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NUMISMATIQUE GAULOISE.

Lettre à M. E. HUCHER, sur la numismatique gauloise.

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MONSIEUR ET TRÈS-HONORÉ CONFRÈRE,

J'ai reçu avec reconnaissance et lu avec un vif intérêt dans le deuxième numéro de la Revue de la numismatique belge de cette année, la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'adresser, contenant la description et la gravure de dix médailles gauloises anépigraphes de votre cabinet, encore inédites, et à peu près inconnues, si elles ne l'étaient même entièrement, jusques au moment où vous avez appelé sur elles leur attention. Ces types sont tous également bien dessinés et gravés dans votre publication; mérite assez rare et qu'on ne saurait trop apprécier.

La monnaie d'argent, n° 10, que vous regardez avec raison comme gauloise, mais où en même temps, vous voyez une division d'un tétradrachme pannonien représentant une

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tête d'Apollon laurée et au revers un Gaulois brandissant son épée haute dans la main gauche et opposant de la droite le long bouclier national aux coups d'un ennemi, me parait très-remarquable sous le rapport du type du guerrier combattant.

M. Rollin m'a communiqué une anépigraphe, petit bronze, dont je joins ici l'empreinte

et qui me paraît être une variété de votre no 9. Même rose au revers, et même attitude du quadrupède qui doit être aussi un griffon, si ce n'est pourtant, un cheval, car la mauvaise conservation du relief de la tête laisse la chose indécise et douteuse, au premier aspect. Je crois, du reste, la pièce inédite.

Je vous avouerai ici en toute franchise, mon cher et docte confrère, que je conçois quelques doutes sur la sincérité ou la réalité de l'obvers du type de votre joli no 3 (or), charmante petite pièce rappelant dans toute sa pureté le style grec et dont le revers nous offre le bige macédonien et sous les pieds des chevaux un symbole obscur et compliqué sur la nature duquel vous voulez bien appeler mon attention et me demander mon avis. Vous avec cru y reconnaitre deux tiges végétales unies ou liées ensemble, l'une figurant une fleur ou un fruit avec trois folioles,

l'autre un épi de blé, avec cette particularité bizarre qu'une épée sort de l'un des grains de l'épi. Symbole inconnu ou encore non observé, du moins avec les circonstances exactes où il se produit ici.

A ce sujet, je dois vous dire qu'ayant conféré de ce mème symbole, tel qu'il vous a apparu, avec un de nos plus loyaux et savants numismates, également votre ami et le mien, nous n'avons pu y voir, d'une manière certaine, ni fruit rond, ni même la baie ou les folioles que vous avez cru y remarquer, et que ce fruit, à notre avis, pourrait bien n'être que le sabot d'un des coursiers du char.

La configuration et la présence de l'épée nous a semblé également douteuse; du reste, en ce qui me concerne personnellement, mon cher et bienveillant confrère, pour me servir d'une expression de Montaigne, je vous soumets cette observation, non comme bonne, mais comme mienne.

Mais la pièce capitale de la planche jointe à votre lettre, et la plus intéressante, non-seulement comme type, mais aussi sous le rapport de la facture, est votre magnifique statère d'or qui y figure sous le n°1, rang qui lui était bien légitimement acquis.

J'ai toujours porté, mon cher et honoré confrère, une attention toute particulière aux monuments de la numismatique gauloise armoricaine de la classe de votre curieuse anépigraphe dont, entre autres auteurs, MM. Lelewel, Lambert de Bayeux, Le Mière de Morlaix et vous, avez publié des produits remarquables.

On connaissait depuis longtemps d'autres médailles gauloises en or, en électrum, en billon où, comme sur votre beau statère, le sus gallicus était placé sur la tête triom

phale de l'Apollon-Belenus. Sur d'autres monnaies armoricaines on avait également observé, ainsi que sur la vôtre, ces cordons perlés rattachant de petites têtes, où M. Lambert a vu des masques ('), à celles du dieu; elles sont au nombre de quatre sur votre exemplaire, mais, on ignorait encore, avant la gravure que vous en avez donnée, son revers, offrant un personnage dans un char, sonnant d'une espèce de trompe (sans doute, la trompe gauloise), et guidant un cheval androcéphale ayant lui-même à la bouche une tige mince et rigide terminée par un évasement, attribut qui vous parait difficile à caractériser, mais où, selon vous, les partisans de la pipe celtique, découverte récente en numismatique, pourraient bien voir fonctionner un objet de nature à favoriser leur hypothèse.

Les sujets les plus graves offrent quelquefois leur côté plaisant, et chemin faisant, vous l'avez saisi avec bonheur, dans cette circonstance.

Du reste, mon cher confrère, rien de nouveau sous le ciel; et si cette précieuse découverte de la pipe gauloise s'accréditait parmi nous, combien de fumeurs, amis de l'antiquité et de ses us et coutumes, ne seraient-ils pas heureux d'apprendre qu'ils n'ont fait jusqu'à ce jour que continuer, à leur insu, d'observer un usage sans doute, religieux et sacré, enseigné à leurs ancètres par les druides, et qui le pratiquaient eux-mêmes avec amour!

« Spectatum admissi, risum tenealis amici. »

Mais, pour revenir à une idée plus grave et plus raison

(') Essai sur la numismatique gauloise du nord-ouest de la France, p. 426, nos 23-24, pl. IV.

nable sur le nom, la nature et la valeur de l'objet difficile à déterminer que tient à la bouche le cheval androcéphale de votre statère, je vous rappellerai l'explication proposée par Duchalais pour un attribut qui me parait analogue à celui qui nous occupe, et placé dans une semblable position à l'obvers d'une pièce présumée de mème origine que la vôtre. Voici sa définition: « Un symbole en forme d'un pétale de rose dont le centre serait évidé (1).

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L'étude de la numismatique gauloise présente un vaste champ à des études, à peine ébauchées encore, et dont les résultats font espérer des découvertes plus sérieuses et moins contestables que celle dont il vient d'être question.

Parmi les monuments de l'art monétaire des différents peuples de l'antiquité, je n'en connais pas qui offrent des attributs symboliques religieux, guerriers, astronomiques, artistiques, agricoles, etc., aussi nombreux et aussi variés que ceux provenant des produits du monnayage des habitants de la Gaule antérieur à l'occupation romaine, et plus particulièrement encore les médailles ou monnaies, la plupart anépigraphes ou muettes, connues et classées sous la dénomination d'armoricaines, catégorie à laquelle appartiennent vos deux superbes statères, no 1 et 2.

Personne, assurément, ne sait mieux que vous, Monsieur et cher confrère, qu'un grand nombre des représentations typiques ou symboles figurés sur les pièces ainsi désignées, inconnus ou du moins expliqués, le plus souvent,

(') Description des monnaies gauloises de la bibliothèque. Pièces imitées des statères macédoniens, etc., pp. 338-339, no 799-XXIX.

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