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que les cola de M. B. ne furent pas connus, jadis, de Démosthène luimême, il suivra nécessairement que toute la symétrie de chiffres qui est fondée sur les cola n'est rien qu'un jeu d'arithmétique amusante, qui, si Démosthène revenait, l'étonnerait bien.

M. B. n'en est pas moins l'un des hommes de notre temps qui connaissent le mieux les orateurs attiques. Editeur habile d'Hypéride, puis d'Andocide, d'Antiphon et de Dinarque dans la petite collection Teubner, il inaugura dans cette collection le système si avantageux de placer l'annotation critique sous le texte. Il eût adopté cette même disposition pour Isocrate, si l'édition de Benseler qu'il vient d'être chargé de retoucher n'eût pas été clichée. Il a dû, pour cette fois, se borner à introduire dans le texte quelques améliorations incontestables; mais c'est surtout dans la préface critique placée en tête du volume qu'il faut chercher les supériorités de cette édition d'Isocrate sur toutes celles qui l'ont précédée. Nombre de modifications apportées par le nouvel éditeur ont pour objet de faire disparaître de l'édition l'hiatus qu'Isocrate évitait avec tant de soin; ces corrections se font assez généralement à peu de frais : ex. Tŷ λóyw d' (1, § 20) au lieu de to è λéyo. Mais M. B. a parsemé la pré, face de corrections à un certain point de vue plus importantes. La sup pression de τὰ dans la phrase suivante : ἀλλ' ἡγεῖσθαι τοῦτον χαριέστατον, ὃς ἂν τῶν διεσπαρμένων, ἐν ταῖς τῶν ἄλλων διανοίαις ἀθροῖσαι [τὰ] πλεῖστα δύο νηθῇ καὶ φράσαι κάλλιστα περὶ αὐτῶν (11, § 41) est à approuver sans réserve. – 11, § 12 : ὡς περὶ μὲν τὰ θηρία τέχνας εὑρήκαμεν αἷς αὐτῶν τὰς ψυχὰς ἡμεροῦμεν καὶ πλείονος ἀξίας ποιοῦμεν, ἡμᾶς δ ̓ αὐτοὺς οὐδὲν ἂν πρὸς ἀρετὴν åpeλýcarμev xtλ. Il paraît évident qu'en apprivoisant les bêtes, ce sont les bêtes elles-mêmes, et non pas tàs Yuyàs twv Onplwy, dont nous aug. mentons le prix; aussi acceptons-nous, pour notre part, la conjecture ta de M. B. (comp., de plus, μãs d'autoùs qui fait pendant à tà Onpía dans le membre de phrase corrélatif). Il y a bien d'autres corrections de M. B. qui mériteraient d'être signalées. Qu'il nous suffise de recommander la présente édition aux lecteurs d'Isocrate comme la meilleure du moment. Nous ne pouvons qu'exprimer le désir que le second et dernier volume ne se fasse pas longtemps attendre. On dit que M. Blass révisera ensuite le Lysias, l'Isée et le Lycurgue de Scheibe; personne n'est mieux préparé que lui pour entreprendre cette besogne. Espérons que ce bruit ne se démentira pas, et qu'en même temps qu'il nous donnera la fin de son Eloquence athénienne, il nous préparera de bonnes éditions des orateurs qu'il apprécie si bien.

Charles GRAUX.

200.-

Inventaire sommaire des Archives communales de la ville de Strasbourg, antérieures à 1790, rédigé par J. BRUCKER, archiviste. Strasbourg, R. Schultz et Comp., 1878. T. I, vш. 240 p. T. II, 292 p. in-4°. 37 fr. 50.

Prix :

Nous avons rendu compte autrefois d'un essai d'inventaire tenté pour les Archives de Strasbourg et partant de l'initiative privée de l'archiviste lui-même. M. Brucker en avait annoncé la suite et l'aurait publiée sans doute, si le concours du public ne lui eût fait défaut, comme il arrive malheureusement trop souvent pour des travaux purement scientifiques, Découragé par cet insuccès, l'honorable conservateur des archives municipales continua son travail, mais en le gardant en manuscrit. Heureusement que la municipalité provisoire de Strasbourg, désireuse de faire connaître au monde savant les richesses de ses dépôts, résolut, il y a quelques mois, d'en publier à ses frais l'inventaire complet. Le travail de M. B. put donc prendre le chemin de l'imprimerie, et, par une concession que l'on doit reconnaître d'autant plus qu'elle contraste agréablement avec tant d'autres mesures prises en Alsace dans ces dernières années, on permit à l'archiviste de publier son travail, comme il l'avait rédigé, c'est-à-dire en français.

