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écrit et peut-être, comme le pense M. B., l'ampleur et le nombre des documents qu'elle a laissés, ont-ils fait illusion sur sa vraie puissance. Elle paraît, en effet, n'avoir j'amais été complètement affranchie de tout lien de vasselage. Avec une réserve qui ne s'explique que trop, mais qui nous paraît regrettable, M. B. n'a pas voulu se prononcer sur la question tant controversée de l'ère à laquelle il faut rapporter ces inscriptions. A ces publications sur les Valabhîs se ratache celle d'un acte émané d'un Jayabhatta qui fut en guerre avec eux et qui régnait sur la rive orientale du golfe de Cambay 1. M. B. l'identifie avec un prince de ce nom, le deuxième des trois membres connus jusqu'ici d'une petite dynastie, vassale probablement des Câlukyas du Dékhan, établie à Baroch au v° siècle. Il admet pour cela que l'inscription est datée de l'ère Samvat et il y voit la preuve de l'ancienneté de cette ère. Le fait est certainement de ceux dont il faut prendre bonne note, car il serait de première importance, s'il était bien établi 2. Malheureusement il l'est fort peu. Les autres inscriptions de cette dynastie sont toutes datées de Çaka. Pourquoi celle-ci ne le serait-elle pas aussi, et n'émanerait-elle pas d'un homonyme du vre siècle? Nous avons bien deux Dadda dans la dynastie : pourquoi n'aurions-nous pas deux Jayabhatta? La première partie de l'inscription, qui contenait la généalogie du prince et qui aurait tranché la question, est perdue.

Sur la même côte, nous trouvons plus tard une branche des Râshtrakūtas ou Râthors. M. B. a donné une de leurs inscriptions dans la suite du même mémoire 3 et, l'année d'après, une autre émanée de la branche principale 4. Par cette double publication il a beaucoup contribué à élucider l'histoire jusqu'ici bien confuse des branches méridionales de cette puissante famille que, du Gange à l'Indus et de l'Himalaya jusque bien au-delà de la Krishnâ, on rencontre un peu partout, soit comme petits ou grands feudataires, soit comme chefs de vastes monarchies indépendantes. En cette dernière qualité, ils apparaissent pour la première fois dans ce qui est aujourd'hui l'état du Nizam. Dans le cours du vine siècle, ils y supplantèrent les premiers Câlukyas dont il avaient déjà failli renverser la domination deux siècles plus tôt, et ils y gardèrent la haute main jusque vers la fin du xe, où les Câlukyas parvinrent à ressaisir l'empire. Le siége de leur puissance était Mânyakheta 5. Sur la fin du viie

1. Inscriptions from Kávi, ibid., V, 109. of Dadda II, ibid. VII, 61.

Cf. maintenant : The Umetá grant

2. Il obligerait, par exemple, d'abandonner pour les Valabhîs l'ère de 319 ap. J.-C Bien que M. B. ait produit plus loin, p. 152, un nouvel argument très-ingénieux en faveur de l'antiquité de l'usage de l'ère Samvat, cet usage, dès le v° siècle, n'est rien moins que prouvé.

3. Inscriptions from Kávi, ibid., V, 144.

4. A new grant of Govinda III Rathor, ibid., VI, 59.

5. Aujourd'hui Mâlkher à l'ouest de Hyderâbâd, par 17° 12 N. et 77° 8' E.,

Greenw.

siècle, ils s'emparèrent de la côte de Gujarât jusqu'à l'embouchure de la Mahî, où les Câlukyas les avaient également précédés, et ils y établirent une branche cadette demeurée probablement leur vassale, dont on ne connaît jusqu'ici que trois princes et dont on ignore la fin.

Egalement vassaux des Râshtrakutas de Mânyakheta, un peu plus bas sur la côte, régnaient des Çilâhâras. M. B. a publié aussi une inscription de cette famille 1. L'acte émane d'un roi Chittarâja qui tenait les îles autour de Bombay et une partie du Konkana, et est daté de 1025. A cette époque l'étoile des Râshtrakutas avait pâli dans le Dékhan et les Çilâhâras avaient passé sous la suzeraineté des Câlukyas.

Pour achever cette revue, il ne reste plus qu'à mentionner deux inscriptions de Jhâlrâpâthan au nom d'un certain Voppaka, frère de Deva et vassal de Durgagana 2. Contrairement aux documents dont il vient d'être question, ceux-ci n'ont qu'un intérêt purement paléographique; le suzerain, le vassal et l'ère à laquelle se rapportent les dates étant également inconnus 3.

