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faitement bon, pas un fleuve dont les eaux ne tendent vers les lieux bas.

Cette eau cependant, si vous la frappez avec la main, et que vous la fassiez jaillir, vous la verrez s'élancer au-dessus de votre tête; si une digue arrête l'impétuosité de son cours, elle ira baigner le sommet d'une montagne.

Direz-vous que ce phénomène vient de la nature de l'eau et non de l'impulsion qu'elle a reçue? Les hommes aussi peuvent être entraînés au mal, mais c'est quand la violence des passions pervertit et étouffe l'excellence de leur nature.

Kao-tseu.

S. III.

La vie s'appelle la nature et une commune existence assimile entr'eux tous les êtres sen

sibles.

Meng-tseu. Dit-on que

la vie est la nature,

comme l'on dit qu'un objet blanc est blanc?

Kao-tseu. Sans doute.

Meng-tseu.

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Une plume blanche ressemble donc à de la neige; la neige ressemble donc au jaspe blanc? Kao-tseu. Sans doute..

Meng-tseu. Si cela est, la nature du chien est donc la même que la nature du boeuf; celle du bœuf la même que celle de l'homme?

S. IV.

Kao-tseu.-Quand nous jugeons d'un mets ou d'un tableau, le plaisir de la vue et du goût réside en nous,

les saveurs et les couleurs dans les objets; ainsi je dirai l'humanité est intérieure, la justice est extérieure.

:

Meng-tseu.

-

Comment cela?

Kao-tseu. Cet homme est avancé en âge et je le respecte; avant que je le visse, ce respect n'existait pas en moi. Cet homme est blanc, et je le juge blanc (1); voilà pourquoi je disais que la justice est extérieure. Meng-tseu. Le respect inspiré par l'âge diffère entièrement de l'affirmation de la blancheur; car la blancheur d'un cheval ne diffère nullement de la blancheur d'un homme; mais vous imaginerez-vous que je respecterai un cheval pour son grand âge, comme je respecte un vieillard? que faut-il en clure? Que le respect ne naît point du calcul des années, mais d'un sentiment de vénération inné dans tous les hommes.

en con

Kao-tseu. J'ai de l'affection pour mon frère, je n'en ai point pour un habitant de Tsin; et cette préférence est une inspiration de mon cœur ; c'est pourquoi je dis que l'humanité est intérieure. Je respecte un vieillard du pays de Tsou, aussi bien qu'un parent avancé en âge, parce que leur vieillesse éveille en moi le même sentiment; c'est pourquoi je dis que la justice est extérieure.

Meng-tseu.

Voici deux plats de chair rôtie; l'un est préparé par moi, l'autre par un homme de Tsin ;

(1) C'est d'autrui et non de moi que je tire cette idée de blancheur.

cès deux mets ont le même goût et excitent également mon appétit; s'ensuit-il que mon appétit est extérieur?

Meng-ky-tseu interrogea. Kong -tou-tseu, et lui dit Comment votre maître soutient-il que la justice est intérieure?

Kong-tou-tseu.

Nous puisons en nous mêmes

notre respect, c'est pourquoi il l'appelle intérieure. Voici un de mes concitoyens qui

Meng-ky-tseu.

a un an de plus que mon frère aîné; auquel des deux dois-je le respect?

Kong-tou-tseu.

Meng-ky-tseu.

--

A votre frère aîné. ›

Supposez maintenant que nous buvions ensemble, auquel dois-je verser le premier? Kong-tou-tseu. A votre concitoyen.

Meng-ky-tseu. -Si vous tirez de la parenté les motifs du respect, de l'hospitalité ceux de la politesse, il est donc vrai de dire que la justice est extérieure et intérieure ?

non pas

Kong-tou-tseu ne put résoudre cette difficultés il alla trouver Meng-tseu qui lui dit : De votre oncle ou de votre jeune frère lequel respectez-vous? Kong-tou-tseu. Mon oncle.

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Meng-tseu. Si dans un sacrifice votre jeune frère représente votre père ou votre aïeul, lequel respectez-vous?

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Meng-tseu. Vous pouviez raisonner ainsi et lui dire: Je fais les honneurs à mon concitoyen, parce qu'il a le titre d'hôte; mais le respect dû à mon frère

aîné est pour ainsi dire perpétuel, et celui que je têmoigne à mon concitoyen n'est que passager.

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Meng-ky-tseu interrogea Meng-tseu, et lui dit : Tantôt Kong-tou-tseu respectera son oncle, tantôt son jeune frère; la justicé est donc extérieure et non pas intérieure.

Meng-tseu. En hiver je bois de l'eau tiède, en été de l'eau fraîche; direz-vous que mon goût pour tel ou tel mets, pour tel ou tel breuvage, est extérieur?

Kong-tou-tseu interrogea Meng-tseu, et lui dit : Kao-tseu soutient que l'homme naît sans vice ni vertu ; d'autres que la force de l'éducation le rend vicieux ou vertueux. C'est pourquoi sous les règnes heureux de Wen-wang et de Wou-wang, le peuple embrassa la justice; sous la tyrannie de Li-wang et de Yeouwang, le peuple se précipita dans le vice. D'autres enfin prétendent que parmi les hommes, les uns naissent nécessairement bons, les autres nécessairement mauvais; ainsi le vertueux Yao ne peut corriger son frère Siang; le cruel Kou-seou ne peut pervertir son fils Cheun. Tcheou avait sur ses oncles Wei-tseu-ky et Pi-kan, toute la supériorité d'un prince, et cependant son funeste exemple n'altéra nullement l'éclat de leur sagesse.Maintenant vous dites que la nature. de l'homme est essentiellement bonne; tous les autres philosophes sont donc dans l'erreur?

Meng-tseu. -Si l'homme suit les vrais penchans de son cœur, il peut, sans effort, pratiquer la vertu ; c'est pourquoi je disais que sa nature est essentiellement bonne; mais s'il se laisse aller au mal, devonsnous accuser ses dispositions naturelles?

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Tous les hommes se sentent pénétrés de commisération pour le malheur, de haine pour le vice, de respect pour la vieillesse ; tous savent distinguer la vérité du mensonge.

La commisération n'est autre chose que l'humanité; la haine du vice, l'équité; le respect intérieur et extérieur, l'honnêteté; le sentiment du vrai, la prudence. Or cette humanité, cette justice, cette prudence, notre ame ne les puise pas dans les objets extérieurs; nous les possédons au dedans de nous, seulement nous ne songeons pas à exploiter cette mine féconde. C'est pourquoi le Sage a dit: Si vous les cherchez, vous les trouverez au fond de votre coeur; si vous les négligez, vous les perdrez à jamais,

Si cet homme est deux fois, cinq fois plus vertueux qu'un autre ; si celui-là est riche de vertus sans nombre; cette différence vient du plus ou moins de zèle qu'ils ont mis à cultiver les dons de la nature.

Le livre des vers dit : « Quand Dieu laissa échapper » de ses mains cette multitude de peuples, il leur >> donna la force vitale et le flambeau de la raison; >> dès-lors les hommes s'attachèrent aux lois de la mo» rale, et se passionnèrent pour la vertu. » Confucius, en lisant ce passage, s'écria: Qu'il connaissait bien le cœur humain, celui qui fit ces vers ! « Le ciel >> donne à l'homme la force vitale, mais il lui faut » un guide pour la diriger; il verse dans son sein les » semences de la morale, et, docile à cette divine im» pulsion, il trouve son bonheur dans la beauté de >> la vertu. »

- Meng-tseu dit': la vertu règne dans les années

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