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CHAPITRE IV.

Code de Commerce de 1808.

Le grand travail de codification né de la révolution française appelait inévitablement un Code de commerce 1.

Un arrêté des consuls du 15 germinal an IX établit, auprès du ministre de l'intérieur, une commission de sept membres chargée de concourir à la rédaction d'un projet; et nomma membres de cette commission les citoyens : Corneau, juge au tribunal d'appel à Paris; Vignon, président du tribunal de commerce; Boursier, ancien juge du commerce; Legras, jurisconsulte; Vital-Roux, négociant; Coulomb, ancien magistrat; et Mourgue, administrateur des hospices.

La commission, réunie auprès du ministre de l'intérieur Chaptal, prépara le projet, qui fut présenté aux consuls le 13 frimaire an X. Un arrêté des consuls du 14 frimaire an X ordonna l'impression du projet, et son envoi aux tribunaux et aux conseils de commerce.

On lit dans le discours préliminaire des auteurs du projet : « Nous avons recherché les causes qui ont rendu jusqu'à présent les faillites si ruineuses pour le commerce, et si fatales au crédit nous avons cru reconnaître que ces causes proviennent du défaut de garantie, qui met le débiteur failli dans une indépendance dangereuse, en lui laissant la faculté d'abuser de sa situation. Les anciennes lois s'étaient bornées à prescrire au débiteur failli des formes dont l'inexécution était sans dangers : la contrainte par corps était la seule arme dont les créanciers pouvaient disposer; elle était leur seule garantie. »>

Le projet était divisé en trois livres, comprenant 485 articles. Les faillites et banqueroutes étaient réglées par les sept premiers titres du 3e livre, sous les articles 345 à 421.

Nous rapportons ici la plus grande partie de ces 77 articles. Rien ne nous paraît plus utile pour l'intelligence d'une législation, que d'apercevoir comment ses dispositions se sont engendrées dans l'esprit du législateur. Quoique ce premier projet ait subi beaucoup de modifications, et ait même été amendé par ses auteurs, nous le donnons, néanmoins, préférablement aux projets subséquents, afin de mieux indiquer le point de départ de notre législation nouvelle. Locré, se

plaçant à un autre point de vue, s'est abstenu de le réimprimer.

« TITRE I.. DE LA FAILLITE.

345. Tout commerçant qui cesse ou suspend ses payements est en état de faillite. Dans les trois jours qui suivent la cessation ou suspension de payements, il est tenu d'en faire la déclaration au greffe du Tribunal de commerce. Dans les lieux où il n'y a pas de Tribunal de commerce, la déclaration doit être faite, dans le même délai, à la municipalité.

346. A compter de l'ouverture de la faillite, tous les biens meubles et immeubles du débiteur sont sous la garde de la loi.

547. Nul créancier ne peut acquérir privilège ni hypothèque sur les biens du failli, dans les dix jours qui précèdent l'ouverture de la faillite.

348. Tous actes translatifs de propriétés immobilières faits dans les dix jours qui précèdent l'ouverture de la faillite sont nuls.

349. Tous actes ou engagements pour faits de commerce, contractés par le débiteur dans les dix jours qui précèdent l'ouverture de la faillite sont présumés frauduleux. Les titres constitutifs de ces engagements ne sont admis que sur la preuve qu'ils ont été légitimement contractés.

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350. Toutes sommes payées dans les dix jours qui précèdent l'ouverture de la faillite pour dettes non échues, sont rapportées.

351. La loi n'admet aucune revendication sur les marchandises ou autres effets mobiliers du failli.

352. L'ouverture de la faillite rend exigibles les dettes non échues.

355. L'ouverture de la faillite est fixée par la date de la déclaration de cessation ou de suspension de payements faite par le débiteur failli dans le délai prescrit par l'article 345. A défaut de déclaration, l'ouverture de la faillite est fixée par la date du premier protêt faute de payement et à défaut de protêt, par la date du premier acte qui constate le refus de payer.

554. L'ouverture de la faillite donne le droit de faire, au nom de la masse des créanciers, et pour la conservation de leurs droits, inscription

1 V. pour l'histoire du Code de Commerce Locré,

Législation, t. I, p.74 et t. XI, p. 1 et suivantes (éd. belge).

aux hypothèques sur les immeubles connus du débiteur failli.

555. La faillite donne lieu à une poursuite criminelle s'il y a présomption de banqueroute.

356. L'instruction de la procédure criminelle n'arrête point le cours des poursuites civiles pour la conservation et le recouvrement de l'actif du débiteur.

TITRE II. DE LA FORME DE PROCÉDER DANS LES

FAILLITES.

