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de l'île de France, avec l'orthographe du temps.

La langue était encore si peu formée, qu'il serait à désirer qu'on en publiât une traduction, comme on l'a fait des Établissements de saint Louis de l'an 1270, en relevant soigneusement les variantes des manuscrits, dont plusieurs n'ont pas été vérifiées par M. Beugnot, et qui se trouvent à Orléans, à Troyes, à Carpentras, et à Rome en la bibliothèque du Vatican. Il serait curieux de savoir en quoi le dialecte picard, donné par des manuscrits, diffère du dialecte de l'île de France. Quoique Beaumanoir avoue lui-même qu'il ne connaissait bien que les coutumes du Beauvoisis sa patrie, qu'il avait vu pratiquées dès son enfance, il s'étudia à fortifier les bonnes règles qu'il y trouvait, par des exemples tirés des coutumes voisines; mais ce qui indique un esprit supérieur, c'est qu'il voulait établir le droit commun de la France. Ce résultat n'a pu être obtenu que bien des siècles après lui; la rédaction définitive des principales coutumes, en forme législative, n'a été commencée qu'en vertu d'une ordonnance de Charles VII; elle n'était pas ache vée sous Louis XIV, et ce n'est qu'après la révolution de 1789, sous le consulat de Napoléon, qu'on put, en 1801 et 1802, en former le code civil.

A l'époque de Beaumanoir, le droit romain, introduit dans les Gaules d'abord par le code Théodosien,avait succombé dans l'anarchie féodale de la fin du neuvième siècle, quand le territoire français fut partagé en une centaine de principautés, et quand chaque seigneur fut maître dans ses terres. Malgré la puissance du clergé, qui avait emprunté beaucoup aux édits des empereurs chrétiens et aux Capitulaires de Charlemagne, il n'existait presque partout que des coutumes et des usages: Beaumanoir remarque qu'il n'y avait pas au royaume de France «< deus << chastelenies qui de toz cas uzassent d'une << miesme coustume (1). » Les livres de Justinien, récemment découverts en Italie, obtinrent une vogue et une autorité morale qui se fait sentir dans l'ouvrage latin de l'Anglais Bracton et dans les Établissements de saint Louis ; mais les papes, qui avaient déjà décrété des codes ecclésiastiques, donnaient à la juridiction cléricale une autorité plus considérable, due à l'empire de la religion et à l'ignorance barbare des nobles heureusement nos rois formèrent autour d'eux un corps de légistes qui les aidèrent à affranchir les communes, et, par l'établissement d'une justice centrale, à recouvrer peu à peu les prérogatives du pouvoir législatif.

:

Les baillis, milice locale fortement liée au parlement duoi, duquel ils relevaient, et près duquel ils se rendaient plusieurs fois par an, travaillèrent efficacement à limiter la juridiction de l'Église, qui avait usurpé le pouvoir civil et criminel, sous prétexte de l'inviolabilité des

(1) Prologue, p. 14.

sacrements et des personnes ecclésiastiques. Ils profitèrent encore plus de la paresse et du défaut de prévoyance des barons pour attirer par des conflits réitérés la décision des affaires au conseil du prince, et pour les décharger du poids et des ennuis de la justice ordinaire.

On remarque cette double tendance dans l'écrit de Beaumanoir : seulement on est surpris │(et c'est une contradiction manifeste avec sa mission) d'y trouver le conseil donné aux barons, de pendre les bourgeois ou autres, leurs sujets, qui tenteraient de faire des confédérations contre eux (1). Comment sans elles les chartes de commune se seraient-elles formées, à partir des règnes de Louis le Jeune et de Louis le Gros, et auraient-elles déjà donné tant de force au pouvoir royal, dont Beaumanoir se montre d'ailleurs le partisan zélé? Il est vrai qu'il réserve au roi l'approbation de l'érection des communes (2). Mais les rois n'auraient pu les multiplier, si d'abord les habitants de ces communes, en résistant à quelque grande injustice, ne s'étaient confédérés pour en empêcher le retour, et n'avaient payé de fortes sommes aux rois pour obtenir leur protection.

