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alinéa de l'art. 1403, cette circonstance donne lieu à une récompense due (non pas à l'autre époux, comme le dit inexactement le texte, mais à la communauté, ce qui est différent, comme on le verra plus loin) par l'époux qui prend avec son immeuble la récolte que, dans l'ordre régulier des choses, la communauté devait recueillir. Il est vrai que l'art. 1403 ne parle que des coupes de bois; mais il est clair que c'est uniquement parce que le cas se présenterait très-rarement pour d'autres fruits (1) le législateur s'est préoccupé de eo quod plerumque fit, et sa règle doit évidemment s'appliquer à toutes les récoltes, puisque pour toutes il y a même motif, à savoir, la crainte des avantages frauduleux qu'il serait si facile de faire à un époux par ce moyen.

Pour les fruits civils, nous l'avons déjà dit, l'acquisition se fait jour par jour; en sorte que, quoique la communauté se dissolve longtemps avant l'échéance du terme des loyers d'une maison, elle aura cependant droit à une partie de ces loyers: autant il s'est écoulé de jours depuis le terme précédent, autant elle prendra de fois la fraction imputable à une journée. On sait aussi que les loyers des fermes sont aujourd'hui fruits civils comme les loyers des maisons. On l'a vu sous les art. 584 et 586, auxquels nous renvoyons aussi pour le cas où l'immeuble rural serait tantôt loué et tantôt exploité par les époux, et donnerait ainsi successivement des fruits civils, puis des fruits naturels.

Quant aux produits qui ne constituent pas des fruits, ils restent propres à l'époux propriétaire, et la communauté ne peut les prendre qu'à charge de récompense. La loi nous déclare ici, comme dans l'article 508, que les substances extraites des mines, carrières ou tourbières, sont ou ne sont pas réputées fruits, selon que ces carrières, mines et tourbières, existaient déjà quand le droit de jouissance a commencé ou n'ont été ouvertes que depuis (2). Et puisque la communauté exerce sur les propres des époux un droit de jouissance, un droit qui, malgré les différences que nous avons signalées, n'en est pas moins véritablement un usufruit, il est clair que ce n'est pas seulement la règle de l'art. 598 pour les carrières qu'il faut appliquer ici, mais aussi celles des art. 591 et 592 pour les futaies, de l'art. 593 pour les échalas, glands, faînes, etc., de l'art. 594 pour les arbres fruitiers, de

(1) Une coupe de bois peut très-bien se trouver retardée d'une ou plusieurs années. Il n'en saurait être ainsi pour des récoltes de céréales, de vignes, de prairies, etc. (2) D'après le texte de l'art. 1403, c'est selon que les mines, carrières ou tourbières, ont été ouvertes avant ou pendant le mariage, que leurs produits sont ou ne sont pas des fruits; mais il est clair que la règle n'est ainsi formulée qu'en vue des immeubles qui appartenaient déjà à l'époux lors de la célébration, et qu'il faut élargir la formule si l'on veut qu'elle embrasse aussi les immeubles qui arrivent à l'époux pendant le mariage. Ainsi, un mariage s'est fait en 1830; le père d'un des époux a ouvert une mine sur son immeuble en 1835, et c'est en 1840 que cet immeuble est arrivé à l'époux par succession: il est bien évident que les produits de la mine seront des fruits pour la communauté, quoique cette mine n'ait été ouverte que pendant le mariage. Il faut donc dire que les produits seront ou non des fruits, selon que la mine a été ouverte avant ou après le moment où a commencé la jouissance de la communauté sur cet immeuble. Voy. MM. Toullier (t. XII, no 128); Duranton (t. XIV, no 147); Paul Pont et Rodière (t. I, no 397 et suiv.); Odier (t. I, no 98); Troplong (t. I, no 560 et suiv.); Bellot (I, 146); Battur (200); Glandaz (Encyclop., vo Comm., 76); Taulier (V, 90); Dalloz (loc. cit., 700).

