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qu'avait voulu reproduire la réforme, les évêques étaient élus par le peuple: « que le peuple des Etats-Unis com« mence, disait-il, par en faire autant. » Après cela il soutenait, contrairement à Franklin, que l'imposition des mains par quelque évêque, n'en était pas moins une cérémonie essentielle, et il tenta de faire rendre par les deux chambres un bill qui eût autorisé les évêques anglais à sacrer les évêques de royaumes ou états étrangers, sans exiger d'eux la prestation du serment ou la souscription de l'acte d'uniformité. Tout ce qu'il obtint fut la permission à l'évêque de Londres de sacrer des doyens et recteurs; Granville revint à la charge, réfuta les allégations de lord Thurlow, grand partisan du système qui eût laissé les églises angloaméricaines sans évêques, et fit si bien que l'archevêque de Canterbury fut autorisé par les deux chambres et se détermina lui-même à donner la consécration à deux évêques. Le succès de l'intervention de Granville charma les adhérents de l'église établie; et la veuve du général Oglethorp, pour lui en témoigner sa reconnaissance, lui abandonna la possession d'un domaine qu'elle avait dans le comté d'Essex. C'est encore à Granville Sharp que l'humanité est redevable de la première idée d'une colonie qui a long-temps offert des symptômes de prospérité, en même temps que le modèle du régime philanthropique. Il s'agit de la colonie de Sierra Leone en Afrique, sur la côte de ce nom (derrière la baie Saint-Georges), 1787. Elle fut fondée par une compagnie dite Société de Sierra Leone, dont il eut le premier la présidence, mais dont enfin il fut obligé de résilier la direction. En 1787 aussi se forma une société pour l'abolition de la traite, société qu'il provoquait depuis longtemps et dont la création lui sembla la

en

plus belle récompense de sa persévérance. Dès lors son œuvre était impérissable. Une association de notabilités prenait son idée sous son patronage, l'adoptait, la déclarait sienne. Les obstacles devaient tomber les uns et les autres devant ce faisceau d'intelligences élevées et de volontés fortes; c'est ce qui bientôt eut lieu. Pitt, qui promit son concours à l'association, devint, il est vrai, irrésolu et tiède, sitôt qu'il s'agit de porter des coups décisifs, et de saper la traite par sa base. Mais, 1807, Fox se prononça si hautement en faveur des idées de Granville, que les deux chambres votèrent l'abolition de l'esclavage. Un mois plus tard sortait du néant l'Institut africain, dont le but était de préciser et de vulgariser les notions sur l'agriculture, l'industrie, le commerce, les mœurs l'état social et politique des diverses nations de l'Afrique, afin d'agir sur elle et de les civiliser en les améliorant. Granville Sharp mourut le 6 juin 1813, toujours vaquant à la noble tâche qu'il avait choisie, comblé de gloire comme le premier qui ait voulu fortement l'émancipation des races esclaves, et heureux d'avoir assez avancé leur délivrance pour qu'on ne doutàt point du plein succès de ses doctrines dans un prochain avenir. A ces titres il a droit d'être rangé parmi les plus beaux caractères qui aient honoré l'espèce humaine et parmi les bienfaiteurs de l'humanité. On lui doit divers opuscules, tels qu'un Traité sur le duel, une Démonstration du droit naturel qu'a le peuple de participer à la confection des lois, un Plan pour l'abolition générale de l'esclavage dans les colonies, une Introduction à la musique vocale, etc. Il était fort bon musicien, exécutait sur plusieurs instruments à vent, et inventa une espèce de harpe. Il dessinait aussi très-bien et improvisait la caricature;

que

mais telle que la peut faire un philanthrope, fort inoffensive et ne frappant P-OT. de main-morte. GRAPPE (PIERRE-JOSEPH), jurisconsulte, né en 1755 à Trebief près de Salins, acheva ses études à l'université de Besançon, où il succéda, en 1790, au savant professeur Seguin (Voy. ce nom, XLI, 473), dans la chaire de droit romain. A la rentrée des cours, en 1792, il prononça sur les lois pénales un discours dans lequel il s'attacha surtout à démontrer que leur adoucissement ne pouvait qu'avoir une in fluence salutaire sur les mœurs. L'un des conseils du malheureux Dietrick, lé maire de Strasbourg, qui venait d'être renvoyé devant le tribunal criminel du département du Doubs, sous la prévention de manœuvres contre-révolutionnaires, il parvint à faire prononcer son acquittement. Ce triomphe ne fit qu'accroître la haine que lui portaient déjà les démagogues; et, forcé de céder à l'orage, il se retira dans les montagnes du Jura; mais, inscrit sur la liste des suspects, il fut enfermé dans les cachots de la terreur, avec Louvot, son ami, et ne revint à Besançon qu'après la chute de Robespierre. Il concourut à la rédaction du journal Le 9 thermidor (Voy. COUCHERY, LXI, 458); et plus tard fit partie de la nouvelle administration, composée entièrement d'hommes qui réunissaient à des lumières une grande modération. Il était président du district de Besançon lorsqu'il fut député par le département du Doubs au conseil des CinqCents, en l'an V (mai 1797). On ne peut douter qu'il ne fût un des membres du nouveau tiers qui se proposaient de mettre un terme à la révolu tion, en rapportant les décrets rendus dans les temps d'anarchie. Mais, quoiqu'il fût lié très-intimement avec plusieurs d'entre eux, notamment avec le général Pichegru, il échappa cepen