Si du moins Beaumanoir avait donné aux seigneurs le conseil de s'unir aux communes pour défendre leurs priviléges féodaux, incessamment contestés et envahis, en reconnaissant les premiers les droits des citoyens (3), et en leur conférant, comme saint Louis eut l'habileté de le faire en 1256, l'élection annuelle de leurs maires, il aurait mieux mérité de la postérité, en aidant à former, comme en Angleterre, un droit parlementaire.

En France, on a suivi la direction contraire, en ruinant la féodalité par l'alliance de la royauté et des communes. Mais par ce moyen on est arrivé au pouvoir absolu de Louis XIV, et on n'a rien fondé de stable dans les mœurs françaises; on a marché d'innovation en innovation, sans jamais s'arrêter, quand dans un pays voisin on était parvenu de bonne heure à un état de liberté telle, qu'on y trouve cette maxime, sans

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(1) Le passage est trop curieux pour n'être pas cité : : Quand li communs d'une vile ou de plusors viles font « aliance contre lor segneur,... il les doit penre à foree; « et s'il les prent sitot qu'il ni ait encorc riens de fet, << fors que l'aliance,... il doit punir toz les consentans << par longue prisons, et raconbre (mulcter d'amende ) à « sa volonté, selon lor avoir et s'il pot savoir les quie<< retains qui l'aliance porcacèrent; si les fait penre.... «< ce sunt des traistres. (Ch. 30, no 63, I, 430 ).

(2) Ch. 50, n° 2, 11, 264. « Nus ne pot fere vile de com«mune el royaume de Frances, sans l'assentiment du « roy... et se li roi en veue faire aucunes.. Si doit-il être << contenu es chartres des francises qu'il lor dones, sauf « le droit des églises et des chevaliers. »

(3) C'est ce que les barons anglais eurent la sagesse de faire; et c'est ce qui, en 1265, leur donna la force, en appelant les députés des bourgs au parlement, de fonder un gouvernement dont les libertés se sont accrues sans dommage pour l'autorité royale, alors que la grande charte de 1215, dont saint Louis, par sa sentence arbitrale de janvier 4268, avait vainement déclaré le majatien, mais en annulant les statuts d'Oxford.

cesse opposée aux entreprises des rois : Nolu-
mus leges Angliæ mutare.

Sous saint Louis, il est vrai, on parvint à
donner assez de sécurité aux citoyens et de
bien-être à toutes les classes (par une sorte de
pondération des pouvoirs, due au mérite des lé-
gistes et des magistrats de ce temps, appuyés de
l'autorité d'un roi plus grand par ses vertus
que par l'étendue fort limitée de sa prérogative),
pour que dans le siècle suivant on ne cessât
de réclamer les us et coutumes du tems du
bon roy saint Loys.

L'espace nous manque pour faire voir com-
ment Beaumanoir contribua pour sa part, par
l'habileté et la sagesse de ses décisions, et par
le caractère réglementaire qu'il leur donna, à
corriger les abus de la puissance féodale.

C'est en généralisant aussi ses décisions re-
cueillies sous le nom d'Olim, que le parlement
fit entrer le pouvoir royal dans les pays soumis
à l'autorité des barons, et qu'il reconquit peu à
peu le pouvoir législatif. Ce secret d'État re-
monte au treizième siècle.

Beaumanoir proclame (1) que « le roi peut faire
«<tels establissements, comme il lui plaist, pour
le commun profit, et cela d'une manière obli-
gatoire qu'il n'y a si grand baron qui ne
puisse estre trait en la cour du roi, pour de-
« faute de droit (déni de justice) ou pour faux
jugement (mal jugé). Toute laïe ( seigneuriale
<< et non ecclésiastique) du royaume est tenue
<< du roi en fief et arrière-fief (2). >> C'est pour
cela sans doute que la grande ordonnance de
1256, sur les attributions des sénéchaux et des
baillis, est faite pour les provinces de la langue
d'Oc, comme pour celles de la langue d'Oyl. Pour
amener la ruine des guerres privées et du duel ju-
diciaire, que saint Louis n'avait pu interdire que
dans ses domaines (ordonnances de 1257 et
1260), Beaumanoir établit (3) que le roi ou le
comte a droit de s'interposer entre les parties
qui se sont défiées, et que la justice n'a le droit
de poursuivre la punition du méfait, que s'il
n'y avait pas eu combat. Quoique Beaumanoir
reconnaisse à la juridiction ecclésiastique le
droit de prononcer sur les contestations relatives
aux mariages et aux bâtardises, aux testaments
et aux dons faits aux églises et monastères, aux
procès des croisés, à ceux des veuves, aux sor-
celleries (auxquelles il croyait peu (4), et aux
dîmes, il ouvre la porte à l'intervention du par-
lement, et des comtes comme gardiens des égli-
ses. Si la pragmatique sanction de 1268 est
contestée dans un de ses articles, parce que l'o-
riginal n'est pas au trésor des chartes, ni dans
les monuments contemporains, il n'est pas dou-
teux que saint Louis n'ait affranchi son pou-
voir des excommunications, sous lesquelles ont