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l'art. 596 pour l'alluvion, de l'art. 597 pour les servitudes; il faut également appliquer la règle de l'art. 587 pour les choses de consommation, au premier rang desquelles se trouvent les sommes d'argent, de sorte que celles de ces choses qui sont propres aux époux tomberont dans la communauté même pour la propriété, mais à charge de restitution lors de la dissolution. Le Code lui-même suppose l'application de cette règle dans les art. 1403, in fine, et 1433, où il parle de valeurs mobilières propres aux époux et que la communauté prend cependant, sauf à en payer récompense.

VII. 3o CONQUETS. L'actif de la communauté se compose, en troisième et dernier lieu, de tous les biens, tant immeubles que meubles, qui sont acquis pendant le cours du mariage par toute cause qui ne se trouve pas exclusivement personnelle à l'un des époux (1). Quant à ceux provenant d'une cause personnelle à un époux, ils restent propres à cet époux, si ce sont des immeubles; que si ce sont des meubles, ils appartiennent encore, en règle générale, à la communauté, non plus d'après notre 3o et comme conquêts, mais d'après le 1o, qui, en général (et sauf exception pour les produits non fruits, pour les meubles donnés avec réserve et pour quelques autres cas précisés plus loin), attribue à cette communauté tous les biens meubles des époux (2).

La communauté étant en possession de tous les biens, et le moyen pour un époux d'établir que tel ou tel bien lui est propre étant on ne peut plus facile, il était tout naturel de déclarer que la présomption serait ici en faveur de la communauté, et que tout bien serait réputé commun jusqu'à ce que l'un des époux soit venu établir qu'il lui est propre. C'est ce que fait l'art. 1402, dont la règle, formulée seulement pour les immeubles, s'applique également aux meubles, et à plus forte raison, puisque, pour ces meubles, la qualité de propres est encore plus exceptionnelle et plus rare. Ainsi, d'une part et pour ce qui est des meubles, tous sont censés appartenir à la communauté jusqu'à la preuve faite par l'époux, soit d'un droit de propriété personnelle sur tel d'entre eux, soit d'un droit à une récompense pour tel autre que cette communauté n'a pu prendre que sauf restitution. D'autre part et pour les immeubles, cas où la présomption était évidemment moins énergique, cette présomption existe encore, et l'immeuble lui-même sera réputé commun (3), tant qu'un des époux ne prouvera pas qu'il lui est propre.

Ainsi, même pour un immeuble, c'est à l'époux qui lui refuse la qualité de bien commun de faire preuve à cet égard; et, pour cela, il

(1) L'usufruit qui grevait un propre de l'un des époux et qui a été acquis pendant le mariage entre aussi en communauté. Proudhon (Usuf., 2681); Bugnet, sur Pothier (639); Pont et Rodière (no 412); Dalloz (719); Req., 16 juill. 1845. Voy. cependant Lebrun (liv. 3, chap. 2, sect. 1); Pothier (639); Merlin (Rép., v Récomp., sect. 1, 85, no 3).

(2) Voy. suprà la note première sur le n° 1.

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(3) Et par la même réputé acquét, comme dit l'art. 1402, puisque les immeubles, à la différence des meubles, n'appartiennent jamais à la communauté qu'autant qu'ils ont été acquis après la célébration du mariage, tout immeuble possédé par un épous avant le mariage lui restant propre.

lui faut établir, ou qu'il en avait soit la propriété, soit la possession, dès avant le mariage, ou qu'il lui est arrivé depuis, soit par succession, soit par donation, soit par remplacement d'un précédent immeuble propre, soit par l'une des autres causes donnant des immeubles propres et qui vont être indiquées par les art. 1404-1408.

Par exemple, l'immeuble que l'époux avait acheté avant son mariage sous une condition qui ne s'est réalisée que pendant la communauté; celui qu'il avait donné ou vendu avant la célébration, et qui lui revient pendant le mariage par l'effet d'une révocation légale de la libéralité ou d'une rescision de la vente; celui qu'il avait acheté d'un mineur ou d'une femme mariée non autorisée, et pour lequel il n'a obtenu que pendant le mariage la ratification nécessaire, lui seront reconnus propres; car dans tous ces cas et autres analogues, la propriété de l'époux, par l'effet rétroactif de la condition, de la résolution ou de la ratification, se trouve être antérieure au mariage (1).

