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que coûtent la plupart des marchandises qui nous sont apportées, comme venant de la Chine, par la compagnie des Philippines, et par les vaisseaux de retour des Indes.

Il y a plus: le peu de fabriques qui existent aujourd'hui en Espagne ne suffit pas pour fournir des royaumes aussi vastes que ceux du Mexique et du Pérou. Il convient également que les habitans du pays aient, outre l'agriculture, un autre genre d'occupation. Or, je n'en trouve point d'autre, excepté l'exploitation des mines. Ce dernier travail est en grande partie réservé exclusivement aux indiens par le réglement de la Mita, qui, , par ses priviléges, est un fléau plus terrible pour ces malheureux qu'une maladie contagieuse ou une longue peste. Les castes intermédiaires et mélangées forment le plus grand nombre dans tous les endroits un peu considérables. Tous les individus de ces classes n'ont pas de terres propres à l'agriculture; et faute d'occupation utile, ne doit-on pas craindre que le pays ne se remplisse bientôt d'une foule de vagabonds que le penchant à l'oisiveté naturel à ces contrées entraînerait bientôt dans les plus grands désordres. La fabrication des étoffes, occupation aussi hon

nête qu'utile, est le meilleur moyen pour faire de cette classe de gens, des sujets laborieux et utiles au roi, à l'Etat et à eux-mêmes, et pour arrêter les désordres que ne manquent jamais de causer l'oisiveté et la fainéantise. Par combien de mains une arrobe de coton ne passe-t-elle pas avant que l'art l'ait réduite à l'état de toile? Hommes, femmes, enfans trouvent à s'occuper pour égrainer, filer, carder, arçonner ou tisser chacun selon ses forces, son âge et son talent. D'ailleurs, toutes ces opérations sont l'occupation favorite de toute espèce de gens dans ce royaume. Le nombre étonnant de ceux qui s'y occupent dans tous les genres, et au plus bas prix, prouve de la manière la plus convaincante mon assertion; et cela même promet à l'Etat, pour l'avenir, des membres laborieux et utiles. L'industrie de ce pays est encore dans l'enfance; mais les habitans font déjà beaucoup, si l'on considère les idées et les principes bornés qu'ils ont pu acquérir sur un art aussi utile. Ils n'ont pour travailler que les plus mauvais instrumens et des métiers mal construits; ils ignorent l'usage des machines qui facilitent et abrègent les différentes opérations.

La nation voisine de los Moxos a fait, dans ce genre d'industrie, plus de progrès qu'aucune autre de ce continent, graces à la méthode employée par les espagnols conquérans pour les instruire. Ils ne se contentèrent pas de tirer ces peuples de l'état de barbarie, mais ils furent en même tems leurs bienfaiteurs et leurs maîtres, et en un mot, leurs pères, soit pour le spirituel, soit pour le temporel. Il n'y a que l'oppression sous laquelle gémissent aujourd'hui ces malheureux sujets du roi, qui ait pu retarder et arrêter les progrès dans les arts, que l'on devait attendre de leur habileté et de leur talent naturel, et des bons principes de leurs maîtres. Que l'on fournisse à cette province et à d'autres des métiers construits selon les règles de l'art, des instrumens et des ustenciles de bonne qualité, et qu'on leur apprenne l'usage des machines qui abrègent les opérations, et l'on verra que les habitans de cette partie de l'Amérique ont autant d'aptitude et d'habileté pour les arts, que ceux de l'ancien continent.

Les étoffes que l'on fabrique aujourd'hui dans le pays, malgré tous leurs défauts, sont réellement déjà d'une qualité qui les rend

propres à une infinité d'usages pour l'habillement des deux sexes, comme le prouvent les échantillons que j'ai envoyés. Mais si l'on s'occupait avec plus d'activité de cet objet, que ne doit-on pas attendre d'un pays qui possède exclusivement les plus belles matières connues pour la teinture, et qui jouit en même tems, avec une abondance dont il n'y a pas d'exemple, de toutes les espèces de matières minérales que la chimie emploie dans cet art. Le nouveau continent est la patrie de la cochenille, du bois de brésil, de celui de campèche, du moralet, de la tara, et d'une infinité d'autres substances de ce genre dont on connaît à peine le nom, et dont j'ai décrit plusieurs dans ce traité. Quant aux sels et aux autres préparations chimiques employées comme mordans, et qui fixent et modifient les couleurs, j'en ai parlé avec assez d'étendue dans la première partie de cet opuscule. Un pays qui possède si abondamment ces substances salines, tous les métaux et les demimétaux connus, et de plus les agens chimiques les plus puissans, c'est-à-dire, les trois acides minéraux pour la fabrication desquels j'ai donné ci-dessus une méthode appropriée aux circonstances; un tel pays possède toutes

les matières premières que l'industrie humaine, aidée des connaissances chimiques, a su appliquer jusqu'à présent aux arts et aux fabriques.

La continuation des recherches sur les matières de ce genre, qui sont si abondantes dans ce continent, promet des découvertes intéressantes et des avantages considérables pour l'Etat. L'ordonnance royale du 50 novembre 1797, sous le ministère de don Gaspar de Jovellanos, relativement à l'administration du gouvernement temporel des missions des indiens Chiriguanas et Chaneses, ouvre un champ immense aux spéculations de cette nature. L'exécution de ces mesures, que l'on désirait avec tant d'ardeur, procure à ces missions de nouveaux rapports d'intérêts commerciaux, et des avantages réciproques. D'ailleurs elles font rentrer le domaine royal en possession de plusieurs propriétés usurpées depuis long-tems par les religieux du collége de Tarija, qui regardaient les productions de ce terrain comme un patrimoine qui leur appartenait en propre. D'après les relations de personnes dignes de foi qui ont traversé ces nouveaux pays, ils abondent en coton de la meilleure qualité, et l'on peut presque assu

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