(1) Ch. 34, n° 41, 11-23.
(2) Ch. 11, n° 12, I, 162,
(3) Ch. 59 et 60.

(4) Ch. 11, n° 25.

tremblé plusieurs de ses prédécesseurs. Il main-
tint les élections canoniques aux évêchés et
aux bénéfices ecclésiastiques, sans l'intervention
du pape; il empêcha les exactions faites au nom
de la cour de Rome. En 1246, les barons de
France avaient fait alliance contre les entreprises
ecclésiastiques, et voulaient que la juridiction
du clergé fût limitée à la connaissance de l'hé-
résie, des usures et des mariages, ce qui était
déjà beaucoup; car Clovis et Charlemagne avaient
fondé les libertés gallicanes, en ne permettant
aux conciles de ne faire aucunes lois sans leur
aveu. Les baillis royaux au treizième siècle, et
Beaumanoir en particulier, s'étudièrent à res-
treindre la juridiction ecclésiastique; fort de
l'appui du parlement, celui-ci admit l'appel contre
les actes de cette juridiction, comme envers la
juridiction laïque (1).

L'œuvre de Beaumanoir est complète en
soixante-dix chapitres. Il est probable qu'il la re-
mania jusqu'à sa mort; et l'on croit que ses succes-
seurs, dont elle devint le manuel, y ajoutèrent
quelquefois. C'est probablement à cette circons-
tance qu'est due la mention de la canonisation de
saint Louis, dans le Prologue (2). Beaumanoir,
y est-il dit, << est grand légiste, canoniste et
coustumier (3). »
ISAMBERT.

-

Montesquieu, Esprit des Lois, XXVIII, ch. 23,27. - Lau-
rière, Sur les Ordonnances du Louvre et les Etablisse-
ments. Duclos, Acad. des Inscrip., XVII, p. 184;
XVIII, 185. Dupin, Add. aux lettres sur la profession
d'avocats, p. 706, 708, cinquième édition. F. Lajard,
1838, dans l'Hist. littér. de l'Institut, 1842, XX, 356.
Ed. La Boulaye, Rov. des Législ., 1840, XI, 467. - Beugnot,
Notice en tête de l'éd. de Beaumanoir de 1840, p. 131.

-

BEAUMANOIR, ancienne maison de la pro-
vince du Maine, dont la filiation n'est bien con-
nue qu'à partir du quinzième siècle. (Les deux
personnages précédents ne paraissent pas appar-
tenir à cette famille). Vers le milieu du quin-
zième siècle, un mariage apporta dans cette
maison la seigneurie de Lavardin, érigée depuis
en marquisat ; et c'est sous le nom de Lavardin
que sont connus les membres de cette famille,
à laquelle appartiennent les deux personnages
suivants.

BEAUMANOIR (Jean LAVARDIN, marquis
DE), maréchal de France, né en 1551, mort à
Paris le 13 novembre 1614. Élevé dans le pro-
testantisme près de Henri IV, il commença
de servir en 1569, et abjura en 1572, après
les massacres de la Saint-Barthélemy, où son
père fut tué. Il servit alors le parti catholi-
que sous le maréchal de Matignon. Mécontent
de ne pas voir ses services récompensés comme
il les appréciait, et menacé d'ailleurs d'être
poursuivi pour assassinat (1574), il retourna

(1) Arrêt du parlemenf de la Toussaint 1264, contre l'é-
vêque de Beauvais. - - Olim, 1, 591. — Beaumanoir, ch. 11,
n° 12; 1, 163.

(2) Le savant Loysel, en 1617, cite cet ouvrage, comme
le premier et le plus hardi livre qui ait été composé sur
les coutumes de France. C'est là, en effet, son caractère
principal.