357. Dans les vingt-quatre heures qui suivent la déclaration de la faillite, le commissaire du gouvernement près le Tribunal de commerce est tenu de faire apposer les scellés sur les magasins, meubles et effets du débiteur failli.-Dans les lieux où il n'y a point de Tribunal de commerce, l'apposition des scellés est faite, dans le même délai, par le maire ou l'adjoint qui a reçu la déclaration de faillite. Dans ce dernier cas, l'extrait du procès-verbal d'apposition des scellés est transmis, sans délai, au commissaire du gouvernement près le Tribunal de

commerce.

558. Le commissaire du gouvernement est tenu de faire tous actes nécessaires pour le maintien des droits des créanciers et de ceux du débiteur. Il est tenu, en vertu de l'art. 354, de requérir l'inscription aux hypothèques sur les immeubles des débiteurs du failli. - Cette inscription est reçuè sans aucune avance des droits d'inscription, ni des salaires du conservateur, sauf le recours contre le grevé. Il est tenu de requérir l'inscription sur les immeubles du failli. Cette dernière inscription est reçue sur simples bordereaux et sans titres authentiques. Elle ne donne lien au payement d'aucune espèce de droits.

359. Dans les trois jours qui suivent l'apposition des scellés, ou la remise du procès-verbal, et nonobstant toutes oppositions, il est procédé de suite et sans frais, en présence d'un délégué du Tribunal, et à la requête du commissaire du gouvernement, aux reconnaissance et levée des scellés, et à l'inventaire des marchandises, meubles et effets mobiliers du débiteur.

360. Pendant le cours de l'inventaire, ou après sa clôture, et suivant l'exigence des cas, le Tribunal de commerce peut, sur la réquisition du commissaire du gouvernement, ordonner la vente des denrées, marchandises, et autres objets périssables. — Il peut commettre un individu pour recevoir les sommes provenant de la vente, et poursuivre le payement des dettes exigibles.

361. Dans les dix jours qui suivent la clôture de l'inventaire, le débiteur failli est tenu de déposer au greffe du Tribunal de commerce un état de situation que l'on nomme bilan. Cet état doit être accompagné des livres, et de l'acte de société s'il y a société.

362. Pour faciliter au débiteur la rédaction

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et l'évaluation de tous les effets mobiliers et immobiliers du débiteur, l'état des dettes actives et passives, le tableau des pertes. Le bilan doit être affirmé véritable, daté et signé par le débiteur.

364. Dans les vingt-quatre heures qui suivent le dépôt du bilan, le débiteur est tenu, sous la surveillance du commissaire du gouvernement, de convoquer les créanciers indiqués par le bilan. Cette convocation s'opère par un avertissement circulaire qui énonce : l'état de faillite où le débiteur se trouve; le lieu, le jour et l'heure indiqués par le commissaire du gouvernement pour la réunion des créanciers; l'invitation de concourir à cette réunion, ou de s'y faire représenter par un porteur de pouvoir.

365. Les pouvoirs doivent être donnés par acte public. - Ils contiennent l'autorisation : · de représenter le créancier; d'élire domicile dans le lieu où siége le Tribunal; de faire vérifier les titres de la créance; d'affirmer pour et au nom du créancier, et dans les formes prescrites par la loi, la sincérité de la créance; de consentir et signer, s'il y a lieu, toutes délibérations et transactions.

366. Au jour indiqué par l'avertissement, l'assemblée est tenue par le commissaire du gouvernement. Il en dresse le procès-verbal; -I vérifie, d'après l'indication du bilan, la qualité présumée de ceux qui se présentent comme créanciers, et les pouvoirs de ceux qui représentent les créanciers; - Il informe l'assemblée des mesures qui ont été prises et des formalités qui ont été remplies; Il admet le débiteur failli à présenter, ou à faire présenter par un porteur de pouvoir, le tableau de sa situation et les moyens de transiger; - Il fait élire domicile par les créanciers non résidant dans le lieu où siége le Tribunal. — L'assemblée, suivant l'exigence des cas, confirme, révoque ou accorde un sauf-conduit au débiteur failli.

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- Elle nomme des commissaires pour vérifier le bilan et les livres. Elle détermine les mesures provisoires que l'intérêt des créanciers peut exiger. Elle fixe le délai dans lequel chaque créancier, quels que soient la nature et le titre de sa créance, est tenu de la faire vérifier et de l'affirmer. Le commissaire du gou-、 vernement concourt à la délibération; il représente les absents.-Les créanciers et les porteurs de pouvoirs admis dans l'assemblée sont tenus de signer le procès-verbal; en cas d'impuissance de signer, il en est fait mention.