On connaît le cadre de classement prescrit ou plutôt imposé par M. de Persigny, ministre de l'intérieur, à tous les archivistes de toutes les communes de l'empire français. C'était une idée absurde en elle-même de vouloir enfermer dans un même moule l'histoire de Lille et celle de Marseille, et de tracer des formules identiques pour les archives lyonnaises et celles de Carpentras, Pour Strasbourg en particulier, l'on ne pouvait imaginer rien de plus antiscientifique que de vouloir faire entrer son histoire dans les cadres préparés pour la moyenne des communes françaises. Son passé de ville libre impériale, de ville libre royale ensuite, ses relations politiques, le rôle joué par elle en Europe pendant deux ou trois siècles demandaient un groupement tout autre des matériaux conservés dans ses archives. Mais c'est là une observation qui ne s'adresse point à l'archiviste, au travailleur consciencieux qui ne faisait qu'obéir, en agissant de la sorte, aux ordres de ses supérieurs administratifs 2.

Les deux volumes publiés par M. B. renferment la série AA du cadre général de classement, intitulée Actes constitutifs et politiques de la Commune. Ils ne comprennent qu'une faible partie du dépôt, mais il faut ajouter que c'en est la partie de beaucoup la plus intéressante, au point de vue de l'histoire générale. Ce ne sont point, en effet, des archives locales que celles de Strasbourg, mais celles d'un Etat, fort petit, il

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2. C'est ainsi que l'on ne trouvera point dans ces volumes les pièces nombreuses échangées au moyen âge et au xvi° siècle avec les évêques parce qu'il y a une rubrique: Correspondance ecclésiastique. Comme si ce n'étaient pas des correspondances essentiellement politiques!

est vrai, mais qui n'en joua pas moins un rôle considérable à certains moments, tant par sa position géographique que par le talent de ses hommes politiques. On y trouve donc des pièces nombreuses ayant trait aux guerres ou négociations diplomatiques de l'Europe, du xive au XVIIe siècle. Beaucoup de savants y ont puisé avec succès pour des travaux qui ne se rattachaient d'aucune manière à l'histoire même de la ville et dépassaient même de beaucoup l'horizon particulier de l'Al

sace.

Le premier volume débute par l'analyse des Privilèges et franchises de la cité; mais il est rempli presque tout entier — ainsi que le second — par la Correspondance de la commune avec les souverains, etc. C'est sous ce titre assez bizarre, imposé par le règlement, qu'est résumée l'histoire politique proprement dite de Strasbourg. Les documents antérieurs à la première moitié du xive siècle sont rares et de peu d'importance, mais, à partir de l'avènement de l'empereur Charles IV (1346), ils abondent. L'étude du dépôt de Strasbourg est indispensable à qui voudrait écrire les ravages des bandes de Coucy dans les contrées rhénanes, l'invasion des Armagnacs, les guerres des Hussites, les luttes contre Charles le Téméraire. A l'époque de la Réforme, le rôle de Strasbourg devient plus important encore; c'est à Strasbourg que se concentrent un instant les fils conducteurs de la politique protestante en Europe. Aussi les documents abondent sur le règne de Charles-Quint, Ferdinand Ier et Maximilien II.

Le second volume renferme au début des pièces d'une importance secondaire. Les troubles du Grand-Chapitre et même la guerre des Évêques n'ont guère qu'une importance locale. Une correspondance expédiée de Metz pendant un quart de siècle par M. de Flavigny (1601-1621) nous renseigne sur les menus faits de la politique française à cette époque. Arrive la guerre de Trente Ans. L'invasion de Mansfeld en Alsace déchaîne une première fois les horreurs de la guerre sur la province (1622); l'arrivée des Suédois y ramène ce fléau dix ans plus tard et depuis la lutte s'y continue presque jusqu'à la fin de la guerre. Les documents de cette époque nous renseignent sur la politique française presque autant que sur celle de l'Empire et de la Suède. La correspondance des agents diplomatiques de Strasbourg à Paris présente surtout de l'intérêt. De 1648 à 1680, nous assistons à la lente décadence des forces de la république ; elle ne peut plus résister à la pression croissante de la politique française, et sa neutralité, violée à la fois par Louis XIV et par Léopold Ier, ne réussit pas plus à la défendre que les appels de secours qu'elle adresse au dehors. La capitulation de 1681 met fin à cette longue et pénible agonie, en assurant à la ville, avec une partie de ses libertés intérieures, la protection du Grand Roi.

Le second volume continue l'inventaire jusqu'à l'année 1698 et la signature de la paix de Ryswick, qui céda définitivement Strasbourg à la France. Mais, à partir de 1681 déjà, rien de bien important ne se

rencontre dans les cartons du dépôt. Louvois et ses collègues s'étaient dorénavant chargés du soin de représenter les intérêts de la ville au dehors, et l'ancienne république autonome va se perdre peu à peu dans la monarchie de Louis XIV.

La publication de ces deux volumes représente une somme de travail considérable; avant de pouvoir songer seulement à rédiger son inventaire, M. Brucker a dû classer en entier son dépôt, car le désordre y était immense, depuis le sac de l'Hôtel-de-Ville en 1789. Peu avant la guerre de 1870, l'administrateur de la Bibliothèque municipale versa en outre aux archives près de vingt mille pièces, accumulées depuis un demi-siècle dans les greniers. Il a fallu trier et classer cet immense fouillis, parcourir un à un ces milliers de documents mis naïvement au rebut, les intercaler à leur place, et cela à peu près seul et sans aide scientifique. Aussi ne faut-il point s'étonner si les deux volumes publiés jusqu'à ce jour représentent douze années de travail et de la vie de l'archiviste.

