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publicité au portrait du plus célèbre sculpteur dont Valenciennes s'honore, et nous l'avons fait exécuter au burin par M. Malfeson, graveur de notre pays, artiste estimable et trop peu connu, qui cultive dans l'obscurité de la province un art de plus en plus abandonné, mais que la lithographie ne parviendra pas à faire totalement oublier. L'autorité municipale de Valenciennes a donné le nom de Saly à une des rues neuves de cette ville; c'est une justice rendue à une des gloires de la cité: on reste étonné de ne pas voir figurer ce nom honorable dans la Biographie universelle, ouvrage estimable à tant de titres, malheureusement trop souvent incomplet sous le point de vue artistique: c'est cette omission qui nous a engagé à consacier une notice un peu étendue à cet excellent artiste; puissions nous contribuer à empêcher sa mémoire de se perdre dans le souvenir de nos concitoyens!

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L'ABBAYE

DB

MARQUETTE-LEZ-LILLE.

La comtesse Jeanne de Constantinople joue assurément un grand rôle dans l'histoire de Lille. Elle avait été éprouvée par de cruelles infortunes: son père, mort misérablement après avoir tenu avec gloire les rênes de l'Empire d'Orient; son époux vaincu et captif, lui qui s'était auda cieusement vanté de charger de chaînes, le sage et vaillant Roi de France; un imposteur, honteusement puni, mais qui sur des esprits crédules et presque toujours enclins à la rébellion avait laissé de terribles impressions contre sa piété filiale, et des doutes effrayants sur la fin véritable du grand Baudouin; enfin, la perte prématurée de son enfant unique, n'avaient que trop porté la riche souveraine de Flandres à réfléchir sérieusement sur le néant des grandeurs humaines et à tourner à jamais ses regards vers un monde plus heureux. Dans son siècle, les puissants du jour, lorsqu'ils étaient désabusés des illusions de la fortune et de la renommée, songeaient ordinairement, pour rendre plus efficace leur paix avec le ciel, à fonder un couvent, ou à enrichir quelque communauté naissante. Ainsi l'Abbaye de Clairmarais avait eu pour fondateur Thierry d'Alsace, ainsi l'Abbaye de Marquette s'éleva par les pieuses prodigalités de Jeanne de Constantinople.

Les premières constructions de l'Abbaye de Marquette, dont la célébrité dura jusques à la révolution française, furent commencées en octobre 1226, dans un lieu dit la Vieille Cour, proche de la rive gauche de la Marque, et non loin du Pont-à-Marque. Trois ans après on l'édifia définitivement, par suite d'arrangement pris amiablement avec l'Abbaye de Loos, dans une métairie appelée la Cour de Marquelle, contenant à peu près 4o bonniers avec un moulin à vent, près du confluent de la Marque et de la Deûle.

Le nouveau cloître fut habité en 1233. Le Comte Ferrand fut enterré, et on lui érigea dans le chœur un beau tombeau de marbre.

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L'Auguste fondatrice avait assigné à l'abbaye, entr'autres bienfaits, le don annuel de 14,000 (ou 4000) harengs secs à prélever sur ses revenus de Mardick. Cette redevance fut en. suite convertie en une somme déterminée de monnaie de Flandre. Le dénombrement des propriétés du monastère ne tarda pas à recevoir la sanction de St.-Louis.

Cette puissante princesse avait en outre établi dans le monastère un hôpital pour les pauvres malades avec une dotation annuelle de 200 livres. C'est l'origine du fameux Hôpital-Comtesse de Lille.

Trente-quatre abbesses, toutes filles de qualité, gouvernérent l'Abbaye de Marquette depuis son origine jusqu'à la fin du 17° siècle. Toutes remarquables par leurs vertus, plusieurs de ces bonnes filles possédaient une instruction profonde, un caractère élevé, et une prudence exemplaire. Diverses religieuses sous leurs ordres furent placées à la tête d'autres institutions semblables. La Gallia Christiana donne le sommaire de 35 abbesses jusqu'en 1707. Buzelin n'en cite que 31. Elles eurent beaucoup à souffrir des tourments de la guerre. Souvent, elles se retirèrent dans leur refuge à Lille et quelques unes furent captivées par l'ennemi (1).

(1) Les premieres familles du pays se glorifient d'avoir fourni des abbes

A l'exception d'un petit nombre d'événements importants, le plus souvent communs au canton où elle est située, que peut contenir l'histoire d'une communauté de filles? La narration aride des acquisitions des rentes, des donations, des échanges, des ventes, des bulles papales, des chartes des Souverains, des sauve-gardes, des décisions des magistrats, des contestations de juridiction, de droits de pêche et de cygnes; des relations de pieux pélerinages, et de miracles stupéfians; des guérisons merveilleuses, des tableaux de pensions et de contributions de guerre, de dettes libérées ; des descriptions de processions, de prises d'habits et de cérémonies religieuses; des épitaphes, des chronogrammes, des visites pastorales, des entrées de baillis et de confesseurs, des éloges réitéres aux régularités monastiques, des détails multipliés sur les mœurs et les usages des cénobites; tout cela compose en très grande partie les Annales de l'Abbaye de Marquette.

