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même époque, c'est à-dire, en 1703 et 1704, il s'opposa encore aux empiétemens des jésuites en les empêchant de s'emparer de la chaire de mathématiques, dont ils s'efforçaient depuis long-temps d'obtenir la concession.

Adversaire infatigable de cette compagnie, il s'attira sa haine et ne pût en détourner les effets. Aussi, le 7 février 1705 reçut-il une lettre de cachet du roy. « Elle m'ordon»nait, dit-il, de me retirer à Bourges; cet ordre fut adressé » à M. de Bagnols, intendant de Flandres, qui l'envoya à • M. Hustin, son subdélégué à Douai. »

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« Celui-ci n'eut pas la force de me l'apporter lui-même; » il en fut plus touché que moy, j'écrivis aussitôt un billet ⚫ audit Hustin, par lequel je lui marquais que quoique le public fut bien convaincu de mon innocence et de la droi. ture de mes intentions, j'avais néanmoins reçu cet ordre >> avec toute la soumission possible, et que pour mieux mar» quer cette soumission, j'étais résolu de partir sur-lechamp; mais que comme garçon, j'avais une famille assez » nombreuse, composée de plusieurs proches parens et de quelques domestiques, et qu'il estait nécessaire de donner quelques ordres à mes affaires avant mon départ, j'étais persuadé que M. l'intendant ne trouverait pas mauvais » que je ne partisse que le lendemain. Le jour fut donc employé à régler ma famille autant que la briéveté du temps » le pouvait permettre. J'eus la consolation de trouver une >> multitude considérable d'amys très-solides, entre lesquels plusieurs m'offrirent leur crédit, d'autres leurs secours » et quelques-uns même leurs bourses. Je reçus ce jour-là » les visites et les complimens de tous les corps de notre » ville, tant de l'Université que de l'Estat major de la Gou>> vernance et du Magistrat. Tous les honnêtes gens de la » ville, et en particulier les écoliers des Facultés de Droits » vinrent en foule, entre lesquels j'eus la consolation d'en voir plusieurs pleurer à chaudes larmes. Dieu me fit la grâce d'être le moins affligé de tous, et ma fermeté se redoublait pour deux motifs principaux : le premier, que » je n'avais rien fait que pour le salut de l'Université et de

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était pertout le que » toute la ville ; et le deuxième, suadé que je ne souffrais persécution que pour la justice.»>

Les regrets touchans exprimés par tout ce que la ville possédait alors de personnages notables, soit par leurs fonctions ou leurs lumières, étaient une protestation digne contre la mesure arbitraire prise à l'égard d'un homme de conscience et de résolution.

Cette protestation calme honore à-la-fois ceux de qui elle émaue, et celui à l'occasion de qui elle fut faite.

La noblesse du caractère de Monnier de Richardin se révèle dans une lettre qu'il écrivit de Bourges, le 18 mars 1705, à M11o Du Bellay, chanoinesse de Denain, et dans laquelle on trouve le passage suivant :

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« Je ne serais pas fâché d'avoir M. de Boufflers pour juge. » Je ne crois pas à propos d'employer encore la protection de Mme la princesse de Conty, ni même le crédit de M. LePelletier; tant d'intercesseurs pourraient me nuire. Sou» vent plus un homme est innocent et considérable par son caractère, plus on s'attache à faire durer la persécution : » si ce n'estait qu'un malheureux, et qu'il fust véritable⚫ment coupable, on n'y regarderait pas de si près. A l'é» gard de la demoiselle, amie de M. le chancelier, je déclare » que ce canal ne me plaist nullement. Car outre l'antipathie qu'on dit y avoir entre M. le Chancelier et M. Cha» millart, c'est que cette demoiselle ne se remue que par le » métal; et telle est mon humeur que j'aimerais mieux être » exilé toute ma vie, que de donner seulement une pistole » pour accélérer mon retour. Il n'appartient qu'à un criminel de racheter son supplice, et je ne veux pas qu'il soit » dit que j'aye fait finir à beaux deniers comptans une disgrâce que je ne me suis attiré que pour être trop fidèle au roy, et pour n'avoir fait que ce qu'un honnête homme » aimant son devoir a dû faire. »

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Ces sentimens élevés aident à supporter ce que l'exil a de pénible, mais non à en abréger la durée; aussi celui de

Monnier de Richardin ne cessa-t-il que le 2 septembre 1707, par suite de la puissante intervention de M. l'évêque d'Arras.

