter simultanément plusieurs objets, et, faisant l'application de ses principes aux routes militaires, il arrive à cette conséquence intéressante, que les marches et les manœuvres des tacticiens, ainsi que les évolutions navales, sont fondées sur la même théorie que la construction des routes, et que cette partie de l'art de la guerre pourrait être soumise à des règles tout-àfait mathématiques.

Ce mémoire est accompagné de notes qui sont, en quelque sorte, de nouveaux mémoires. La première a pour objet l'emploi le plus avantageux de la force des animaux, dans les transports effectués sur les routes. Dans une autre, M. Dupin fait voir que les routes peu inclinées sont les plus avantageuses : enfin, il établit la limite de la pente des routes dans les travaux civils, ainsi que dans ceux de l'artillerie et du génie militaire. Mais la question des systèmes de routes se reproduit au sujet des déblais et remblais, et un supplément contient la théorie d'une ligne que l'auteur nomme courbe régulatrice des routes.

A ces questions relatives aux travaux publics, succèdent des recherches sur l'optique et sur l'acoustique. C'est à regret que nous renonçons à insérer ici l'analyse de ce mémoire, l'un des plus remarquables que M. Dupin ait publiés. Son but était de ramener aux opérations graphiques de la géométrie descriptive, les questions les plus compliquées de la catoptrique; mais il est conduit en même tems à la découverte de plusieurs lois générales auxquelles les rayons lumineux

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