(Les articles 367 à 376 sont relatifs à l'affirmation et à la vérification des créances, et ne diffèrent notablement du Code qu'en ce que

l'affirmation précèderait la vérification. Par les articles 374 et 375, le Tribunal de commerce fixe un nouveau délai pour les créanciers défaillants.)

376. A défaut de comparution dans le délai fixé par le jugement, les défaillants sont déclarés déchus de tous droits et actions sur les biens du débiteur failli.

377. Dans les trois jours qui suivent l'exécution des formalités prescrites par les articles précédents, le débiteur failli est tenu, sous la surveillance du commissaire du gouvernement, de convoquer ceux des créanciers dont les créances ont été admises.

378. L'assemblée est tenue dans la forme prescrite par l'art 366. Les commissaires rendent compte de l'exécution du mandat qui leur a été donné. L'assemblée délibère suivant l'exigence des cas.

379. S'il intervient un traité entre les créanciers délibérants et le débiteur failli, la résolution n'est obligatoire que par le concours d'un nombre de créanciers représentant, par leurs titres de créances vérifiés, les trois quarts de la totalité des sommes dues.

380. L'homologation du traité par le Tribunal de commerce le rend exécutoire à l'égard de tous les créanciers autres que les créanciers privilégiés et hypothécaires dont les titres de créances ont été vérifiés et admis.

381. S'il n'intervient point de traité, les eréanciers forment un contrat d'union, et nomment des syndics et un caissier chargé de recevoir les sommes provenant de toute espèce de

recouvrements.

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383. Le créancier porteur d'un effet dont le tireur, l'accepteur et les endosseurs sont en faillite, participe aux distributions, au marc le franc, pour le total de sa créance jusques à son parfait et entier payement.

384. Nul payement n'est effectué que sur la représentation du titre constitutif de la créance. Le caissier mentionne sur le titre le payement qu'il effectue. Le créancier donne quittance en marge de l'ordre.

(Les articles 385 à 387 sont relatifs à la vente des immeubles. Le titre III, De la cession de biens, comprend les articles 388 à 392.)

392. Nul n'est admis au bénéfice de la cession, s'il ne justifie que toutes les formalités prescrites pour la faillite ont été remplies.

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393. Tout commerçant qui a fait faillite ou cession de biens peut être réhabilité s'il représente devant le Tribunal de commerce les titres des créances comprises dans le bilan, ou les quittances pour la totalité des sommes dues en principal, intérêts et frais.

394. La demande en réhabilitation, et les pièces, sont communiquées au commissaire du gouvernement. Le Tribunal prononce, contradictoirement avec le commissaire du gouvernement, sur la demande en réhabilitation.

395. Si la demande est admise, le nom du réhabilité est rayé du tableau des faillis. Il est réintégré dans l'exercice de ses droits civils et politiques. Il est autorisé à faire afficher le jugement qui le réhabilite.

TITRE V. -DE LA PRÉSOMPTION DE BANQUEROUTE.

396. Il y a présomption de banqueroute : Si le débiteur qui a cessé ou suspendu ses payements n'a pas fait la déclaration prescrite par l'article 345; Si le débiteur, ayant fait la déclaration, n'a pas déposé son bilan et ses livres de commerce dans le délai prescrit par l'article 361;-S'il n'a pas tenu un livre authentique, et fait inventaire dans les formes et délais prescrits par l'article 4 ; - Si, ayant une société de commerce, il ne s'est pas conformé aux articles 23 et 24.

397. Dans les cas prévus par l'article précédent, le commissaire du gouvernement près le Tribunal de commerce est tenu de dénoncer les faits au commissaire du gouvernement près le Tribunal criminel.

598. A défaut de dénonciation de la part du commissaire du gouvernement près le Tribunal de commerce, ou en cas d'inaction de la part du commissaire du gouvernement près le Tribunal criminel, tout créancier peut porter plainte pour fait de banqueroute.

599. Si le prévenu est mis en jugement, les poursuites commencées devant le Tribunal de commerce sont continuées devant le Tribunal criminel à la requête du commissaire du gouvernement près ce Tribunal. Les fonctions attribuées au Tribunal de commerce et à son délégué sont remplies par le Tribunal criminel et par son délégué.

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près le Tribunal de commerce, ou le maire ou adjoint dans les lieux où il n'y a pas de Tribunal de commerce, sont tenus de se conformer aux dispositions de l'art. 557.

401. Dans les vingt-quatre heures qui suivent l'apposition des scellés ou la remise du procèsverbal, le commissaire du gouvernement près le Tribunal de commerce est tenu de faire la dénonciation prescrite par l'art. 397.

