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dans sa signification collective; on en trouve la preuve dans l'art. 746.

Le premier de cet article est ainsi conçu: « Si le » défunt n'a laissé ni postérité, ni frère, ni sœur, ni » descendans d'eux, la succession se divise par moitié >> entre les ascendans de la ligne paternelle et les ascen» dans de la ligne maternelle. » Que l'on suppose que le mot de postérité ne comprenne pas les enfans adop

tifs,

il en résultera que lors même que le défunt en aurait laissé un ou plusieurs, sa succession devrait être déférée aux ascendans; car rien dans le texte que nous venons de citer, si ce n'est le mot dont il s'agit, n'est susceptible de se rapporter aux adoptés. Cette conséquence absurde prouve le peu de fondement de la supposition d'où elle dérive.

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Le propre de l'adoption est de constituer une postérité civile. On connaît la maxime du droit romain, filios familias non solùm natura, verùm et adoptiones faciunt: il en est de même dans notre droit. Les rapports que l'adoption établit entre l'adoptant et l'adopté, présentent de nombreux caractères d'analogie avec les rapports qui existent entre le père et le fils légitimes; ainsi l'adoptant et l'adopté se doivent mutuellement des alimens; ainsi il y a prohibition de mariage entre l'adoptant et l'adopté, entre les enfans adoptifs du même individu, entre l'adopté et les enfans légitimes de l'adoptant, etc.

Enfin, l'adoption est un moyen particulier de disposer de sa fortune en faveur d'un individu : par l'acte, l'adoptant accorde des droits actuels à l'adopté sur tous les biens qui lui appartiennent; une preuve, c'est qu'il s'ôte la fa

IV.

culté de les donner tous par libéralité entre-vifs : il lui accorde en outre des droits sur tous les biens qu'il laissera à son décès; une preuve encore, c'est que l'adopté est du nombre des héritiers légitimaires, c'est qu'il a la saisine de la succession, c'est que les dispositions testamentaires de l'adoptant ne peuvent le priver que de la quotité dispo¬ nible. Et qu'on le remarque bien, l'adoption est un mode de disposer de l'universalité de sa fortune; d'où il suit qu'elle accorde des droits à l'adopté sur tous les biens de l'adoptant; d'où il suit encore qu'elle lui accorde des droits même sur les biens donnés par l'ascendant, puisque ces biens sont du nombre de ceux dont l'adoptant a la propriété.

Une chose vient à l'appui de ces raisonnemens; c'est que l'adoptant pourrait donner par acte entre-vifs à l'adopté les biens qu'il a reçus lui-même de l'ascendant, et qu'on ne voit point pour quel motif l'adoption ne serait pas susceptible de produire seule cet effet, puisqu'il n'y aurait rien en cela de contraire à sa nature, puisque d'ailleurs il est de principe qu'on peut faire indirectement ce qu'on a le droit de faire d'une manière directe.

Ces moyens, susceptibles d'être employés pour le fils adoptif qui s'oppose à l'exercice du droit de retour de l'ascendant, ne sont pas sans quelque force; cependant nous nous déterminons pour l'opinion contraire; nous pensons que le fils adoptif ne peut jamais porter obstacle à la

réversion.

L'art. 747 décide qu'il y a ouverture au droit de retour

de l'ascendant, toutes les fois que le donataire prédécède sans postérité; la première chose à examiner dans l'espèce, est donc de savoir si le donataire a ou non une postérité lorsqu'il laisse un fils adoptif.

Pour nous décider, nous devons chercher le sens du mot de postérité; mais ici se présente une remarque à

faire.

Quand il s'agit de l'interprétation grammaticale d'un terme employé par le législateur, il faut distinguer : ou ce terme appartient exclusivement à la science du droit, ou il appartient au fond de la langué, à cette masse de mots dont se servent également toutes les classes de la société. Dans le premier cas, on doit examiner par les dispositions du législateur, le sens qu'il a voulu donner au terme dont il s'agit; dans le second, on doit présumer, sauf le cas d'une volonté contraire et positive, qu'il a conservé au mot l'acception que l'usage lui donne.

Le mot de postérité n'est pas un terme de droit; pour en connaître le sens, il faut donc recourir d'abord à la manière dont il est employé dans le discours ordinaire, et vérifier ensuite si le législateur ne s'en est pas servi dans une acception ou plus restreinte ou plus étendue. Or:

1o. Dans le discours ordinaire, le mot de postérité ne comprend pas les enfans adoptifs ; il est facile de le prouver: (a) Le Dictionnaire de l'Académie, principale

autorité dans cette matière, définit le terme de postérité la suite de ceux qui descendent d'une méme origine.

L'adopté a pour origine sa famille naturelle; il

il n'a donc pas pour origine sa famille adop

tive; il fait partie de la postérité de son père légitime; il ne fait donc point partie de celle de l'adoptant.

(b) L'adoption n'est connue en France que depuis la révolution; le mot de postérité, qui n'a pas, à beaucoup près, une origine aussi moderne, ne présente donc aucune idée qui y soit relative.

2o. Rien ne prouve que le législateur ait voulu étendre le sens du mot de postérité aux enfans adoptifs; tout, au contraire, conduit à penser qu'il a voulu conserver à ce mot sa signification usuelle; en effet :

(a) Le fils fait partie de la postérité de l'ascendant; si donc l'adopté faisait partie de la postérité du fils, il ferait aussi partie de celle de l'ascendant; or, il n'en est pas ainsi : l'adopté et l'ascendant de l'adoptant sont étrangers l'un à l'autre.

(b) Lorsque le législateur prend un mot dans le langage ordinaire et en change quelque peu la signification, il lui conserve toujours son sens radical; c'est-à-dire, il ne l'emploie pas dans une acception qui, rapprochée de l'acception usuelle, donne lieu à des conséquences absurdes; or, le mot de postérité est tel qu'on ne pourrait l'appliquer aux enfans adoptifs sans autoriser des conséquences de cette nature: il est spécialement destiné à représenter ceux qui viennent de la même origine; si donc parmi les individus qu'il rappelle

)

collectivement on plaçait les adoptés, il s'ensuivrait qu'on leur attribuerait deux origines différentes, celle de leur famille naturelle, et celle de leur famille adoptive. Cette manière de voir résulterait même positivement du texte de la loi. L'art. 747 attribue exclusivement à la postérité du donataire l'effet d'éteindre le droit de retour. L'adopté qui reste dans sa famille naturelle et qui sert de postérité à son père légitime, porterait bien certainement obstacle à l'ouverture d'un droit de retour fixé sur des biens donnés à celui-ci par un ascendant; si donc il produisait encore le même effet dans sa famille adoptive, il s'en-. suivrait qu'il servirait de postérité à deux individus différens, à deux individus étrangers l'un à l'autre.

En vain objecterait-on que le propre de l'adoption est de donner deux familles à une même personne ; il ne résulte pas de là qu'on lui attribue deux origines, qu'on lui imprime le caractère bizarre d'être une double postérité. Il serait contraire à tous les principes de supposer une volonté absurde au législateur. Il ne peut prendre que la nature pour base de ses dispositions; autrement elles seraient chancelantes, et ne présenteraient point ce carac¬ tère de stabilité qui leur est si nécessaire. En vain objecterait-on encore qu'on doit reconnaître trois espèces de postérité: la postérité

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