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était naturel d'exiger que la déclaration contraire fût écrite aussi dans l'acte que passe la femme; c'était d'ailleurs couper court à de nouvelles difficultés, et notre article a eu raison de demander que la femme fasse sa déclaration dans l'acte par lequel elle contracte. Il importerait peu toutefois, on le conçoit, que cette déclaration fùt consignée dans le même acte ou dans un acte séparé : ce qu'il faut, ce qui est dans la pensée de la loi, c'est que l'avertissement soit officiellement donné par écrit, à l'occasion du traité à intervenir.

Quant à l'effet que produira la déclaration d'inexistence d'un contrat contenue à l'acte de mariage et non démentie par une déclaration contraire de l'acte postérieur, il est moins étendu que ne l'ont cru quelques personnes. Cet effet, qui, d'abord et bien entendu, est purement relatif, et ne se produit que par rapport au tiers qui a traité avec les époux, n'est pas de permettre à ce tiers de considérer, pour l'exécution de son traité, comme commune en biens la femme qui ne l'est pas, mais seulement et uniquement de faire considérer cette femme comme pouvant s'obliger et aliéner avec l'autorisation du mari (ainsi que la femme mariée le peut, de droit commun), quoiqu'elle soit soumise au régime dotal, qui lui enlève cette faculté. Ce que la loi rend inefficace relativement au tiers qui a été trompé, et quant à l'exécution de son traité, ce n'est pas toute clause dérogeant au régime de droit commun, à la communauté légale, mais uniquement la clause qui établit l'inaliénabilité des biens de la femme, et qui rend ainsi nuls l'aliénation ou l'engagement que cette femme, même assistée de son mari, en consentirait. Ainsi, par exemple, quand j'ai accepté le bail que me faisait du bien de sa femme un mari qui se disait marié sans contrat, et que l'acte de célébration déclarait de même marié sans contrat, je ne pourrai pas, si plus tard la femine prouve qu'elle est mariée en séparation de biens et demande la nullité du bail, conjurer cette nullité et prétendre que la femme doit être traitée, quant à ce bail, comme si elle était commune en biens. Ce n'est pas de ces cas, en effet, que le législateur s'est occupé. Il a pensé que quand il ne s'agirait ainsi que du plus ou moins d'étendue des droits réciproques du mari et de la femme, le tiers a toujours un moyen facile de se garantir, c'est d'exiger la signature des deux époux. Mais quand une femme qui se dit, et que son acte de mariage dit également, mariée sans contrat et par conséquent en communauté légale, tandis qu'elle a fait un contrat qui la soumet au régime dotal, vient avec le secours de son mari me vendre un de ses immeubles dotaux, ou l'hypothéquer pour garantie de l'emprunt qu'elle me fait, ou prendre envers moi des engagements qui ne peuvent avoir d'autre garantie que ces mêmes immeubles, c'est alors que je pourrai invoquer le bénéfice de l'art. 1391, et faire déclarer valables, malgré la dotalité, qui sera non avenue quant à eux, les contrats que cette femme, dûment autorisée, a passés avec moi. C'est ici que s'applique la nouvelle disposition de l'art. 1391, quand elle dit que, sous les conditions indiquées, la femme sera réputée, à l'égard des tiers, capable de contracter dans les termes du droit commun, c'est-à-dire capable

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d'aliéner tous ses biens, de les hypothéquer et de les engager, avec autorisation du mari ou de justice, comme si elle était mariée en communauté légale (1).

23. Formes et rédaction du contrat.

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1394. Toutes conventions matrimoniales seront rédigées, avant le mariage, par acte devant notaire.

Le notaire donnera lecture aux parties du dernier alinéa de l'art. 1391, ainsi que du dernier alinéa du présent article. Mention de cette lecture sera faite dans le contrat, à peine de dix francs d'amende contre le notaire contrevenant.

Le notaire délivrera aux parties, au moment de la signature du contrat, un certificat, sur papier libre et sans frais, énonçant ses noms et lieu de résidence, les noms, prénoms, qualités et demeures des futurs époux, ainsi que la date du contrat. Ce certificat indiquera qu'il doit être remis à l'officier de l'état civil avant la célébration du mariage.

