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M. W. a également modifié les grandes divisions de l'ouvrage : celles-ci sont désormais au nombre de six: Pentateuque-Josué, livres historiques, livres prophétiques, livres poétiques, réunion du canon juif, le texte de l'Ancien Testament, tandis que la troisième édition se présentait ainsi : 1° origine des différents livres ; 2° histoire du canon ; 3° histoire du texte. Pour tout le reste, la quatrième édition se borne à des changements insignifiants.

Nous nous trouvons donc en présence de ce spectacle singulier, d'un éditeur qui, dans les deux tiers du livre, respecte profondément le texte de son devancier, et, dans le troisième, lui substitue hardiment le sien. Cela peut paraître inconséquent; toutefois les personnes qui suivent de près les études bibliques s'entendront sans doute pour approuver M. W., comme l'a fait tout d'abord l'éminent professeur de Leyde, M. Kuenen (Voy. Theologisch Tijdschrift, Leiden, 1878, n° 3). Le mérite connu. du livre de Bleek réside, tout le monde l'accorde, dans ses introductions aux livres particuliers. Ç'a été l'élément d'un succès solide et de bon aloi: il convenait de le respecter. Aussi M. W. reproduit-il le texte premier partout où il le pouvait sans se tenir trop en arrière des résultats actuels. Du moment où il reconnaissait la nécessité d'un changement important et qu'il se sentait en mesure de l'opérer, il valait mieux tailler dans le vif et renoncer à une correction pénible et gauche; c'est ce qu'il a fait pour les livres historiques. On demandera pourquoi il n'a pas agi de même pour le Pentateuque-Josué, à l'égard duquel Bleek représente un point de vue dépassé. C'est sans doute que M. W. aurait cru outre-passer par là ses droits de rééditeur. Sa contribution personnelle dans la présente édition est assez sensible pour juger de ce que vaudrait un Bleek tout à fait transformé par le professeur de Greifswald. Il appartiendra au public, en conservant sa sympathie à cet excellent ouvrage, de mettre M. W. à même de nous donner une introduction à l'Hexateuque (PentateuqueJosué) qui corresponde à l'état actuel de la science. Ce qui augmentait le scrupule de M. W. est certainement aussi la circonstance, qu'il est lui-même l'auteur d'une théorie nouvelle de la formation de GenèseJosué qui n'a pas encore complètement subi l'épreuve de la discussion. Il reproduit sa thèse à la fin d'un précieux résumé de l'histoire de la question mosaïque depuis la mort de Bleek, principalement emprunté à M. Kuenen; cette thèse ne saurait manquer d'intéresser vivement ceux que préoccupe l'issue de la grande controverse engagée entre les partisans de l'antiquité respective du document élohiste et du document jéhoviste. M. W., comme les critiques les plus récents et les plus autorisés, considère le document élohiste sacerdotal comme le plus récent, comme exprimant la phase postérieure du développement religieux israélite. Nous sommes aise de donner à son résumé la publicité d'un recueil français. (Voy. Jahrbücher für Deutsche Theologie 18761877.) Le Jéhoviste (JE) provient de deux sources, dont l'une emploie couramment le nom de Jahvé, l'autre celui de Elohim. Pour

plus de simplicité, ajoutons que J comme E ont été l'objet de plusieurs éditions augmentées, avant d'être réunis. A J E, livre historique ne contenant que de brefs textes de loi (Exode, xx-xxiii, xxxiv), encadrés aux places convenables, a été réuni le Deutéronome, qui n'était originairement qu'un recueil de lois; en même temps l'Hexateuque entier (en tant qu'il équivaut à J E, par conséquent à l'exclusion complète du Lévitique) a été retravaillé au point de vue deutéronomique, faiblement dans la Genèse, d'une manière plus sensible dans Exode et Nombres, considérablement dans le livre de Josué. A côté de JE + Dt existe, d'une façon indépendante, un autre ouvrage, qui est également historique-législatif, à savoir le code sacerdotal, dénomination préférable à celle de Grundschrift (nous félicitons M. W. d'avoir rejeté cette dénomination équivoque, empruntée à un système dont les représentants diminuent de jour en jour). L'élément fondamental de ce livre, qui apparaît presque pur dans la Genèse, mais qui ailleurs a reçu, par les soins d'une école entière, les développements les plus étendus, est le livre de la quadruple alliance (Q), ouvrage qui se distingue en ceci, qu'il place les lois dans un cadre strictement historique et quil aime aussi à les habiller d'un vêtement historique. Le dernier rédacteur de l'Hexateuque (R) qui a fait un tout de J E + Dt et du code sacerdotal, prend pour base ce dernier, part de ses conceptions et emploie ses expressions. · La question de l'ancienneté relative de ces sources repose présentement sur la comparaison de J E + Dt avec PC (le Priester-codex); quant à la question de l'antériorité respective de J et de E, on ne saurait pour le moment la trancher. La solution se trouve dans cette remarque, que J E ne sait rien de l'unité de culte, que le Deutéronome réclame ladite unité comme une institution nouvelle non existante jusque-là, que le code sacerdotal, au contraire, la suppose comme ayant existé de tout temps naturellement et développée dans toutes ses conséquences. Ainsi donc, le code sacerdotal (Grundschrift, document élohiste) est non-seulement de date plus récente que J E, mais est postérieur au Deutéronome. II forme la loi de la « Communauté, » du culte divin légitime, non du << peuple d'Israël. » Avec ce trait s'accordent tous les autres 1. Tout n'est pas également original dans cette exposition, mais elle dénote un esprit ferme, précis, capable de voir de haut, et, ou nous nous trompons fort, ou le suffrage prochain des critiques en ratifiera sans hésiter les principaux points. Voilà longtemps que l'Allemagne se dérobe à la tâche de formuler nettement ce qui, dans le plus grand problème de la critique de l'Ancien Testament, doit être considéré comme acquis ou réclame une nouvelle enquête. M. Wellhausen est de ceux dont les travaux autorisent les meilleures espérances.