Ces différentes monographies, réunies aux trois édits d'Açoka dont nous avons rendu compte dans le précédent numéro, forment ainsi une sorte de réseau épigraphique embrassant à peu près toute la période indigène de l'histoire du Gujarât depuis la fin des Guptas. De toutes les dynasties importantes (les petites ne se comptent pas) une seule, en effet, n'y est pas comprise, celle des Câvadas, dont la domination dura du vin au xe siècle et dont les successeurs, une branche des Câlukyas, fournirent les deux dernières dynasties indigènes antérieures à la conquête musulmane. C'est l'histoire de ces deux dynasties Câlukyas ou Solankis qui fait l'objet du mémoire dont il nous reste à parler.

Le siége de leur puissance était dans le nord de la province, à Anhilvâd Pâthan 4, qui auparavant déjà avait été la capitale des Câvadas : de là leur souveraineté, à ses jours d'apogée, s'étendait sur tous les pays où se parle le Gujarâti et même au-delà. La première dynastie, qui compte quelques règnes marquants dans l'histoire des lettres, dura de 942 à 1243. A cette date elle fut définitivement supplantée par une branche collatérale, les Solankîs de Vyâghrapallî ou Vâghelâ, qui, depuis un siècle environ, avaient grandi à ses dépens dans la partie méridionale de la province. Ceux-ci, à leur tour, disparurent comme monarques sou

1. A grant of Chhittarája deva, Mahámandaleṛvara of the Konkana, ibid., V, 276.

2. Two inscriptions from Jhalrápáthan, ibid., V, 180.

3. Pour ses lecteurs d'Europe, M. B. ferait bien de préciser parfois davantage les localités, qu'il n'est pas toujours facile de retrouver au milieu de la confusion orthographique qui fleurit sur les cartes. Je pense que Jhâlrâpâthan est la ville indiquée sous ce nom ou quelque chose qui y ressemble, en Harâvatî, par 24° 35' N., et 76° 7' E. Greenw.

4. Aujourd'hui Nahrvâl Pâthan, ou simplement Pâthan, sur la Sarasvatî, dans la partie Nord-Ouest des Etats du Guikovar.

verains en 1304 par suite de la conquête définitive du pays par les musulmans. Jusqu'ici cette partie des annales du Gujarât présentait de nombreux points obscurs. Dans le grand ouvrage de Lassen, par exemple, elle est loin d'être mise sous son vrai jour : non-seulement les relations des dynasties entre elles n'y sont pas saisies, mais le fait même que Câlukya et Solankî ne sont que des variantes d'un seul et même nom 1, est resté inaperçu. Ces obscurités sont maintenant dissipées ou du moins notablement réduites, grâce surtout au mémoire de M. B. Celui-ci se distingue non seulement par le nombre des inscriptions nouvelles qui s'y trouvent réunies (on en connaissait trois jusqu'ici, M. B. en donne onze), mais encore par l'abondance des renseignements tirés des chroniques, la plupart inédites et dont plusieurs sont décrites ici pour la première fois. Ce travail, proprement épigraphique, est ainsi devenu non pas un exposé suivi de l'histoire du Gujarât, mais une critique des sources de cette histoire pour une période de trois siècles et demi.

Les points principaux sur lesquels M. B. a fourni des données ou des lumières nouvelles, sont la liste et la filiation des souverains, l'expédition de Mahmoud de Ghazna en Gujarât, la dépossession de la branche aînée par la branche cadette de Vâghelâ, enfin l'origine même des Caulukyas du Gujarât. Les chroniques les font venir de Kalyâna en Kanoj, où les ancêtres de Mûlarâja, leur fondateur, auraient tenu un état avec le titre de rois. Comme il n'y a pas toujours à faire fond sur la prétention des Râjpouts d'être originaires des pays du Gange, et qu'on ne connaît pas de localité du nom de Kalyana dans cette partie de l'Hindoustan, qu'au contraire Kalyâna dans le Dékhan a été du commencement du ve jusqu'à la fin du XIIe siècle le siége d'une puissante monarchie Câlukya, la plupart des historiens se sont prononcés en faveur d'une origine méridionale de la dynastie du Gujarât. M. B., au contraire, pense que les écrivains indigènes ont raison quant au fond, et que ces nouveaux Câlukyas venaient en effet de l'Hindoustan, comme en étaient venus, six siècles auparavant, leurs parents du Dékhan 2. Il donne en faveur de cette opinion plusieurs arguments dont deux surtout sont de grande valeur : les traditions des brâhmanes Audicyas (c'est-à-dire septentrionaux)

