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retrouve dans l'actif en nature, et s'y distingue de toutes autres valeurs. Il sera dans l'actif s'il est matériellement dans le portefeuille; il sera également dans l'actif, s'il y est replacé par celui qui ne le tenait du failli que pour le lui rapporter; car en ce cas il n'a pas cessé de faire partie du compte du portefeuille.

756. La circonstance d'une affectation spéciale à des payements déterminés résultait de l'ancien article 583; mais elle y était exprimée en des termes moins généraux qui ont souvent donné lieu à des difficultés. L'article disait : « Ou si elles ont reçu de sa part la destination spéciale de servir au payement d'acceptations ou de billets tirés au domicile du failli. »

Dans la première discussion de la Chambre des Députés de France, on proposa d'ajouter à l'article que le propriétaire des effets ou titres ne pourrait exercer la revendication qu'autant qu'il ne serait débiteur de la faillite à aucun autre titre. Cet amendement fut combattu et l'on démontra qu'il dénaturait les contrats de mandat et de dépôt : il ne peut être permis à un homme de détourner de l'usage pour lequel il a consenti à les recevoir des valeurs qu'on ne lui a remises que pour un usage déterminé, et sur sa promesse de les employer à cet usage; la probité ne le permet pas; l'article 1293 du Code civil excepte de la compensation les sommes ou objets remis en dépôt et les choses prêtées à usage; l'article 408 du Code pénal punit de la prison et d'une amende le détournement de sommes ou valeurs quelconques confiées à titre de dépôt. L'amendement ne fut pas adopté.

Lorsque le mandat n'est ni exprès ni manifeste, lorsque l'affectation de payement n'est pas clairement indiquée, l'application de cet article peut donner lieu à des contestations sérieuses, mais qui consistent en débats sur les faits plus qu'en questions de droit. La Cour de Cassation l'a reconnu dans les termes suivants : « Attendu que l'arrêt attaqué de la Cour de Nimes, pour reconnaître à Léon père et fils le droit de revendiquer les effets de commerce dont il s'agissait au procès, s'est fondé sur ce qu'il était établi par les faits et par les présomptions graves, précises et concordantes dont la constatation et l'appréciation étaient dans les attributions exclusives des juges du fond, que les effets revendiqués n'avaient été remis par Léon père et fils à Baron et compagnie qu'à titre de provision, avec la destination spéciale de servir à payer des engagements déterminés; que

cette déclaration, en fait, justifie suffisamment l'application de l'article 585 (ancien) du Code de commerce 1. >>

757. Le droit à la revendication est acquis au propriétaire des effets ou titres, si, au moment où à éclaté la faillite, ils existaient en nature dans les mains du failli, ou dans celles de ses mandataires ou préposés que la jurisprudence assimile à lui. L'ouverture de la faillite fixe le droit 2. La Cour de Paris a appliqué les mêmes principes à la revendication d'une somme touchée, postérieurement à la faillite, pour effets qui s'étaient trouvés susceptibles d'être revendiqués lorsque la faillite s'était ouverte : « Considérant que la somme n'a été reçue par Bonnet et Bazin que quatre jours après l'ouverture de leur faillite; que, dès lors, elle n'a pu se confondre avec l'actif des faillis; mais qu'elle est restée distincte et susceptible d'être revendiquée 3. »

758. Les mêmes motifs seraient, à plus forte raison, applicables, si la négociation ou l'encaissement avaient été opérés par les curateurs : le droit serait le même, et le fait beaucoup plus évident, puisque l'existence des curateurs suppose inévitablement l'existence de la faillite, et que la masse des créanciers ne prend les affaires du failli que dans l'état où elles se trouvent à l'ouverture de la faillite qui fixe et arrête tous les droits.

759. L'ancien article 584 donnait lieu à de fréquentes contestations; il était ainsi conçu : « La revendication aura pareillement lien pour les remises faites sans acceptation ni disposition, si elles sont entrées dans un compte courant par lequel le propriétaire ne serait que créditeur; mais elle cessera d'avoir lieu si à l'époque des remises, il était débiteur d'une somme quelconque. >>

C'est avec raison que le législateur a supprimé cet article dans la nouvelle loi. En effet, les remises ainsi faites (sans acceptation, entrées dans un compte courant par lequel le propriétaire n'est que créditeur), ne l'ont été ni à titre de dépôt ni à titre de mandat. Elles sont la conséquence de la confiance accordée au failli, et n'ont pu être que l'exécution d'un contrat formel on tacite passé avec lui antérieurement à la faillite. La personne qui, ayant suivi la foi du failli, l'a volontairement constitué son débiteur, doit être placée dans la même catégorie que les autres créanciers avec lesquels il se trouve en compte 4.