(3) Loysel, Mém.de Beauvais et de Beauvoisis, VII, 12

auprès du roi de Navarre, qui le nomma colonel de son infanterie. Il assiégea Villefranche en Périgord, s'en empara pendant les pourparlers, et la mit à sac. Il servit Henri IV jusqu'en 1580, et prit part au combat de Marmande, à la prise de Cahors et d'Eause en Armagnac. En 1580, il quitta de nouveau le parti calviniste pour le service de Henri III, et en fut récompensé par le grade de maréchal de camp. Il servit ensuite sous le duc de Joyeuse jusqu'en 1587, et se distingua à la bataille de Coutras, perdue par l'armée catholique; puis il aida le duc de Nevers à soumettre le bas Poitou. En 1589, il passa au service de la Ligue, après l'assassinat de Henri III. Lavardin de Beaumanoir fut des premiers à reconnaître Henri IV, qui le nomma lieutenant général en 1590; gouverneur du Maine, du Perche et de Laval, en 1592; puis maréchal de France le 7 janvier 1595. Enfin il reçut le gouvernement de la Bourgogne et du pays de Bresse après la découverte de la trahison de Biron. Il se trouvait près

de Henri IV, quand ce prince fut assassiné en 1610. En 1611, il fut nommé, sous Louis XIII, ambassadeur extraordinaire en Angleterre, pour y renouveler les anciens traités d'alliance.

De Courcelles, Dictionnaire historique des généraux trançais, t. II.

BEAUMANOIR (marquis pE), littérateur français, né vers 1720 en Bretagne, mort yers 1795. Il suivit d'abord la carrière militaire, fit les campagnes de la guerre de sept ans, et se livra tardivement à la culture des lettres. On a de lui quelques pièces de théatre : Osman III et Laodice, reine de Carthage, les Ressources de l'Esprit, les Mariages, la Justification d'Enguerrand de Marigny, etc., réunies sous le titre d'Euvres diverses; Lausanne (Paris), 1770, 2 vol. in-8°. Le peu de succès qu'ent sa traduction de l'Iliade en vers, Paris, 1681, le fit renoncer à une traduction de l'Odyssée qu'il avait entreprise.

Le Bas, Dictionnaire encyclopédique de la France.

FIN DU QUATRIÈME VOLUME.

de l'île de France, avec l'orthographe du temps.

La langue était encore si peu formée, qu'il serait à désirer qu'on en publiât une traduction, comme on l'a fait des Établissements de saint Louis de l'an 1270, en relevant soigneusement les variantes des manuscrits, dont plusieurs n'ont pas été vérifiées par M. Beugnot, et qui se trouvent à Orléans, à Troyes, à Carpentras, et à Rome en la bibliothèque du Vatican. Il serait curieux de savoir en quoi le dialecte picard, donné par des manuscrits, diffère du dialecte de l'île de France. Quoique Beaumanoir avoue lui-même qu'il ne connaissait bien que les coutumes du Beauvoisis sa patrie, qu'il avait vu pratiquées dès son enfance, il s'étudia à fortifier les bonnes règles qu'il y trouvait, par des exemples tirés des coutumes voisines; mais ce qui indique un esprit supérieur, c'est qu'il voulait établir le droit commun de la France. Ce résultat n'a pu être obtenu que bien des siècles après lui; la rédaction définitive des principales coutumes, en forme législative, n'a été commencée qu'en vertu d'une ordonnance de Charles VII; elle n'était pas ache vée sous Louis XIV, et ce n'est qu'après la révolution de 1789, sous le consulat de Napoléon, qu'on put, en 1801 et 1802, en former le code civil.

A l'époque de Beaumanoir, le droit romain, introduit dans les Gaules d'abord par le code Théodosien,avait succombé dans l'anarchie féodale de la fin du neuvième siècle, quand le territoire français fut partagé en une centaine de principautés, et quand chaque seigneur fut maître dans ses terres. Malgré la puissance du clergé, qui avait emprunté beaucoup aux édits des empereurs chrétiens et aux Capitulaires de Charlemagne, il n'existait presque partout que des coutumes et des usages: Beaumanoir remarque qu'il n'y avait pas au royaume de France « deus << chastelenies qui de toz cas uzassent d'une << miesme coustume (1). » Les livres de Justinien, récemment découverts en Italie, obtinrent une vogue et une autorité morale qui se fait sentir dans l'ouvrage latin de l'Anglais Bracton et dans les Établissements de saint Louis ; mais les papes, qui avaient déjà décrété des codes ecclésiastiques, donnaient à la juridiction cléricale une autorité plus considérable, due à l'empire de la religion et à l'ignorance barbare des nobles heureusement nos rois formèrent autour d'eux un corps de légistes qui les aidèrent à affranchir les communes, et, par l'établissement d'une justice centrale, à recouvrer peu à peu les prérogatives du pouvoir législatif.

