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COMMUNICATIONS.

Notice d'un manuscrit de la bibliothèque royale, par M. Émile Gachet.

MESSIEURS,

En travaillant à rechercher pour vos travaux quotidiens quelques-uns des documents dont la bibliothèque royale est si riche, j'ai par hasard un jour mis la main sur un petit manuscrit à la physionomie bien vieille, à l'écriture bien usée et bien indéchiffrable, espèce de relique appréciée uniquement par ceux qui ont la passion de la paléographie. Ce manuscrit, analysé rapidement dans l'inventaire, ne pouvait montrer toutes ses richesses qu'à celui qui aurait la patience de le lire et même de le copier, et il paraît que personne n'avait encore eu celte patience jusqu'au bout. Je ne me rebutai point. Loin de là, je résolus de consacrer à l'exploration de cette relique quelques-uns de mes loisirs, et aujourd'hui c'est avec un véritable plaisir que je vous adresse le résultat de mon travail.

Pour procéder avec ordre dans cette analyse, il convient de faire d'abord la description matérielle du volume.

C'est un petit in-8° de cinq pouces de hauteur, dont la reliure date de l'empire. Il a été comme beaucoup d'autres porté à la bibliothèque nationale à cette époque, et il a gardé de cette espèce d'exil des marques ineffaçables, d'abord sa reliure, où l'on voit sur le dos les N couronnés et les étoiles impériales, avec ce titre : Vita Pilati-Cicero de amicitia, etc., XII° siècle; puis au premier et au dernier feuillet le timbre rouge de la république, portant, comme

on sait, les mots Bibliothèque nationale autour du faisceau républicain; il montre aujourd'hui sur ces mêmes feuillets le timbre noir de la bibliothèque de Bourgogne.

Ce volume se compose de quatre-vingt-seize feuillets de parchemin qui ne paraissent pas être tous de la même espèce, et dont l'écriture varie selon les opuscules, ce qui nous porte à croire que tous ne sont pas de la même époque, mais qu'ils ont été reliés et réunis après coup.

Le premier opuscule, qui est un discours sur l'avent et sur certaines cérémonies de l'église, nous semble du XII siècle.

Le deuxième, le troisième, le quatrième et le cinquième sont, par l'identité de l'écriture et par les dates qu'on y trouve, du commencement du XIIIe siècle.

Le reste du volume, dont l'écriture est différente de celle des opuscules ci-dessus, peut tout aussi bien appartenir au XIIe siècle qu'au commencement du XIII. Nous ne saurions le préciser avec certitude.

Nous aurions voulu pouvoir déterminer la provenance et l'origine de ce manuscrit, mais aucune indication positive ne s'y rencontre à cet égard. Nous ne pouvons donc émettre que des conjectures, et ces conjectures sont que ce volume provient d'un monastère du pays de Liége. Quelques mots flamands écrits sur l'une des marges feraient supposer qu'il appartient à la partie flamande de ce diocèse ; et, d'un autre côté, quelques autres indices nous engagent à le restituer à l'Entre-Sambre-et-Meuse. Mais, nous le répétons, rien de tout cela ne nous semble pouvoir être affirmé positivement.

Voici maintenant l'analyse de chacun des opuscules qui forment ce précieux volume.

I.

No 10147. Fol. I. Manuscrit sans titre, qui, par une faute d'impression, est intitulé Macrobii homelia dans l'inventaire de la bibliothèque, rédigé par M. Marchal. Nous n'y avons vu le nom de Macrobe nulle part. Dans tous les cas il est peu probable qu'on ait pensé à attribuer ces homélies au célèbre philosophe platonicien; quant à l'autre Macrobe, prêtre africain et évêque des Donatistes à Rome, on ne cite point dans tous les fragments qui restent de lui, d'ouvrage qui ait quelque rapport à celui-ci.

Notre manuscrit ne consiste pas non plus en homélies, c'est plutôt un traité ou un discours sur quelques pratiques usitées dans l'église. Voici au surplus comment nous l'avons analysé. Ecce nomen domini venit de longinquo, etc., explication de ce passage d'Isaïe où le prophète annonce la venue du messie. L'auteur commence par expliquer pourquoi l'église célèbre l'avent, et il expose la manière dont elle le fait, en spécifiant les cantiques que l'on chante alors. Explication de la fête de Noël et signification des trois messes que l'on célèbre ce jour-là.