1 Cass. 25 mai 1837.

2 Cass. 24 juin 1834. 5 Paris, 11 juin 1823. Cass. 20 juillet 1846 (Pasier. 1846, 1,875). V. encore: Cass. 15 mai 1855.-Massé, no 259. 4 Ainsi, celui qui a remis en compte courant à une maison de banque des effets de commerce qu'il a endossés au profit de cette maison, sous la condition qu'elle lui fourni

rait des contrevaleurs en espèces, suivant ses besoins, ne peut, après la faillite de la maison de banque, réclamer la restitution ou revendiquer, par voie de contrepassement d'écritures, les effets non encore alors payés. Paris, 12 janvier 1851 (Pasier. 1851, 2, 49). V. aussi les arrêts de Paris des 21 avril et 2 mai 1849 (Pasier. 1849, 2, 500).

760. Il n'est pas douteux que s'il a été fait pro-pliqué cette doctrine en l'absence même d'acvision entre les mains du failli pour le payement des lettres de change tirées sur lui, et non échues au moment de la faillite, la provision ne peut être revendiquée par le tireur et tombe, au contraire, dans l'actif de la faillite 1.

761. Mais si c'est le tireur qui tombe en faillite après avoir fait provision entre les mains du tiré, la propriété de la provision demeure acquise au porteur. La Cour de Cassation de France a ap-'

ceptation par le tiré, et d'affectation spéciale de la provision; mais la Cour de Cassation de Belgique, qui a aussi été appelée à décider ce point de droit, a considéré l'acceptation comme étant la réalisation de la condition sous laquelle la provision a été cédée au preneur et n'a en conséquence attribué la provision au porteur, que dans le cas d'acceptation de la lettre de change 2.

ARTICLE 567.

Pourront être également revendiquées, aussi longtemps qu'elles existeront en nature, en tout ou en partie, les marchandises consignées au failli à titre de dépôt ou pour être vendues pour le compte de l'envoyeur.

Pourra même être revendiqué le prix ou la partie du prix desdites marchandises, qui n'aura été ni payé ni réglé en valeur, ni compensé en compte courant entre le failli et l'acheteur.

Code fr. 1808. ART. 581. Pourront être revendiquées, aussi longtemps qu'elles existeront en nature, en tout ou en partie, les marchandises consignées au failli, à titre de dépôt, ou pour être vendues pour le compte de l'envoyeur; dans ce dernier cas même, le prix desdites marchandises pourra être revendiqué, s'il n'a pas été payé ou passé en compte courant entre le failli et l'acheteur.

Code fr. 1838. ART. 575. Pourront être également revendiquées, aussi longtemps qu'elles existeront en nature, en tout ou en partie, les marchandises consignées au failli à titre de dépôt, ou pour être vendues pour le compte du propriétaire.

Pourra même être revendiqué le prix ou la partie du prix desdites marchandises qui n'aura été ni payé, ni réglé en valeur, ni compensé en compte courant entre le failli et l'acheteur.

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ou tout autre contrat, dérobées au déposant, vrai propriétaire.

764. L'article 2279 du Code civil accorde la revendication pendant trois ans pour la chose perdue ou volée. Si donc la chose n'est sortie des mains du failli, ou du possesseur pour lui, que par perte ou vol, le propriétaire pourra exercer cette revendication, même contre le détenteur de bonne foi.

Mais la jurisprudence a décidé, avec raison, que cet article 2279 n'est pas susceptible d'extension. On a donc jugé que le propriétaire ne peut pas revendiquer son meuble contre le tiers de bonne foi qui le tient de celui qui se l'est procuré par abus de confiance. La Cour de Cassation a appliqué cette solution au cas même d'escroquerie « Attendu que les exceptions sont de droit étroit....; qu'en fait d'escroquerie, l'individu escroqué a suivi la foi de celui qui l'a trompé, et, par la vente qu'il lui a faite, lui a donné un titre indépendamment de la possession; qu'il n'en est pas de même de la chose volée, à l'égard de laquelle il n'y a ni vente, ni remise volontaire, et qui, au contraire, a été prise par une voie de fait quelconque 1. »

765. Le principe du § 2 de l'article 567 est le même que celui du § 1er. Tant que le prix, qui représente la chose, n'a pas été confondu dans les biens du failli, il peut encore être réputé représenter la chose pour le propriétaire. Au contraire, ce prix, s'il a été payé au failli avant sa faillite, est entré dans les biens de ce débiteur, et il ne reste au propriétaire qu'une créance ordinaire à laquelle aucun privilége n'est attaché2.