402. Si, à l'époque de la mise en jugement de l'accusé, il n'a pas été pris d'autres mesures conservatoires que celle de l'apposition des scellés, le commissaire du gouvernement près le Tribunal criminel est tenu de faire procéder à la levée des scellés apposés sur les magasins, meubles et effets du débiteur, et à l'inventaire, dans les formes et délais prescrits par les articles 359 et 360.

(Les articles 403 à 412 prescrivent, pour l'affirmation et la vérification des créances, des formalités analogues à celles des articles 564 à 377; sauf en ce que l'obligation de faire citer les créanciers est attribuée au commissaire du gouvernement. L'article 411, en déclarant déchus les créanciers défaillants, réserve aux créanciers inconnus la voie de l'opposition.) 413. L'assemblée est tenue par le commissaire du gouvernement. Il en dresse procèsverbal; Il informe l'assemblée des mesures qui ont été prises et des formalités qui ont été remplies;-Il représente les créanciers absents. - L'assemblée nomme des syndics à l'effet de procéder, avec le commissaire du gouvernement, à la rédaction du bilan de l'accusé; - Elle autorise, s'il y a lieu, les syndics à intervenir à fins civiles dans la procédure criminelle contre les auteurs. fauteurs et complices de la banqueroute; Elle nomme un caissier chargé de recevoir les sommes provenant de toute espèce de recouvrements.

414. Le commissaire du gouvernement peut faire ordonner que l'accusé sera présent à la rédaction du bilan pour fournir les renseignements nécessaires.

415. Pendant le cours de la procédure criminelle, il ne peut intervenir de traité entre l'accusé et les créanciers.

416. Si le prévenu est renvoyé de l'accusation, il peut être admis à traiter avec ses créanciers, conformément aux articles 578, 379 et 380.

417. Si le prévenu est condamné, les créanciers procèdent par leurs syndics, en conformité des articles 581, 382, 385, 384, 585, 586 et 387.

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ses livres de commerce, soit par toutes autres voies frauduleuses.

419. Sont complices du crime de banqueroute, ceux qui sont convaincus de l'avoir aidée ou favorisée directement ou indirectement par supposition de créances, par recèlement ou enlèvement de marchandises ou effets, et par toutes voies frauduleuses.

420. Le Code pénal détermine les formes de procédure et les peines qui sont applicables aux banqueroutiers, leurs complices, fauteurs et adhérents.

421. Indépendamment des peines prononcées par le Code pénal, le banqueroutier, ses complices, fauteurs et adhérents, sont solidairement responsables de la totalité des sommes dues par le banqueroutier. »>

Les observations des tribunaux et celles des conseils de commerce sur ce projet ont été imprimées en 3 vol. in-4°. La commission révisa son projet, auquel elle apporta de nombreux amendements, et elle fit précéder cette révision d'une analyse raisonnée de ces observations, publiée en 1805, et ouvrage de Gorneau, Legras et Vital-Roux.

Le nouvau projet servit de base à celui que rédigea la section de l'intérieur du Conseil d'Etat. Locré constate à cette occasion le fait suivant : « A la différence de ce qui s'était pratiqué lors de la confection du Code civil, les commissaires rédacteurs du projet de Code de commerce n'ont pas été appelés aux délibérations de la section, si ce n'est accidentellement et pour avoir d'eux quelques renseignements; et ils n'ont pas assisté aux séances du Conseil d'État 1. »

Le projet de la section de l'intérieur fut soumis aux délibérations du Conseil. La partie relative aux faillites et banqueroutes y fut discutée dans dix-neuf séances, du 24 février au 26 mai 1807.

La discussion s'ouvrit par un exposé général que Cretet fit du système proposé, et dont voici l'analyse :

« La nécessité de nouvelles dispositions contre les faillites, était un des principaux motifs qui avaient déterminé à rédiger un Code de

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peut donner l'administration aux seuls créanciers présents; les absents, pour lesquels la loi doit veiller, seraient sacrifiés. La section propose d'établir un curateur.

« Ce ministère n'est pas absolument nouveau en France. La déclaration de 1720 indiquait cette mesure, mais ne la commandait pas. La loi n'avait réglé ni la nomination ni les fonctions de curateur. En Angleterre il y a des curateurs, mais dont les pouvoirs sont trop étendus; nonseulement ils administrent, mais ils jugent. En Hollande, on les prend dans une chambre qui est permanente; mais là aussi, en même temps qu'ils administrent, ils prononcent sur beaucoup de questions. A Gênes, les tribunaux nomment des curateurs, et les prennent ou parmi les créanciers ou au dehors.