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« Le 16 octobre, Monnier arriva à Douay ; la nouvelle de mon retour, dit-il, s'estant répandue dans la ville, grand » nombre d'honnêtes gens vinrent m'en féliciter. Je vis M. » de Pontmarie, gouverneur de Douai, mon généreux amy, » lieutenant du roy, au même gouvernement. J'eus la con»solation d'être convaincu que la joie publique estait sin» cère, et je fus rendre grâce à Dieu avec plusieurs de mes » amys dans la chapelle de l'abbaye de Paix. >>

Monnier de Richardin reprit aussitôt ses fonctions; ses collègues qui devaient élire un nouveau recteur deux jours après son arrivée, voulaient l'élever à cette dignité, mais il refusa, dit-il, par diverses raisons qu'il ne donne pas. Cependant, on peut à bon droit, supposer qu'il craignit d'appeler de nouveau sur lui par cette distinction la haîne de ses ennemis.

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Le journal de Monnier s'arrêtant presque aussitôt après son retour à Douai, on terminera cet article en rapportant une solennité Universitaire, qui eut lieu à cette époque : « Le » 25 octobre, dit-il, se célébra au college St.-Waast, l'acte » de licence des maîtres-ès-arts; j'y assistai, et on me fit >> beaucoup d'honneur. Cette cérémonie se pratiqua de cette » sorte; premièrement, le bédeau de la Faculté des arts appela à haute voix ceux du collège St.-Waast (ils avaientla » préséance ce jour-là, parceque la cérémonie se faisait dans » leur collége); puis ceux du collège du Roy ; et enfin, ceux » du collège d'Anchin: Ensuite le sieur de Meuricourt, professeur de philosophie, prononça un discours latin qu'il partagea en deux parties; dans la première il fit voir qu'il n'y avait rien de si précieux que l'or: dans la se» conde, il n'y avait rien de plus vil. Il adressa la fiu de son » discours au chancelier de l'Université, en lui présentant » les candidats là présens au nom de la Faculté des Arts; >> bedeau relut de rechef tous leurs noms, et ils prêtèrent » ensuite le serment de Foy, suivant le formulaire prescrit

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» par le concile de Trente. Puis, ils jurèrent d'observer les » statuts de la Faculté, que le bedeau lut à toute voix ; enfin, ils se mirent à genoux et reçurent la bénédiction » du chancelier qui les créa : Artium licentialos autoritate » apostolica et regiá. »

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Cette séance universitaire prouva qu'alors la direction donnée aux études était peu éclairée. En effet, quelle opinion peut on avoir des connaissances acquises par la jeunesse de cette époque, quand on voit un professeur de philosophie développer sérieusement devant un nombreux auditoire des thèses puériles. Ce n'est point avec de frivoles controverses et d'ingénieux paradoxes qu'on forme des hommes capables de servir utilement leur pays.

On a restreint autant que possible les citations que l'on a faites relativement aux affaires de l'Université de Douai, parce que les contestations qui ont eu lieu alors ont perdu une grande partie de leur intérêt.

Toutefois, on doit dire, que ces Mémoires seraient fort utiles à consulter si l'on voulait écrire l'histoire de cette Université. On puiserait à cette source des documens curieux qu'on ne pourrait rencontrer ailleurs pour la période de temps que l'auteur embrasse dans son journal.

On y trouverait surtout des renseignemens et des faits pleins d'intérêt sur les professeurs de l'Université, notamment sur MM. Gallois, Denys, Turpin, Plaisant, Delcourt, etc., etc., sur le rétablissement du collège de Marchieunes et sur la Faculté de médecine. On publiera peut être ailleurs quelques articles relatifs au séjour que Monnier de Richardin a fait à Bourges en 1705, 1706 et 1707; inté ressans pour le Berry, ils ne pourraient trouver leur place dans un recueil où l'on ne s'occupe que de la Flandre et du Haynaut.

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MARTIN DE VOS.

MARTIN DE VOS, artiste d'une imagination inépuisable, d'une conception hardie et riche, d'une exécution aussi prompte que facile, est trop peu connu, même dans le pays qu'il illustra par ses talens et qu'il orna de ses innombrables ouvrages. Sorti d'une famille que l'on peut comparer à ces arbres qui donnent à la fois de belles fleurs et de bons fruits, il eut pour ancêtres et pour parens des peintres et des poètes : sa famille, féconde surtout en artistes, produisit Pierre, Paul et Simon de Vos, peintres, et Laurent de Vos, musicien, auteur de motets imprimés, mort décapité à Cambrai, dans les troubles de 1580 (1).

Martin de Vos, vit le jour à Anvers, la ville commerçante et artistique, où les richesses et les chefs-d'œuvre abondaient, où les négocians habitaient des palais, et où les peintres, riches et considérés, formaient une corporation aussi nombreuse que celle des bouchers ou des boulangers dans d'autres villes; il prit naissance au commencement de ce XVI° siècle, si remué, si remuant, si novateur, si guerroyant et si fécond en grands hommes de tous genres, dans les lettres, dans la guerre et dans les arts.

Martin eut pour père et pour maître Pierre de Vos, assez

(1) Voir la notice que nous avons donnée sur Laurent de Vos, maître de chapelle de la cathédrale de Cambrai, dans les Archives du Nord, première série, Hommes et Choses, p 231.

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