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celui de Saint-Haon-le-Châtel, avec des remarques sur les noms de lieu, par M. le docteur Frédéric Nicolas.

Je signalerai enfin, dans la même livraison, un travail assez étrange de M. Félix Michalowski, intitulé La beauté signe de santé. Quelques pensées justes s'y mêlent à beaucoup d'idées paradoxales; il y a aussi bien des passages obscurs, contradictoires. Quelques extraits pris çà et là donneront de la manière de l'auteur une idée plus exacte que ne pourrait le faire une analyse, d'ailleurs impossible, de son travail.

La laideur n'est qu'une déviation, un état morbide réputé congénial, c'est-à-dire de naissance, mais que, le plus souvent peutêtre, on ne gagne que plus tard. J'ai à cœur de montrer que ce mal redoutable, puisqu'il est si redouté, issu de causes endémiques et passagères, ne saurait être indélébile....

En voyant combien les règles d'hygiène les moins difficiles à observer peuvent changer les plus tristes apparences, chez les enfants surtout, et en songeant, d'autre part, combien notre condition matérielle et morale, si misérable autrefois, laisse à désirer encore, on ne peut s'empêcher de croire que les bornes de notre perfectionnement physiologique, loin d'être atteintes ni dépassées (?), ne sont peut-être ni connues ni même soupçonnées....

Tous les mammifères ne doivent se nourrir, dans la première enfance, qu'avec le lait maternel, puisque la nature a pris soin de leur en préparer. Tout autre aliment, ne peut que leur gâter le

sang.

«La vraie cause de la mortalité effrayante qui frappe les enfants est dans l'empiétement d'une digestion sur l'autre....

La beauté du corps, c'est la fleur de la santé, c'est le couronnement de l'édifice vital; mais qui songe à cela? qui règle sa vie sur la maxime salutaire que le sain et le beau c'est la cause et l'effet?»

Je m'arrête. L'auteur regrette que les pratiques de la sélection, qui, dit-il, ont créé de nos jours un art nouveau, une méthode rationnelle, simple et facile, d'assurer au premier venu une force prodigieuse, de lui procurer des muscles puissants et souples, bien dessinés sous une peau fine et ferme, lisse et unie, n'aient encore été, à notre honte, pratiquées que pour former des boxeurs..." Que veut-il done? Heureusement il conclut et termine presque aussitôt par ces paroles qui contrastent singulièrement avec ce qui précède, et que, pour ce motif surtout, je me fais un devoir de citer : « Pour

plaire aux autres et à nous-mêmes, c'est l'àme qu'il faut rendre belle; le charme attractif vient par surcroît. "

PIERRE CLEMENT,

Membre du Comité.

MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE DU GARD.

Novembre 1864; août 1865.

Le volume des Mémoires de l'Académie du Gard dont j'ai à entretenir le Comité est consciencieusement rempli, et les sujets qu'il embrasse sont des plus variés. Fort peu cependant comportent une appréciation motivée. Les discours prononcés en séance publique, les comptes rendus des travaux de la compagnie, les rapports sur les concours y tiennent une grande place; il en est de même des notices ou esquisses biographiques sur ceux de ses membres que la mort a frappés depuis plus ou moins longtemps; la poésie enfin y est largement représentée par un certain nombre de ces pièces justement appelées fugitives, parce qu'elles ne font que passer, genre essentiellement français d'ailleurs, comme la romance, et dans lequel de grands poëtes, Gilbert, Millevoye, Malfilâtre, André Chénier, pour ne pas remonter trop haut, et tout près de nous Jean Reboul, Lamartine, Victor Hugo, Alfred de Musset, ont produit des chefsd'œuvre qui sont dans la mémoire de tous.

