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n'a pu trouver sa fâreté;

que fes propres sujets poursuivent à toute heure,

JE PLEURE.

Mais fi mon débiteur veut bien me rembourfer;
fi mes prés, mes jardins, mes forêts s'embelliffent,
fi mes vaffaux fe réjouiffent,

& fous l'orme viennent danser ;
fi par fois , pour me délaffer,

je relis Ariofte, & même la Pucelle,
toujours catin, toujours fidelle,

ou quelqu'autre impudent dont j'aime les écrits ;

JE RIS.

Il le faut avouer, telle est la vie humaine : chacun a fon lutin qui toujours le promène des chagrins aux amusemens.

De cinq fens, tout au plus, malgré moi je dépends. L'homme eft fait, je le fais, d'une pâte divine; nous ferons tous un jour des efprits glorieux : mais dans ce monde-ci l'homme eft un peu machine. La Nature change à nos yeux;

& le plus trifte Héraclite, quand fes affaires vont mieux, redevient Démocrite.

Par M. DE VOLTAIRE,

BY

RÉPONSE

AUX VERS PRECEDENS.

DT

U tėms vous trompez les efforts, & moi, j'en éprouve Poutrage; vous favez vous paffer de corps: votre efprit ne change point d'age; les neiges font devant vos yeux, le printems eft dans votre tête: tous vos vers font des fleurs de fête, tous vos jours font des jours heureux. D'Apollon vous tenez la caiffe, de ce Dieu vous vifez les bons; &, quoique vous payiez fans ceffe, vous ne dites pas: point de fonds. Four moi, débile créature,

la trifte main de la Nature

étend un crêpe fur mes jours. Mes yeux m'étoient d'un grand fecours, pour lire les fruits de vos veilles : je les perds, & j'ai des oreilles, pour entendre de fots difcours. Pourfuivi par la calomnie, je ne fens plus que te poids de la vie ; mon bonheur eft dans le cercueil de mon irréparable amie :

ta

PUnivers me paroît en deuil, O vous, rare ornement de notre Académie! vous nous garantiffez fon immortalité; que les traits aigus de l'envie n'altèrent pas votre gaîté !

Vous ne mourrez jamais ; moi, je meurs à toute heure ;

Vous êtes JEAN qui rit, & je fuis JEAN qui pleure. Par M. l'Abbé DE VOISENON.

EPIGRAMME.

UN habitant de Vire ou de Falaise,

lieux confacrés à la fidélité,

par un ferment s'étoit mis à son aife,
fur un argent jadis à lui prêté,
dont par après le prêteur tranfporté,
le rencontrant, lui fit plaintes amères.
« Coquin! larron! vrai doyen de fauffaires!
» peux-tu nier qu'on ait chez toi porté
» ces cent écus en espèces bien claires >>>?
De vous à moi, c'est bien la vérité,
dit le parjure, & n'en fais pas mystère:
mais hors de-là, quelle néceffité
d'aller à tous divulguer notre affaire ?

REGRET S

Du premier âge.

DANs le monde, nos premiers ans

font dirigés par l'innocence :
quelle est heureuse notre enfance!
toujours croire eft fa jouiffance,
& tous fes rêves font charmans.
Combien fa joie eft vive & pure!
il lui femble, du fein des jeux,
que tous les cœurs font vertueux,
qu'ils font fermés à l'imposture.
Mortels, qui nous ouvrez les yeux,
hélas ! vous êtes bien coupables!

l'on perd tout, quand on vous voit mieux; on perd ces preftiges aimables,

par qui les hommes font des Dieux.
Ah! rendez-moi, s'il eft poffible,
l'opinion que j'eus de vous ;
fur la foi d'une erreur paifible,
j'aimois à vous estimer tous;
je regrette un bandeau fi doux :
la vérité m'eft trop pénible !

Par Madame la Comtesse DE B1**.

LE LOUP ET LE HERISSON,

FABLE.

UN Loup, maître-fripon,

(il n'eft pas befoin que l'en jure,)
fit rencontre d'un Hériffon,

qui, le long d'un taillis, fe rouloit d'aventure
Meffire Loup, fur l'animal,

cut voulu se jetter: il en mouroit d'envie :
mais l'autre qui le fait brutal,
oppofe tous fes dards à l'atteinte ennemie.
Eh quoi! lui dit notre glouton,

vous voilà comme en tems de guerre,
armé de pied en cap! pourquoi tant de façon
avec fon allié, fon ami, fon compêre ?
tout cet appareil, à quoi bon?
Eh mais! à rien ! reprit le Hériffon,
traînant tout doucement fon épineuse égide;
chacun a fon allure, & l'instinct me décide:
je ne me pique pas d'avoir de la raison.

Par M. DORAT.

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