1395. Elles ne peuvent recevoir aucun changement après la célébration du mariage.

1396. Les changements qui y seraient faits avant cette célé bration doivent être constatés par acte passé dans la même forme que le contrat de mariage.

Nul changement ou contre-lettre n'est, au surplus, valable sans la présence et le consentement simultané de toutes les personnes qui ont été parties dans le contrat de mariage.

1397. Tous changements et contre-lettres, même revêtus des formes prescrites par l'article précédent, seront sans effet à l'égard des tiers, s'ils n'ont été rédigés à la suite de la minute du contrat de mariage; et le notaire ne pourra, à peine des dommages et intérêts des parties, et sous plus grande peine s'il y a lieu, délivrer ni grosses ni expéditions du contrat de mariage sans transcrire à la suite le changement ou la contre-lettre.

SOMMAIRE.

1. Le contrat doit être passé devant notaire avec minute. La présence du second notaire ou des témoins n'y est pas requise à peine de nullité.

II. Il ne peut être fait ni modifié pendant le mariage. Erreur de Toullier.

(1) Comme on le voit, la loi n'a pas ici, quant aux tiers, d'autre but que de les ren seigner sur le seul fait de l'existence ou de l'inexistence d'un contrat, en les prote geant contre la fausse déclaration qui serait faite sur ce point par des époux dotaus. Si donc elle se préoccupe aussi de faire indiquer dans l'acte de célébration la date du contrat, ainsi que les noms et la résidence du notaire qui l'a reçu, c'est unique ment dans l'intérêt des époux et de leurs enfants, pour qu'ils puissent toujours trouver ce contrat. Cette précaution peut surtout être utile pour les enfants aprila nort des parents.

III. Il peut recevoir des changements avant le mariage, mais sous des conditions determinées. Les donations faites aux époux par des tiers ne sont pas réputées changements au contrat. Secùs des conventions destinées à remplacer une clause douteuse du contrat par une clause plus explicite. Inexactitude de MM. Rodière et Paul Pont.

IV. Le changement n'est valable, même entre les époux, qu'avec l'accomplissement des formes voulues pour le contrat et le consentement de tous ceux qui y ont été parties. On doit comprendre sous ce nom les ascendants dont le conseil est nécessaire aux futurs : dissentiment avec plusieurs auteurs. Toutes ces parties doivent être présentes et consentir simultanément. Erreur de MM. Maleville, Toullier et Battur.

V. A l'égard des tiers, le changement n'est valable qu'autant qu'il est rédigé à la suite de la minute du contrat. Le notaire qui délivrerait une copie du contrat sans y joindre celle du changement serait passible de dommages-intérêts envers les tiers lésés; mais le changement ne serait pas nul envers eux. Ereur de Toullier. — Observation sur une inexactitude de MM. Rodière et Paul Pont.

I.

L'acte destiné à fixer les conventions matrimoniales doit être signé avant le mariage; il ne saurait être dressé ni modifié en quoi que ce soit après la célébration. Les époux qui procèdent à cette célébration sans avoir rédigé aucun contrat n'en peuvent plus faire ensuite, et se trouvent soumis, ainsi qu'on l'a déjà dit, au régime de la communauté légale, sans pouvoir y apporter plus tard aucune modification.

Pour assurer l'immutabilité du contrat, et pour empêcher les époux de détruire ou de modifier l'acte après le mariage célébré, la loi exige que cet acte soit passé devant notaire et avec minute. Nous disons avec minute, et c'est évident, puisque l'art. 1397, en parlant des contre-lettres, exige qu'elles soient rédigées à la suite de la minute du contrat (1). Le contrat notarié, mais reçu en brevet, serait donc nul, aussi bien que celui qui serait fait par acte sous seing privé; mais il va sans dire que les contrats faits même par acte sous seing privé avant le Code, et sous l'empire d'une coutume qui le permettait, ont conservé leur validité (2). Du reste, si les contrats de mariage doivent partout aujourd'hui, à peine de nullité, être faits par acte notarié dont il y ait minute, il n'est pas nécessaire à peine de nullité qu'ils soient reçus par deux notaires ou par un notaire et deux témoins. L'étrange loi du 21 juin 1843, que nous avons analysée et critiquée sous l'art. 1317, laisse le contra: de mariage parmi les actes pour lesquels un notaire seul et sans témoins suffit, pourvu qu'on y constate mensongèrement la présence des témoins ou du second notaire; il a été entendu, lors du vote de cette disposition immorale, à la Chambre des députés et à la Chambre des pairs, qu'il n'y avait pas à distinguer à cet égard si le contrat contien:

(1) Toullier (t. XII, no 71); Grenier (Hyp., no 8); Duranton (t. XIV, no 44) ; Dalloz (loc. cit., 256). Les parties ne pourraient pas, par un dépôt chez le notaire, conférer l'authenticité au contrat quelles auraient elles-mêmes rédigé. Rolland de Villagues (Rep., vo Cont. de mar., no 64); Duranton (t. XIV, no 43); Zachariæ (t. III, p. 396); Troplong (no 185); Dalloz (260 et 261). Voy. Pont et Rodière (2o ¿dit., i, 110).

(2) Voy. Paris, 19 déc. 1838; Rej., 18 avril 1838; Dostia, 26 déc. 1849 / Dev., 12, II, 165); Cass., 18 avril 1865 (Dev., 65, I, 317).

ou ne contient pas de donations. Ainsi, quoique la donation soit rangée par la loi de 1843 parmi les actes pour lesquels la présence effective du notaire en second ou des témoins est requise à peine de nullité. elle se trouve soustraite à cette règle lorsqu'elle est faite dans le contrat de mariage (1).

II. La règle que nul changement ne saurait être apporté aux conventions matrimoniales après la célébration du mariage ne peut être douteuse, puisqu'elle fait l'objet de la disposition formelle de l'article 1395. Pourtant elle a été niée opiniâtrément par Toullier, dans une longue dissertation (XII, 24 à 41), qui se résume à dire : 1o que l'article 1395 n'ajoute pas expressément la peine de nullité à la prohibition qu'il porte; et 2° que cette prohibition n'ayant eu pour fondement dans nos anciennes coutumes que la crainte de voir les époux se faire pendant le mariage, sous forme de conventions matrimoniales, les avantages que la loi leur interdisait, et ces avantages leur étant aujourd'hui permis à la condition d'être révocables (art. 1094 et 1096). il s'ensuit que ces conventions, postérieures à la célébration et modificatives du contrat primitif, sont également permises sous cette même condition de révocabilité, sans quoi il y aurait contradiction entre l'aticle 1395 et l'art. 1094.

Tout ceci n'est que sophisme. D'abord il est faux que la prohibition n'eût pour cause autrefois que la crainte des avantages entre époux. puisqu'elle existait dans les pays de droit écrit et dans les coutumes qui permettaient aux époux les libéralités entre-vifs, aussi bien que dans les autres coutumes... De ce qu'on permet aux époux de se faire des libéralités, ce n'est nullement une raison pour leur permettre des conventions dérogeant au contrat de mariage; car, dans une donation proprement dite, l'époux saura du moins ce qu'il fait, tandis que dans une convention ordinaire cet époux, la femme surtout, pourrait être trompé et procurer un avantage sans en avoir même le soupçon. Enfin, si notre Code avait entendu permettre les conventions dérogatoires au contrat, il n'aurait pas manqué de porter une disposition analogue a celle de l'art. 1096 pour proclamer la révocabilité de ces conventions. Il est évident que si l'on admettait une fois la validité des conventions faites pendant le mariage, nonobstant l'art. 1395, il faudrait les reconnaître irrévocables, puisque nul texte n'en prononce la révocabilité, et il faudrait arriver à dire nettement que les époux sont toujours libres de substituer à leur régime primitif un second régime tout different. qui pourra être remplacé à son tour par un troisième. Quant à l'absence de la déclaration expresse de nullité, l'argument ne peut pas même paraître sérieux. Aucune disposition analogue à celle de l'article 1030 du Code de procédure n'existant pour le Code Napoléon, est clair que la conséquence naturelle de toute prohibition est ici la nullité de l'acte prohibé, et qu'il n'en est autrement que par exception et

(4) Conf. Rodière et Paul Pont (t. I, no 130, et 2e édit., I, 142); et Bordeaux, 27 ma 1853 (Dev., 53, II, 587); Troplong (no 184); Dalloz (loc. cit., 257).

dans les cas où une sanction autre que la nullité est portée par le législateur. Or, loin qu'aucun texte formule ou fasse seulement soupçonner pour notre prohibition une sanction autre que la nullité, on trouve, au contraire, dans l'art. 1453 la preuve que cette nullité est bien la sanction que le législateur entend donner à nos articles.

