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< Enfin on vit la côte britanni- « affreuse navigation, soit qu'il eût « que, et un officier anglais parut << reçu de nouveaux ordres, soit que « à bord du Great-Britain, deman- « ce fût de sa part une nouvelle <<< dant à saluer le roi de France « conception, le capitaine d'Urville « Henri V. Quand on lui eut mon- «< vint dire au roi Charles X qu'il << tré le duc de Bordeaux, il se pros- « fallait se séparer des princesses << terna devant ce prince, lui don- « et de leur suite, que lui, son fils << nant le titre de Majesté; ce qui « et petit-fils resteraient à bord du « prouve que le cabinet anglais « Great-Britain, mais qu'il serait << n'avait encore adhéré qu'à l'ab- « permis de débarquer à madame << dication et à la régence; car il « la dauphine, à madame la du<< n'est guère possible de penser « chesse de Berri et à sa fille. Le << que cet officier, qui se dit envoyé « malheureux prince comprend à <<< par lady Mornington, sœur du « l'instant toute la portée d'un tel << duc de Wellington, eût rempli « plan, et, avec une admirable pré<< une telle mission sans les ordres « sence d'esprit, il pense au seul « du ministère anglais. Il était por- « moyen qu'il a de le combattre. <<<-teur d'une lettre de cette lady « Aussitôt il le communique à ma<< pour madame de Gontaut, qu'elle « dame de Gontaut et à M. le baron << avait connue dans la première « de Damas, gouverneur du jeune «< émigration, et il ne put la remet- « prince. « Je sais, leur dit-il, le << tre que furtivement et à l'insu du « sort qui m'attend, et mon fils le <<< capitaine-geolier, qui né permit« sait aussi; nous y sommes rési<< pas que la duchesse répondit « gnés; mais il faut à tout prix << autrement que de vive voix à une « sauver le duc de Bordeaux. Se<< ancienne amie, qui lui avait of- «< condez-moi ; le ciel nous aidera. » <«<fert gracieusement tout ce dont « Quelque difficile que fût une pa<< pouvait avoir besoin la famille « reille tâche, tous les deux l'ac« royale. S'étant bornée à lui faire « ceptèrent sans hésiter. Dans son «< connaitre l'état de souffrance et «< zèle et son dévouement, madame << de privation où se trouvaient les « de Gontaut songeait aux moyens <<< enfants et les princesses, elle re- << de sortir d'une position aussi a çut le lendemain des provisions « embarrassante, lorsqu'il s'en pré<< de toute espèce, et surtout des « senta un qu'elle saisit avec au<< fruits, qui furent très-agréables «< tant de présence d'esprit que de << à toute la famille. Là se bornè- « dévouement. Déjà cet ordre de <<< rent pour le moment tous les « débarquement pour les princesses « effets de la politesse britanni- « était venu aux oreilles de madame

«<< que.

<< Les augustes prisonniers con« tinuèrent à être maltraités, in«sultés par l'homme à qui on les << avait livrés, lequel, du reste, ne << savait guère lui-même ce qu'il « devait faire, et n'osait pas pren<«<< dre sur lui une aussi grande res<< ponsabilité.

« Enfin le septième jour de cette

<< la dauphine, et, dans son impa« tience de quitter le fatal vaisseau, « persuadée que cet ordre était pour « toute la famille, cette princesse « venait de se précipiter la première « sur une échelle pour gagner le « rivage, au risque de se noyer ou « de se rompre le cou. Le capitaine « d'Urville l'avait vue avec joie « prendre un parti qui entraît si