Le nouvel article a pris soin de dire que le droit du propriétaire existe aussi bien pour la partie du prix non payée que pour le prix intégral.

766. C'est un axiôme de droit commercial que qui règle paye. On décidait donc, sous l'ancien Code, que le prix avait été payé au failli par l'acheteur lorsque le failli avait reçu de celui-ci un réglement en billets. Néanmoins des difficultés avaient été élevées. La nouvelle rédaction les fait cesser en assimilant, en termes exprès, le prix réglé en valeurs, au prix payé.

Les mots de l'ancien article prix passé en compte courant, avaient donné lieu à des difficultés dont témoigne le passage suivant d'un arrêt de la Cour de Toulouse : « Attendu que

l'article 581 ne refuse le droit de revendiquer le prix des marchandises vendues pour le compte de l'envoyeur, que lorsque ce prix a été payé ou passé en compte courant; que le même motif a dû dicter l'une et l'autre de ces deux dispositions. Le législateur n'a pas voulu exposer l'acheteur à payer deux fois; il s'est d'ailleurs conformé au principe général en matière de faillite, qui veut que tout ce qui est confondu dans l'actif du failli soit le gage commun de tous les créanciers. Il faut en conclure que la passation en compte courant doit avoir les caractères, les effets d'un payement; elle doit avoir libéré à jamais l'acheteur, et avoir grossi l'actif du failli. C'est ce qui arrive lorsque le compte courant, offrant des opérations réciproques, le débit passé pour l'un balance le crédit passé pour l'autre. C'est ce qui arrive lorsque l'un et l'autre des correspondants est tour à tour débiteur et créancier, et, lorsqu'au moment de la faillite, le prix de la marchandise vendue pour le compte d'un tiers se trouve néanmoins compensé, dans l'intérêt de l'acheteur, avec une somme, une valeur que lui devait le commissionnaire. Mais c'est une erreur de prétendre que la seule inscription, la seule insertion sur un compte ouvert entre le commissionnaire et l'acheteur, du prix de la marchandise dû par ce dernier, constitue la passation en compte courant dont parle la loi; et, s'il en était ainsi, jamais la revendication du prix n'aurait lieu; car, d'un autre côté, le commissionnaire vend presque toujours en son nom, et il y est autorisé par l'article 91 du Code de commerce; de l'autre, il ne peut pas vendre à terme sans ouvrir un compte et y débiter l'acheteur. Il faut dire qu'il y a lieu à revendication de prix, toutes les fois que ce prix est réellement dû, et que l'acheteur n'a aucun prétexte d'en refuser le payement, soit au commissionnaire, soit à l'envoyeur; ou bien il en résulterait l'injustice criante qu'une somme, reconnue pour être la représentation d'une marchandise dont le consignataire n'aurait jamais eu la propriété, lui serait attribuée exclusivement au véritable, au seul propriétaire 3. »

La loi nouvelle, conforme à la doctrine exposée dans cet arrêt, a prévenu désormais toute équivoque, en employant les mots de prix compensé en compte courant.

1 Cass. 6 mai 1833.

Ainsi, lorque le prix a été payé en espèces, mais se trouve dans la caisse du failli, même dans des sacs cachetés et donnés par l'acheteur avec étiquette et indication du nom du commettant, il n'y a pas de revendication possible, parce qu'en pareil cas il n'y a pas de dépôt, car nul ne peut se constituer un dépôt à lui-même. Bédarride, no 1130.

– Lainné, p. 510, enseigne qu'en ce cas il faudrait admettre la revendication. Mais elle devrait être écartée dans le cas où le prix aurait été versé en numéraire entre les mains d'un tiers indiqué par le vendeur. La raison en est, d'une part, qu'il y a payement réel, et, d'un autre côté, qu'il n'y a pas identité. V.aussi Pardessus, no 1280.—Esnault, no 641. * V. Toulouse, 7 février 1825.-Cass. 9 janvier 1858.

ARTICLE 368.

Pourront aussi être revendiquées les marchandises expédiées au failli, tant que la tradition n'en aura point été effectuée dans ses magasins, ou dans ceux du commissionnaire chargé de les vendre pour compte du failli.

Néanmoins, la revendication ne sera pas recevable, si, avant leur arrivée, les marchandises ont été vendues sans fraude, sur factures et sur connaissements ou lettres de voiture signés par l'expéditeur.

ARTICLE 369.

