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La Monographie des roses dont le succès fut prodigieux, ne tarda pas à être suivie du Choix des plus belles fleurs et de quelques branches des plus beaux fruits.

Cet ouvrage, qui est aussi fort estimé, présente quelques inégalités. La partie des fruits n'est pas exécutée avec autant de perfection que celle des fleurs. Il faut reconnaître que M. Redouté ne peignait pas les fruits aussi bien que les fleurs.

Quelle est la cause de cette différence? L'artiste aurait-il négligé la peinture des fruits, où serait-il par la nature de son talent appelé à les peindre moins bien que les fleurs?

Il est probable que M. Redouté n'aura pas porté sur cette partie de l'art tous les soins, toute l'application qu'il a consacrés à celle qu'il avait choisie, qui faisait ses délices, qu'il aimait passionnément. Peut-être la cause d'une perfection moins grande sur ce point tient-elle au sentiment qui l'inspirait dans ses compositions. Toutes les affections de l'artiste se concentraient sur les fleurs; il leur avait voué une espèce de culte; il en avait fait comme des êtres animés, doués de sentiment; il était heureux de les voir, et les peignait con amor. Aussi, les fleurs de Redouté, se balançant mollement sur leurs tiges, semblaient répondre au sentiment qui leur avait donné la vie. Il n'en était pas de même des fruits. Les fruits, aux yeux de Redouté ne présentaient qu'une nature morte, qui ne pouvait produire le même prestige.

C'est un trait de ressemblance de plus que le talent de Redouté eut avec celui du célèbre Van Huysum, si admirable dans la peinture des fleurs, et qui ne put réussir à peindre les fruits.

Si, nous avons fait cette remarque, c'est qu'elle fait ressortir les qualités éminentes du talent de l'artiste. Tel excelle dans un genre, qui souvent est médiocre dans un autre. Le véritable artiste est celui qui se passionne vivement, et il n'atteint à la perfection de l'art qu'autant qu'il est fortement impressionné. Nous l'aimons mieux supérieur dans un genre, que médiocre dans plusieurs.

Le dernier ouvrage publié par Redouté présente un C'hoix de soixante roses nouvelles, non encore figurées; il est dédié à S. M. la Reine des Belges, sa royale élève.

La jeune Reine n'a pas oublié celui qu'elle appelait son bon maître. Avant de quitter la France, elle lui laissa un précieux souvenir: un bouquet, dont les fleurs, peintes par elle-même, étaientdisposées de manière à former un ingénieux emblême de sa reconnaissance.

M. Redouté était peintre de fleurs du cabinet de la Reine des Français ; il avait eu le bonheur d'approcher souvent de la famille royale, d'enseigner l'art de peindre les fleurs à Sa Majesté, alors duchesse d'Orléans, à Mme Adélaïde et aux jeunes princesses Louise et Marie. La princesse Marie, enlevée sitôt aux arts qu'elle cultivait avec tant de distinction, objet d'éternels regrets, quittait quelquefois le ciseau du statuaire pour saisir d'une main légère le pinceau dont elle savait aussi se servir avec habileté.

Peintre favori des reines, Redouté avait été admis par Marie-Antoinette au Petit-Trianon. La jeune et infortunée princesse était alors l'objet de tous les hommages, et l'éclat dont elle brillait rejaillissait sur le trône. L'artiste qu'elle honorait d'un grâcieux sourire eut le bonheur de lui plaire en reproduisant les fleurs des parterres qu'elle cultivait ellemême. Il fut aussi accueilli avec une affectueuse bienveillance par l'impératrice Joséphine, qui aimait à le voir dans ses jardins de la Malmaison, dont il peignit les plus belles plantes. La bonne Joséphine, succombant au chagrin d'un cruel abandon, le reçut encore la veille de sa mort, et lui adressa de touchantes paroles.

A l'art de peindre les fleurs, Redouté joignait le talent de l'enseigner et le secret de le faire aimer. Grâces à ses leçons, à l'attrait qui s'y attachait, ce genre de peinture, qui convient si bien aux femmes, se répandit de plus en plus. Les élèves qu'il forma sont en grand nombre. Nous citerons parmi les dames qui l'ont eu pour maître et qui se distinguent par un beau talent: Mesdames Panchoucke, de Chantereine, Olympe Arson, Janet et Delaporte-Bessin.

