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déclarait que la conservation de l'unité et le rétablissement de la religion catholique en France demandaient qu'ils donassent la démission de leurs sièges. « Nous sommes contraint, disait-il, par la nécessité des temps, qui exerce sur nous sa violence, de vous annoncer que votre réponse écrite doit nous être envoyée dans dix jours, et que cette réponse doit être absolue et non dilatoire, de manière que, si nous ne la recevons pas telle que nous le souhaitons, nous serions forcé de vous regarder comme si vous aviez refusé d'acquiescer à notre demande. »

Ce bref du pape, du 15 août 1801, n'a pas été adressé au vénérable cardinal de La Rochefoucauld, mort le 23 septembre 1800, et il n'a pu, du ciel, où ses vertus, ses souffrances, ses bienfaits, l'ont sans doute fixé, donner ou refuser sa démission.

M. de Salamon quitta Rouen dans les premiers jours d'avril 1802. Après son départ, les vicaires capitulaires continuèrent d'administrer le diocèse. Mgr Cambacérès, nommé à l'archevêché de Rouen, le 9 avril 1802, sacré dans la cathédrale de Paris, le jour des Rameaux, 11 avril 1802, par le cardinal-légat Caprara, arriva à Rouen le 14 mai 1802, et prit solennellement possession de son siège le dimanche 23 mai.

Mgr Cambacérès avait écrit de Paris, le 31 mars 1802 (10 germinal an X), avant sa nomination officielle, mais déjà arrêtée, au clergé constitutionnel de Rouen, la lettre suivante, des plus significatives:

« Je dois vous prévenir que vous êtes sans juridiction dans mon diocèse, et que votre ministère ne saurait

être utile. Jusqu'à ma prise de possession de mon siège, la seule autorité qui puisse et doive gouverner le diocèse de Rouen, ce sont MM. les Grands-Vicaires, nommés par le Chapitre, à la mort de M. le cardinal de La Rochefoucauld, mon prédécesseur. (1) »

Ainsi, le nouvel archevêque de Rouen reconnaissait comme valide l'élection des grands-vicaires par le Chapitre. « Je suis jaloux, écrivait-il aussi à Beugnot, le préfet de la Seine-Inférieure, de m'entourer d'une manière honorable (2). »

Le clergé constitutionnel réfléchit et se soumit. Il adressa, le 25 avril 1802, « à Monsieur Cambacérès, leur archevêque », son adhésion, en ces termes :

<< Instruits de la conduite qu'ont tenue, vis-à-vis de Son Eminence Monseigneur le Cardinal-Légat, Messieurs les archevêques de Besançon et de Toulouse, les évêques de Soissons, Cambray, Strasbourg, etc.; animés des mêmes sentiments qui les ont dirigés, et désirant lever, dans votre esprit, tout doute sur nos dispositions, nous vous déclarons, par cette lettre, abandonner volontairement la Constitution civile du clergé, et admettre toutes les dispositions et articles de l'accord passé entre N. S. P. le Pape Pie VII et le gouvernement français, et vous reconnaître pour seul premier pasteur et archevêque de ce diocèse, vous promettant, en cette qualité, l'obéissance que nous avons vouée dans notre Ordination à notre archevêque et à ses successeurs. >

(1) Arch. nat., AB., XIX, 353 (Legs Beugnot). Cité par M. Etienne Dejean, dans son ouvrage : Un préfet du Consulat. Paris, Plon, 1907, p. 352.

(2) Id.

Aussi, dans la première visite que le clergé fit le 15 mai 1812, à Mgr Cambacèrès, à l'hôtel de la Préfecture, on vit réunis, et pour toujours, les deux clergés, comme ils assistèrent en habits de choeur, le dimanche 23 mai, dans la cathédrale, à l'intronisation de leur archevêque.

Il résulte des faits et des dates rappelés en cette étude que, contrairement aux assertions de S. Em. le cardinal Mathieu, M. de Salamon n'eut à s'occuper, dans le diocèse de Rouen, ni du Concordat, ni de son application, et que le clergé, sauf la fraction minime des Clémentins, accepta volontiers le Concordat et s'y conforma fidèlement (1).

C'est l'honneur de Mgr Cambacérès, puissamment aidé par les prêtres admirables qui composaient alors son Administration et son Conseil, d'avoir réorganisé l'Eglise de Rouen, c'est l'un de ses meilleurs titres à la reconnaissance de notre diocèse.

(1) M. Etienne Dejean, dans son livre sur Beugnot, dit, en parlant de la Seine-Inférieure: « Le Concordat ne fut pas mal accueilli. Quatre maires seulement paraissent s'y être opposés. Le Conseil général manifesta dès le premier jour son approbation de voir « la majorité respectable du département rendue à ses habitudes anciennes et sentimentales, et assurée désormais de trouver dans la religion, dont elle regrettait les consolations, de nouveaux motifs de respect pour les lois. » Pages 348-349.

LA LIGUE ET SES LIBELLES

Par M. CHANOINE-DAVRANCHES.

Depuis que des soldats catholiques avaient, dans un accès regrettable de fanatisme et de colère, massacré à Vassy des protestants qui continuaient à chanter en français leur office devant le duc de Guise, la guerre religieuse n'avait pas cessé d'ensanglanter la France. Momentanément suspendue par des traités de paix illusoires, elle renaissait toujours plus ardente, sans que la question qui divisait les esprits fût jamais résolue. Charles IX avait cru désarmer les partis en accordant successivement des satisfactions à chacun d'eux. Il n'avait réussi qu'à se les aliéner l'un et l'autre. La révolte des principales villes du Midi, l'échec du duc d'Anjou devant la Rochelle lui montrèrent la gravité du mal il fallait compter avec les protestants. Il signa avec eux un nouveau traité de paix (1) qui leur assurait la liberté de conscience. Les catholiques ne manquèrent pas de déclarer inacceptable cette concession faite à un moment où le pape et le roi d'Espagne venaient précisément de féliciter le Gouvernement français de l'énergie qu'il avait déployée à la Saint-Barthéle

(1) La paix de la Rochelle, 1573.

my. De part et d'autre, on se montrait encore plus surexcité. Charles IX mourut; le duc d'Anjou, qui était appelê à lui succéder, n'était pas apte à dominer la situation.

Il crut faire acte de politique avisé en déclarant dès son entrée en France que les huguenots n'avaient qu'à se faire catholiques ou à sortir du royaume. Cette fanfaronnade, qui les indisposa, ne lui concilia même pas les sympathies des catholiques, parce qu'on s'aperçut bien vite qu'il n'avait pas l'intention de réaliser ses menaces et qu'il se contenta d'envoyer dans le Midi des officiers dépourvus de troupes sans tenter un effort sérieux.

Cependant la partie sage de la population désirait la paix entre les catholiques exaltés que surexcitait l'ambition des Guise et les protestants fanatiques qu'aiguillonuait la crainte des représailles, un tiers parti se forma dans le but avoué d'obtenir le rétablissement de la tranquillité publique par une prudente et mutuelle tolérance. On l'appela le groupe des politiques. Trois membres de la grande famille des Montmorency en avaient pris l'initiative, MM. de Damville, de Méru et de Thoré. Le duc d'Alençon voulut y entrer et chercha à en prendre la direction dans l'espoir caché de satisfaire, sous des apparences de patriotique désintéressement, ses visées ambitieuses. Il s'aboucha avec le prince de Condé et le roi de Navarre qui étaient alors les chefs du parti protestant, mais, au dernier moment, il prit peur et dévoila à la Cour le plan des conjurés. Le prince de Condé, averti, eut le temps de

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