1. Solankî ou Solunkî est la forme populaire de Caulukya qui est l'orthographe usitée dans les inscriptions de la branche de Gujarât. Celles du Dekhan écrivent d'ordinaire Câlukya ou Calkya, ce dernier dès le vi siècle,

2. M. B. va jusqu'à croire que les ancêtres de Mûlarâja pourraient bien avoir occupé le trône même de Kanoj pendant la lacune de près de trois siècles que présente l'histoire de cet empire, de Yaçovarman à l'avènement définitif des Râthors. Je ne puis le suivre jusque-là. Les sources indigènes qu'il cite ne paraissent pas avoir gardé pour ces princes le souvenir d'une origine si haute, et il n'est pas non plus très-probable que Mûlarâja, si en effet ses ancêtres avaient occupé un trône aussi illustre, eût mentionné son père Râji simplement comme ayant été « un roi des rois », sans dire où. Il y a du reste des traces que, dans le cours du 1x siècle, le Gujarât était sous la suzeraineté de Kanoj et que cette suzeraineté était exercée dès lors, non par des Câlukyas, mais par des Râthors. Cf. Ind. Antiq., 11, 41.

qui disent être arrivés dans le pays à la suite des Solankis, et les armoiries de ces princes qui sont le taureau de Çiva, tandis que celles de leurs parents du sud portent le sanglier de Vishnu. Cette dernière preuve nous paraît même plus forte qu'à M. B. Les Cálukyas du Dékhan se montrent très-fiers de leur emblême ou lânchana : non seulement ils le mettent dans leurs actes à la place habituelle, sur le sceau, mais ils le mentionnent encore expressément dans le corps de leurs inscriptions, comme une de leurs prérogatives les plus précieuses et qu'ils tiennent de la faveur spéciale de Vishnu. Et, quand un de leurs princes alla établir, au VIIe siècle, une branche cadette vers les embouchures de la Krishnâ, celle-ci continua exactement à cet égard l'usage de la branche aînée.

Des onze inscriptions publiées par M. B., la première seule est intégralement traduite (elle est aussi donnée en fac-simile). Les autres ont été simplement transcrites en nâgarî, avec indication détaillée du contenu. Je n'ai pas besoin d'ajouter, la publication venant de M. Bühler, que tout le travail, jusque dans les moindres parties, est de main d'ouvrier. Quelques observations notées à la lecture sont renvoyées en note 1.

A. BARTH.

109.

Las Ordenansas et Coustumas del Libre Blanc publiées avec une introduction, des notes et un glossaire par le D' J.-B. NOULET. Montpellier, bureau des publications de la Société pour l'étude des Langues romanes. Paris, Maisonneuve, 1878, in-8°, 199 p. Prix : 7 francs.

Ce volume porte le n° 3 parmi les Publications spéciales de la Société pour l'étude des Langues romanes. 2. Disons tout de suite pour prévenir une erreur possible que ce livre, inspiré par les Evangiles des quenouilles, «< a pour sujet les croyances, préjugés et usages populaires » du pays Toulousain au xvi° siècle. Les commères de Toulouse, quittant leurs quartiers, se réunissent dans une salle et, après force discours, << finissent par arrêter leurs Ordonnances et Coutumes du livre blanc,

1. Le fac-simile donne : p. 43, 1. 11, amena au lieu de átmana; p. 45, l. 1, vriddhashe au lieu de vriddhaye; ibid. 1. 3, etannivasi°. La date de la fin du règne de Bhima qui, p. 22, est 1072, est 1063, p. 122. P. 48, 1. 7, dans la transcription, lire nirggataya. – P. 57, le village d'Indila paraît être le même que Itilâ de p. 68. — P. 67, Ekângavíra est un surnom de Jayantasimha, non de Jayasimha. P. 82, au lieu de Medhurá, la transcription porte Medhera; de même p. 89, au lieu de Chhatáhára, Chhatráhấrû ; et p. 103, au lieu de Dálaüdda, Dâlaŭdra. — P. 96, les frontières de la pallika ne sont pas exactement indiquées.