L'auteur s'occupe ensuite et sans transition des sacrements de l'église et de leur signification; il décrit à ce propos la consécration d'une église dans les plus grands détails. Il parle de la bénédiction de l'eau, du sel, de la cendre et du vin ; et, après avoir longuement étendu cette description, il compare l'église matérielle à l'église spirituelle, c'est à dire à la réunion des fidèles. Le Christ en est le fondement, dit-il, et les apôtres en sont les murailles; les évêques et les docteurs en sont les colonnes, et chaque pierre de l'édifice est représentée par les chrétiens, selon leurs vertus et leur foi. Que signifient aussi l'eau et le sel? et pourquoi

se sert-on de sel dans le baptême, puisque le Seigneur n'en a point parlé? On pourrait en dire autant de l'huile et du saint chrême. Le sel, répond l'auteur, est toujours employé dans l'écriture pour exprimer la sagesse: Habete, inquit Dominus, sal in vobis et pacem habete in tuos. Et ailleurs: Vos estis sal terræ. Quant à l'eau, c'est la figure de l'esprit. L'auteur continue de la même manière l'explication des diverses substances énumérées; puis il parle de l'alphabet symbolique que l'évêque trace en forme de croix sur le pavé du temple, et il l'explique de cette manière : cette croix est la figure de l'un et de l'autre testament: dans ces quelques lettres toute la science est contenue. Écrites une fois dans la synagogue, elles le sont deux fois dans l'église, parce que les chrétiens ont reçu, de plus que les juifs, le testament de Jésus-Christ.

Nous trouvons plus loin ce passage à propos du vin : Vinum psalmista nobis permittens aït: Inebriabunt, etc., et le Seigneur lui-même ne nous invite-t-il pas à l'ivresse dans le cantique des cantiques, où il est écrit: Mangez, amis, et enivrez-vous? Ailleurs pourtant, ajoute l'auteur, le Seigneur nous dit au contraire de fuir l'ivresse. Il y a donc une bonne et une mauvaise ivresse, car ce que Dieu ordonne ne peut pas ne pas être bon, et ce qu'il défend doit être mauvais. Nouvelle preuve de ce que dit l'apôtre, que la lettre tue et que l'esprit vivifie. La bonne ivresse, c'est celle de l'esprit; la mauvaise, c'est celle du corps. Bona est ebrietas mentis, mala est ebrietas ventris.

Suit encore une explication très-longue du baptême, puis nous trouvons un dialogue ainsi conçu:

MICHAEL.

Quis ut Deus quasi? Quis facit mirabilia ut Deus?

GABRIEL.

Fortitudo Dei, qui ad Dei pertinet fortitudinem, annuntiat ut consilium Dei annuntiaret, qui est fortitudo Dei ipse.... æreas debellavit potestates.

RAPHAEL.

Medicina Dei, quod apparet, quæ illuminationis Tobiæ medicinam docuit, quod de archangelis esse demonstratur.

URIEL.

Ignis Dei qui in rubo Moysi apparuit, qui de seraphin esse dicitur, tunc quia in igne apparuit, tunc quia eidem Dominus conjunctus fuit.

Ordines angelorum novem sunt, quorum, primus angeli..... secundus archangeli, tertius virtutes, quartus potestates, quintus principatus, sextus dominationes, septimus troni, octavus cherubin, nonus seraphin.

Ce petit dialogue nous semble assez dans le genre des dialogues d'Alcuin avec Charlemagne.

Une petite exhortation à l'amour du prochain suit cette étrange digression.

Au fol. 6 verso, je trouve un tout autre discours, qui a pour but la dépravation du siècle. Il commence ainsi : Merito de vinea Deus conqueritur, quia corrupti et abhominabiles facti sunt, sicut aït Isaias. Les deux feuillets qui suivent ne contiennent plus que des versets et des répons, ainsi que les indications de prières usitées à certaines fêtes.

Au fol. 9 recto, est un autre manuscrit tronqué commençant par les mots :.. ipsam custodibus. Diversa genera ergo vinearum nobis, fratres, sacræ proponunt scripturæ,

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