On voit par là (je ne parle pas bien entendu des travaux réservés à la section d'archéologie) qu'une très-petite part est faite à celle d'histoire et de philologie. Cependant un travail important, original, sur le Système administratif et financier des travaux publics dans les provinces romaines, nous arrêtera quelques instants. II Y aurait encore à citer, dans le cadre de la littérature, des beaux-arts et des voyages, L'Andalousie, l'art arabe et le peintre Murillo, par M. Salles; Sorrente, par M. Eugène Brun; une étude de M. Albert Meynier sur Phidias et les Grecs; des Observations grammaticales et philologiques de M. Liotard, dont le purisme délicat s'accommode difficilement des audaces de quelques-uns de nos écrivains, et des plus célèbres. Le Comité comprendra qu'à raison de son caractère véritablement scientifique Fétude de M. Maurin sur les grands travaux exécutés dans les provinces romaines ait la préférence. L'Académie du Gard est là véri

tablement dans ses domaines, et il y a tout profit à les parcourir avec un guide aussi instruit et aussi consciencieux que M. Maurin. Aux frais et à l'initiative de qui s'exécutaient les travaux publics dans les provinces romaines, et comment concilier l'exécution de ces entreprises souvent gigantesques avec les perturbations presque incessantes qui désolèrent l'empire à l'époque où elles s'accomplissaient?

Plusieurs hypothèses, dit M. Maurin, se présentent à cet égard : Ou bien la conception de ces travaux émanait du pouvoir central dont les gouverneurs étaient les instruments, et c'est le trésor public qui en faisait les frais;

Ou bien les villes qui devaient en profiter les faisaient exécuter au moyen des revenus municipaux;

Ou bien encore ils étaient dus aux largesses de simples particuliers.

On peut croire enfin que ces trois ordres d'action et de ressources concoururent, mais dans une mesure et des proportions différentes, à l'accomplissement des grands travaux dont nous admirons encore sur quelques points, notamment à Fréjus, à Nimes, à Poitiers, à Trèves, les imposants débris.

Les nombreuses inscriptions lapidaires que l'on possède jusqu'à présent n'expliquent pas, en ce qui concerne les monuments de Nimes, le problème que s'est posé M. Maurin. On a beau les interroger, rien n'indique encore à qui l'on doit les Arènes, la Maison carrée, la tour Magne, les thermes de Nemausus, le temple de Diane. Dans un autre pays, au contraire, à Alcantara, près du Tage, une inscription claire, précise, constate qu'un pont y fut construit par quelques municipes voisins, et à leurs frais. Partant de là, l'auteur conclut justement, par induction, que, sauf dans les circonstances exceptionnelles (par exemple quand un empereur voulait, pour quelque motif particulier, faire acte de générosité envers une ville), les monuments des provinces ayant une destination locale devaient être exécutés aux frais des municipes, et c'est ainsi, dit-il, que les amphithéâtres de Vérone et de Capoue ont dû être construits. Que disent à cet égard les documents historiques et législatifs? Une source d'informations précieuse, la correspondance de Pline le Jeune, proconsul de Bithynie, avec Trajan, établit que les travaux étaient conçus et décidés sans que l'emperour le sût ; souvent même l'exécution en était fort avancée quand il en enten

dait parler pour la première fois. Après avoir énuméré les travaux commencés à Pruse, Pline indique les moyens de pourvoir à la dépense. Que répond Trajan? Si les charges ne sont pas au-dessus des moyens des Prusiens, il faut les laisser faire. Rien n'est plus clair. Une autre fois, ce sont les villes de Nicodémie et de Sinope qui veulent amener l'eau dans leur enceinte; c'est Nicée qui veut remplacer un théâtre et un gymnase dévorés par le feu. Et Trajan de répondre que, si ces villes sont assez riches, il ne faut mettre aucun obstacle à leur entreprise. «Laissez faire, dit-il expressément, si la dépense n'excède pas les ressources. L'argent vient-il à manquer, Trajan recommande à Pline de rechercher s'il n'y a pas incurie ou malversation. Quelquefois encore l'empereur envoie de Rome sur les lieux un architecte, un fontainier, chargés de diriger les travaux et de ménager les fonds que des mains inhabiles gaspilleraient. Mais cette intervention du pouvoir central n'infirme nullement cette assertion de M. Maurin, que la plupart des monuments des provinces romaines étaient l'œuvre de l'initiative municipale.