<«< bien dans ses vues. Il ne douta « vers l'échelle qui avait servi à « pas que les autres princesses ne « madame la dauphine, et en un << suivissent cet exemple; mais, « instant tous les deux furent hors « voyant qu'elles restaient immo- « du navire... Qu'on juge de la joie <«<biles, il les y invita, avec sa brus- « des princesses et de l'étonnement, <«< querie et son impolitesse accou- « de la stupeur du capitaine, lors«tumées. Ce fut alors que madame « que, revenant avec un fauteuil à << de Gontaut, entraînée par un « la main, il vit le jeune prince et << mouvement d'indignation vérita- « son gouverneur sur le rivage bri«<blement admirable, lui dit avec « tannique! A peine lui fut-il pos << tant d'à-propos : « Ne pensez pas «sible d'exprimer sa colère par <«< que ni moi ni la princesse, dont « quelques paroles dures et impo« je suis responsable, obéissions à «lies, selon sa coutume. Ce fut << un pareil ordre. C'est bien assez «< alors que le roi, prenant la parole, « que vous ayez laissé ainsi des- « lui dit avec calme et dignité : << cendre madame la dauphine. N'y « A présent, Monsieur, vous pou« a-t-il donc pas dans votre vais- « vez disposer de mon fils, de moi; «seau, comme dans tous les au- << nous sommes vos prisonniers; « tres, des siéges destinés à cet « nous savons le sort qui nous at<< usage pour les dames et les en- << tend; nous y sommes résignés. «<fants? Vous pouvez disposer de « Le duc de Bordeaux est sauvé, << nous comme il vous plaira; vous « c'est tout ce que nous voulions. >> « pouvez nous ôter la vie; mais « Charles X, en cette occasion, fut << nous ne descendrons pas ainsi. » « véritablement sublime; c'est peut« Et, en prononçant ces mots avec « être le plus beau moment de sa « une rare énergie, la digne gou- « vie. Nous sommes heureux d'y << vernante serrait dans ses bras la « avoir trouvé occasion d'honorer « princesse Louise, qui, elle aussi, « sa mémoire. M. le baron de Da«<exprimait de son mieux au ca- « mas et madame la duchesse de « pitaine son indignation et sa « Gontaut ne le furent pas moins << résolution de ne pas se soumet- « par leur courage et leur présence « tre à ses ordres (1). Consterné par « d'esprit. Madame la duchesse de « des plaintes, des récriminations « Berri et sa fille, qui n'étaient << aussi vives, Dumont -d'Urville « point averties, qui ne purent en « demanda aux gens de l'équi- « conséquence comprendre que par « page s'il ne se trouvait pas, en « une sorte d'inspiration ce qu'elles << effet, dans le navire des sièges de « avaient à faire dans une circons<< l'espèce de ceux qu'on lui deman- «tance aussi importante, aussi im« dait, et sur leur réponse qu'il pou- « prévue, le comprirent néanmoins «vait y en avoir dans les maga- « à merveille. Ainsi toute l'infor<< sins, il s'y rendit lui-mêine pour « tunée famille, tous ses amis, ses « s'en assurer. A peine avait-il le « fidèles serviteurs concoururent « dos tourné, que M. le baron de « adınirablement à sauver encore << Damas, saisissant par le bras le « une fois l'enfant du miracle. << jeune duc de Bordeaux, l'entraîna « Sans rien affirmer sur les projets << ou les instructions du capitaine

(1) Cette scène vraiment dramatique pourrait

être le sujet d'un tableau que les arts saisiront sans doute un jour.

d'Urville, on ne peut pas douter « que le roi ne les eût compris dans

« le sens le plus funeste, et qu'il« expédition, il n'avait pas fait tout « n'eût très-bien vu qu'une prompte « ce que l'on attendait de lu', il est et énergique résolution pouvait « au moins bien sûr qu'il avait « seule les déjouer. << donné au nouveau gouvernement « des preuves irrécusables d'un entier dévouement.

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<< Dans une relation de cet évè<< nement qui fut donnée quelques « mois après par l'Annuaire histo• rique de Lesur, ouvrage notoire⚫ment écrit sous la dictée du mi« nistère français, il est dit que les « < princesses, ayant voulu débar- « << quer dans l'ile de Wight, les « princes refusèrent de les sui« vre... Ce mensonge, peu impor<< tant en apparence, prouve cepen<< dant que le plan de séparation « n'était ni fortuit ni imprévu, et « qu'il cachait de sinistres projets. « Quant à notre récit, nous pou◄ vons assurer qu'il émane de té<«< moins irrécusables, et nous en garantissons l'exactitude dans << toutes ses circonstances.

