Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

préparatifs du triomphe; que déjà l'impératrice Césonie y append les armes des vaincus; qu'elle a loué et des manteaux de pourpre pour en revêtir les rois prisonniers, et des casaques jaunes pour les soldats captifs; enfin, qu'elle a loué des chariots et des Gaulois remarquables par leur grande taille (a).

On voit bien que Perse veut railler; mais Heinsius avoit-il tort d'appeler de pareilles Satires, des Satires édentées (b)?

14 Pourquoi recourir, comme Perse le fait si souvent, à des ironies triviales, et plus injurieuses que plaisantes? p. xcvij.] Quelque ridicule que soit un poëte, un stoïcien doit-il, après l'avoir appelé chauve, lui reprocher d'avoir un ventre en forme de cruche, un ventre d'un pied et demi de saillie (c)? doit-il en faire parler un autre du nez, et dire qu'il sort de ses

(a).

Missa est a Cæsare laurus

Insignem ob cladem Germanæ pubis, et aris
Frigidus excutitur cinis: ac jam postibus arma,
Jam chlamydes regum, jam lutea gausapa captis
Essedaque, ingentesque locat Cæsonia Rhenos

Sat. VI, v. 43.

(b) Edentulum Poema. HEINS. de Sat. Horat.

[merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small]

Cependant, Perse lui-même dit qu'il ne veut pas être lu par celui qui se plaît à railler sur les sandales des

narines bégayantes des sons qui ont je ne sais quoi de rance (a)?

L'apostrophe à Janus que le bec de la cigogne n'a, dit-il, jamais pincé par le dos, à qui on n'a jamais fait les cornes par derrière, à qui on n'a jamais tiré une langue aussi longue que celle d'un chien de la Pouille mourant de soif (b); cette apostrophe est-elle dans le goût d'Horace? Pour exprimer d'une manière ingénieuse que des vers sont énervés, Horace auroit-il dit qu'ils nagent sur les lèvres inondées de salive? auroit-il prolongé cette métaphore, en ajoutant qu'Atys et lą Ménade y sont à flot (c)?

Grecs, et qui cherche un louche pour lui dire, Tu es louche:

Et lusco qui possit dicere, Lusce.

Sat. 1, v. 127.

(a) Rancidulum quiddam halba de nare locutus.
Sat. I, v. 33.

(b) O Jane, a tergo quem nulla ciconia pinsit,

Nec manus auriculas imitata est mobilis albas,
Nec linguæ, quantum sitiat canis Apula, tantum.
Sat. 1, v. 58.

La preuve que ces vers sont de très-bon goût, disent quelques commentateurs, c'est que S. Jérôme, écrivant à un moine, emploie aussi le bec de la cigogne, les oreilles d'âne et la langue du chien, pour l'avertir qu'on le louoit en face, mais qu'en arrière on se moquoit de lui.

[merged small][ocr errors][ocr errors][merged small]

Hoc natat in labris : et in udo est Mænas et Atys.

Sat. 1, v. 104.

Voici une plaisanterie d'un autre genre, et qui tient du sarcasme : il s'agit de ces prières que les fourbes adressoient secrètement aux dieux, de crainte que les hommes ne les entendissent. Celles, dit Perse, que vous employez pour séduire Jupiter, osez les adresser même à Staïus? O bon Jupiter! s'écriera-t-il, ô Jupiter! Et Jupiter lui-même ne s'écriera pas, O Jupiter (a)! Cela peut être fort piquant, mais j'avoue que je n'en sens pas le sel. Je conçois qu'un scélérat ignorant et brutal ait recours au maître des dieux avant de consommer le crime: mais qu'un Jupiter s'atteste luimême, qu'il s'anime à la vengeance, et cherche à réveiller sa justice assoupie, par des exclamations humaines, j'avoue que je n'y comprends rien. Quand je lis, au contraire, dans Sénèque: Quel est l'aveuglement de ceux qui n'oseroient déclarer aux hommes ce qu'ils disent aux dieux (b)? Je comprends cela, et je le retiens.