1. La rédaction du document jéhoviste (J E) devrait remonter ainsi au vin siécle environ, celle du Deutéronome à la fin du vii, celle du code sacerdotal au v avant J -C.

Pour en revenir à cette quatrième édition, elle a le double mérite d'améliorer sensiblement l'œuvre primitive de Bleek et de préparer le public, à brève échéance, nous l'espérons, à un progrès plus considé

rable encore.

Maurice VERNES.

242. Histoire du comté de Tonnerre, par A. CHALLE, président de la Société des Sciences historiques et naturelles de l'Yonne. Auxerre, Perriquet, 208 pages in-8°.

L'histoire du comté de Tonnerre présente un réel intérêt. L'une des dernières du royaume, cette principauté conserva une certaine indépendance, et, sur bien des points ses derniers possesseurs jouissaient de droits presqu'aussi étendus que ceux qu'avaient exercés leurs prédécesseurs du XII° siècle. Aussi y avait-il là matière à une intéressante monographie, et les archives seigneuriales n'auraient pas manqué de fournir ample matière à une étude sur l'administration féodale durant les trois derniers siècles. Celui qui demanderait cette étude à cette nouvelle histoire du comté, risquerait de perdre son temps. M. Challes, au lieu de réunir des faits intéressants, et qui longtemps encore seront nouveaux sur l'organisation intérieure du pays, sur les tribunaux, les impôts, la condition des terres et des personnes, s'est attaché à raconter longuement, trop longuement même, la vie et les gestes des anciens comtes de Tonnerre. Généralement ce récit n'est guère qu'une amplification de l'Art de vérifier les dates et des ouvrages employés par l'auteur de celui-ci. Quand M. C. contredit ses devanciers, il ne donne aucune raison ni pour ni contre, et nous ignorons pourquoi il a adopté sur tel point, rejeté sur tel autre, la chronologie suivie jusqu'à lui. Sans compter que l'histoire générale reparaìt à chaque instant et que ce que l'auteur nous en dit ne se distingue ni par la nouveauté du fond, ni par l'élégance de la forme. Autre défaut plus grave: les sources sont citées d'une façon tellement sommaire, quand elles sont citées, qu'il est à craindre que M. C. ne cite de mémoire ou d'après d'autres ouvrages. P. 6o. Il renvoie au Livre des Chartes de la ville, sans plus de détails. — P. 40. Guillaume de Nangis, 1. I, c. XXXIV, et Christine de Pisan, Vie de Charles V. Comment ces deux noms viennent-ils ici à propos d'un fait du x1° siècle? L'ouvrage de Guillaume de Nangis n'est pas divisé en livres et nous ignorons où Christine parle de Guillaume, comte de Tonnerre, vers 1136. — P. 32. Chronic. Besuense, Gall. Christ. Instrum. Ling. Il faut mettre un trait entre Besuense et Gallia et lire Gallia Christiana, tome X, instrumenta Lingonensia (Langres). Ajoutons que ce n'est que fort rarement que les sources sont indiquées même de cette façon incomplète.

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Enfin, ce qui rend l'ouvrage de M. C. presqu'impossible à consulter, est la manière déplorable dont ont été corrigées les épreuves. On

trouve, p. 33, Alexandre III du temps de Philippe Ier. La suite des comtes de Tonnerre (p. 42-43) est absolument incompréhensible; un comte mort en 1161, agit encore en 1164; de Guillaume III on passe sans transition à Guillaume V. En 1217, Célestin III (!) couronne Pierre de Courtenay, empereur d'Orient à Rome (p. 60). Jeanne de France, comtesse de Champagne, femme de Philippe le Bel, fait un traité en 1347 avec la comtesse de Tonnerre (p. 76). Qu'est-ce que les archives du Trésor des Chartes, p. 256, no 24? (p. 87). Ne serait-ce pas la layette 256, no 24 (Cf. Teulet, II, 289)? Un tel renvoi nous fait craindre que M. Ch. n'ait pas vu l'acte lui-même.