Les prochains volumes coûteront moins de travail, le classement méthodique des pièces étant désormais achevé. Ils ne présenteront point d'ailleurs un intérêt égal pour les savants du dehors, car leur contenu sera plus particulièrement relatif à l'histoire intérieure et purement locale de Strasbourg.

Nous ne relèverons pas quelques petites fautes d'impression ni de légères erreurs dans un certain nombre de noms propres et de dates, presque inévitables dans un travail de ce genre. Nous espérons que désormais les travailleurs français aussi, guidés par ce conducteur méthodique et fidèle, sauront exploiter les richesses scientifiques que leur offrent les Archives de Strasbourg pour l'histoire du xvo, du xvi et du xviie siècle.

R.

201.

Lettres écrites à la cour par M. d'Angervilliers, intendant d'Alsace, de 1716 à 1724, publiées par l'archiviste du district de la Basse-Alsace. Strasbourg, R. Schultz, 1878, 164 p. in-8°. — Prix : 4 fr.

L'archiviste en chef du département du Bas-Rhin, M. Spach, faisait, il y a de cela dix ans, l'acquisition d'un fonds de pièces officielles, retrouvées dans l'étude d'un notaire du Midi, et ayant appartenu à M. d'Angervilliers, l'un des intendants d'Alsace, au commencement du XVIIIe siècle. Il nous offre aujourd'hui une série de lettres, tirées de ces documents incorporés aux Archives de la Basse-Alsace, et donnant, dans une certaine mesure, le tableau de l'administration officielle de cette province au moment de la Régence. Les sources pour l'histoire d'Alsace au dernier siècle sont encore si clair-semées qu'il faut accueillir avec reconnaissance chaque contribution nouvelle qui nous fournit sur la matière des renseignements authentiques. Le volume de M. S. mérite d'autant plus un bon accueil, qu'il est formé par la correspon

dance administrative officielle du principal représentant du pouvoir central. On peut y suivre les agissements du gouvernement d'alors visà-vis des seigneurs et des princes allemands encore possessionnés en Alsace, vis-à-vis des villes libres, ses vues politiques, commerciales et religieuses, etc. En général, l'impression qui se dégage de la lecture de ces pièces est satisfaisante; étant donné le principe d'un pouvoir absolu, l'on ne peut que louer la prudence et le tact déployé dans la majorité des cas par l'intendant qui n'avait point une position facile au milieu du dédale de lois et de coutumes qui régissaient alors en Alsace une population différente déjà par la langue, les mœurs et la religion, du reste du

royaume.

Nous regrettons seulement que M. Spach n'ait pas fait précéder son choix d'une notice biographique sur M. d'Angervilliers lui-même. Quelques éclaircissements sur certains points d'histoire locale auraient été également les bien venus 1.

R.

202.

La Terreur blanche, épisodes et souvenirs de la réaction dans le midi en 1815, d'après des souvenirs contemporains et des documents inédits, par Ernest DAUDET. Paris, Quantin, I vol. in-8° de xI-404 pages. Prix : 5 fr.

C'est toujours avec une certaine appréhension qu'on lit un livre d'histoire composé par un romancier de talent, s'appelât-il Walter Scott ou Thackeray; il est si facile aux hommes d'imagination de se laisser entraîner quand ils racontent des événements très-dramatiques! Aussi n'est-on pas sans inquiétude en lisant le premier chapitre de la Terreur blanche de M. Ernest Daudet. L'auteur nous fait assister à un grand bal offert par les négociants de Bordeaux au duc et à la duchesse d'Angoulême; nous voyons entrer la princesse « vêtue d'une robe de satin blanc bro. dée de dessins et d'arabesques d'or; coiffée d'un turban de même étoffe et de même couleur, orné de plumes et relevé d'une aigrette en diamants ». Elle a «< un collier de perles, attaché par une grosse émeraude, des gants très-longs qui couvrent ses bras jusqu'au coude et n'en laissent voir que la partie supérieure ». Sa physionomie présente quelque chose de dur et de triste, « comme si son œil eût gardé avec une intensité toujours vi. vante la vision tragique du Temple et des amertumes de l'exil..., et son sourire même a des larmes, dans lesquelles l'imagination emportée vers le drame de 1793 croit voir des gouttes de sang. » Bien que M. E. D. nous dise, en propres termes, dans son introduction ; « Pas un fait n'est mentionné dans cet ouvrage qui ne puisse être prouvé, » on conviendra

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1. Une bizarre faute de rédaction, qui change complètement le sens de la phrase, se trouve p. 85, note 1.- P. 109, lisez n'avait pour m'avait.

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