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les plus beaux exemples de patriotisme et de foi chrétienne. Après de brillantes études faites au collège Saint-Joseph de Fontenay, il fut admis à l'Institut Catholique d'Arts et Métiers de Lille, d'où il sortit au bout de trois ans avec le diplôme d'ingénieur.

Pourvu d'un certificat d'aptitudes militaires, qui lui avait permis de choisir son régiment, il fut incorporé, le 6 septembre 1914, quelques semaines après la déclaration de guerre, au 137 d'infanterie, où ses qualités sérieuses furent vite appréciées de ses chefs. Envoyé à Nantes pour y suivre les cours d'officiers, il en revint peu de mois après aspirant et partit en mars 1915 pour le front, au moment précis où il avait la douleur d'apprendre la mort de sa sœur, dont le mari un héros lui-même avait comme lieutenant au 133° régiment d'infanterie, été grièvement blessé et fait prisonnier à l'effroyable bataille de Thann.

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Que mon amour et ma tendresse, écrivait-il le 24 avril 1915 à ses parents, vous soient une consolation dans la terrible épreuve que la Providence vous envoie, et soyez sûrs que dans quelques jours là-bas, face à l'ennemi, je ferai tout mon devoir, en brave et vrai français, et si Dieu me ramène près de vous, je n'aurai aucun reproche à me faire, et fièrement je pourrai vous aimer et vous bénir ».

Sa belle âme de chrétien et de patriote lui inspirait chaque jour les plus nobles sentiments, et c'est ainsi que le 18 mai de cette même année 1915, rendant compte aux siens de sa vie nouvelle, il leur racontait la douce et réconfortante émotion qu'il éprouvait chaque soir, en allant avec ses soldats, prier dans l'église voisine pour la prochaine victoire...

« C'est beau, je vous assure d'entendre tous ces hommes, quf demain seront peut être tombés sur le champ de bataille, chanter qu'ils sont prêts à mourir pour leur France bien aimée. Quand on a vu de tels spectacles, on ne peut pas ne pas croire à la victoire finale... Sans doute, il y a du danger,

des moments de surprise et même d'effroi, mais c'est si beau et si noble de se battre et de souffrir un peu, que je plains ceux qui n'auront jamais vu la guerre, qui n'auront pas goûté l'émotion produite par le sifflement des balles et l'éclatement des obus. Et puisque l'on doit mourir un jour, quand pourrait-on faire une plus belle mort! »

Une volonté étayée par de pareils sentiments était incapable de fléchir devant le danger, et dès le premier combat auquel il prit part, le 7 juin 1915, à Hébuterne, Louis Deligné le fit bien voir, en s'emparant l'un des premiers de la ferme de Touvent, le dernier retranchement de l'ennemi.

« J'ai vu à cette attaque, écrivait-il peu de jours après à ses parents, des blessures de toutes sortes, j'ai vu le sang couler à flots, j'en ai eu sur mes mains, sur mes habits; j'ai vu des camarades tués à côté de moi. Dieu m'a secourù et m'a donné le courage de ne pas faiblir... Et cependant, j'ai vécu des heures pénibles, en voyant tomber un à un des camarades, sans pouvoir ni les secourir, ni les venger. Mais aussi à côté de ces tristesses, que de belles et grandioses choses! On ne pense pas à la mort, allez! quand on voit la victoire couronner les efforts. Un long frisson d'une émotion indéfinissable vous secoue, quand on passe sur un bout de terrain de France, occupé tout à l'heure par les Boches et redevenu Français, grâce à nos efforts... Comme on est fier, et avec quel enthousiasme on crie: Vive la France! Il faut avoir vécu ces heures pour savoir combien elle est chère à notre cœur, celle qu'on appelle « La Patrie ».

Et ce digne fils des grands Vendéens d'autrefois d'ajouter: « Ce matin, j'ai fait dire une messe pour les morts de ma section et j'en ai demandé une autre pour les blessés. >>

Avec la même vaillance, Louis Deligné prit part en septembre, à la bataille de Tahure, avec le grade de sous-lieutenant. C'est à la suite de cette affaire qu'il obtint l'élogieuse citation suivante:

« A donné le plus bel exemple de calme et de courage en

maintenant pendant dix jours sa section sous un violent bombardement d'artillerie lourde, dans un poste avancé et en contact immédiat de l'ennemi. »

Le 15 décembre 1916, devant Verdun, remplaçant à la tête de sa compagnie son capitaine blessé la veille d'une balle d'avion, il enleva avec ses hommes, après un combat acharné de 24 heures, une position allemande. Mais blessé, à l'issue de la lutte, d'un éclat de grenade, il dut être évacué sur Luxeuil-les-Bains.

C'est de là qu'adressant ses vœux de nouvel an à sa famille, il se félicitait en termes vraiment sublimes, d'avoir pu donner quelques gouttes de son sang pour reprendre un lambeau de cette terre de France, pour laquelle tant de braves s'étaient fait tuer.