dant aux proscriptions de fructidor, et son élection fut maintenue. Grappe paraissait très-rarement à la tribune ; mais il travaillait dans les commissions où ses profondes connaissances en droit étaient très-utiles. Après le 18 bru maire, il passa au corps législatif dont il fut élu l'un des secrétaires. Il en sortit en 1804, et, s'étant fait inscrire au tableau des avocats de Paris, il fut bientôt l'un des jurisconsultes le plus employés pour la consultation. A la réorganisation des facultés de droit, Fontanes, alors grand-maître de l'Université, le plaça sur la liste des professeurs de l'école de Paris; mais Napoléon, qui n'avait point oublié les liaisons de Grappe avec Pichegru, raya lui-même son nom. Ce ne fut qu'en 1819, lorsque l'affluence croissante des élèves nécessita la création de nouvelles chaires, que M. Royer-Collard le fit nommer professeur de code civil. Peu de temps après il reçut la décoration de la Légion-d'Honneur. Grappe mourut le 13 juin 1825, à 70 ans, laissant la réputation d'un homme intègre, plein de candeur, de désintéressement, et d'un savant jurisconsulte. Ses élèves, qui le considéraient comme un père, voulurent porter eux-mêmes ses restes au cimetière de Vaugirard; et là, une souscription fut spontanément ouverte pour lui ériger un monument. On a de Grappe des Consultations qui sont regardées comme autant de traités complets sur la matière. Merlin en a inséré une dans ses Questions de droit, au mot Subrogation, et c'est ce que nous avons de mieux sur ce sujet. Grappe se proposait de publier un Cours complet de code civil; il en avait recueilli les matériaux; et l'on doit regretter que le temps lui ait manqué pour accomplir ce projet. W-s.

GRAPPIN (Pierre-PhilippE), le dernier bénédictin de la congrégation de Saint-Vannes, naquit le 1er

férier 1738, à Ainvelle-les-Conflans, bailliage de Vesoul, d'une famille honorable de la bourgeoisie. A dix-huit ans il embrassa la vie religieuse à Luxeuil, et dès qu'il eut terminé son noviciat il y commença, sous la direction de dom Berthod (Voy, ce nom, IV, 356), l'étude de l'histoire et de la diplomatique. Quelques années après il fut envoyé par ses supérieurs à Faverney; il mit en ordre les archives de cette abbaye, et il en composa l'histoire sur les pièces qu'il avait à sa disposition. A cette époque l'académie de Besançon, nouvellement instituée, s'occupait de rassembler des matériaux sur l'histoire de la province; elle mit au concours, pour l'année 1770, l'his toire d'une ville ou d'une abbaye du comté de Bourgogne. Dom Grappin lui adressa deux volumineux Mémoires sur les abbayes de Luxeuil et de Faverney. Le premier remporta le prix et le second eut l'accessit. Ce brillant début fixa sur le jeune religieux l'attention de ses supérieurs; et, pour le mettre à même de cultiver ses talents, ils le nommèrent professeur au collège que l'ordre possédait près de Besançon. Les nouveaux devoirs que lui imposait cette place ne l'empêchèrent pas de rentrer bientôt dans la lice académique; et deux nouvelles couronnes lui furent décernées, en 1774, pour de savantes Recherches sur les anciennes monnaies du comté de Bourgogne, et en 1778 pour une Dissertation sur l'origine des droits de main-morte. Depuis plusieurs années, il travaillait avec dom Berthod, son premier mai tre devenu son ami, à dresser l'inventaire des archives publiques et particulières de la province, et à copier les documents les plus importants pour les envoyer au dépôt général des chartes dont le ministre Bertin (Voy. ce nom, LVIII, 138) avait eu l'heureuse idée. Le départ de dom Berthod en

