Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

Ce ne fut pas seulement en ces occasions que les deux partis donnèrent des preuves de leur haine mutuelle, car sur mer ils combattaient avec la mème fureur. Deux flottes portugaises débarquèrent des troupes sur les côtes de l'Andalousie et de la Galice, où ils mirent tout à feu et à sang et où ils s'emparèrent d'un énorme butin.

Peu de temps après, de nouvelles forces furent envoyées pour défendre la côte des Algarves que l'amiral espagnol était en train de piller; les adversaires se rencontrèrent en vue du cap S. Vincent, et le combat s'engagea. Les soldats portugais, bien qu'inférieurs en forces, soutinrent intrépidement les attaques vigoureuses et réitérées de l'ennemi, mais ils succombèrent sous le nombre, furent défaits, et leur amiral fut fait prisonnier. 1337. Le roi de Portugal ne se laissa pas abattre par ces revers; il envahit la Castille, répandant partout la terreur et l'épouvante; là, il rasa plusieurs villes et bourgs et y mit le feu, attaqua la Galice, ravagea les campagnes, pilla et prit Salvaterra, arriva jusqu'à Orense et laissa partout de profondes traces de son ressentiment. 1338. A la vue d'une guerre si cruelle, le pape Benoit 12 et le roi de France, Philippe 6, tentèrent de réconcilier les deux monarques, les avertissant des grands préparatifs que faisaient les Maures, dans le but de pénétrer en Espagne; ils firent signer une trève aux deux souverains et l'on nomma de part et d'autre, des plénipotentiaires qui, de concert avec l'ambassadeur de France et le nonce du pape, procédèrent aux conférences qui eurent lieu à Alcala.

Les prétentions du monarque castillan furent si déraisonnables que le ministre de Portugal, dédaignant d'y répondre, revint à Lisbonne où il fit part à son souverain de ce qui s'était passé. Ce fut à la fin de cette même année et peu après cette malheureuse tentative de réconciliation entre les deux pays que le roi de Castille se vit forcé lui-même de demander la paix, vu que les Maures avaient envahi l'Espagne, dont déjà ils occupaient une grande partie.

La paix fut alors conclue entre le Portugal et la Castille; on échangea les prisonniers, les places prises furent restituées, et la princesse Da Constança, cause innocente de la guerre, fut remise au roi de Portugal.

1340. Pendant ce temps les Maures faisaient de grands progrès en Castille où leurs conquêtes s'étendaient de plus en plus. Le roi de Castille ayant besoin du secours de ses voisins, n'osait cependant pas le demander au roi D. Affonso, à cause de ses mauvais procédés envers lui. Il chargea de cette mission la reine Da Maria. qui obtint de son père le pardon de son mari:

E vendo o Rei sublime Castelhano
A força inexpugnabil, grande e forte,
Temendo mais o fim do povo Hispano,
Já perdido uma vez, que a propria morte;
Pedindo ajuda ao forte Lusitano,
Lhe mandava a charissima consorte,
Mulher de quem a manda, e filha amada
Daquelle a cujo reino foi mandada.

(Canto 3, estancia 101).

En effet, les troupes portugaises, commandées

2

par le roi lui-même, arrivèrent à Séville et marchèrent avec les Castillans vers le mont Corvo, d'où ils découvrirent les premiers corps de l'armée ennemie, lesquels occupaient un vaste espace. Selon les historiens, les forces musulmanes étaient de 400.000 fantassins et 40.000 cavaliers :

Nunca com Semiramis gente tanta
Veio os campos Hydaspicos enchendo;
Nem Attila, que Italia toda espanta,
Chamando-se de Deos açoute horrendo,
Gotthica gente trouxe tanta, quanta
Do Sarraceno barbaro estupendo,
Co'o poder excessivo de Granada,
Foi nos campos Tartessios ajuntada.

(Canto 3, estancia 100.)

