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par sa naissance et sa position sociale, était transporté sur le terrain. même d'une lutte politique et religieuse qui se continue depuis plus de deux siècles, et semble nous reporter parfois au lendemain de la bataille. sur la Montagne-Blanche.

M. G. a su saisir, en outre, le premier, dans son travail d'ensemble, un point de vue nouveau, que plusieurs écrivains avaient entrevu déjà et signalé comme le seul juste, pour qui voudrait traiter l'histoire de la guerre de trente ans. Ce point de vue, c'est celui de l'unité de l'histoire européenne, à partir du xvr° et du xvir siècle. Tout historien qui ne tiendra point compte de l'espèce de solidarité qui se forme alors entre les diverses nations civilisées de notre continent, des influences réciproques exercées par elles, ne pourra donner qu'un tableau fort incomplet de cette époque. M. G. non-seulement a posé nettement ce principe - il y revient dans la préface de son second volume, mais il l'a traduit dans la pratique, ce qui peut-être est plus difficile. Evidemment, la tâche de l'historien devient plus lourde, s'il doit suivre de l'œil tous les fils de la trame diplomatique, se croisant incessamment à travers l'Europe entière, et si son récit, presque à chaque nouveau chapitre, doit nous mener en des contrées nouvelles et s'occuper de personnages nouveaux.

Dans le récit des faits militaires, M. G. n'a point eu, naturellement, à innover autant, bien qu'il ait également modifié, sur bien des points, l'histoire convenue des campagnes de Bohême. Mais si quelqu'un voulait bien saisir tout le mérite de ce beau travail et se rendre compte de la différence immense qui le sépare de ses devanciers, qu'il lise les chapitres sur les relations diplomatiques de l'Empire avec l'Espagne et la France; sur celles des princes de l'Union évangélique avec l'Angleterre et la Savoie; cette lecture lui montrera du coup les révélations curieuses que l'étude des archives peut apporter à une histoire si souvent déjà narrée et le renouvellement heureux que l'on peut faire subir, grâce à elle, aux évènements en apparence les mieux connus.

Les deux volumes de M. G. sont du printemps de l'année 1619 au mois de décembre 1620; ils embrassent donc le développement progressif et la chute lamentable de la révolution bohême. Nous ferons ressortir surtout le remarquable portrait de l'empereur Ferdinand II, que M. G. dépouille de la meilleure partie de l'auréole légendaire dont l'avaient orné non-seulement M. de Hurter et les écrivains ultramontains, mais la plupart des écrivains les plus hostiles à sa personne. L'énergie qu'on se plaisait à lui reconnaître dans le malheur, sa soumission complète à l'Eglise qu'on vantait sans cesse, se changent, sous la plume de son nouvel historien, en une apathie passive, en un dévouement calculé, qui n'empêchent pas à l'occasion la plus énergique résistance. Sa prodigalité dans les crises les plus urgentes, sa lenteur à se décider pour une mesure quelconque, nous le font apparaître comme un personnnage tout différent de celui que l'on croyait connaître jadis.

Nous signalerons encore les chapitres relatifs à l'élection de Ferdinand

comme empereur et à celle de l'électeur Palatin comme roi de Bohême; le récit de l'ambassade envoyée par Louis XIII aux princes protestants et à Vienne, sous la conduite du duc d'Angoulême; le tableau des négocia tions ridicules entreprises avec l'Espagne par Jacques I d'Angleterre, que Sully flattait encore assurément en l'appelant le plus sage des fous et le plus fou des sages. Pour ce dernier chapitre, M. G. a pu s'aider des extraits obligeamment communiqués par M. Gardiner, le savant historien anglais.