La doctrine de Toullier est donc une erreur certaine, et c'est avec raison qu'elle est repoussée par tous les auteurs et par la jurisprudence (1).

III. Si les conventions matrimoniales ne peuvent recevoir aucun changement après la célébration du mariage, elles peuvent fort bien être changées avant, dans l'intervalle de la signature du contrat à la célébration; mais la loi exige, pour la validité des changements, certaines conditions que nous allons étudier après quelques observations préalables.

Le Code nous parle de changements et de contre-lettres; mais la première expression suffit à elle seule, car elle embrasse la seconde comme le genre embrasse l'espèce. La contre-lettre, en effet, est un changement qui présente une sorte de démenti donné au contrat, un aveu d'inexactitude préméditée dans l'une ou plusieurs clauses de ce contrat. Ainsi, par exemple, si les futurs époux, après avoir dit dans leur contrat qu'ils mettent en communauté leurs biens meubles, font un acte nouveau pour déclarer qu'ils y mettent aussi telle portion de leurs immeubles, ou bien si, après avoir dit que tels biens de la femme seraient paraphernaux, ils déclarent ensuite qu'ils seront dotaux, ce sont là des changements auxquels le nom de contre-lettre ne conviendrait pas; que si, au contraire, l'acte nouveau vient déclarer qu'une donation de 50 000 fr. faite dans le contrat n'était pas sérieuse pour le tout et ne doit avoir effet que pour 30 000 fr., ce nouvel acte constitue ce qu'on appelle spécialement contre-lettre. Mais dans un cas comme dans l'autre, il y a toujours changement apporté à la teneur du contrat; et ce mot générique de changement suffit dès lors pour embrasser toutes les hypothèses (2).

MM. Paul Pont et Rodière (1, nos 137-139, et 2° édit., I, 148 et 154) font remarquer, avec raison, que s'il faut regarder comme changements faits au contrat les donations que l'un des époux ferait à l'autre dans

(1) Voy. Duranton (XIV, 38); Battur (I, p. 2); Zachariæ (III, p. 397); Rodière et Paul Pont (1, 133 et 134); Duvergier (sur Toullier, no 40); Troplong (1, 173 et 174); Demante (Diss. Thėmis., t. VIII, p. 161); Rej., 23 août 1826; Toulouse, 7 mai 1829; Bordeaux, 8 déc. 1831; Rej., 31 janv. 1833; Lyon, 3 janv. 1838; Req., 18 août 1840; Caen, 9 mai 1844 (Dev., 32, II, 665; 33, I, 471; J. Pal., 1838, t. II, p. 37; 1844, t. II, p. 286); Cass., 24 août 1846; Lyon, 21 juill. 1849 (Dev., 49, II, 477).— Voy. aussi Agen, 12 mai 1848, et Rej., 16 juill. 1849 (Dev., 50, 1, 380).

(2) Voy. Bastia, 16 janv. 1856 (Dev., 56, II, 81); Delvincourt, Battur (t. I, no 45); Duranton (t. XIV, no 59); Zachariæ (t. III, 398); Odier (no 662); Troplong (no 240). -Spécialement, est nulle comme constituant une modification au contrat de mariage la contre-lettre postérieure à la célébration du mariage par laquelle le mari et le père de la femme réduisent les gains de survie assurés à cette dernière dans ce contrat; par suite, cette contre-lettre ne peut être opposée à la femme, encore bien qu'elle ne soit pas un tiers vis-à-vis de l'auteur de la contre-lettre. Req., 27 dec. 1854 Dev., 55, I, 113).

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