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rassante vis-à-vis du gouvernement, et la communauté le pria de rester. Les syndics qui l'avaient offensé ne furent pas les derniers à joindre leurs instances à celles des autres: Lion Asser consentit avec regret à demeurer à son poste1.

Lorsque Louis XVI monta sur le trône (1774), la Communauté des Juifs de Metz, comme d'habitude, dut demander au roi la confirmation de ses privilèges, et elle profita de cette circonstance pour faire prévaloir ses prétentions au sujet de la juridiction rabbinique. Elle obtint, non sans peine, l'insertion, dans les lettres-patentes du 3 février 1777, d'une clause par laquelle le roi maintenait et confirmait les Rabbins et Élus dans l'exercice de leur juridiction, en ce qui concernait les contestations de Juif à Juif en matière civile seulement, avec défense à tous et à chacun de décliner ladite juridiction en ce cas, sous telles peines qu'il appartiendrait 2.

Quand le Parlement de Metz dut enregistrer ces lettres patentes (17 mai), il ne voulut pas le faire sans maintenir, en partie au moins, ses prétentions. Il ajouta à la lettre-patente cette restriction << qu'après que les Juifs auront subi dans les contestations qui pourront s'élever entr'eux, la juridiction de leurs Rabins et Élus ou chefs de leur communauté, il leur sera libre, s'ils le jugent à propos, de se pourvoir par action nouvelle par devant les juges compétens, sans qu'audit cas d'action nouvelle lesdits Rabin et Élus ou chefs de ladite Communauté puissent user envers eux d'aucune

censure 3. >>

Le tribunal rabbinique avait donc de nouveau le droit de juger les affaires de Juif à Juif en matière civile, et surtout en matière de police de quartier; mais il n'avait aucun pouvoir pour faire exécuter ses sentences. On eut recours au moyen qu'avaient employé les rabbins de l'Alsace trente-cinq ans auparavant, et qui leur avait fait obtenir, en 1745, du Conseil souverain de la province, un arrêt donnant à leurs décisions force de chose jugée, et les rendant exécutoires par les voies et moyens appliqués aux jugements des tribunaux ordinaires. C'est ainsi que le Parlement fit exécuter une décision du Conseil des syndics expulsant de la ville un certain Mayence. Le 21 décembre 1782, le Parlement rendit cet arrêt qui était d'une haute importance, et qui aurait pu avoir des consé

Il eut une autre fois encore à subir les volontés des syndics au sujet d'un autre usage. Voir Aron Worms, dans son 777, p. 13 a.

Coutumes et usages observés par les Juifs de Metz, 74-77, dans Recueil des Loix, Coutumes et usages.

3 Ibid., p. 81.

Ibid., p. 82-101.

quences graves, si la Révolution n'était venue bientôt assimiler les Juifs aux autres citoyens français.

A son arrivée à Metz (1765), Lion Asser était déjà d'un âge fort avancé. Il mourut dans cette ville, le 15 Tammouz 545 (juillet 1785, après y avoir exercé son ministère pendant vingt ans. En 1782, lorsque le comte de Provence, qui fut plus tard Louis XVIII, vint à Metz, il se rendit un vendredi soir à la synagogue. Il fut reçu à la porte du temple par les syndics, ayant à leur tête le grand rabbin Lion Asser. Le prince accueillit gracieusement les hommages des Juifs et ne dédaigna pas la bénédiction que lui donna le grand rabbin en lui présentant un séfer torah. Le souvenir du vieux patriarche resta, dit-on, gravé dans la mémoire du prince, et l'on s'étonnait autour de lui, de voir dans sa bouche l'éloge d'un juif : « Juif ou chrétien, aurait dit le frère de Louis XVI, » que m'importe ? J'honore la vertu partout où elle s'offre à >> moi 1. >>

Lion Asser s'était fait connaître, bien avant son arrivée à Metz, par un ouvrage de casuistique N, « rugissement du lion ». Ce travail était devenu si populaire que bientôt on ne connut plus le rabbin que sous le nom même de son livre: on l'appela Rabbi Schaagass-Arié, et la légende se donna pleine carrière pour vanter les mérites et les qualités du rabbin. Il est encore auteur du livre 28, commentaire sur quelques traités du Talmud, qu'il a fait imprimer à Metz, en 1781, in-f°, chez Goudchaux Spire-Lévy.