Dans les chapitres relatifs à l'histoire intérieure de la Bohême, nous avons remarqué plus particulièrement ceux qui nous font connaître la lenteur indicible de la stratégie d'alors, les misères endurées par les soldats et surtout par les malheureux paysans, qui, vers la fin de la guerre, se levaient partout pour assommer leurs propres défenseurs. Du récit de M. G. ressort aussi que ceux des écrivains antérieurs, qui ont sévèrement condamné l'attitude de l'aristocratie bohême pendant la guerre, n'ont fait que lui rendre strictement justice. Il est impossible de montrer plus d'égoïsme et d'indifférence que la plupart des grands seigneurs du pays n'en firent voir dans cette lutte, dont ils auraient été pourtant les seuls à bénéficier en cas de victoire. Si la première période de la guerre se termina par la victoire de Ferdinand II, c'est bien moins à son courage, et au talent de ses généraux qu'il l'a due, qu'à l'avarice et à l'incapacité profonde de ses principaux adversaires.

Pour terminer l'histoire de cette première période de la guerre de Trente Ans, il ne manque plus que deux chapitres : le récit de l'expulsion de Mansfeld, qui seul tenait encore la campagne pour Frédéric V en Bohême, et le tableau des mesures de réaction politique et religieuse par lesquelles Ferdinand compléta la conquête de ce royaume. Nous prions M. Gindely de ne pas trop nous faire attendre le quatrième volume, qui nous apportera ces derniers chapitres et nous fera pénétrer en même temps dans une période nouvelle de cette histoire, encore moins étudiée dans ses détails que la première, et qui, sous la plume de l'auteur, nous réserve assurément des surprises inattendues.

R.

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196.1. M. MÜLLER, Schillers Briefwechsel mit dem Herzog Friedrich-Christian von Schleswig-Holstein-Augustenburg, eingeleitet und herausgegeben, in-8°. Berlin, Paetel, 1875, 83 p. — Prix : 2 mark 40 (3 fr.) 2. J. MICHELSEN, Briefe von Schiller an Herzog Friedrich-Christian von Schleswig-Holstein-Augustenburg über æsthetische Erzie hung, in ihrem ungedruckten Urtexte herausgegeben, in-8'. Berlin, Paetel, 1876, 176 p. Prix 3 m. (3 fr. 75).

- 3. A. JUNG, Schillers Briefe über die esthetische Erziehung des Meuscben,... mit einer Einleitung und erklærenden Anmerkungen herausgegeben, in-12. Leipzig, Teubner, 1875, vii-374 p. - Prix : 2 m. 40 (3 fr.).

Pour reconnaître la générosité toute spontanée avec laquelle le duc

Christian de Schleswig-Holstein lui avait offert une pension, Schiller avait demandé et obtenu la permission de lui adresser une série de Lettres sur l'éducation esthétique, dont les originaux périrent dans le grand incendie du palais de Christiansborg à Copenhague, le 26 février 1794. Sur les instances du duc, Schiller avait d'abord entrepris d'en reconstituer une copie d'après son brouillon; mais, quand il se mit à l'œuvre, il ne put se résigner à les refaire sous la même forme : ses idées s'étaient modifiées sur certains points, élargies sur d'autres. Bref, au lieu de la copie demandée, il composa une nouvelle série de Lettres, qui parurent dans les Heures et dont il fit hommage au duc Christian.

Par un heureux hasard, M. Max Müller, à la suite de recherches faites d'après ses conseils dans les archives ducales, a été mis en possession d'une partie de la correspondance échangée à cette époque entre Schiller, Baggesen, le duc Christian et le comte Schimmelmann. Elle se compose à peu près exclusivement, outre la lettre par laquelle le duc et le comte proposèrent à Schiller sa pension, la réponse de Schiller et une lettre de Baggesen, des billets dont, à partir de 1795, Schiller accompagnait les numéros des Heures, qu'il adressait au duc, et des réponses du duc.

