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ces facultés se détermine par la méditation et le travail, dont l'instruction est le fruit.

Une longue étude fait le savant dans un ou deux genres; une étude réfléchie sur plusieurs genres fait l'érudit; une étude suivie sur l'ensemble des connoissances humaines fait l'homme instruit..

C'est de cette troisième classe que nous voulons nous occuper spécialement, parce que c'est par elle qu'on peut arriver aux deux autres, et que c'est elle encore qui donne le plus de développement à l'esprit, le plus d'aptitude aux différens états de la société, et le plus de succès dans le monde.

Le savant, d'après nos routines, peut être au-dessous d'un érudit, et l'érudit peut avoir beaucoup moins de connoissances qu'un homme instruit. Cela s'explique de soi-même. La science bien entendue ne peut embrasser que deux ou trois objets; l'érudition peut en embrasser plusieurs ; l'instruction les embrasse tous. Un savant n'est pas toujours un homme d'esprit, et souvent il y a loin d'un homme de lettres à un savant. La briéveté de la vie, les bornes naturelles de l'esprit humain, la variété des goûts et des inclinations, qui, dans le nombre des études, détermine des préférences, une sorte de vocation qui semble maîtriser le sentiment et la pensée, et, plus encore que tout cela, l'immense et volumineux dépôt des connoissances acquises et

conservées par l'imprimerie, s'opposent à ce qu'un écrivain soit profondément universel, et le condamnent à ne prendre que la superficie de chaque chose, avant de s'arrêter à celle sur laquelle son goût et son attrait pourront le fixer. On a cité quelquefois des hommes qui se croyoient profonds dans tous les genres, que l'on disoit savoir tout, et qui seroient aujourd'hui bien étonnés de s'apercevoir qu'ils ne savoient pas grand'chose.

Il faut bien renoncer à une grande fortune, quand il n'y a plus moyen que d'en avoir une médiocre. La science universelle est maintenant une chose impossible: mais chaque science, en particulier, peut être étudiée et approfondie; on en peut même reculer les bornes par une application constante, et l'on ne sauroit dire jusqu'où ces progrès peuvent se porter. Mais, les hautes sciences n'étant point l'objet particulier de cet ouvrage, nous nous contenterons d'y jeter un coup-d'œil en passant, et d'en indiquer les sources, comme sur la carte on indiqueroit la route à celui qui voudroit connoître par lui-même un pays dont quelques célèbres voyageurs auroient parlé. Nous nous bornerons à tracer le plan méthodique d'études et de lectures nécessaires à ceux qui veulent prendre une idée générale de tous les objets d'instruction, et s'appliquer ensuite, d'une manière plus spéciale, aux

genres de connoissances qui leur paroîtront plus importans, plus utiles ou plus agréables. Rien de plus commun dans le monde que de rencontrer des parens qui, en retirant leurs enfans du collége ou d'une pension, demandent quel plan de lecture ils pourroient suivre pour leur donner l'instruction dont ils n'ont reçu que les premiers élémens, sans beaucoup d'ordre, et presque sans profit.

Il est remarquable encore que presque tous les hommes qui ont joui de quelqué célébrité par leurs ouvrages ou par leurs succès dans le monde, comme hommes d'esprit, ont repris en sous-œuvre leur éducation de collége, et que, manquant de guides qui auroient pu leur indiquer les sources, ils ont été obligés de se tracer, en tâtonnant, une route d'instruction qu'un livre comme celui-ci leur auroit indiquée, en leur épargnant beaucoup de temps et de peines heureux encore si, en les prenant au hasard, les livres qu'ils trouvoient sous la main, ne leur ont pas fait perdre quelque chose de plus précieux que le temps qu'ils ont dû regretter !

Nous avons une foule d'ouvrages élémentaires sous le titre de Cours de lecture, Cours d'études encyclopédiques, &c. &c. qui sont bons pour donner les premières - notions dans quelques genres de sciences et de lit

térature; máis ce qui leur manque, c'est l'indication des ouvrages qu'on doit préférer pour prendre une connoissance plus détaillée et plus approfondie de ces différens objets. C'est-là précisément le but que nous avons voulu atteindre dans celui-ci, comme la base de toute solide instruction. Cet avantage manque également à plusieurs ouvrages qui jouissent d'une réputation bien méritée. Rollin est excellent pour inculquer les meilleurs principes, et pour former le goût et la raison; le P. Lamy, pour faire un bon théologien; Fleury, pour tracer le plan des études sérieuses et classiques; Condillac et Deleuze, pour former des savans dans l'histoire et la politique, &c. : mais aucun d'eux n'a fait précéder son ouvrage d'une vue générale de ce que l'esprit humain embrasse dans ses connoissances, et presque tous se sont attachés à des objets particuliers. Il nous semble toutefois qu'il doit en être de toutes les connoissances en général comme de la géographie, par exemple, et qu'il est bien plus facile de classer dans sa mémoire la position de tel royaume ou de telle province, quand on a commencé par bien connoître une description générale de l'ensemble du globe terrestre et de toutes les parties qui le

composent.

Les essais de littérature, les mélanges,

les dictionnaires, même méthodiques, ont sans doute leur utilité; cependant ils ne rassemblent que des matériaux détachés d'un édifice qu'on ne sauroit plus reconstruire si l'on en avoit perdu le plan. Ces lectures peuvent servir à consolider l'instruction: mais, avant qu'on ait réuni les connoissances nécessaires pour savoir en profiter, elles sont plus propres à détourner qu'à bien conduire; et pour avancer, il faut suivre constamment une route bien tracée, et ne point divaguer ceci n'empêche pas qu'on ne puisse s'occuper de deux ou trois études àla-fois; et chacune d'elles ne sauroit nuire à l'autre, parce que l'ordre qui les divise, empêche toute confusion dans l'esprit.

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