« On sait qu'il n'a pas joui longtemps de ces faveurs, et que lui, « sa femme et son fils unique moururent horriblement mutilés dans un wagon sur la route de Versailles, le 4 mai 1842. Tout le monde se rappela alors le voyage de Cherbourg; il n'y eut que le fils du duc de Berri qui parut l'avoir oublié avec une générosité, mais aussi un oubli des injures, bien digne de son illustre race. « L'année suivante on ouvrit une « souscription pour lui élever un « monument à Condé-sur-Noireau,

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sa patrie. Le comte de Chambord a souscrivit pour une somme de « cinq cents francs!.. »

Z.

<< Lorsque ce plan eut échoué par « le débarquement du duc de Bor- URSEL (le prince D'), né vers adeaux, à la personne duquel on te- 1750, de l'une des premières familles < nait évidemment par-dessus tout, des Pays-Bas autrichiens, prit une le capitaine d'Urville retint encore grande part, dès le commencement, « à son bord le roi Charles X et son à la révolution que firent éclater « fils; mais ce ne fut que pendant dans cette contrée, en 1790, les << quelques jours, et probablement innovations de Joseph II. Ce qui ■ jusqu'à ce qu'il eût reçu de nou- étonna beaucoup, c'est qu'on le vit ⚫veaux ordres, de nouvelles ins- se réunir au parti de l'avocat Vonck, «tructions. Alors les laissa partir qui tendait par ses principes à la ⚫ en toute liberté, et ils rejoignirent a leurs parents, leurs amis qui les aftendaient sur le rivage, et qui << avaient craint d'être pour tou jours séparés d'eux...

<< Dumont-d'Urville rentra aussi « tôt avec son escadrille dans le << port de Cherbourg; et il se hâta « d'aller à Paris, où il fut parfaite <«<ment bien accueilli et félicité sur la manière dont il avait rempli sa mission. Peu de temps après, il & fut nommé amiral; ce qui prouvé que si, dans cette mémorable

Révolution française qui éclata dans le même temps. Il publia même dans ce sens plusieurs écrits qui lui attirèrent des persécutions, lorsque le parti aristocratique et religieux triompha. Le chanoine Van-Cupen, qui dirigeait ce parti, fit même arrêter le prince d'Ursel, qui ne recouvra la liberté qu'après avoir adressé au congrès de Belgique des plaintes très-vives et qui furent publiées dans les journaux. Les Vonckistes ayant alors repris le dessus, il rentra eu faveur, et fut nommé par les États

des Pays-Bas ambassadeur à la cour
de Naples. Mais l'envahissement de
la Belgique par les armées de la
République française rendit bientôt
cette mission inutile. Le prince d'Ur-
sel se rendit alors à Vienne, où il
vécut encore plusieurs années dans
une sorte d'exil et privé de tous ses
biens....
Z.

ainsi que leurs amis, Escher, Hoch, Kunker et quelques autres, traduits devant une commission qui devait les juger. Mais la chute du gouvernement pentarchique les sauva, et ils contribuèrent ensuite beaucoup par leurs efforts à assurer l'indépendance et l'intégrité de la Suisse, ce qui leur fit souvent courir de trèsgrands dangers. Ustéri, toutefois, dans les derniers temps de sa vie, s'occupa peu des affaires publiques. Livré tout entier aux lettres, il publia plusieurs écrits estimés, notamment 1 Manuel du droit public de la Suisse, contenant le nouveau pacte fédéral, les actes y relatifs et les constitutions des vingt-deux cantons qui composent actuellement la