Cependant le texte original des Lettres semblait toujours perdu à jamais, lorsque, mis en éveil par les découvertes de M. Max Müller, un autre savant, M. J. Michelsen, se rappela avoir reçu autrefois des archives ducales un cahier contenant du moins on l'avait toujours supposé- une simple copie des Lettres parues dans les Heures. Un coup d'œil jeté sur ce cahier lui fit comprendre combien on s'était abusé jusqu'ici: il ne contenait, en effet, rien moins que les six premières lettres (et la moitié de la septième) de Schiller au duc Christian, dans leur forme primitive. Comme on sait pertinemment, d'après une des lettres de Schiller publiée par M. Max Müller, que malgré les instances réitérées du duc, Schiller ne les reconstitua jamais, il faut bien supposer que, dans l'entourage du duc Christian, une copie en avait été prise, à mesure que Schiller les envoyait. Malheureusement, la fin du cahier a été arrachée par la suite, et la partie si miraculeusement conservée s'arrête au milieu de la septième lettre.

Nous n'avons pas besoin d'insister sur l'intérêt qui s'attache aux documents absolument nouveaux mis au jour par ces deux volumes: bornons-nous à ajouter qu'au point de vue de l'élégance et de la correction leur exécution ne laisse rien à désirer.

Il nous reste à dire quelques mots du troisième ouvrage annoncé en tête de cet article. M. Jung croit à la possibilité de faire lire avec fruit les Lettres sur l'éducation esthétique dans les classes supérieures des gymnases. Nous ne voudrions pas détruire ses illusions, mais il nous semble difficile de faire comprendre à des esprits encore très-peu au fait de la philosophie de Kant un ouvrage que la plupart des lecteurs ordinaires des Heures trouvèrent presque inabordable. Quoiqu'il en soit, l'édition de M. J. a été faite en vue de rendre cette lecture accessible à la

jeunesse, et si celle des gymnases n'est point appelée de si tôt à en recueillir les fruits, celle des universités trouvera, dans le travail de M. J., un guide excellent, sûr, clair et complet. En France, par exemple, il rendra de grands services aux candidats à l'agrégation d'allemand, qui trouveront dans son introduction un très-bon résumé des doctrines esthétiques de Schiller. Cette introduction, longue de quatre-vingt-dix pages, se divise en trois parties. Après une étude sur le développement esthétique du génie de Schiller jusqu'à l'apparition des Lettres et sur la part qu'y eut la philosophie de Kant, vient une analyse détaillée des Lettres, à la suite de laquelle M. J., pour compléter l'exposition des doctrines esthétiques du poète, a joint une analyse de ses autres travaux sur la même matière. Nous n'avons guère qu'un petit reproche à adresser à M. J.: il porte sur la manière un peu obscure dont l'origine des Lettres est exposée à la page 44. Il semblerait résulter de la phrase qui termine cette page, que M. J. considère comme identiques les lettres adressées au duc Christian et celles insérées dans les Heures. Nous aimons mieux croire que M. J. a mal exprimé sa pensée; en tout cas, ce passage aurait besoin d'être remanié et un peu développé dans une édition ultérieure.

Le reste du volume contient les Lettres telles qu'elles ont paru dans les Heures. Un commentaire, qui a dû coûter beaucoup de temps et de peine à M. J., contient, page par page, les extraits des anciens philosophes, de Kant ou des autres ouvrages de Schiller lui-même, qui offrent quelque analogie avec les passages correspondants des Lettres, soit qu'il se soit fortuitement rencontré avec eux, soit que Schiller ait eu une réminiscence de Platon, Aristote, Cicéron, etc., soit qu'il ait développé plus longuement autre part un point déterminé. Chemin faisant, M. Jung donne, au besoin, quelques indications historiques ou biographiques, dans lesquelles nous n'avons remarqué que les deux inexactitudes ci-après : p. 107, note 11. Louis XVI a été exécuté le 21 et non le 17 janvier 1793; p. 108, même note, la date du 5 mai donnée comme celle de la mort de Schiller est évidemment un lapsus; chacun sait qu'il est mort le 9 mai.