A propos de cet imprimeur, nous allons compléter succinctement les renseignements que nous possédons sur l'imprimerie hébraïque de cette ville, en renvoyant pour les détails aux auteurs qui ont spécialement écrit sur la matière 2.

On a vu que Moyse May, le premier imprimeur de Metz pour l'hébreu, ne pouvait faire le tirage de ses publications qu'au moyen des presses d'un imprimeur juré. Il travailla ainsi pendant plus de cinq ans, publiant chaque année trois ou quatre ouvrages de liturgie ou de casuistique. En 1769, il entreprit la publication d'un Talmud complet en petit format in-8°, et y ajouta un grand nombre de commentaires qui ne se trouvaient pas ordinairement dans les autres éditions. Cette entreprise était au-dessus de ses ressources, elle ne put réussir. Malgré la protection que lui accordèrent les syndics, malgré l'appui du grand-rabbin, qui faisait en sa faveur une très grande propagande, Moyse May ne put arriver à publier

1 Teissier, Hist. de la typogr., p. 144, note.

2 Carmoly, dans Revue orientale.

que trois traités du Talmud, laissant un quatrième inachevé. Il quitta la ville chargé de dettes et alla s'établir à Hambourg.

Quelques années après, vers 1773 ou 1774, le gendre de Moyse May, Goudchaux Abraham Spire Lévy, chercha à rétablir l'imprimerie de son beau-père. Grâce à l'esprit très libéral de Louis XVI et de Lamoignon, il obtint des lettres-patentes (4 juin 1775) qui l'autorisaient à établir une imprimerie hébraïque à Metz. Spire se mit à terminer (1775) le volume du Talmud (Rosch-haschana) laissé inachevé par May. Mais il renonça à continuer cette œuvre ruineuse. Il se contenta de la publication de quelques rituels, de la réimpression de certains livres devenus rares, et enfin de la publication du du grand rabbin Asser, du p de R. Gerson Coblentz, rabbin assesseur de Metz et d'un recueil de lettres casuistiques (") de R. Jacob Reicher 2. C'est là, à peu près, le bilan de l'imprimerie Spire pendant quinze années.

La Communauté de Metz s'était montrée très libérale envers lui comme envers son beau-père, et lui avait accordé, dans les dépendances mêmes de la synagogue, un vaste local pour son imprimerie. Mais les débouchés manquaient, il végéta ainsi jusqu'en 1789, date de sa mort.

Ses fils Abraham et Salomon Spire publièrent un journal hebdomadaire en langue judéo-allemande, qui n'eut qu'une durée éphémère (5 novembre 1789 au 1er avril 1790). Ils publièrent aussi deux volumes du, d'Aaron Worms (in-4°, 1790-1791 et 1793), et le b, du grand-rabbin Oury Phoebus Cahen, dont nous allons parler. Leurs affaires allaient mal, la situation politique du pays n'était pas favorable: ils fermèrent l'imprimerie (1794). Ce ne fut que dix-neuf ans plus tard (1813) que l'on songea à la rétablir.

(A suivre.)

AB. CAHEN.

1

inachevd, qui ne ראש השנה et enfin ,770 ברכות,1770,נדה, 1769 ביצה

parut qu'en 1775.

2

ap, 3° partie; les deux premières parties ont été publiées, la première à Hall, 1710; la seconde à Offenbach, 1719. Il avait fait précéder ces trois parties d'un autre ouvrage, qui porte le même titre, et qui traite de quelques règles de la dialectique talmudique.

NOTES ET MÉLANGES

ELAZAR LE PEITAN

Sous ce titre, j'ai remis à la Commission de l'École des HautesÉtudes (section des lettres) un mémoire qui sera inséré dans un volume que cette École publie en l'honneur de son regretté président, M. Léon Renier. Les volumes collectifs se publient toujours avec une grande lenteur, et les travaux qui y sont réunis sont de nature si variée qu'une partie en échappe toujours à l'attention de ceux qui seraient intéressés à les connaître. Nous nous permettons donc de mettre sous les yeux des lecteurs de la Revue les résultats nouveaux que nous croyons pouvoir leur offrir sur le plus grand et plus fécond des liturgistes juifs.