1784 pour Bruxelles, où il était appelé pour coopérer à la continuation de l'œuvre des Bollandistes, laissa dom Grappin seul chargé de terminer le dépouillement des archives; et le zèle avec lequel il s'acquitta de cette tâche lui mérita de fréquentes marques d'approbation du ministre. Admis à l'académie de Besançon en remplacement de dom Berthod, il y lut successivement plusieurs morceaux intéressants, entre autres une Dissertation dans laquelle il essaie de prouver que le cardinal de Granvelle n'a point eu de part aux troubles des Pays-Bas. La lecture des Mémoires de Granvelle conservés à la bibliothèque de Besançon lui en avait fait apprécier toute l'importance; et le premier il conçut l'idée de les publier (1). Il fit part de son projet à M. Bertin; mais le moment était peu favorable aux publications historiques. C'était celui où l'assemblée des notables du royaume venait de se déclarer inhabile à trouver les moyens de combler le déficit. On parlait de convoquer les états-généraux, et le ministère, encore indécis sur l'opportunité de cette grande mesure, fit demander à dom Grappin un mémoire sur la composition des anciens états de Franche-Comté. Le garde-des-sceaux, satisfait de ce premier travail, le chargea de rédiger et de répandre dans la province différents écrits propres à préparer l'opinion publique aux changements qu'il devenait nécessaire d'introduire dans la répartition de l'impôt, et que les ordres privilégiés repoussaient avec un aveuglement déplorable. C'est ainsi que dom Grappin se trouva naturellement conduit à s'occuper de questions restées jusqu'alors étrangères à ses goûts comme au genre de ses études. Ne voyant dans la révolution que la ré

(1) La publication des Mémoires de Granvelle vient d'être entreprise sous les auspices du

gouvernement. Le premier volume est sous presse à l'imprimerie royale (nov. 1838), 15 ́

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forme des abus, il en adopta les principes, sans en prévoir les conséquences; et ce ne fut pas sans un vif regret qu'il se vit forcé de quitter le religieux asile où il avait passé tant d'années paisibles au milieu de ses livres. Ayant prêté le serment exigé des ecclésiastiques, il fut nommé vicaire métropolitain; mais il ne prit aucune part à l'administration du diocèse. Bientôt, effrayé de la marche des évènements, il donna sa démission pour se retirer dans sa famille au pied des Vosges; mais avant de s'éloigner de Besançon il publia, sous le voile de l'anonyme, une dernière brochure intitulée Les Prêtres, dans laquelle il protesta de toutes ses forces contre les absurdes reproches adressés au clergé par ses antagonistes. Député en 1797, par les prêtres constitutionnels du département de la Haute-Saône, à l'assemblée qui prit le titre de concile national, il en fut élu l'un des secrétaires, et fut continué dans les mêmes fonctions au concile de 1801. C'est dans ces assemblées qu'il connut l'abbé Grégoire et les autres chefs de l'église constitutionnelle de France, avec lesquels il entretint dès-lors une correspondance fort active. A la suite du concordat de 1802, M. Lecoz, ayant été nommé archevêque de Besançon, s'empressa de désigner dom Grappin l'un de ses vicaires-généraux, et se reposa en partie sur lui de la réorganisation du diocèse. Quoique très-occupé par les détails d'une administration que les circonstances rendaient encore plus épi neuse, il continuait de donner une partie de son temps à la culture des lettres. Il profita de son crédit sur quelques personnes influentes pour provoquer le rétablissement de l'ancienne académie qui l'élut son secrétaire perpétuel; et, malgré son grand âge, il remplit les fonctions de cette place avec une remarquable activité. La mort

subite de Lecoz, en 1815, changea la position de dom Grappin. Il dut quitter l'archevêché pour aller occuper un modeste appartement où il reprit sa vie d'études. Une chute qu'il fit peu de temps après ne lui permit plus que rarement de sortir de sa chambre. Il avait précédemment abdiqué la place de secrétaire de l'académie ; mais il n'en continuait pas moins de prendre un vif intérêt à ses travaux. La lecture, la rédaction de divers articles qu'il fournissait aux journaux et sa correspondance remplissaient tous ses moments. Il ne connut jamais l'ennui de la solitude. Doué d'une grande vigueur de tête et d'une force d'âme peu commune, il acheva paisiblement sa longue carrière, et mourut ou plutôt s'éteignit, sans maladie, le 20 nov. 1833, dans sa 96° année. Le matin même il avait composé une pièce de vers adressée à un de ses jeunes compatriotes, pour l'encourager à l'étude. Membre d'un grand nombre d'académies et de sociétés littéraires, il avait compté au nombre de ses amis plusieurs hommes distingués, entre autres dom Clément, le savant auteur de l'Art de vérifier les dates, le baron de Zurlauben, l'abbé Grandidier, etc. Outre une foule d'articles dans le Journal ecclésiastique de l'abbé Dinouart, dans les Affiches de Franche-Comté, dans les recueils de l'Eglise constitutionnelle, etc., on a de lui : I. Exɑmen religieux de l'examen philosophique de la règle de Saint Benoît (par D. Cajot), 1748, in-8°. II. Mémoires sur l'abbaye de Faverney Besançon, 1771, in-8°. III. Abrégé de l'histoire du comté de Bourgogne, Avignon (Vesoul), 1773, in-12; 2° édit. augmentée, Besançon, 1780, in-12. IV. De l'origine des droits de main-morte dans le comté de Bourgogne, 1778, in-8°. V. Recherches sur les anciennes monnaies