A. FÉCAMP.

197.

General Graf Chasot. Zur Geschichte Friedrichs des Grossen und seiner Zeit, von Kurd von SCHLEEZER. Zweite Auflage. Berlin, Herz, 1878, in-8°, vi240 p. 3 mark (4 fr. 75).

Le comte Isaac François Egmont de Chasot (1716-1797), dont M. de Schlözer nous raconte l'histoire dans cet essai, est un gentilhomme de Normandie que Frédéric II, alors prince royal, connut au siège de Philippsbourg (1734). Il fut un des hôtes du château de Rheinsberg. La vivacité de son esprit, la gaieté de son humeur, la malice de ses propos, et la grâce de ses manières, tout en lui plaisait à Frédéric, et Chasot fut

un des douze chevaliers de l'ordre de Bayard. C'était le matador de ma jeunesse, disait plus tard Frédéric II. Quand éclata la première guerre de Silésie, Chasot reçut le commandement d'un corps nouveau, celui des chasseurs de campagne, et à Mollwitz il sauva la vie à Frédéric II 1. II devint ensuite major du régiment des dragons de Bayreuth, et ce fut une charge furieuse, dirigée par Chasot, qui fit gagner à Frédéric la bataille, si chaudement disputée, de Hohenfriedberg (1745). « L'intrépide et preux Chasot » comme l'appelle Frédéric, II dans une de ses plus mauvaises poésies, reçut l'ordre pour le mérite. Mais quelque temps après, Chasot, mécontent de Frédéric, quitta le service: il se retira près de Lubeck dans un beau domaine qu'il nomma Marly et devint bourgeois de Lubeck. En 1759, quand la place de gouverneur de la ville fut vacante, ce fut lui qui l'obtint. Vingt ans après (1779), il revit Frédéric II; de tous les joyeux compagnons de Rheinsberg, il était le seul vivant, et Frédéric, oubliant ses rancunes, lui fit l'accueil le plus cordial 2.

M. de Schlözer dit avec raison que son livre est une contribution à l'histoire de Frédéric II et de son temps. On y trouve d'intéressants détails sur le séjour de Frédéric à Rheinsberg, sur la guerre de la succession d'Autriche, sur les batailles de Mollwitz, de Czaslau, de Hohenfriedberg, sur les divertissements d'une cour allemande au xvII° siècle 3, sur les dernières années du vieux roi. Un des chapitres les plus curieux de l'ouvrage est emprunté aux mémoires inédits du marchand lubeckois Wilcken: c'est le récit d'un voyage que ce négociant entreprit en 1776 à Postdam et à Berlin.

A. C.

198.

Deutsche Grammatik für Auslænder jeder Nationalitæt, von Dr K. KRAUSE; 3. Auflage, besorgt von D' K. NERGER. Rostock, Werther. 1878. I volume grand in-8°, 283 pp.

Cette grammaire allemande est destinée aux étrangers de toute nationalité. Il nous paraît, à priori, impossible de tenir compte, dans une

1. Plus tard Voltaire lui écrivait :

Il me souvient encore de ce jour mémorable
Où l'illustre Chasot, ce guerrier formidable,
Sauva par sa valeur le plus grand de nos rois;

O Prusse, élève un temple à ses fameux exploits.

2. Chasot avait épousé la fille du peintre Torelli; il eut deux fils : l'aîné, Frédéric, chef d'escadron au service de la Prusse, mourut en 1800; le cadet, Louis, marié à une demoiselle de Gansauge, fut aide de camp de Frédéric Guillaume III, prit part en 1807 à l'expédition de Blucher contre Rügen, devint, après la paix de Tilsitt, commandant de Berlin et organisa en 1813 la légion russo-allemande.

3. A Neu-Strelitz, à la cour de la duchesse Sophie Dorothée, Clasot dirige les concerts et préside à toutes les fêtes.

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