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emmena à Messène les filles naïves de Sparte. C'est lui qui après avoir fait entrer des rythmes nouveaux dans la poésie nationale et enrichi de traits nouveaux notre langue, célébra les saintes amours de Cassandre, dont le nom rappelle la prophétesse d'Ilion et se plut aux ris de Vénus l'Acidalienne. Peut-être a-t-il conçu les feux d'un amour plus profond; peut-être a-t-il senti l'implacable aiguillon de la déesse. Ainsi ses chants pleurent des blessures telles qu'aucunes ne furent mieux connues des Amours eux-mêmes. Il entreprend enfin une grande œuvre: il chante les rois et les dieux; il les orne de titres d'honneur; il montre ses compatriotes les Français descendant d'une origine troyenne et le roi Charles illustre par une longue suite d'ancêtres. C'est ainsi, en effet, que le fils d'Hector, laissant le Xanthe et le Simoïs, vint sur le Rhin, sous les auspices des dieux. Que la Grèce cède ses honneurs aux Gaulois, que Rome renonce à son antique orgueil Nous sommes vainqueurs et nous nous réjouissons des dépouilles opimes du Latium. Gloire au Gaulois, qui triomphe dans ces Jeux Olympiques! En vain Virgile, en vain Homère se vantent: l'un et l'autre sont surpassés par le Mercure Gaulois, digne de s'asseoir au premier rang sur le double coupeau de l'Hélicon, digne de donner des lois sur les sommets consacrés aux Muses.

Celui-ci, lorsqu'il vit sa patrie chancelant sous la guerre civile, les brigandages partout, les villes incendiées, la majesté royale attaquée, la terre engraissée de cadavres; maintenant, dit-il, mourons; il serait honteux de survivre à la patrie, d'accorder à nos ans d'inutiles délais ! Il dit et, se couchant sur ses vêtements, vit briller son dernier jour, tel le cygne auprès des rives couvertes de roseaux.

Ni l'ambition, ni l'amour insensé des honneurs, ni l'aiguillon de l'ignoble avarice ne le pressa; il a goûté dans un repos bien gagné, après douze lustres, l'amertume mêlée aux biens pleins de douceur. Vous qui avez à cœur sa gloire, qui déjà concevez les récompenses que mérite une telle maîtrise, allez! pleurez et priez dans des mètres harmonieux! Acquittez-vous envers le défunt de vos pieux offices. Pour nous, il nous plaît de porter dans ces funérailles un sombre manteau et dans notre deuil de laisser notre chevelure sans soins.

Voilà le chant qui attestera notre sincère douleur! voilà les honneurs dus à notre confraternité poétique. A tes mânes, o Ronsard. voilà ce que je chante, voilà ce que je voue, ce que je dédie, gage suprême de notre amitié.

J. P.

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La plate-tombe de Jehan de Grimouart

en l'Eglise d'Oyron

ES Gouffier, ducs de Roannais, marquis de Boisy et de Maulévrier, comtes d'Etampes et de Caravas, barons d'Oyron, de Passavant, de Bourg-sur-Charente et de Saint-Loup, seigneurs de Bonnivet, de Crève-Cœur et de maints autres fiefs, étaient au XVI° siècle d'opulents et très honorés seigneurs.

Ils eurent la faveur de nos souverains, et presque tous

la méritèrent.

L'un d'eux, Guillaume, avait été gouverneur de Charles VIII enfant; son fils Artus, un preux et un sage, fut l'un des héros de la charge épique de Fornoue, devint grand panetier de France et Louis XII le fit gouverneur du jeune comte de Valois qui devait être François Ier. Le frère de cet Artus fut le vaillant et malheureux amiral Gouffier de Bonnivet qui mourut à Pavie, en 1524. Puis vinrent François Gouffier, nommé évêque de Béziers en 1548, qui mourut en allant en Ecosse à titre diplomatique; le duc Claude Gouffier, grand écuyer de France, 1546, qui partagea la captivité du roi François; Charles Gouffier, chevalier de Malte, 1590, Henri Gouf

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fier, marquis de Boisy, qui mourut au combat de Saint-Iberquerque, 1639, et dont Collardeau fit en vers une épitaphe singulièrement ampoulée.

Plusieurs de leurs épouses, aussi, furent illustres en leur temps par leur valeur personnelle encore plus que par leur haute origine, par exemple Philippe de Montmorency, Phylippe noble Dame

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Qui de Dieu tant reçeut
Qu'en son ventre conceupt
Grands seigneurs magnifiques

Et Dames héroïques » (1).

Hélène de Hangest-Genlis, épouse d'Artus Gouffier, que les fastes artistiques de la Renaissance française, louent pour son intelligence et son goût en toutes les choses de l'esprit; puis Jacqueline de la Trémoïlle, Françoise de Brosse-Bretagne, Claudine de Beaune, Eléonore de Lorraine, pour ne citer que celles-là.

De leur résidence d'Oyron, sise à mi-chemin de Loudun à Thouars, et à trois lieues de chacune de ces villes, les Gouffier avaient fait une sorte de petite cour où ils aimaient à résider autant que leurs grandes charges à la Cour ou à l'armée le leur permettaient.