du comté de Bourgogne, 1782, in-8°. VI. Almanach historique, de Besançon et de la Franche-Comté, 1785, in-8°; suppl., 1786. VII. Éloge historique de Jean Jouffroy, cardinal d'Alby, 1785, in-8°. VIII. Mémoire où l'on essaie de prouver que le cardinal de Granvelle n'eut point de part aux troubles des PaysBas, 1788, in-8°. IX. Mémoire sur les guerres du comté de Bourgogne au XVIe siècle, 1788, in-8°. X. Des Eloges de l'abbé Grandidier, de dom Berthod, de Toulongeon, etc. Parmi ses ouvrages manuscrits, on distingue l'Histoire de l'abbaye de Luxeuil, celle de l'abbaye de St-Paul de Besançon: et la Vie de Lecoz, avec les pièces justificatives, gr. in-4°. Une Notice sur dom Grappin a été imprimée dans le recueil de l'académie de Besançon.

W-s. GRASER (JEAN-BAPTISTE), savant ecclésiastique italien, naquit à Roveredo dans le Tyrol, en 1718. Dès ses premières études, il parvint de lui-même à comprendre les dé monstrations géométriques d'Euclide. Quand il eut été fait prêtre, il s'adonna particulièrement à la littérature, et fut choisi parmi ses concitoyens, en 1748, pour enseigner la rhétorique dans leur collège public. On le vit ensuite professer la philosophie et la théologie. L'académie des Agiati de cette ville se fit un devoir de se l'agréger. L'abbé Jérôme Tartarotti, mort en 1761, lui avait laissé, avec tous ses manuscrits, un legs considérable, à la charge de terminer ceux de ses ouvrages qui restaient imparfaits mais Graser fut détourné de ce travail, soit par d'autres occupa tions, soit par une respectueuse défiance. Il se borna à faire une oraison funèbre de ce savant, ainsi que des poésies en son honneur, et les publia avec des mémoires sur sa vie. La ré

putation qu'il avait acquise le fit appeler à Inspruck par le conseiller de Sperges, pour y être conservateur de la bibliothèque dite Teresiana, et professeur de morale. Ces fonctions l'attachèrent tellement à ce pays, qu'il refusa la chaire de droit-canon en l'université de Pavie, que lui offrait le comte de Firmian. Il remplit successivement, à Inspruck, les chaires d'histoire universelle et de patrilogie, c'està-dire, de la doctrine des saints Pères, et y fut grand-recteur de l'université. Ses travaux affaiblirent sa santé; il revint à Rovedero, où il termina sa carrière en 1786. Quoique son cœur fût bon et sensible, il avait le caractère brusque; et, dans sa gaîté, il se permettait souvent des traits satiriques et mordants. On le comparait à Esope, avec lequel il avait d'ailleurs quelque ressemblance corporelle. Il composait une ode, une élégie, une satire, avec autant de promptitude et de facilité, qu'un secrétaire habile écrit ce qu'on lui dicte. Cependant le genre dans lequel il excella est l'éloquence. L'impératrice Marie-Thérèse et le pape Pie VI l'honorèrent de leur bienveillance. Beaucoup de savants d'Italie lui dédièrent leurs ouvrages. Les principaux de ceux qu'il a laissés sont : I. De philosophic moralis ad jurisprudentiam necessitate. II. De historici studii amanitate. III. De præsbyterio et in eo sedendi jure, dédié au cardinal Garampi. G-N.

GRASLIN (LOUIS - FRANÇOIS de), économiste et financier peu connu, mais bien digne de l'être, vit le jour à Tours en 1727. Il fit ses études au collège de Juilly avec une grande distinction et fut reçu avocat au parlement. Il avait à peine trente ans lorsqu'il obtint la charge considérable de receveur-général des fermes à Nantes. Peut-être dut-il à sa résidence dans cette ville, l'un des plus importants

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