Interrogeons maintenant le code Théodosien. Une vérité en résulte, c'est que les fonctionnaires municipaux ruinaient les villes par la manie des constructions nouvelles. L'excès fut poussé à un tel point, que ceux d'entre eux qui auraient nui aux cités (qui læserint civitates) par des dépenses exagérées furent condamnés à l'exil, leurs biens confisqués au profit des villes. Dira-t-on que ces lois ne remontent qu'au règne de Constantin? Qu'importe, si elles reproduisent d'anciennes dispositions? et c'est la vérité. M. Maurin fait même remarquer que, dans leur ardeur de construire, les fonctionnaires municipaux de la décadence, rivalisant sur ce point avec les barbares, détruisaient les anciens monuments pour en élever d'autres appropriés aux nouveaux usages, au nouveau culte. Faisaient-ils mieux? Il est permis d'en douter. Dans l'histoire de l'architecture, rien ne doit surprendre. N'a-t-on pas vu le xvi et le xvIII° siècle appliquer à d'admirables églises gothiques des façades de l'ordre dorique ou corinthien?

M. Maurin est ensuite amené à rechercher comment se formait dans les cités romaines le domaine municipal, et il constate que les libéralités privées y contribuaient pour une bonne part. Ce qu'on donne aujourd'hui à des institutions de charité, à des établissements religieux (et l'on sait l'importance croissante de ce dernier article), était alors donné aux villes. En étudiant leur régime municipal, on

acquiert la preuve qu'un temps vint où ce régime avait principalement pour but d'augmenter leurs revenus. Étaient-elles hors d'état de suffire à certaines dépenses jugées urgentes, elles avaient la ressource de l'impôt indirect; mais encore fallait-il (il en est de même aujourd'hui et pour le même motif) qu'il fût approuvé par l'autorité centrale. C'est sous l'influence de ce régime que furent exécutés la plupart des grands travaux. Longtemps, à l'exemple de ce qui se passait à Rome, les premiers magistrats des provinces captèrent les suffrages publics en promettant de faire construire des places, des théâtres, etc. Puis, quand la décadence de l'empire arriva, quand les villes manquèrent de citoyens assez riches pour remplir les magistratures locales, non-seulement les candidats aux fonctions municipales firent défaut, mais il fallut user de rigueur pour en trouver, et, dit M. Maurin, il vint un moment où les fonctionnaires furent nommés par leurs ennemis; de là une curieuse constitution d'Alexandre Sévère, qui permit aux gouverneurs des provinces d'annuler les élections faites dans le but de ruiner les élus.

N'oublions pas de noter, avec le savant secrétaire perpétuel de l'Académie du Gard, qu'il admet la participation des empereurs à la construction des grands travaux dans des circonstances exceptionnelles, par exemple quand il s'agissait de voies de communication traversant des provinces entières ou de reconstruire les monuments d'une ville incendiée. Ainsi on lit dans les Annales de Tacite que l'empereur Claude donna vingt millions de sesterces aux habitants de Bologne, et Néron le cinquième de cette somme à ceux de Lyon, pour relever leurs villes tombant en ruines. Il est prouvé, en outre, que l'empereur Adrien dota Nimes d'une basilique qualifiée d'admirable (opus mirabile) par son biographe Spartien, et qui fut consacrée à Plotine, épouse de Trajan. Un autre point très-intéressant à relever, c'est que les légions romaines paraissent avoir été employées exceptionnellement aux travaux publics des provinces.

En terminant son excellent travail, M. Maurin arrive à des conclusions qu'il formule à peu près en ces termes :

La plupart et les plus considérables des monuments publics des provinces romaines ont été construits avec les ressources municipales. Le secours des empereurs s'est borné à des subventions et à faire travailler les légions à ces travaux.

Des particuliers y ont contribué, soit par esprit de générosité, soit par intérêt personnel, mais dans une part fort restreinte.

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