Les baillis, milice locale fortement liée au parlement du soi, duquel ils relevaient, et près duquel ils se rendaient plusieurs fois par an, travaillèrent efficacement à limiter la juridiction de l'Église, qui avait usurpé le pouvoir civil et criminel, sous prétexte de l'inviolabilité des

(1) Prologue, p. 14.

sacrements et des personnes ecclésiastiques. Ils profitèrent encore plus de la paresse et du défaut de prévoyance des barons pour attirer par des conflits réitérés la décision des affaires au conseil du prince, et pour les décharger du poids et des ennuis de la justice ordinaire.

On remarque cette double tendance dans l'écrit de Beaumanoir : seulement on est surpris ( et c'est une contradiction manifeste avec sa mission) d'y trouver le conseil donné aux barons, de pendre les bourgeois ou autres, leurs sujets, qui tenteraient de faire des confédérations contre eux (1). Comment sans elles les chartes de commune se seraient-elles formées, à partir des règnes de Louis le Jeune et de Louis le Gros, ét auraient-elles déjà donné tant de force au pouvoir royal, dont Beaumanoir se montre d'ailleurs le partisan zélé? Il est vrai qu'il réserve au roi l'approbation de l'érection des communes (2). Mais les rois n'auraient pu les multiplier, si d'abord les habitants de ces communes, en résistant à quelque grande injustice, ne s'étaient confédérés pour en empêcher le retour, et n'avaient payé de fortes sommes aux rois pour obtenir leur protection.

Si du moins Beaumanoir avait donné aux seigneurs le conseil de s'unir aux communes pour défendre leurs priviléges féodaux, incessamment contestés et envahis, en reconnaissant les premiers les droits des citoyens (3), et en leur conférant, comme saint Louis eut l'habileté de le faire en 1256, l'élection annuelle de leurs maires, il aurait mieux mérité de la postérité, en aidant à former, comme en Angleterre, un droit parlementaire.

En France, on a suivi la direction contraire, en ruinant la féodalité par l'alliance de la royauté et des communes. Mais par ce moyen on est arrivé au pouvoir absolu de Louis XIV, et on n'a rien fondé de stable dans les mœurs françaises; on a marché d'innovation en innovation, sans jamais s'arrêter, quand dans un pays voisin on était parvenu de bonne heure à un état de liberté telle, qu'on y trouve cette maxime, sans

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(1) Le passage est trop curieux pour n'être pas cité : Quand il communs d'une vile ou de plusors viles font « aliance contre lor segneur,... il les doit penre à forec; « et s'il les prent sitot qu'il ni ait encore riens de fet, << fors que l'aliance,... il doit punir toz les consentans « par longue prisons, et raconbre (mulcter d'amende ) à « sa volonté, selon lor avoir et s'il pot savoir les quie<< retains qui l'aliance porcacèrent; si les fait penre.... « ce sunt des traistres. (Ch. 30, no 63, 1, 430).

(2) Ch. 50, n° 2, 11, 264. « Nus ne pot fere vile de com«<mune el royaume de Frances, sans l'assentiment du « roy.., et se li roi en veue faire aucunes.. Si doit-il être << contenu es chartres des francises qu'il lor dones, sauf « le droit des églises et des chevaliers. »

(8) C'est ce que les barons anglais eurent la sagesse de faire; et c'est ce qui, en 1265, leur donna la force, en appelant les députés des bourgs au parlement, de fonder un gouvernement dont les libertés se sont accrues sans dommage pour l'autorité royale, alors que la grande charte de 1215, dont saint Louis, par sa sentence arbitrale de janvier 4268, avait vainement déclaré le majatien, mais en annulant les statuts d'Oxford.

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