«La section propose d'emprunter à ces législations le ministère du curateur; ses pouvoirs, limités aux actes conservatoires, cesseront à l'apparition des véritables propriétaires, c'est-à-dire des créanciers. Il en présentera la liste au tribunal, qui nommera parmi eux des syndics provisoires. Le curateur cessera alors d'aministrer; mais il conservera la surveillance de ses syndics. C'est lorsque l'on connaîtra tous les créanciers, c'est-à-dire la véritable masse, que le failli pourra proposer un concordat.

« Le Conseil aura à examiner s'il convient de séparer la masse des créanciers hypothécaires de celle des créanciers chirographaires. La section s'est en général peu écartée du droit reçu; si ce n'est à l'égard des femmes, dont il importe de réprimer les fraudes.

« Jusqu'ici les banqueroutiers ont été rarement punis. La section propose de diviser les faillis en trois classes, en introduisant, entre les faillis et les banqueroutiers frauduleux, une classe intermédiaire qui sera jugée correctionnellement 1. »

Nous n'entreprendons point de présenter ici l'analyse des discussions qui ont eu lieu dans le sein du Conseil, et dont Locré a publié les procès-verbaux; mais nous ne saurions trop en recommander l'étude attentive à quiconque voudra se former une juste idée de l'esprit des dispositions du Code. Nous y aurons souvent recours dans le commentaire des articles. Nous n'indiquerons ici que ceux des points fondamentaux qui ont été le plus vivement discutés.

C'était une question grave que celle de savoir si l'événement de la faillite dessaisirait le failli de la propriété de ses biens. La rédaction de la section pouvait être interprétée en ce sens, qui était adopté par plusieurs défenseurs du projet. On décida qu'il ne serait dessaisi que de l'administration. (Séance du 26 février 1807 2.)

Le système d'annulation des actes postérieurs à l'existence de la faillite ou aux dix jours pré

cédents, qui depuis a été l'objet des plus vifs débats dans la discussion de la loi de 1838, occupa le Conseil d'État, qui tempéra en quelques points la sévérité des dispositions de la section. (Séances des 26 février, 25 et 26 mai 3.)

Plusieurs séances furent consacrées à débattre diverses organisations de la faillite. On ne pouvait plus s'en tenir au régime suivi sous l'ordonnance de 1675. En adoptant le principe qui dessaisissait le failli de l'administration de ses biens, il devenait indispensable de décider à qui cette administration passerait.

L'institution des curateurs proposée par la section n'eut point de succès dans la discussion. On craignit de substituer aux anciens abus des abus nouveaux, en créant pour les gens d'affaires une profession habituelle et permanente, qui, vivant des faillites, trouverait profit à en perpétuer la situation précaire. La triple cascade des curateurs aux syndics provisoires, de ces syndies aux syndics définitifs, compliquerait l'administration, prolongerait les procédures, multiplierait les frais. On se plaignait des pouvoirs trop étendus donnés aux curateurs, dont on faisait, pour beaucoup de cas, de véritables magistrats. En leur attribuant la saisine, on viole le droit de propriété du failli, on compromet le gage des créanciers, livré aux spéculations, aux malversations, aux imprudences, aux négligences des curateurs.

On proposa de remettre l'administration première à un juge. Cette proposition fut réfutée facilement; mais elle conduisit à séparer les pouvoirs que la section confondait; et de cette discussion est née l'institution du juge-commissaire, membre du tribunal, délégué dès l'origine de la faillite pour en surveiller spécialement les opérations. Dans un nouveau projet de la section, les attributions de ce commissaire en faisaient tout à la fois un administrateur et un juge. On arriva à ne lui conférer que ce dernier caractère; ce qui est le système du Code.

Les curateurs ayant été rejetés, la section proposait de nommer un sequestre. Mais, quand il fut convenu de ne donner au commissaire que des attributions de juge, un simple sequestre ne suffisait plus; il fallait administrer. La section proposa de confier, jusqu'à l'union ou au concordat, l'administration à des agents administrateurs, choisis par le tribunal, même en dehors des créanciers; et d'établir simultanément des contrôleurs désignés par le tribunal parmi les créanciers. Ce système fut encore rejeté. On écarta comme inutile la création de créanciers contrôleurs, pensant que le contrôle du commissaire et celui du tribunal devaient suffire. Quant à l'agence, on la voulut de courte durée, et investie de pouvoirs peu étendus. Plusieurs membres demandaient que ces agents fussent

1 Locré, Législation, t. I, p. 77 et t. XII, p. 43.

2 Ibid. t. XII, p. 48.

5 Ibid. t. XII, p. 178 et 190.

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