La bataille s'engagea près du Salado, petite rivière entre Penha del Cierro et Tarifa dont ce combat conserve encore le nom; les alliés firent un horrible carnage des musulmans qui furent tués au nombre de plus de 200.000:

Quando o poder do Mauro grande e horrendo
Foi pelos fortes Reis desbaratado,

Com tanta mortandade, que a memoria
Nunca no mundo vio tão grão victoria.

(Canto 3, estancia 115).

1344. Il y eut un tremblement de terre qui fit de grands ravages en Portugal. L'année suivante mourut la princesse Da Constança, femme de l'infant D. Pedro.

1348. Cette année-là survint une peste générale qui désola toute l'Europe; mais ce fut en Por

tugal qu'elle fit le plus de ravages; la misère arriva à son comble et le nombre des morts fut tel que des villes entières restèrent sans habitants.

1355. L'histoire de Da Ignez de Castro est intimement liée à celle du roi D. Affonso 4o comme une indélébile tache de sang qui souille la mémoire de ce prince; nous la reproduisons ici d'après le récit des anciens chroniqueurs: Da Ignez habitait le palais de l'infante Da Constança comme dame d'honneur et parente; elle était dotée de tant de noblesse et de beauté que l'infant D. Pedro en devint amoureux, et comme Da Constança s'en aperçut, aussitôt qu'elle eut son premier enfant elle la prit pour marraine, voulant ainsi empêcher que l'infant ne continuàt à lui témoigner tant d'affection, les coutumes religieuses de ce temps faisant de ce lien spirituel un obstacle infranchissable entre Da Ignez et D. Pedro; mais leur amour, loin de diminuer, augmenta de jour en jour, et lorsque Da Constanca mourut, l'infant eut des relations avec Da Ignez, desquelles naquirent quelques enfants. Lorsque D. Pedro fut roi, il déclara qu'il l'avait épousée clandestinement, mais celui-ci qui ignorait ce mariage craignait de le voir s'effectuer, voyant que D. Pedro était tout à son amour pour Da Ignez; aussi insistait-il auprès de son fils pour qu'il se mariât, l'interrogeant souvent afin de savoir s'il l'avait épousée, parce que, disait-il, s'il en était ainsi, il voulait la traiter comme sa belle-fille, en lui accordant l'autorité et l'estime que méritait celle qui un jour devait être reine; mais l'infant ne lui fit jamais connaître qu'il était marié, et ne voulut jamais

accepter la main d'aucune des princesses que le roi lui offrait :

De outras bellas senhoras e Princezas,
Os desejados thalamos engeita;

Que tudo em fim, tu puro amor, desprezas,
Quando hum gesto suave te sujeita.

(Canto 3, estancia 122).

Ce fut alors que les grands du royaume, suspectant l'infant d'être déjà marié ou devoir l'être bientôt avec Da Ignez, conseillèrent au roi de l'obliger à se séparer de celle-ci, et de ne pas la garder plus longtemps dans le royaume. Trois favoris du roi, ennemis mortels de Da Ignez, incitaient D. Affonso à la faire mourir, parce que, disaient-ils, ses frères D. Fernando de Castro et Alvaro Peres, étant grands d'Espagne, et com mençant déjà à avoir une grande influence en Portugal, on pouvait craindre qu'ils ne fissent périr l'infant D. Fernando, héritier de D. Pedro, afin que leurs neveux, les fils de Da Ignez, pussent lui succéder sur le trône.

La reine Da Brites, Gonçalo Pereira, évêque de Braga, et plusieurs autres personnes considérables, voulant sauver Da Ignez, avertirent l'infant de ce qui se tramait, et lui conseillèrent de l'épouser et de la mettre en sûreté dans une retraite où sa vie ne courût plus aucun risque; mais l'infant considéra ces conseils comme étant dus à de fausses menaces que personne n'oserait exécuter.

Cependant le roi, excité par ses trois favoris, Alvaro Gonçalves, D. Pedro Coelho et D. Diogo

« VorigeDoorgaan »