En réalité, un seul texte de quelque intérêt est à signaler dans le travail de M. Challes : la coutume du comté de 1495, qui, paraît-il, est inédite et que l'auteur publie dans ses pièces justificatives. Le document est intéressant, mais on le trouvera un peu court pour être accompagné d'une si longue dissertation.

A. M.

243.

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Quelques lettres inédites d'Isaac de la Peyrère à Bulliau, publiés avec une notice, des notes et un appendice par Ph. TAMIZEY DE LARROQUE (Plaquettes gontaudaises, no 2). Paris, Champion, et Bordeaux, Lefebvre. 50 p. pet. in-18.

M. Tamizey de Larroque vient de publier le second numéro de la jolie collection qu'il a intitulée : Plaquettes Gontaudaises. (Voy. Rev. crit., no 45.) Celle-ci est consacrée à un original du xvir° siècle, Isaac de la Peyrère, bibliothécaire du grand Condé, qui, né protestant à Bordeaux en 1594, se fit catholique en 1655, et mourut au séminaire de N.-D. des Vertus, le 30 janvier 1676 1. La cause de son abjuration fut le scandale causé par les hérésies contenues dans son livre sur les Préadamites paru en 1655, où il soutenait que, d'après la Bible même, il avait existé des hommes avant Adam. Accusé d'hérésie à ce sujet, arrêté à Bruxelles, terrifié par des menaces, il dut aller à Rome implorer le pardon du Pape, Alexandre VII, qui prit le cas assez gaîment, et reçut l'hérétique en disant : « Embrassons cet homme qui est avant Adam. » C'était du reste avant tout un érudit fantaisiste que La Peyrère, fort inoffensif et plein d'esprit, comme le prouvent les charmantes citations

1. Il paraît avoir été du reste fort peu fanatique et la jolie épigramme de La Monnoye paraît avoir exprimé assez justement ses sentiments :

La Peyrère ici git, ce bon Israélite,
Huguenot, Catholique, enfin Préadamite.
Quatre religions lui plurent à la fois,

Et son indifférence était si peu commune,

Qu'après quatre-vingts ans qu'il eut à faire un choix,

Le bon homme partit, et n'en choisit pas une.

des lettres de Gui Patin et de Richard Simon, faites par M. T. de L., et les lettres mêmes à Bulliau. Il y raille fort agréablement ses railleurs. « Il y a un gaillard, écrit-il, qui a ecrit à un de mes amis sur le suject de mes Préadamites que je luy ferois plaisir de faire une carte des païs de la Lune. Je lui ai fait savoir que M. Hevelius l'a faite et que, s'il veut, il ne sera rien de si aysé que de lui faire donner une place dans ces contrées nouvellement descouvertes, pour y bastir une belle maison, et que l'on y fait de beaux châteaux aussy bien qu'en Espagne. »>

M. T. de L. donne encore des détails intéressants sur un ouvrage de La Peyrère du Rappel des Juifs, où, caressant une chimère bien souvent reprise depuis par des auteurs et des visionnaires protestants, surtout en Angleterre, il annonce le retour des Juifs en Terre-Sainte. Une version manuscrite latine de cet ouvrage remanié a dû se trouver dans la Bibliothèque du grand Condé et on en a perdu la trace. La Peyrère avait écrit aussi, en 1644, pendant son séjour à Copenhague auprès de l'ambassadeur de France, une Relation de l'Islande (parue en 1663) et à La Haye, un peu plus tard, une Relation du Groënland (parue en 1647). Sa Relation de la Bataille de Lens, publiée en 1648, est un petit chefd'œuvre de narration. M. T. de L. a réédité la lettre dédicatoire à la reine de Suède. Est-il nécessaire d'ajouter, quand on a affaire à un éditeur tel que M. Tamizey de Larroque, que les notes sont pleines de curieux détails bibliographiques, biographiques et anecdotiques? Nous y relevons l'annonce très-bien venue d'une prochaine édition complète et correcte, avec commentaire, des lettres de Guy Patin 2.

244. L'Espagne au XVI et au XVIIe siècle, documents historiques et littéraires, publiés et annotés par Alfred MOREL-FATIO. Heilbronn, Henninger frères; Paris, libreria española de Denné; Madrid, libreria de Murillo, 1878, xi et 698 p.

M. Morel-Fatio, un de ceux qui connaissent le mieux les Cosas de España, n'a pas voulu présenter dans ce volume un tableau de la société espagnole au xvie et au xvIe siècle. Les documents inédits qu'il a pu bliés ne concernent que quelques épisodes de l'histoire moderne de l'Espagne; mais ils renferment des détails nouveaux, et, comme dit l'auteur, confirment sur plusieurs points les opinions reçues, rectifient sur d'autres des théories prématurées et mal établies, ou tout au moins comblent des lacunes dans la connaissance d'une époque difficile à comprendre et à juger équitablement.

L'ouvrage contient : I. Un mémoire présenté au roi Philippe II par

1. Auteur d'une Selenographia, Dantzig, 1647.

2. Nous avons relevé p. 41, 1. 31, une faute d'impression: Bouquier pour Bauquier.

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