2. Ont déjà paru: I. Mila y Fontanals, Les Noves rimades, la Codolada. 3 fr. 50; II. Lespy, Proverbes du Béarn. 5 fr.; IV. Doniol, Les patois de la basse Auvergne. 4 fr. 50; V. Azaïs, Dictionnaire des idiomes du Midi de la France, t. I, 15 fr. 40. Sont sous presse: Lidforss, Coutumes d'Agen; Bringuier, Poésies complètes; Pitré, Contes populaires; l'abbé Vinas, Opuscules philologiques

et archéol.

titre qui fait allusion au registre nommé Livre blanc, contenant les franchises et coutumes de la ville de Toulouse. >>

Les Ordenansas furent publiées pour la première fois à Toulouse, en 1555; d'après l'unique exemplaire connu (aujourd'hui en la possession du Dr Desbarreaux-Bernard), M. G. Brunet en a donné en 1846 une réimpression à petit nombre. L'édition du Dr Noulet, digne de ce vétéran des études « romanes » 1, contient, outre la préface: 1° la reproduction plusieurs fois collationnée du texte défectueux de 1555, et, en regard, une version en « roman littéraire du xvi° siècle, tel que l'on peut supposer que Ducèdre aurait voulu l'employer »; 2o des notes; 3° un glossaire.

2

los,

1° Au xvI° siècle, la langue d'oc n'avait pas cessé d'être employée comme langue écrite dans le Midi, particulièrement à Toulouse. On doit donc s'attendre à trouver en lutte dans les éditions de cette époque les formes orthographiques académiques et les formes vivantes. Pour l'article, par ex., nous avons dans les Ordenansas: lo trente fois, et 65 f. le, sept fois, et 18 f. les, dels neuf fois, et 1 f. des. De même dans la conjugaison nous trouverons portar 155, etc., et porta 458, jogar 455 et joga 499, levar 410 et leva 656, cargar 193 et carga 181, soit environ quarante fois l'infinitif en -ar et trente f. l'infin. en -a; Forbir 422 à côté de forby 437, soit sept fois l'infin. en -ir et six f. l'inf. en -i; veser 796 et vese 600, sçaber 810 et sçave 645, soit 5 f. l'infin. en -er et 4 f. l'inf. en -e. Far revient 12 fois, et fa se présente dans un ex. unique (174). Croit-on que les formes vivantes proviennent de la négligence de l'imprimeur? La vue des rimes prouvera le contraire: para (parar) rime avec le futur fara 233-4, saulta (saultar) avec auta (autan) 335-6,

1. Les Méridionaux continuent à appeler romane leur langue, exclusion faite des autres idiomes néolatins. Les travaux de nos Académies provinciales n'étant pas toujours suffisamment connus, il ne sera pas hors de propos de donner ici la liste des articles publiés par le Dr Noulet dans les Mémoires de l'académie de Toulouse : - Cinq chronogrammes inédits en langue romane, 1847, p. 324-32; Dissertation sur le mot roman mondi, 1850, p. 104-12; Discours... (généralités sur les Etudes sur qq.

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langues et les littératures romane et française), 1850, p. 210-6; troubadours du xive s. I. Bernard de Panassac. II. Guillaume d'Alaman, 1852, p. 85-90, 404-8; - Dissertation sur une chanson attribuée à Gui du Faur de Pibrac, 1852, p. 113-20; - De dame Clémence Isaure substituée à Notre-Dame la Vierge Marie comme patronne des jeux littéraires de Toulouse, 1852, p. 191-225; — De la prétendue pléiade toulousaine au xvio s., 1853, p. 297-322. - Recherches sur l'état des lettres romanes, dans le Midi de la France, au XIV S., suivies d'un choix de poésies inédites de cette époque, 1860, p. 1-48; - Les pierres de Naurouse et leur légende, 1872 p. 132-8; Vie de Sainte Marguerite en vers romans, 1875, p. 348-73.

2. Ces nombres et ceux qui suivront sont approximatifs. Outre les formes vulgaires, on trouve aussi des formes fautives, comme du (v. 118) au lieu de del, et au (v. 92 et 524) à la place de al. L'article toulousain le, les, est bien antérieur aux Ordenansas. Dans Goudelin (xvII s.), ce même article, en dépit du chaos orthographique des éditions, paraît être au pluriel: les devant les voyelles et les consonnes, des dev. les consonnes, deis dev. les voyelles, as dev. les c., ais dey. les v.

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