USTÉRI (PAUL), magistrat suisse, né vers 1770 à Zurich, était le fils du célèbre professeur qui fonda dans cette ville une école spéciale pour les filles des artistes et de toutes les classes peu fortunées (Voy. USTERI, XLVII, 234). Elevé sous les yeux de son père, il fut bientôt l'un des savants les plus distingués de ce pays. Très-lié dès l'enfance avec notre collabo- confédération suisse, accompagné de rateur Stapfer, comme lui il adopta dans les premiers moments les principes de la Révolution française, mais comme lui (Voy. STAPFER, LXXXIII, 16) il s'en éloigna dès qu'il vit que l'ordre et la paix se trouvaient compromis dans sa patrie. La résistance qu'ils opposè rent aux déprédations du fameux Rapinat en 1799, et le zèle qu'ils mirent à défendre la propriété de l'Église protestante, leur attirèrent de vives persécutions de la part du Directoire français. Dénoncés par le parti révolutionnaire, ils furent,

notes statistiques et autres (en allemand et en français), seconde édition, Aarau, 1821, 3 vol. in-12; 2° Discours sur le projet d'arrêté de la diète contre l'abus de la publicité en matière de politique intérieure, prononcé dans l'assemblée du grandconseil de Zurich, dont Ustéri était membre, le 19 juin 1828, in-8°; 3 Motif de l'amendement à la loi sur la presse, in-8°.-Ustéri a composé pour cette Biographie plusieurs notices sur des littérateurs suisses et allemands. Il est mort vers 1840, à Zurich,

M-D j.

V

VADIER (MARC - GUILLAUME ALBERT), l'un des plus ineptes et des plus fougueux révolutionnaires qui aient tourmenté la France aux cruelles époques de 1793 et 1794, était né, vers 1730, dans le comté de Foix, d'une famille de bourgeoisie, qui, ainsi que beaucoup d'autres, était fort jalouse des avantages de la noblesse et du clergé, et, par conséquent, fort disposée à favoriser toute révolution qui renversait ces deux ordres. Devenu, après des études médiocres, conseiller au présidial de Pamiers, il s'occupa baucoup moins de ses fonctions judiciaires que de tout ce qui pouvait lui donner de la popularité, soit par des discours empreints de démagogie, soit par des manifestations de ce faux zèle, de cette tartufferie, qui, dans ces temps de charlata nisme, a fait tant de dupes. Il ne lui en fallut pas davantage, en 1789, - pour être nommé député du tiersétat de sa province aux États-Généraux que Louis XVI avait si imprudemment convoqués. Dès la première séance, il s'y réunit au parti Je plus exalté, et vota pour la proposition la plus contraire au pouvoir royal; mais, dépourvu de talent oratoire, il fut d'abord peu distingué dans la foule des orateurs braillards, comme les appelait Danton. Ce qui est assez remarquable, c'est que Vadier fut le premier, dans cette assemblée, qui osa donner au roi le nom de tyran, et qui, aussitôt

après le voyage de Varennes, demanda qu'il fût déchu et qu'une Convention nationale fût réunie pour le juger; puis, dépassant toute mesure, il nomma hautement ce malheureux prince un brigand couronné; et, ce qui caractérise bien cette époque, c'est que ces expressions furent dès lors consacrées, qu'on les retrouve à chaque page de son histoire. Cependant, il est bien sûr qu'il n'y avait en cela de la part de Vadier ni conviction ni courage. On sait assez aujourd'hui que sa bravoure n'était pas grande, et qu'il pensa mourir de peur lorsque plusieurs dénonciations le signalèrent en même temps à la tribune et dans les journaux comme un républicain forcené. Alors il protesta hautement de son attachement à la royauté constitutionnelle de Louis XVI, et, dès que la session fut terminée, il se retira avec la même imprévoyance que ses collègues, ne comprenant pas qu'ils avaient ouvert la carrière à des hommes plus audacieux et plus cruels qu'ils n'avaient pu l'être. Un an s'était à peine écoulé, lorsque le tyran fut emprisonné, son trône renversé, et que Vadier revenait à Paris comme membre de la Convention nationale nommée pour le juger. Dès les premières séances il siégea au sommet de la Montagne, à côté de Marat et de Robespierre. Comme à l'Assemblée nationale, il parla peu d'abord, se contentant de voter avec une sorte

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