Et de même que l'immeuble sera propre et non conquêt dès là que l'époux justifiera d'un droit de propriété remontant au delà du mariage, alors même que cette propriété n'y serait pas accompagnée de la possession (comme il arrive dans le cas d'un achat fait avant le mariage sous une condition suspensive dont l'accomplissement ne s'est réalisé, et n'a ainsi donné lieu à la possession de l'époux, que postérieurement à la célébration), de même la simple possession antérieure au mariage (pourvu, bien entendu, qu'il s'agisse d'une possession légale et à titre de propriétaire, d'une possession conduisant à la prescription) suffira par elle seule, et sans avoir été accompagnée de la propriété, pour exclure l'immeuble de la communauté (2). Ainsi, peu importe que cette possession légale n'ait duré que fort peu de temps avant le mariage, puisque, à quelque moment que la prescription s'accomplisse, elle aura un effet rétroactif et remontant à l'origine de la possession (3). Et peu importe aussi, comme l'a décidé avec raison la Cour suprême en cassant une décision contraire de Cour d'appel (4), que la prescription ne fût pas encore accomplie lors de la dissolution de la communauté, et que la propriété prétendue de l'époux ait été contestée entre cet époux et des tiers, puisque, quand même ces tiers

(1) Il en était autrement autrefois, dans le cas d'acquisition faite d'une femme non autorisée, et l'immeuble pour l'aliénation efficace duquel intervenait, pendant la communauté, le consentement de la venderesse devenue veuve ou dûment autorisée, formait un conquêt. Ceci tenait à ce que l'aliénation de la femme non autorisée étant alors radicalement nulle et non pas seulement annulable, comme aujourd'hui, c'était dans le consentement donné régulièrement plus tard, et pendant le cours de la communauté, que se trouvait le titre de l'acquisition. Aujourd'hui que l'acte est seulement annulable et peut se ratifier, il est, par l'effet de l'approbation donnée postérieurement, valable rétroactivement et à compter du jour même où il a eu lieu. Conf. Tessier (Société d'acq., no 28); Troplong (499); Dalloz (742); Duranton (170); Toullier (179); Pothier (185).

(2) Duranton (XIV, 177); Pont et Rodière (no 420); Odier (114); Troplong (529); Dalloz (760).

(3) Duranton (178); Rodière et Pont (no 421); Odier (115); Troplong (534) ; Dalloz (761). Contrà: Bellot (I, p. 135).

(4) Cass., 4 mai 1825; et aussi Rej., 23 nov. 1826.

feraient déclarer inexistant le prétendu droit de l'époux, ce ne serait toujours pas au profit de la communauté, vis-à-vis de laquelle cet époux doit toujours triompher, sauf à succomber, s'il y a lieu, vis-àvis des tiers.

Mais si la possession antérieure à la célébration a, pendant le mariage, été reconnue insignifiante par l'époux, et donné lieu, non plus à une simple ratification de l'acte primitif, mais bien à un nouvel acte translatif de propriété, il est clair que, la propriété n'ayant alors sa source que dans ce dernier acte, l'immeuble serait un conquêt, et la doctrine contraire de Toullier (XII, nos 173 à 177) est une erreur certaine. Il est évidemment inexact de dire, comme le fait cet auteur, que la disposition de notre art. 1402 est une innovation; que le droit coutumier n'admettait comme excluant la qualité de conquêt que la propriété antérieure au mariage; et que le Code, en admettant de plus la possession, entend parler d'une possession quelconque. L'ancien droit, comme le Code (et la preuve s'en trouve dans Pothier à chaque page, et notamment au no 157), admettait aussi bien la possession que la propriété, et le Code, comme l'ancien droit, veut une possession légale, c'est-à-dire une possession juridiquement efficace et dans laquelle se trouve la cause du droit de l'époux. C'est donc avec raison que la doctrine de Toullier à cet égard est repoussée et par les arrêts et par les auteurs (1).