15 Un de ses moyens (de Perse) les plus familiers, étoit de railler dans les autres ce qu'on avoit coutume de reprocher à ses pareils, p. xcvij. ] Pour moi, je ne pense qu'à lui, lorsqu'il s'écrie: Voilà donc

(a) Dir agedum Staïo. Proh Jupiter! ô bone, clamet, Jupiter! At sese non clamet Jupiter ipse?

Sat. II, V. 22.

[ocr errors]

(b) Nunc quanta' est dementia hominum ! Turpissima vota deis insusurrant : si quis admoverit aurem conticescent. Et quod scire hominem nolunt, deo narrant. SENEC. Epist. x.

pourquoi vous dépérissez? La science n'est donc rien pour vous, si quelqu'un ne sait pas que vous êtes savant (a)? Je ne pense qu'à lui, lorsque, pour dissimuler ses travaux assidus il fait ainsi parler un centurion en faveur de l'ignorance : « Ce que j'ai de science me suffit; je n'ai point envie d'être un Arcésilas, ni de ressembler à ces tristes Solons qui marchent la tête basse et les yeux fixés contre la terre, lorsque, méditant les rêveries de quelque ancien maniaque, on les entend sourdement murmurer entre leurs dents, ou qu'on les voit pesant des paroles sur leurs lèvres avancées (b). »

16 Je veux parler des interlocuteurs dont il (Perse) fait un usage trop fréquent, et qu'il emploie souvent mal à propos, etc. p. civ.] Lorsqu'on a recours au dialogue dans des ouvrages où il n'est pas nécessaire, on est tenu de lui conserver autant de vérité que dans le genre dramatique. Les différentes manières de se débattre de vive voix entre deux ou plusieurs autres per

(a) En pallor seniumque? ô mores! usque adeone Scire tuum nihil est, nisi te scire hoc sciat alter. Sat. 1, v. 26.

(6) Hic aliquis de gente hircosa centurionum

Dicat: Quod sapio, satis est mihi; non ego curo
Esse quod Arcesilas, ærumnosique Solones,

Obstipo capite, et figentes lumine terram;
Murmura cum secum, et rabiosa silentia rodunt,
Atque exporrecto trutinantur verba labello

Egroti veteris meditantes somnia.

Sat. III, v. 78.

sonnes, sont les modèles de cette forme. S'il arrive donc qu'un Satirique néglige de faire parler ses interlocuteurs d'une manière conséquente, et conforme à leurs véritables intérêts; s'il ne leur prête que des lieux communs et des motifs supposés, pour avoir le plaisir de les réfuter ensuite; enfin, si l'on apperçoit qu'il ne songe qu'à se ménager quelques places propres à recevoir des détails préparés d'avance : tous ces vains artifices, loin d'aller au but, ne causent que de la fatigue et de l'ennui.

On ne sauroit disconvenir que le dialogisme de Perse ne soit sujet à tous ces inconvéniens. Parmi ceux qui ont successivement traduit ou commenté cet auteur, on remarque que la plupart ont changé l'ordre des interlocuteurs, établi par ceux qui les avoient précédés. Il parle de temps en temps par la bouche de ses personnages (a); ce qui détruit toute illusion, ce qui jette le lecteur dans l'incertitude, et lui fait soupçonner de l'inconséquence où il n'y a que du désordre. Au lieu de répondre à ce qu'on lui objecte, il imagine un nouveau dialogue et joue les deux rôles. Mais voici

(a) Casaubon n'en est point choqué: Observandus autem Persii mos proprius: quoties enim alium inducit sibi aliquid objicientem, sic personam alienam sustinet, ut suam interea non ponat. CASAUB. Comment. in Pers. P. 74.

Quelques-uns prétendent qu'il n'y a point, dans les satires de Perse, de dialogue proprement dit ; mais que cet auteur, à la manière des stoïciens, se fait à lui-même des objections, et y répond.

« VorigeDoorgaan »