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Pour faciliter l'exécution des dessins coloriés, Redouté inventa un procédé de tirage en couleur, d'après lequel les couleurs primitives sont appliquées sur les planches. Lorsque le papier en a reçu l'empreinte, le pinceau n'a qu'à la retoucher légèrement et à étendre dessus des teintes plates et transparentes. Ce procédé a contribué aux progrès de l'art en multipliant les copies, en leur donnant une perfection qui les rapproche davantage du modèle. M. Redouté, sur le rapport du jury des arts, chargé d'examiner les produits de l'industrie nationale, a obtenu une médaille pour cette invention dont il ne profita guères, et qui fut exploitée au préjudice de ses droits.

Les nombreux ouvrages que Redouté publia sur l'iconographie des plantes, avec des planches coloriées, le firent connaître plutôt comme savant iconographe que comme habile peintre de fleurs. Car quelque perfectionné que soit le procédé de tirage en couleur, jamais il ne rendra la finesse de la touche originale, ni toutes les nuances du modèle. C'est dans les admirables aquarelles, peintes par l'artiste luimême, que se retrouve son talent tout entier. C'est par là que son nom brille à côté des noms des artistes modernes les plus célèbres, de Van Spaëndonck et de Vandaël.

Les bouquets de Redouté sont composés avec beaucoup d'art; et pourtant l'art ne s'aperçoit pas ; ils semblent sortir des mains de la nature. Comme toutes les fleurs se groupent avec grâce! comme les oppositions sont habilement ménagées! Quelle harmonie au milien de cette diversité de couleurs! Quelle savante combinaison dans la distribution des demi-teintes et des ombres! L'éclat trop vif de certaines fleurs est amorti dans la demi-teinte; celles dont les tendres nuances seraient perdues dans l'ombre, ressortent au grand jour avec tous leurs avantages. Comme la lumière circule largement partout! La vigueur du coloris n'ôte rien à la transparence des tons; la couleur n'est pas moins suave que brillante. Sous la grosse main de Redouté qui peignait avec tant de légéreté, les fleurs ont conservé toute leur fraîcheur; la rosée du matin couvre encore leurs feuilles ; la goutte

d'eau brille sur leurs corolles. On reconnaît que le goût le plus pur a présidé à tout cet arrangement. Les diverses parties du tableau concourent à l'effet de l'ensemble et forment un tout harmonieux.

Qui pourrait compter les fleurs que Redouté a fait éclore! Il eu ignorait lui-même le nombre. Chaque exposition du Louvre offrait à notre admiration quelques-unes de ces charmantes productions. Cette année encore la place qu'il avait conquise à l'entrée de la grande galerie était honorablement occupée par les dernières fleurs sorties de son brillant pin

ceau.

Vous vous rappelez, messieurs, le jour de notre dernière réunion, il y a un an, à cette même place!.. Redouté y assistait... Je vous entretenais des productions de nos collègues exposées au Louvre, et pour couronner les éloges donnés aux fleurs de Redouté, je citais les beaux vers de M. Jules Baget. Vous avez applaudi à cet hommage rendu au talent du grand artiste par un de ses élèves qui ne se distingue pas moins dans la poésie que dans la peinture. Comme le bon vieillard octogénaire, encore jeune par la vigueur et la fermeté de son pinceau, paraissait heureux au milieu de ses collègues! Avec quelle effusion de coeur il répondait à l'expression de nos sentimens, à notre admiration pour son beau talent? Hélas! c'était le dernier jour de bonheur qu'il devait passer avec nous !

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PAR MONNIER DE RICHARDIN,

Professeur de Droit, et successivement Recteur et vice- Recteur à l'Université de Douai.

(SECOND ARTICLE.)

Les personnes avec lesquelles Monnier de Richardin avait les relations les plus fréquentes à Paris, appartenaient à l'état ecclésiastique. Ce qui s'explique par l'intérêt qu'il avait à s'assurer la protection des hauts dignitaires de cet ordre pour faire triompher les prétentions de l'Université de Douai.

Dans ses rapports avec le jeune abbé de Guébriant, parent du célèbre maréchal de ce nom, il apprit de cet ecclésiastique diverses particularités de la guerre atroce suscitée dans les Cévennes par l'inflexible volonté de Louvois et par l'intolérance ombrageuse d'une partie du clergé.

<< Cet abbé me conta quelques désordres et cruautés com>>mises par les fanatiques des Cévennes, entre autres, » qu'ayant rencontré un officier de l'armée du Roy, ils lui. » coupèrent la langue et lui tirèrent les yeux de la tête avec » un tire-bourre. Une autrefois, ils traitèrent d'une manière » étrange un curé qui les avait reçus chez lui et à qui ils di>> rent à la fiu du repas: Nous vous sommes bien obligés

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» M. le curé de toutes vos civilités, mais il nous vient une envie » qu'il faut que nous nous passions, de vous fouetler vous ou

» votre chat.

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