Le revendiquant sera tenu de rembourser à la masse les à compte par lui reçus, ainsi que toutes avances faites pour fret ou voiture, commission, assurance ou autres frais, et de payer les sommes qui seraient dues pour mêmes causes.

Code fr. 1808. ART. 576. Le vendeur pourra, en cas de faillite, revendiquer les marchandises par lui vendues et livrées, et dont le prix ne lui a pas été payé, dans les cas et aux conditions ci-après exprimés. ART. 577. La revendication ne pourra avoir lieu que pendant que les marchandises expédiées seront encore en route, soit par terre, soit par eau, et avant qu'elles soient entrées dans les magasins du failli ou dans les magasins du commissionnaire chargé de les vendre pour le compte du failli.

ART. 578. Elles ne pourront être revendiquées, si, avant leur arrivée, elles ont été vendues sans fraude, sur factures et connaissements ou lettres de voiture.

ART. 579. En cas de revendication, le revendiquant sera tenu de rendre l'actif du failli indemne de toute avance faite pour fret ou voiture, commission, assurances ou autres frais, et de payer les sommes dues pour mêmes causes, si elles n'ont pas été acquittées.

ART. 580. La revendication ne pourra être exercée que sur les marchandises qui seront reconnues être identiquement les mêmes, et que lorsqu'il sera reconnu que les balles, barriques ou enveloppes dans lesquelles elles se trouvaient lors de la vente, n'ont pas été ouvertes, que les cordes ou marques n'ont été ni enlevées ni changées, et que les marchandises n'ont subi en nature et quantité ni changement ni altération. Code fr. 1838. ART. 576. Conf. aux articles 568 et 569.

SOMMAIRE.

767. Le législateur s'est prononcé en cette matière en par-
faite connaissance de cause; nécessité d'admettre
dès-lors ce système dans toutes ses conséquences.
768. Modifications que l'ancien article 577 a subies.
769. La tradition réelle n'est pas requise pour que la mar-
chandise ne puisse plus être revendiquée.

770. Qu'entend-on par le mot magasin. Espèces diverses
et exemples.

771. Malgré la suppression de l'ancien article 580, l'identité des objets revendiqués doit être établie.

772. Les marchandises, pour pouvoir être revendiquées,

ne peuvent avoir subi en nature et quantité, ni
changement, ni altération.

775. Quid, si l'altération provient du seul effet des lois
physiques, sans le concours de la volonté de l'homme?
774. Les difficultés que peut faire naitre la quantité des

marchandises doivent être ramenées à la question
d'identité.

775. De la tradition dans les magasins du commission-
naire. Quand empêche-t-elle la revendication?
776. Conditions auxquelles la vente des marchandises doit
être effectuée, avant leur arrivée, pour rendre la
revendication non recevable.

777. Dans tous les cas où la revendication est admise, le
vendeur doit rembourser à la masse les frais
auxquels l'expédition de la marchandise a donné
lieu.

778. Que décider du cas où la livraison de la marchandise est antérieure au jugement déclaratif, mais postéricure, à l'époque fixée par justice comme étant celle de la cessation de payements?

COMMENTAIRE.

767. Ces deux articles remplacent, avec de notables modifications, mais en en conservant. le principes, les articles 576, 577, 578, 579 et 580 de l'ancien Code. Ce sont ces articles, comme nous l'avons déjà dit, dont le projet de loi et la Commission proposaient la suppression absolue. Nous pouvons donc renvoyer, quant aux discussions que le principe du droit de revendication a soulevées, aux préliminaires de ce chapitre. Qu'il nous suffise d'ajouter que le dissentiment, qui après avoir de tout temps divisé le monde commercial, s'est renouvelé, à tant d'années d'intervalle, dans la discussion de l'ancien Code de commerce comme dans celles qui ont précédé l'adoption de la nouvelle loi française et de la nôtre, démontrent assez que c'est là une de ces questions sur lesquelles le