Quant aux circonstances de l'une desquelles un époux devra faire la preuve pour établir qu'un bien lui est propre, non plus comme lui ayant appartenu ou ayant été possédé par lui avant le mariage, mais comme lui étant advenu pendant le mariage par une cause qui l'empêche d'entrer en communauté, on les comprendra par l'étude que nous allons faire sous les articles suivants des différents cas dans lesquels le bien reste exclu de la communauté. Répétons seulement ici ce que nous avons déjà dit incidemment, que la succession et la donation ne sont pas les seules causes qui donnent des propres, et que notre art. 1402, en ne parlant que de celles-ci, a seulement indiqué les principales. Nous allons voir, en effet, qu'en outre de ces deux causes, prévues par les art. 1404 et 1405, une troisième est indiquée par l'article 1406, une quatrième par l'art. 1407, une cinquième par les articles 1434 et 1435 que nous étudierons de suite ici, puis une sixième et dernière par l'art. 1408.

Il va sans dire, au surplus, que l'époux peut faire la preuve des faits dont il s'agit par tous les moyens possibles, et aussi bien par témoins que par titres (2).

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(1) Delvincourt (t. III); Battur (207); Odier (116); Duranton (XIV, 180); Zachariæ (III, p. 421); Rodière et Paul Pont (I, 425); Duvergier (sur Toullier, no 174); Troplong (I, 526); arrêt de Cass. précité du 4 mai 1825. Req., 23 nov. 1826. (2) Rej., 29 déc. 1836 (Dev., 37, 1, 437); Liége, 5 juin 1839. Jugé même que preuve peut être induite des présomptions de fait que fournissent les circonstances de la cause. Riom, 10 nov. 1851 (Dev., 51, II, 774). Voy. Pau, 8 mars 1865; Sir. et Dev. (1865, 11, 90).

1404.

DES BIENS PROPRES AUX ÉPOUX.

1o Des propres immobiliers.

Les immeubles que les époux possèdent au jour de la célébration du mariage, ou qui leur échoient pendant son cours à titre de succession, n'entrent point en communauté.

Néanmoins, si l'un des époux avait acquis un immeuble depuis le contrat de mariage, contenant stipulation de communauté, et avant la célébration du mariage, l'immeuble acquis dans cet intervalle entrera dans la communauté, à moins que l'acquisition n'ait été faite en exécution de quelque clause du mariage, auquel cas elle serait réglée suivant la convention.

1405. Les donations d'immeubles qui ne sont faites pendant le mariage qu'à l'un des deux époux, ne tombent point en communauté, et appartiennent au donataire seul, à moins que la donation ne contienne expressément que la chose donnée appartiendra à la communauté.

1406. L'immeuble abandonné ou cédé par père, mère ou autre ascendant, à l'un des deux époux, soit pour le remplir de ce qu'il lui doit, soit à la charge de payer les dettes du donateur à des étrangers, n'entre point en communauté, sauf récompense ou indemnité.

SOMMAIRE.

I. Observation et renvoi pour les propres mobiliers. Quant aux propres immobiliers, la première classe se compose des immeubles que les époux possèdent au jour de la célébration. Il y a toujours une exception pour l'immeuble qu'un époux aurait acheté depuis la passation du contrat. La réciproque n'a pas lieu : controverse.

IL. Sont propres, en second lieu, les immeubles échus pendant le mariage par succession. Ils le sont pour le tout, quand même il y aurait une soulte à payer, mais sauf récompense. Les art. 747 et 351 présentent des cas de succession soumis à cette règle. Erreur de Delvincourt.

III. Sont encore propres les immeubles arrivant pendant le mariage par donation entre-vifs ou testamentaire, à moins de déclaration contraire du disposant. Mais il faut que la donation soit faite personnellement à l'un des époux; si elle l'était conjointement à tous deux, l'immeuble serait commun: controverse. IV. Sont propres, en quatrième lieu, les immeubles qu'un époux reçoit de l'un de ses

ascendants, soit comme payement de ce que l'ascendant lui doit (pour dot ou pour une autre cause), soit à la charge de payer les dettes de cet ascendant envers d'autres personnes.

I. — Quoique ces trois articles, ainsi que les quatre qui nous resteront à étudier après eux pour terminer notre matière, ne parlent que de propres immobiliers, on a vu par ce qui précède qu'il existe aussi des propres mobiliers; et nous aurons soin, après avoir expliqué les sept articles indiquant les causes d'où proviennent les immeubles propres, de préciser celles qui impriment cette qualité de propres à des biens meubles.

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