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ans dans son cours, et l'on finissait par cette transaction, deux fois offerte par Louis XIV (il faut le proclamer à son honneur), deux fois rejetée par la Grande-Alliance. « Après une guerre de quatorze ans, dit Villars lui-même, pendant laquelle l'Empereur et le roi de France avoient été près de quitter leur capitale, et l'Espagne avoit vu deux rois rivaux dans Madrid, une guerre dont toute l'Europe, excepté la Suisse, avoit ressenti les horreurs, nous nous remettions précisément au même point d'où on étoit parti en commençant'. » Nulle guerre n'a plus montré la vanité de la guerre! Quand donc viendra le jour où ceux qui gouvernent les États seront plus avares de la vie des hommes, et quand donc les peuples ne prendront-ils les armes que pour défendre leurs libertés ou leur honneur!

1 Mémoires de Villars, p. 228.

CHAPITRE XV

Querelles du jansénisme.

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bulle. Persécutions et décrets contre les religieuses des Champs.Procès entre Port-Royal des Champs et Port-Royal de Paris. — Tentatives de conciliation faites par le cardinal de Noailles. Plaidoiries passionnées devant l'officialité de Paris. Condamnation des religieuses des Champs. — Bulle terrible du pape contre Port-Royal des Champs, confiée à la discrétior de M. de Noailles. Rivalité du cardinal de Noailles et du P. Letellier. bulle, et force le cardinal à la publier.

des Champs.

lice.

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Il presse l'exécution de la

Suppression de Port-Royal

Enlèvement des religieuses par le lieutenant de po

- Désespoir des sœurs. Touchants adieux des pauvres. Fermeture et démolition du monastère. Destruction de l'église. Exhumation des morts. Ivresse des fossoyeurs. Scènes sacriTranslation des corps à Saint-Lambert. - Tempête sou

léges.

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Soulèvement de l'opinion en faveur de Chanson. Satires. Pamphlets. Gravures. Conséquences de la destruction de Port-Royal.

Au moment où s'ouvre la lutte suprême dans laquelle doivent si tristement succomber les pauvres religieuses de Port-Royal des Champs, elles sont seules et délaissées; elles ont perdu leurs protecteurs à la cour: Arnauld d'Andilly, son fils Arnauld de Pomponne, la princesse de Conti et cette belle duchesse de Longueville, si constamment et si tendrement dévouée. A leur porte, la maison des Granges est fermée et vide. La mort a emporté tous les soli

taires Lemaistre et Sacy, Desmares et Singlin, Lancelot et Dufossé, Nicole et Tillemont; le grand Arnauld repose dans une église de Bruxelles, Pascal à Saint-Etienne-du-Mont, Racine sous les voûtes mêmes de Port-Royal. Les pauvres religieuses ont cruellement ressenti le contre-coup de tant de pertes. Dès 1679, l'archevêque de Harlay a frappé Port-Royal au cœur en lui défendant de recevoir des novices, « rendant ainsi stérile, suivant l'éloquente parole d'un janséniste, une virginité qui avait été si féconde. » Pendant trente années, malgré leurs supplications, l'archevêché de Paris a maintenu cette défense 1, et les religieuses sont alors réduites à vingt-deux, toutes malades et infirmes, et dont la plus jeune a cinquante ans. Un danger plus imminent les menace. Séparée de l'abbaye-mère 2, rangée depuis lors dans le parti orthodoxe et gouvernée par des abbesses mondaines ou prodigues qui ont dissipé sa fortune, la maison de Port-Royal de Paris réclame les biens de son ancienne métropole, à la condition de payer une pension aux religieuses qui restent. A trois reprises différentes les sœurs de Paris ont adressé au roi une requête où elles représentent que les religieuses des Champs jouissent du superflu, et qu'elles manquent du nécessaire; elles insinuent en même temps qu'elles sont rentrées dans le sein de l'Eglise, tandis que leurs rivales persévèrent dans l'hérésie, et demandent la suppression

1 Louis XIV la renouvela ensuite par un arrêt du Conseil du 17 avril 1706.

* Depuis 1669. Voy. le chapitre xv du t. II.

de l'abbaye des Champs et l'attribution de tous ses biens'. Cédant à leurs obsessions, Louis XIV renvoya l'affaire devant l'officialité de Paris, tribunal ecclésiastique qui s'assemblait sous la présidence de l'archevêque.

L'archevêque de Paris était alors le cardinal de Noailles 2, de l'ancienne maison de ce nom, et l'un des plus éminents prélats du règne. Il était pieux, éclairé, savant, aimé de la cour et chéri du peuple, pour lequel il montrait la tendre sollicitude du bon pasteur. Dans la famine de 1709, il avait vendu son argenterie et nourri seul deux mille pauvres. Il dépensait en aumônes son patrimoine et l'immense revenu de son évêché; tel était son désintéressement que l'on ne trouva à sa mort que cinq cents livres. Par la nature de son esprit, la rigidité de ses opinions et de ses mœurs, le cardinal inclinait peut-être à son insu vers le jansénisme 3; mais, comme un chrétien

1 D. Clémencet, Histoire générale de Port-Royal, t. IX, p. 148.-Histoire abrégée de Port-Royal, p. 37.

2 a Il brilloit, dit Saint-Simon, avec les mœurs d'un ange, une sollicitude pastorale douce, appliquée, instructive, pleine des plus grands exemples, et une désoccupation totale de tout ce qui n'étoit pas de son ministère. »Voy. Saint-Simon, t. XIII, p. 149.-« J'ai toujours craint votre austérité, lui écrit madame de Maintenon; je vous avertis que je vous croirai janséniste si vous n'avez plus soin de vous. Il n'y a qu'un hérétique qui puisse être homicide de soi-même. » Lettre de madame de Maintenon, édition Auger, t. III, p. 58.

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* Madame de Maintenon résume en ces termes l'opinion du clergé sur le cardinal de Noailles: M. le cardinal n'est point janséniste, mais il les ménage; M. le cardinal n'est point janséniste, mais il est obsédé par eux; M. le cardinal n'est point janséniste dans le fond, mais son inclination est pour la cabale; M. le cardinal n'est point janséniste, mais ils se parent de lui, quoique dans le cœur ils en soient très-mécontents. » Voy. Edition Auger, t. III, p. 77-78.

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