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avant cela je fouhaite qu'on obferve que dans tous les termes qui fignifient un acte de Dieu dés l'eternité, il y a toûjours au devant une particule qui emporte préexistence, comme dans proorifmos, predeftination; prothefis, predetermination; pronoia, providence; prognofis, preconnoiffance. Il faudroit donc que felon cette forme l'élection eternelle fut appellée proékloge, préelection. Ce qui ne fe trouve jamais. Mais voyons les paffages: Un des plus notables c'est celuy du chap. 24. de S. Matthieu vers. 22. & celuy qui luy eft parallele, du 13. de S. Marc; que les jours d'affliction ont efté abregez à caufe des élus. Ou comme il y a dans S.Marc, v. 20. à caufe des élus qu'il a élus. Et dans le mefme lieu, verf. 22. Jefus Chrift dit, que de faux Christs, & faux Prophetes viendront, qui feront des fignes

des miracles pour feduire les élus, s'il eftoit poffible. Souvenons-nous de ces deux principes que nous avons pofez: 1. L'un qui eft confeffé, que les mots choisir & élire fignifient naturellement & ordinairement une feparation qui fe fait dans le tems. 2. Le fecond, qui eft une maxime du bon fens '; qu'on ne doit pas transporter un mot de fa fignification naturelle à une autre qui luy eft eftrangere, que pour fauver à l'Ecriture quelque abfurditéapparente. Or je vous prie pour fauver le fens de ces paffages, qu'elle neceffité y a-t-il d'ôter au mot d'élus la fi

gnification naturelle ? Quelle affaire a icy le decret eternel de l'élection ? Et y a-t-il rien plus commode que d'entendre icy que les jours d'affliction ont efté abbregés à caufe des enfans que Dieu s'étoit choifis & feparés actuellement de la maffe des hommes, par la grace & la vocation efficace, & que les faux Prophetes feront des fignes pour feduire ceux à qui Dieu a donné la grace de fe convertir fincerement.

Le Seigneur dans le 20. chap. de S. Matth. pour conclufion de la parabole des ouvriers, que le Pere de famille avoit envoyé travailler à fa vigne, dit; Il y a beaucoup d'appellez peu d'élus: Ileft plus clair que le jour que le mot d'élus, eft oppofé à celuy d'appellés, comme fignifians des chofes contemporaines, & qu'ainfi comme la vocation fe fait dans le tems, auffi fe fait l'election. Et par confequent comme la vocation fignifie l'invitation generale qui s'adreffe à tous les hommes, l'élection fignifie cette feparation que Dieu fait par fon Esprit entre ceux qui font appellés,

Je pourfuis par l'Epiftre aux Romains, où certainement il eft parlé de l'election au falut & à la vie. S. Paul dit, a qui eft-ce qui intentera accufation contre les elus de Dieu, Dieu eft celuy qui juftifie. Y a t'il quelque ombre de neceffité, d'ofter au mot d'élus fa fignification natur elle pour luy en

a Chap. 8. verf. 32.

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donner une eftrangere? ce fens n'eft-il pas bon? mais n'eft-il pas infiniment meilleur de dire, qui eft ce qui accufera les hommes que Dieu a feparés du reste du genre humain par fa grace efficace aufquels il a donné la foy la veritable converfion? que fait l'election eternelle aprés tout, prife en elle même pour empêcher qu'on ne puiffe accufer un homme? Saul perfecutant l'Eglife n'étoit-il pas elu dans le fens de l'ecole; cependant il étoit tres poffible & tres jufte d'intenter accufation contre lui dans cet état ? N'eft-il pas clair qu'icy les elus & les juftifiés c'est la même chofe? qui intentera accufation contre les elus, Dieu eft celuy qui jufifie?

a Devant que les enfants fussent nés ¿ qu'ils euffent fait ni bien ni mal, afin que le propos arrefté felon l'élection de Dieu demenraft &c. il fut dit le plus grand fervira au meindre. C'eft là un des paffages où l'on trouve le plus de neceffité d'entendre par l'election un decret eternel. Cependant il n'y en a aucune. Premierement il faut fçavoir, qu'il n'eft point feur que là il s'agiffe de l'election & de la reprobation par rapport à la vie & à la mort eternelle; ou pour mieux direil eft tres-certain qu'il ne s'agit pas de cela dans cet endroit. Car fans determiner fi Efau eftoit reprouvé ou ne l'eftoit pas à l'egard de la vie eternelle; left clair qu'il ne s'agit icy

a Rom. ch. 9. verf. 11.

que d'une reprobation & d'une election par rapport à l'avantage d'être le Pere du Meffie & le Patriarche de la Nation Sainte. Efau fur reprouvé, à cet egard Jacob fut élu. Afin que le propos arreftè felon l'election de Dieu demeurât. C'est à dire, demeurât ferme. Certainement icy le propos arrefté, prothefis, fignifie le decret eternel de Dieu. Si l'election qui fuit fignifie auffi le même decret eternel, voyez quel fens ! Afin que le decret eternel felon le decret eternel demeurât.

On doit

avoir ce refpect pour les Efcrivains facrez, de les faire parler raifonnablement & intelligiblement. Or certainement cela n'eft ni raifonnable ni intelligible. Mais l'expreffion eft tres-jufte & tres-intelligible fi vous l'expliqués ainfi. Afin que le decret eternel conforme à l'election que Dieu devoit faire dans le tems demeurat ferme & ne fût point changé, il fut dit le plus grand fervira au moindre. Il me femble que ce font-là des lumieres, qu'il ne faut que monftrer pour les faire

voir.

Dans le chapitre onziéme Saint Paul parle trois fois d'élus & d'élection. verf. 5. Ainfi auffi au tems prefent il y a du refidu felon l'élection de grace. verf. 7. Ce qu'Ifraël eft aprés à chercher il ne l'a point obtenu, mais l'élection l'a obtenu, les autres ont été endurcis. Dans ces deux paffages l'élection fignifie le choix & la feparation par la grace pour la vie eternelle, & le fens eft que la re

jection des Juifs dans le tems d'alors, n'étoit pas fi generale, que Dieu n'eût feparé un bon nombre d'entr'eux pour leur donner fon falut & fa grace. Il y a du refidu felon l'élection de grace. Dieu s'eft mis à part un nombre de Juifs par cette élection gratuite; par ce choix fondé dans fa feule mifericorde, par lequel il a converti quelques Juifs à la foi. Tout de même qu'autrefois il s'étoit refervé fept mille hommes du milieu de la revolte generale des dix tribus. L'élection l'a obtenu & les autres ont été endurcis. Ceux qu'il a pluà Dieu d'appeller efficacement en feur donnant la grace victorieufe de la cupidité ont obtenu la juftification, mais le refte des Juifs ont été abandonnés à leur dureté. Il me femble que là dedans, il n'y a veftige aucun de decret eternel, & qu'il y nuiroit bien loin d'y fervir. Il y a un troifiéme paffage dans ce chapitre qui parle encore d'élection, mais c'eft dans un autre fens. v. 28. Ils font certes ennemis quant à l'Evangile à caufe de vous. Mais ils font bien aimés quant à l'élection, à caufe des Peres. Il ne parle plus là de l'élection des particuliers, c'eft de la nation entiere des Juifs. Il predit leur rappel, & declare que cette nation ne peut-étre reprouvée pour jamais, parce que les dons & la vocation de Dieu font fans repentance. Dieu aiant autrefois choifi ce peuple pour fon peuple, il ne peut le rejetter abfolument, aujourd'hui ils font enne

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