LES FONCTIONS DU REIN (1)

Parmi nos organes, il en est dont nous pouvons aisément nous passer. Peut-être même en est-il qui nous exposent à plus de dangers qu'il ne nous procurent d'avantages témoin l'appendice, dont les chirurgiens nous débarassent avec la facilité que

Vous savez.

Il en est d'autres, plus importants par leur volume et dont on ne peut dire qu'ils soient inutiles, car on leur connaît des fonctions, mais dont l'extirpation totale est cependant parfaitement compatible non seulement avec la vie, mais avec la santé. Telle est, par exemple, la rate: l'homme peut très bien vivre dératé. Tel est encore l'estomac, dont on peut à la rigueur se passer, comme en font foi certaines expériences sur les animaux.

Par contre, il est des organes essentiels, indispensables à l'existence. On ne peut vivre je parle de l'homme et des animaux supérieurs sans poumons, sans cœur, sans foie, sans cerveau. On ne peut non plus vivre sans reins. La suppression brusque et complète des fonctions rénales entraîne la mort au bout de huit à dix jours chez l'homme, par suite d'un empoisonnement général qu'on appelle l'urémie. Heureusement nous avons deux reins. Uno avulso non deficit alter, et même, dans chacun d'eux, il se trouve plus de substance active. qu'il n'en est besoin pour satisfaire amplement aux exigences de la vie. Certaines lésions détruisent les

1) Conférence faite à la Sorbonne sous le patronage de la Société des Amis de l'Université de Paris.

trois quarts des deux reins, et les malades vivent. Je ne dis pas qu'ils vivent tout à fait bien, ni surtout avec une sécurité parfaite; mais enfin ils vivent et d'une manière à peu près normale, sous réserve de certains incidents éventuels auxquels ils ne seront pas toujours en état de résister.

Les reins ont une forme et un aspect que vous connaissez bien pour en avoir mangé; car, sous le nom de rognons, nous voyons figurer assez honorablement sur nos tables ceux de veau, de mouton et de porc. Quant aux soi-disant rognons de poulet, c'est tout autre chose c'est l'apanage du coq et vous les chercheriez en vain chez la poule.

Les reins sont situés de chaque côté de la colonne vertébrale. Ils reçoivent en abondance du sang qui pénètre par deux grosses artères et ressort par deux grosses veines. Ils puisent dans ce sang les matériaux avec lesquels ils produisent l'urine qui s'écoule dans la vessie par deux conduits, les uretères (fig. 1).

Le rein est l'un des principaux, je devrais dire le principal organe éliminateur. Or, éliminer, c'est pour l'organisme une nécessité primordiale, plus impérieuse même que manger, car on meurt plus vite de la suppression complète des deux reins que du jeûne absolu. Vous n'ignorez pas que la vie ne peut se maintenir que grâce à la consommation d'une certaine quantité de matière, ou plus exactement à la transformation de cette matière incorporée. Maintes fois, on a comparé la nutrition qui entretient la vie à la marche d'une machine à vapeur, qui ne fonctionne qu'en consommant du combustible. Or le combustible en brûlant laisse des déchets inutilisables, qui ne pourraient s'accumuler dans la