Tous ceux qui sont au courant de la littérature juive savent que rien n'a été établi définitivement sur l'auteur de tant de pioutim, qui, depuis des siècles, se récitent dans toutes les synagogues du monde entier. Les recherches de Rappoport, de S.-D. Luzzatto, de Zunz et de divers autres savants ont toujours laissé planer un doute sur le nom, la patrie et l'époque du plus original des écrivains post-bibliques. On peut lire un très bon résumé des diverses opinions qui ont été émises sur ces différents points dans Landshuth, Ammoudé ha-Abôdâh, s. v.

Notre Peitan se nomme lui-même, dans les acrostiches de ses pièces de vers, Elâzâr fils de Kalir ou Kilir (¬¬¬¬¬na 71>be ou b). Ceux qui l'ont appelé, d'après cela, hakkaliri (¬¬¬bpm), « le Kalirite », avaient raison; on nomme bien Raschip, parce que son père s'appelait prx, et Maïmonide, parce qu'il était fils

הקליר Mais l'erreur commence quand on se sert du mot .מימון de

sans le yod de la nisbéh. En effet, nous pensons que le père d'Élazar portait le nom latin Celer, transcrit en grec Keep, ce qui

= תודוס

répond exactement à oup. L'emploi de noms latins ou grecs, parmi les Juifs de l'Italie depuis les temps anciens, n'a pas besoin d'être prouvé. Pour Rome, nous citerons le médecin Théodosius, qui est mentionné dans la Mischnâh. Parmi les Macchabées, le nom profane était accompagné d'un nom biblique, et s'il est vrai, comme le dit l'auteur du Yuhasin, qu'un piout de notre auteur est signé « Élazar ben Jacob », nous aurions ici le nom de Jacob à côté de celui de Celer. Comme celer signifie « rapide », la réunion de ces deux noms serait alors peut-être une allusion au verset d'Osée, xII, 13: « Et Jacob s'enfuit, etc. >>

Le nom de Celer nous fait supposer que l'Italie est le pays où Élazar est né, hypothèse qui a déjà été proposée par plusieurs savants. Mais nous croyons pouvoir également indiquer la ville où il a vu le jour. Élazar accompagne souvent son nom des mots , ce qu'on a traduit par : « de Kiriat Séfer», nom d'une ville de la Palestine dont la situation est inconnue aujourd'hui. Ce nom de ville a dérouté les historiens pour deux raisons d'abord, parce qu'ils avaient des motifs assez plausibles pour croire qu'Élazar était Italien, et puis, parce que nous avons de lui des pioutim pour les deux jours de fête, tandis qu'en Palestine, la fête du Nouvel-An exceptée, on ne célèbre qu'un seul jour de fête. Tout s'explique si l'on suppose qu'Elazar, à la manière des écrivains juifs du moyen âge, en empruntant un nom à l'onomastique biblique, a entendu parler de pnp Civitas Portus. Or, depuis le quatrième siècle jusqu'à ce jour, Portus, près de Rome, à l'extrémité de la Via-Portuensis, est un évêché, ce qui lui permettait de porter le nom de Civitas Portus, dont Kiriat Sefar est la traduction exacte. Plusieurs inscriptions grecques d'épitaphes juives provenant de Porto, les unes publiées, les autres encore inédites, prouvent l'existence d'une communauté juive à Porto, qui, après l'ensablement d'Ostie, était devenue une rade importante pour le commerce de Rome et attirait les négociants juifs. Pour ces sortes d'adaptations de noms de ville à des noms d'anciennes cités de la Palestine, on n'a qu'à se rappeler le nom de Jéricho (177) employé pour désigner Lunel, parce que la lune s'appelle en hébreu yarêah (). Le surnom de Hammeâti (7) donné à Élazar ben Nathan, l'auteur d'une version hébraïque du Canon d'Avicenne, est, également, une simple traduction et signifie « originaire de Cento (8) ». De Rossi en avait fait un « docteur de Hamat ».

Pour fixer l'époque à laquelle Elazar a vécu, on s'est servi de deux passages de ses pioutim, où il dit, une fois, que le temple est

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