1 Nous ne pouvons cependant nous empêcher de reproduire les passages les plus saillants des rapports qui ont été présentés aux Chambres françaises lors de la solennelle et mémorable discussion dont cette matière a été l'objet. Le premier rapport présenté à la Chambre des Députés résumait ainsi les arguments développés dans la discussion de l'ancien Code:

a Deux systèmes principaux étaient alors en présence. L'un, conforme aux usages commerciaux, étendait la faculté de revendication à tous les cas où les marchandises, fussent-elles même entrées dans les magasins du failli, pouvaient être retrouvées et reprises en nature. Lorsque l'on vend, disait-on, c'est sous la condition d'être payé ; il n'y a réellement transfert de propriété qu'après que cette condition se trouve remplie. Si ce principe n'a pas été appliqué aux meubles, comme aux immeubles, c'est par l'impossibilité de constater l'identité. Quand l'impossibilité cesse, le principe doit reprendre sa force; refuser au vendeur ce droit, qui fait sa sûreté, c'est ruiner le crédit et nuire surtout aux villes de fabrique; personne ne voudra plus livrer avant d'être payé. De quel droit les autres créanciers profiteraient-ils des marchandises qui n'ont point été payées de leurs deniers, et qui, n'ayant point été payées non plus par leur débiteur, ne lui ont jamais réellement appartenu? Ce serait leur faire don du bien d'autrui. Un navire fait naufrage; les sucres périssent, les cotons sont sauvés; les cotons retournent à leur propriétaire : on ne partage pas la perte entre tous ceux qui ont contribué à la cargaison. La revendication est une protection nécessaire contre la fraude d'un négociant qui, à la veille de faillir, s'empresse de multiplier les commandes. Il sait bien qu'il ne payera pas; mais il veut grossir fictivement son actif, et se créer les moyens d'offrir un dividende et d'obtenir un concordat.

« Dans le système contraire on invoquait, pour se refuser à la revendication, les principes du droit civil sur la vente. Elle est parfaite par le consentement, et la propriété ne peut, en passant sur la tête de l'acheteur, continuer à résider sur celle du vendeur. Si la chose vendue est expédiée et mise en route, elle voyage aux risques et périls de l'acheteur qui en supporte la perte. Le vendeur a suivi la

doute est permis, même après la loi. Nous pourrions dire qu'on s'est exagéré les avantages commerciaux de cette revendication et les inconvénients pratiques de son abolition; nous pourrions insister sur les arguments par lesquels on s'est appliqué à démontrer que cette abolition d'un ancien usage était la conséquence juste et logique de principes de droit que l'on n'a pas contestés. Mais les longues citations que nous avons faites suffiront à tout lecteur pour se former lui-même une opinion. Ce qui est de toute évidence, c'est que le législateur ne s'est prononcé qu'en entière connaissance de cause; et sa volonté a été trop clairement manifestée pour que l'on puisse loyalement chercher à en éluder les conséquences 1.

768. Le paragraphe 1er de l'article 568 rem

foi de l'acheteur; devenu créancier comme tous ceux qui sont enveloppés dans le naufrage commun, il doit subir les mêmes pertes; dans le cas de jet à la mer, la perte est supportée par contribution sur toutes les marchandises. La revendication n'est point une justice, parce qu'elle n'est pas possible pour tous. Si on l'admet, il faudrait, pour être conséquent, aller jusqu'à charger les syndics de reconnaitre les marchandises fournies par chaque créancier et de les rendre. Cet usage s'est établi dans le commerce à une époque où les voies de communication et les moyens de crédit manquaient de développement, et où une livraison réelle était habituellement exigée pour valider la vente. Les revendications ont toujours été une source inépuisable de difficultés qu'il faut tarir. La fraude est impossible à prévenir dans les magasins du failli, où les marchandises, pleinement à sa disposition, peuvent être dénaturées, et où il modifiera à son gré la condition des vendeurs, en créant une identité fausse ou en en détruisant une vraie. Le crédit ne souffrira pas de l'abolition de cet usage. On n'établit pas ses espérances de payement sur les chances peu sûres d'une revendication; et lorsqu'on craint une faillite, on ne traite pas. Les tiers ont pu être induits à contracter avec le failli dans la confiance que les marchandises qu'ils voyaient dans ses magasins étaient sa propriété et répondaient de leurs créances.

« Entre ces deux systèmes, les rédacteurs du Code se sont arrêtés à un terme moyen. Ils ont aboli l'ancien usage commercial de la revendication dans les magasins du failli, mais ils ont autorisé la revendication des marchandises encore en route. »>

Après cet exposé, le rapport concluait ainsi :

« Rendre impossible la revendication lorsque ni le failli, ni personne pour lui, n'ont encore pris possession, ce serait pousser bien loin la rigueur. Si la marchandise vendue et expédiée au failli est devenue légalement sa propriété, du moins n'a-t-elle pas encore été mise à sa disposition. Elle n'a, aux yeux de personne, augmenté le crédit et l'actif de celui qui en est propriétaire sans en être possesseur. Le vendeur mérite une condition meilleure que la plupart des autres créanciers, car sa marchandise a été vendue lorsque déjà la faillite imminente l'exposait à une perte certaine ;

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