Comme les princes de Bourbon-Montpensier à Champigny, de l'autre côté du Loudunois, et plus, semble-t-il, que les ducs de la Trémoïlle, à Thouars, les Gouffier de Roannais entretenaient à leur service un personnel imposant de gentilshommes et de serviteurs de tous étages. Ils attirèrent à eux des artistes de premier rang qui leur rebâtirent et ornèrent leur demeure d'Oyron, édifièrent cette très belle collégiale de Saint-Maurice attenant à leur château et où les Juste, de Tours, placèrent sur les corps des Gouffier ces mausolées splendides qui comptent parmi les plus belles et les plus précieuses œuvres d'art de ce temps-là, dans l'Ouest de la France.

(1) Inscription de l'église d'Oyron.

Et sous les encouragements éclairés de tels mécènes, sous la sûre direction du bon goût d'Hélène de Hangest, deux artistes incomparables, Cherpentier et Bernart, produisirent pour eux ces très précieuses faïences d'Oyron-Saint-Porchaire, dont les moindres débris valent aujourd'hui beaucoup plus que leur poids d'or.

C'était donc tout un petit monde que ce château d'Oyron, milieu remuant et fort brillant, car les Gouffier voyaient nécessairement toute la grande noblesse des provinces de Poitou, d'Anjou, de Touraine, et du Pays Loudunois dont l'amiral de Bonnivet eût le gouvernement. Et c'est dans ce cadre où il occupait l'une des premières charges domestiques auprès des ducs de Roannais qu'évolua pendant une vingtaine d'années un gentilhomme de l'une des bonnes et anciennes maisons nobles du Bas-Poitou, Jehan de Grimouart, seigneur du Péré, près Coulonges-sur-Autise.

Il était fils de Pierre de Grimouart et d'Isabeau Girard de la Roussière, et le 18 juillet 1500, s'était allié à Renée Le Gourbeillier, fille de Jehan Le Gourbeillier, seigneur de la Gourbeillerie.

Son nom figure au nombre de ceux des nobles qui servirent au ban de 1508, après quoi il entra au service des Gouffier et fut maistre d'hostel de Hélène de Hangest, office qui comportait autorité sur le reste du personnel attaché au service particulier de l'opulente châtelaine.

Jehan de Grimouart avait alors trois enfants: 1° Geoffroy, qui devint seigneur du Péré et fut en 1538, Valet de 'a chambre du roi, puis plus tard, sous les ordres de Claude Gouffier, alors marquis de Roisy, l'un des cent gentilshom. mes de la chambre royale.

́2o Philippe, né vers 1515, qui fut d'Eglise, devint chanoine et prévôt de la cathédrale de Poitiers, puis vicaire général, de Jacques d'Escoubleau de Sourdis, évêque de Maillezais.

Devenu seigneur du Péré par la mort de son frère aîné, et voyant que le nom de Grimouart allait s'éteindre, Philippe

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donna, le 25 août 1587, là seigneurie du Péré à son neveu Jean Chevalier, à charge de porter de ce jour, le nom et les armes des Grimouart.

3°Madeleine qui épousa en 1526 François Chevalier de la Roullière, et fut mère de Jean Chevalier de Grimouart sus cité.

Sans que nous sachions exactement ce que fut son rôle dans les entreprises artistiques des Gouffier, il est certain que Jehan de Grimouart, maître d'hôtel de la Dame d'Oyron, dût forcément y participer. Ce fut pendant son service à Oyron que fut commencée, par Artus et Hélène, la collégiale Saint-Maurice qui fut continuée, après la mort d'Artus, par sa veuve et son fils Claude; que fut entreprise aussi la merveilleuse fabrication des célèbres faïences d'Oyron et que furent ciselés les plus fastueux mausolées des Gouffier.

A partir de 1524, Hélène de Hangest résida presque chaque année, durant toute la belle saison, à Oyron, et s'il ne l'accompagnait point dans ses voyages, Jehan de Grimouart dut, dans une grande mesure, la suppléer chez elle.

Hy mourut en 1532, cinq ans avant elle.

Son corps fut couché dans l'aile droite de la collégiale, avec ceux des Gouffier, et sur la longue dalle de pierre dure qui le recouvrit, son effigie en pied fut tracée et ciselée au trait profondément. On l'y voit couché la tête appuyée sur un coussinet à glands, les mains jointes dans le geste de la prière dernière que la pierre semble devoir éterniser. Ses pieds sont appuyés sur le lévrier, vieil emblème héraldique de la fidélité; de chaque côté de sa tête l'écusson des Grimouart, qui se répète par trois fois sur la soubreveste dont il est revêtu par dessus sa cuirasse. La maison de Grimouart portait: d'argent fretté de gueules de six pièces, au francquartier d'azur. Pour brisure personnelle Jehan de Grimouart gironnait de quatre traits croisés, le quartier de ses

armes.

Sur sa tombe encore, ses jambes sont armées de cuissard's et de grèves de fer, et ses pieds sont chaussés des solerets

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