A la suite de cette action d'éclat, Louis Deligné, fut l'objet d'une nouvelle citation ainsi conçue:

« Ordre du Corps d'Armée. A remplacé le 15 décembre 1916, son capitaine blessé et a commandé sa compagnie avec habileté et énergie dans des circonstances difficiles. A brillamment conduit dans la soirée du 16 décembre cette compagnie à l'assaut d'une position allemande, qui a été enlevée. Blessé au cours de cette action. »

Ajoutons à la gloire de l'héroïque officier, qu'il devait partir le 9 décembre en permission dans sa famille, et qu'il refusa de profiter de cette faveur, en voyant que tout faisait présager une prochaine attaque de l'ennemi.

A peine remis de ses blessures, il quitta Luxeuil, revint sur le front et prit part avec sa bravoure accoutumée, le 7 mai 1917, à une nouvelle action, qui lui valut une troisième citation:

« Ordre du Corps d'Armée. — Officier très brave, a par son énergique attitude, le 7 Mai 1917, maintenu ses hommes sur une position contre-attaquée et repoussé l'ennemi. »

Il reçut à cette occasion une carte de félicitations personnelles de son commandant en chef le général de Maud'huy.

L'année 1917 s'acheva sans que le bataillon, dont faisait partie la compagnie du lieutenant Deligné, participât à d'important combats.

Mais le 28 février de l'année suivante, le jeune héros vendéen prit une part active à la violente lutte corps à corps, qui eut lieu à l'est de Chavignon, et obtint sa quatrième citation:

« Ordre du Corps d'Armée. Officier d'une bravoure exemplaire et d'un bel esprit guerrier. Le 28 février 1918, sous un violent bombardement, s'est résolument porté au secours d'un élément avancé de son groupe de combat qui avait été attaqué et bousculé; ayant repris et occupé le terrain a fait prisonniers deux allemands qu'il a ramenés et tué un troisième. »>

Le lendemain de ce brillant fait d'armes, Louis Deligné recevait << pour lui et pour ses braves, de nouveaux et affectueux compliments du général de Maud'huy ».

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Nommé lieutenant à titre définitif, il put, après plusieurs patrouilles périlleuses exécutées avec un admirable sangfroid, prendre enfin quelques jours de permission dans sa famille. C'était hélas! la dernière fois qu'il devait revoir sa chère Vendée. Retourné à son poste de combat, le 25 mai 1918; il disparut pour toujours, le 27, ayant dans un suprême acte d'héroïsme, préféré se faire tuer que de se rendre.

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Dans son magnifique ouvrage « Les Enfants du Pays Nantais et le XI Corps d'Armée », notre érudit collaborateur et ami M. Emile Gabory a consigné cet héroïque fait d'armes, qui rappelle celui du dernier carré de Waterloo, et qui compte parmi les plus glorieux de notre 137°: « Le 1° bataillon, entouré d'ennemis, dans un bois, en première ligne, tient jusqu'au soir, demandant de l'aide par pigeons voyageurs. Les pigeons ne rapportent pas, comme la colombe de l'Arche, la branche d'olivier. Le bataillon se laisse massacrer, plutôt que de céder; 200 combattants figurent au 137°:

le jour où il est relevé par des troupes fraîches; il a perdu 49 officiers, dont le lieutenant Deligné et 1750 hommes. Nulle phrase n'aurait la force éloquente de ce chiffre. Nulle phrase ne saurait dignement qualifier la splendide abnégation de pareils héros.

Doué d'une âme délicate et d'un cœur généreux, toujours prêt à se dévouer et à payer de sa personne au plus fort du danger, Louis Deligné était profondément aimé de ses hommes par sa bonté et sa parfaite humeur, et non moins apprécié de ses chefs par sa grande loyauté, son courage à toute épreuve et l'absolue confiance qu'il leur inspirait. Aussi, comme le commandant de Vallavielle l'a justement dit, la disparition de ce vaillant soldat et de ce parfait chrétien, qui faisait l'admiration de tous, fut-elle douloureusement ressentie par le 137° tout entier.

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Le 2 novembre dernier, jour anniversaire des morts le colonel du 137° faisait parvenir au père du lieutenant Louis Deligné la Croix de la Légion d'honneur, suprême témoignage de la Patrie reconnaissante à la mémoire du glorieux disparu.

Cette décoration posthume était accompagnée de cette dernière et magnifique citation:

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« Officier d'élite, d'une bravoure remarquable, s'était déjà signalé par sa très belle attitude au feu. Tué glorieusement le 27 mai 1918, à Chavignon, après avoir opiniâtrement défendu le terrain confié à sa garde. — Croix de Guerre avec palmes.

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Ce sera l'éternel honneur de la Vendée, d'avoir enfanté de semblables héros, et fourni à la France, à l'heure du péril national ses meilleurs soldats et ses plus intrépides défen

seurs.

René VALLETTE.

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