Sous la 1r Abbesse Berthe de Marbais, jadis épouse du seigneur de Molem bais, la comtesse Jeanne dont elle était parente, se dérobant aux tracas des affaires, reçut de ses mains le voile de novice, devint le modèle des religieuses, et mourut dans le cloître, entre les bras de ces pieuses filles, le 5 décembre 1244 (1). Le petit corps de logis qu'elle habitait ne

ses à Marquette. On peut citer la 4o abbesse, Eustachie de Prats, proche parente de la comtesse de Flandre Marguerite; la 6o Berthe de Croix, nièce de l'évêque de Tournai; la 7o Agnès Leneveu, sous laquelle le monastère fut pillé et brûlé le 25 juin 1297; la 17o Marguerite d'Anthoing; la 19 Marie de Licques ; la 23° Gillette de Badizelle; 24o Catherine de Berges; 27o Agnès de Croix; 29e Antoinette de Maulde; 30e Jacquette de Bailleul; 31 Marguerite du Châtel; la 33e Louise de Gand, fille du comte d'Isenghien, gouverneur de Lille et de Douai, laquelle mourut le 18 juillet 1683; la 38° abbesse, de la famille de Franqueville, fut nommée en 1 1766.

A. D.

(1). — « En l'an d'el incarnation mil CC et XLIIII, el mois de décembre, le vigille St.-Nicholai, trespassa me dame li noble contesse Jeha ne, et avoit adont à marit le noble conte Thumas de Savoie ki fu frères à le bele Bietres contesse de Prouvenche et fu mere à le royne de Franche jadis espeuse au saint roy Loys. Et avant ke me dame li noble contesse Jehane

fut démoli qu'en 1775 (1). On lui fit des funérailles magnifiques, et on lui éleva, au nom de la ville de Lille, un mausolée en marbre, auprès de celui du comte Ferrand (2). En

trespassat, pour le grand affection et le grand tenreur de dévotion k'ele avoit au couvent de chaiens et pour le fianche Thumas son marit de prendre les dras d'el ordene, et il dolans et courchié de cuer de le desservanche de tel dame, asseurés des phississiens k'ele ne pooit respasser, en grant tristeche et en grans larmes li otria. Et me dame li abbeesse Bierte et tous li couvens ki nuit et jour estoient enteur li, en gémissemens et en pleurs, en doleur de le pierte de si haute, de si noble, de si gentille dame et de si douche et loial mère ki nouvielement avoit fondée ceste maison et avoit tant fait et encore entendoit à faire grans biens, li donnèrent l'ordene en habit de novisse et de le rechut en grant joie et en grant fianche de son salut et tantost prist ses coingiés à me dame l'abbéesse deseure dite de parler et d'autres choses, et trespassa chaiens en le sale de piere, le jour deseure nommé. » (Extrait d'un manuscrit reposant aux Archives générales de Lille, sous le titre de: Particularités sur l'Abbaye de Marquette, in-4o, du XIe siècle, vélin).

(1) « Elle avoit, dit dom Gouselaire, historien de l'Abbaye de Marquette, fait bastir un hostel dans l'enceinte de ce monastère, que l'on void encore aujuord'hui, où elle avoit coustume de venir de temps en temps, et d'y rester quelques jours hors du bruit et de l'embarras de la cour pour vacquer avec plus de repos aux affaires de son salut; mais quand elle eust obtenu la permission de son époux de quitter tout-à-fait les vanités du monde, elle vint en ce monastère, non plus pour estre la maistresse ainsy qu'elle avoit toujours esté, mais pour estre la dernière de toutes, à l'exemple du Sauveur du monde, qui dit de luy-mesme qu'il y est venu pour servir et non pas pour y estre servi. »

(2) « Son corps fut icy enterré, dit dom Gouselaire, avec les cérémonies et solemnités deues à son mérite, et mis dans un tombeau de marbre, au milieu du choeur des dames, au devant de celui du comte Ferdinand (Ferrand de Portugal), son premier mary que l'on voit encor aujourd'huy. Il y avoit allentour diverses effigies relevées en bosse, qui furent toutes défigurées par les hérétiques, lorsqu'ils pillèrent cette abbaye en l'an 1566. Dom Chrisostome Henriquez, en son ménologe, rapporte l'épitaphe suivant, qu'il dit avoir esté autrefois gravé sur le tombeau de notre comtesse et dont il ne parait plus aujourd'hui aucun vestige. Est sita Flandrensis princeps et Hannoniensis

In tumulo tali: vita vivit speciali,

Sicut Susanna cælebs fuit ista Joanna
Nobilitas talis, proles fuit imperialis,

Justa, poten, fortis, clemens, ac horrida mortis.
Angelicis mixta sit turbis hæc comitissa.

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